Cela a commencé par les huées de quelques dizaines de "spectateurs" - c'est ainsi que le CTV appelle désormais ses "clients", effectivement, on s'aperçoit chaque année que les aficionados sont en voie d'extinction, des voix, justement - qui ont accompagné l'apparition du maire, lors de la remise des clefs du toril aux alguazils.
Le temps qu'ils finissent de brailler, les applaudissements ont ensuite remis les pendules à l'heure, en saluant par une longue ovation, le courage de l'édile vicois, la quasi totalité de l'arène debout. Fallait que ce soit dit, des aficionados ont depuis longtemps fait une croix sur VIC, pour de nombreuses raisons, dont celle de la porcherie ambiante et de l'insécurité qui l'accompagne. Mais rares sont ceux qui osent l'avouer: le lucre des commerces est respectable, mais aussi respectable est la tranquillité et la sécurité des citoyens qui ne retirent de ces démonstrations de beuverie collective que les emmerdes que l'on sait.
Et puis vint l'heure attendue des Escolar: première déconvenue, avec la sortie d'un sobrero, faible, déjà, qui chuta deux fois, fut mal mis en suerte, puis PRADOS l'entreprit sans se croiser, naturelles de profil, petits pas en arrière, des frioritures, mais sans domination, conclusion d'une demi épée ladeada et tendue. Son second était une véritable sardine, qui prit deux piquettes et arriva aux bâtonnets gueule ouverte. Muleta moultes fois accrochée, deux fois désarmé, avant deux pinchazos et une entière. On entendit même un "INDULTO!!" d'humour descendre des gradins, le ton de la pantomine était donné.
Le n° 35, de ROBLEÑO, est né en janvier 2007, c'est donc une merdasse de cinqueño, une autre sardine infumable, qui prendra deux piquettes sortant chaque fois seul. Quelques derechazos que ne supporte même pas le veau: il se couche, épuisé. Puis vient le numéro à la mode moderniste de toreo de profil, souvent accroché, à droite comme de naturelles, la prestation du torero tourne à l'ennui, sans transmission, sanqs émotion, ni relief. L'aburrimiento prend fin avec un magistral golletazo. Le second est un negro entrepelado, "la robe des Victorinos", souffle un voisin. La bestiole perritoro fait chanter les étriers, c'est dire que la poussée au cheval laisse plutôt à désirer. Deux piquettes pour lui aussi. Il s'avère très noble, sans genio, ni poder, ROBLEÑO en profite pour nous servir un numéro de circulaires parfaitement géométriques, à des années lumière de la vraie lidia en chargeant la suerte, le pico et le cite de la voix faisant office de dominio. Évidemment, danger: à force de jouer à découvert, le maestro s'expose et se fait avertir. L'aburrimiento devient général, même chez les clients du CTV les moins exigeants. Pinchazo et entière concluante, le coquin s'adjuge la vuelta, les applaudisseurs peuvent enfin se lever et se dégourdir bras et jambes.
Et voici Serge AGUILAR, avec son negro entrepelado de presque 5 ans, lui aussi, mais juste de présentation, bien que plus charpenté que le reste du lot, carrément anovillado. Bonne mise en suerte, puis seconde, depuis le centre de la piste, pour un manso qui gratte et refuse les cites du varilarguero. Puis quitte seul, après une embestida timide. A droite, il refuse la muleta. AGUILAR se fait accrocher. A gauche, le bestiau parait encore moins fréquentable. Sa corne décrit des arabesques qui n'engagent pas le torero. Là aussi, la suite avec pico et profil, ce qui n'améliore pas les qualités déjà improbables de l'Escolar. Entière! Aussi détestable que la précédente, de Robleño. Même robe grise pour le sixième, qui freine dans la cape. AGUILAR est pris de plein fouet: émotion, la première de la tarde. Mais ce n'est pas celle qu'attendaient les aficionados. Le toro prend deux rations de fer, sans être mis en suerte. Puis fuse sur le réserve., et pousse encore pour une quatrième pique. Un peon désarmé, puis AGUILAR se fait promener, puis se fait cueillir une seconde fois, et effectue un autre vol plané au-dessus des cornes. Miracle: pas de bobo apparent. Suite logique: le toro n'a pas été du tout dominé, AGUILAR tente timidement trois pinchazos, puis puntille à toro vif au terme du septième essai.
Rideau!
Si ce que nous avons vu samedi s'était passé il y a seulement vingt ans, les broncas se seraient succédées: jusqu'à l'émeute! Aujourd'hui, les clients de VIC acceptent tout, comme dans n'importe quelle arène de plage. La faute aux responsables des clubs taurins, bien sûr, qui choisissent les élevages, mais aussi aux squatteurs des callejons qui interdisent PARTOUT aux aficionados de s'exprimer, qui les menacent même, qui orchestrent la claque et les trophées qui n'auraient aucune légitimité. Voir le dernier exemple en date, l'innommable CASAS, exigeant du palco une oreille pour son protégé, et injuriant les aficionados qui s'indignent de ses procédés de dictateurs. Sans compter les peons, autres butifarras, plus habiles à gueuler, cachés derrière leur cape étalée, pour faire pression sur les palcos, qu'à lidier correctement, sans les multiples capotazos qui apprennent le latin aux toros avant de les décomposer plus vite.