mardi 1 mars 2016
LES CHRONIQUES LATINES DE JEAN ORTIZ
Jean Ortiz
Lundi, 29 Février, 2016 - 21:20
Quelques considérations « primaires »
"Je
n’accepte pas que nous nous fondions une nouvelle fois dans un magma
ectoplasmique, sur une base minimaliste, loin du mouvement social et de
la rue."
Opter
pour des « primaires à gauche » revient à s’engager une nouvelle fois
dans une stratégie au final « socialo dépendante » . Elle risque
d’assimiler les communistes à cette « gauche » qui n’en est plus une
depuis longtemps déjà . Si nous sommes peu lisibles, peu visibles,
malgré la nécessité aujourd’hui comme hier d’un puissant parti
communiste, de classe, c’est que nous avons en quelque sorte renoncé à
être pleinement nous-mêmes, antisystème et propositionnels, à refuser
radicalement le capitalisme, à rompre avec lui. Rompre, rupture,
radicalité... Etre partisan de la révolution, même si le mot a été tant
et tant dégradé, n’est-ce pas revendiquer et commencer à construire, par
nos résistances, nos pratiques quotidiennes, des relations et des
valeurs nouvelles, une société de partage, non cannibale, libérée du
marché. Un socialisme d’aujourd’hui, citoyen, autogestionnaire,
démocratique, écosocialiste, qui socialise les grands secteurs
économiques et les leviers financiers, qui remette en cause le carcan
européen, le productivisme sans limites, la monopolisation des
richesses... Mais pour cela il convient d’abord de ne pas renoncer aux
mots, « socialisme », « révolution », et au sens de la marche. Je ne
sais plus qui a dit : Ne pas nommer les choses, c’est ajouter au malheur
du monde.
Nous vivons des temps inhumains de « contreréforme », des temps
terribles pour les millions de « perdants », des temps dangereux de
basculement conservateur, où la tentation est grande de diluer le
discours révolutionnaire dans l’air fétide et régressif du moment, de
s’adapter plus que de « révolutionner », pour tenter de gagner quelques
voix... La politique cède le pas à une sorte de campagne électorale
permanente dominée par le marketing politique, vide, avilisseur, par la
com. manipulatrice, les coups politiques tordus ou pas, le tango des
égos... Et le peuple dans toute cette ratatouille ? On se trompe si l’on
croit que les sondages doivent être pris au pied de la lettre. La
colère gronde dans ce pays et peut éclater sans nous, voire contre nous,
assimilés au « tous pareils », à « la caste » comme disent les
Espagnols.
Les « primaires », ces combats de coqs frelatés, ces rideaux de
pseudo-démocratie et d’enfumage sur l’essentiel, cette singerie des «
States », accentuent la personnalisation outrancière, la dépolitisation,
les postures, les revirements, les petits et gros calculs, au détriment
des contenus, des batailles d’idées, des compétences des militants,
finalement contournés. Comme le référendum d’entreprise contourne les
syndicats...
En tant que communiste, « refonder la gauche » n’est pas vraiment
mon affaire. Refonder, consolider, renforcer, le PCF et le Front de
gauche : OUI. OUI.
Réanime le parti socialiste qui voudra, qui pourra !! Il a infligé
tant de souffrances et d’humiliations à notre peuple pour en payer le
prix. Va-t-on une nouvelle fois contribuer à recrédibiliser un parti
socialiste (sauce Valls ou sauce Cambadélis) plus libéral que les
ultralibéraux ? A lui donner une nouvelle caution « de gauche » et à
nous retrouver Gros-Jean comme devant, avec le titre de « meilleurs
artisans de l’unité de la gauche »... et le « vote utile » pour le «
nouveau PS » ? Se souvient-on du CERES, de la fable toujours bien
vivante des « bons » et des « mauvais » socialistes, des « flingueurs »
d’hier et d’aujourd’hui ? Où sont-ils passés, ceux d’hier ? Que sont-ils
devenus ? La fable permet de ratisser large.
Comment peut-on décréter l’échec du Front de gauche (notre enfant)
s’il n’a été qu’un cartel politique de circonstance et de sommet ? Si on
ne lui a pas permis vraiment de prendre racine, d’ouvrir largement ses
portes, de se structurer en bas? Nous, communistes, avons eu en quelque
sorte peur de notre ombre . Je n’accepte pas que nous nous fondions une
nouvelle fois dans un magma ectoplasmique, sur une base minimaliste,
loin du mouvement social et de la rue.
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