samedi 23 juillet 2022

 

L’Europe danse sur le Titanic

samedi 23 juillet 2022 par Fabrizio Casari blog ANC

140 jours après le début des opérations militaires russes en Ukraine, la réaction occidentale, qui, selon Biden, aurait effacé la Russie de la scène internationale, s’avère être un échec politique et économique, le plus grand et le plus profond de l’histoire de l’arrogance américaine et européenne.

L’effet boomerang des sanctions a accéléré la crise qui touchait déjà tout l’Occident. Elle a une origine politique, résultat de la surestimation de la force des États-Unis et de l’UE sur les marchés internationaux et du degré d’influence politique dans la communauté internationale.

La principale erreur a été conceptuelle : on a cru pouvoir appliquer des sanctions au premier producteur mondial d’énergie et de céréales, en ignorant son poids politique et militaire et en pensant que la communauté internationale, avec une économie déjà à genoux, mise à l’épreuve par la crise de production et de distribution provoquée par la pandémie, pouvait et voulait aggraver la crise de ses approvisionnements énergétiques.

Il faut un ego débordant à Washington, une incapacité à lire les processus internationaux et une dimension onirique pour penser qu’au nom et pour le compte des intérêts américains, le monde veut se suicider.

La surestimation de son propre leadership international s’est manifestée dans l’adhésion internationale aux sanctions : confondre les chiffres avec le poids politique et économique des pays est une erreur banale, de néophytes politiques, de narcissiques devant un miroir déformant.

Les plus grands et les plus puissants pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine ne se sont pas associés aux sanctions contre Moscou. Il aurait suffi de tester les eaux d’abord au lieu de paraître amateur par la suite.

Le bilan raté de la guerre contre la Russie est là : à l’exception du Japon, les 740 millions d’Occidentaux n’ont entraîné personne d’autre à leurs côtés ; les pays représentant 5 milliards de personnes, et ne faisant pas partie de l’Occident, ont accru leurs relations avec Moscou, qui possède l’énergie et le poids politique nécessaires au développement des pays du Brics et d’une grande partie de l’Afrique.
La fermeture des marchés occidentaux a été largement compensée par la montée en puissance des produits russes sur les marchés de l’Est et du Sud. Cela a rendu les sanctions financières insignifiantes, et même le vol des dépôts de la Banque centrale russe et l’interdiction des dollars et des euros n’ont fait que nuire aux créanciers.

Amateurs dangereux

En réponse aux sanctions, la Russie a augmenté le prix des carburants dont l’Europe a désespérément besoin. Et alors que Bruxelles vise à mettre un terme aux approvisionnements russes d’ici la fin de l’année, la hausse des coûts affecte directement l’Europe. Pourquoi ?
Parce que l’UE achète du gaz au Mozambique, à l’Angola, à l’Algérie et à l’Inde, qui tous achètent du pétrole et du gaz à Moscou et subissent inévitablement les augmentations tant lorsqu’ils achètent aux Russes que lorsqu’ils revendent aux Européens.

Il y a une idiotie de calcul dans l’UE qui s’ajoute à la dépendance structurelle et conduit l’Europe à un effondrement de l’offre qui conduira à une très grave crise économique, comme l’a prévenu Purnima Anand, présidente du Forum économique des BRICS.
Pour l’économiste indien, « les sanctions contre la Russie affectent toutes les règles du commerce mondial, car Moscou est un partenaire de nombreux pays d’Afrique, d’Amérique latine, d’Asie et du Moyen-Orient.

D’autre part, les sanctions sur les produits génèrent une augmentation de leur coût ; et cela affecte presque tous les pays qui les émettent, car ces mêmes produits ils sont obligés de les importer. La pandémie avait déjà touché les dessous d’une économie qui, de toute façon, étouffait : il y avait déjà une augmentation inquiétante des coûts de distribution due à la diminution des réserves et à la hausse des coûts de transport, due aussi à la spéculation des compagnies pétrolières. Ce scénario a été aggravé par le désir de frapper Moscou, générant plus de dommages pour les sanctionneurs que pour les sanctionnés.

Qui gagne et qui perd ?

La pression des sanctions pèse sur l’Europe qui, avec la Chine, est le véritable concurrent des États-Unis sur les marchés et qui, depuis le début des sanctions et pour l’approvisionnement en gaz, a dû se tourner (comme par hasard) vers les États-Unis d’où elle a importé ces derniers mois des quantités record de GNL, même si les volumes possibles ne pourront jamais remplacer le gaz russe en termes de quantité, de rapidité de transport, de coût et de qualité du produit.
Entre-temps, le dollar a gagné 13 % par rapport à l’euro.

De cette façon, les États-Unis ont gagné sur leurs alliés et non la Russie, qui, au contraire, a obtenu un avantage de 0,99 grâce à l’appréciation de sa monnaie (le 24 février, un dollar coûtait 1,13 rouble, le 8 juillet, le taux de change était de 1,01). La Russie n’a donc pas été touchée par cette situation. En plus de gagner 15% sur le taux de change, en augmentant ses coûts d’approvisionnement en énergie, elle gagne des chiffres records sur ses actifs du secteur stratégique [Ndt : chiffres à vérifier].

Le bilan à ce jour indique que si l’expulsion de la Russie du système Swift était nécessaire pour freiner les importations/exportations russes, la mission a été un désastre. Si l’idée était d’isoler la Russie, c’est raté : Poutine est un interlocuteur pour le monde, Zelensky ne l’est pas. Si la fourniture d’armes à l’armée ukrainienne avait pour but de vaincre la Russie sur le terrain, c’est un échec cuisant. À ce jour, les Russes contrôlent 26 % du territoire ukrainien et Zelensky, à ce stade, en termes d’influence et d’interlocution stratégique, ressemble davantage à Guaidò qu’à Churchill.

L’UE risque l’implosion

La transformation de l’UE en un protectorat américain produit des résultats inquiétants. L’axe Berlin-Paris, qui a été le pont de commandement de l’UE au cours des 22 dernières années, est en train de s’effondrer en raison de la disparition de la locomotive allemande et de l’absence de leadership ayant une autorité internationale. Il existe un problème général d’étanchéité du cadre systémique, conséquence d’une fragilité politique générale dans laquelle se développe une crise économique et sociale sans précédent et sans issue.

Des crises politiques frappent le Vieux Continent et certaines d’entre elles sont marquées par la démission de chefs de gouvernement. Le cas le plus frappant est celui de la Grande-Bretagne, avec Boris Johnson qui mène la charge anglo-saxonne contre la Russie avec Biden.

La crise économique intérieure n’a pas incité les sujets de Sa Majesté à se montrer solidaires du premier ministre festif : selon The Guardian, une famille britannique sur dix ne mange pas à sa faim, et ce non pas parce que la nourriture manque, mais parce qu’elle coûte trop cher.
De l’autre côté de la Manche, l’inflation a déjà dépassé le plafond de 9%, ce qui a provoqué une première grève contre la hausse des prix de l’essence lundi. Le syndicat des chauffeurs a lancé un référendum auprès de ses membres pour approuver une série de grèves nationales (qui seraient les premières depuis 1995, dans un pays où les salaires stagnent depuis trois ans).

En Estonie, le même sort a été réservé au Premier ministre Kaja Kallas, un faucon russophobe qui a démissionné dans un pays qui compte une forte minorité russe et qui risque d’être coupé des routes commerciales en raison du sectarisme lituanien anti-Moscou.

En Bulgarie, le gouvernement est tombé. Les libéraux ne disposent pas de la majorité au Parlement pour former un gouvernement et leur chef a cédé le mandat au président Radev, rapprochant le pays de nouvelles élections, les quatrièmes en un peu plus d’un an.

Ailleurs sur le continent, les choses ne vont pas non plus très bien.

L’Allemagne a déclaré l’état d’urgence énergétique et le rationnement de l’électricité et du gaz, et Berlin réfléchit déjà à la manière de se sortir des sanctions qui menacent de la faire sombrer économiquement.
Olaf Sholz n’a ni l’expérience, ni le charisme, ni l’autorité d’Angela Merkel, qui seraient nécessaires à un moment aussi délicat, où les décisions prises sur ordre des États-Unis risquent de conduire l’Allemagne vers la fin de l’âge d’or.

La France, malgré sa puissance nucléaire, serait dans une « économie de guerre » et le spectre des révoltes des gilets jaunes agite à nouveau Macron, désormais politiquement et numériquement plus faible à l’Assemblée nationale. La protestation sociale qui avait bloqué les transports aériens et ferroviaires la semaine dernière a repris de plus belle. Inflation de 6,5 %.

L’Espagne traverse une crise politique marquée par le fait que Podemos a cédé aux sirènes atlantiques avec la désaffection conséquente de son électorat et que le PSOE voit comment Sánchez est dépassé dans les sondages par le Parti populaire (qui, cependant, même avec le soutien de VOX, n’atteindrait pas la majorité absolue). La stagnation qui a caractérisé les dernières années de vicissitudes politiques espagnoles est révélatrice des limbes entre les rêves coloniaux et la réalité d’être colonisé où survit la péninsule ibérique.

Aux Pays-Bas, les théoriciens de l’austérité observent avec inquiétude les vagues de grèves des agriculteurs, éleveurs et pêcheurs qui ont paralysé le pays.

En Italie, la pseudo-monarchie de Draghi semble avoir ses mois comptés. En effet, la question est de savoir quand, et non plus si, le M5S sortira son gouvernement de la fureur atlantiste qui a infiniment aggravé les conditions socio-économiques des Italiens.

En attendant que la presse pro-pauvre s’en empare, le rapport annuel de l’ISTAT (Institut national des statistiques), fournit des chiffres effrayants sur la pauvreté italienne. Le nombre de personnes en situation de pauvreté absolue entre 2005 et 2021 a presque triplé, passant de 1,9 à 5,6 millions (9,4 % du total) et le nombre de familles en situation de pauvreté absolue a doublé, passant de 800 000 à 1,96 million (7,5 %). En ce qui concerne les salaires, ils sont inférieurs à 8,41 euros par heure, mais les cadres gagnent 65 fois plus que les ouvriers. L’inflation est de 6,4 %.

Et ce, sans avoir calculé les effets de la guerre et des sanctions contre la Russie, qui, à partir de l’automne prochain, frapperont encore plus durement les économies européennes en général et les économies allemande et italienne en particulier, précisément en raison de leur plus grande dépendance vis-à-vis du gaz russe.

Ce n’est pas de l’alarmisme et cela est confirmé par Fatih Birol, directeur exécutif d’International Energy :

  • « L’Europe sera confrontée à une alerte rouge l’hiver prochain. Les récentes perturbations de l’approvisionnement en gaz naturel, en particulier la réduction drastique des flux vers les pays de l’UE, devraient retirer quelque 35 milliards de mètres cubes de gaz du marché cette année, ce qui représente un défi majeur pour les efforts de reconstitution des stocks ».

Ainsi, la perte du rôle de l’Europe semble se faire par étapes forcées. L’Europe n’a plus de rôle à jouer, ayant renoncé à poursuivre ses propres intérêts pour adhérer à une obéissance atlantiste aveugle qui la punit au nom et pour le compte des intérêts américains.
Un syndrome de Stockholm qui, en quatre mois, s’est transformé en suicide assisté.

LA LUMIÈRE A TOUS LES ÉTAGES ?

Avoir (ou pas) la lumière à tous les étages

 

JPEG M VÉRAN vit depuis trop longtemps dans les palais de la République et leur mobilier national au point qu’il a jugé opportun au sortir du conseil de ministres du 20 juillet 2022 d’intimer aux français « d’éteindre la lumière lorsque l’on n’utilise pas les pièces », de « baisser un peu la clim » ou encore de « débrancher un maximum de prises électriques lorsque l’on part en week-end ou en vacances parce que sinon ça continue de consommer de l’énergie ».

Non content d’avoir infantilisé les français durant plus de deux ans de crise sanitaire, gonflé de la suffisance du donneur de leçon qu’il revendique être devenu, éructant un peu nerveusement ses déclarations « coups de menton » mensongères, souvent contradictoires et ordonnant le matraquage sur toutes les ondes radio et télévisuelles de messages publicitaires pour débiles mentaux, il vient continuer de nous infliger sa présence quasi-quotidienne de désormais porte-parole du gouvernement de Mme BORNE. 

La peur d’une crise énergétique aigüe cet hiver devrait prendre le relais de la peur de l’infâme virus de la COVID-19. En très fidèle soutier du président MACRON, le Docteur VERAN va pouvoir continuer d’œuvrer à l’entretien de la machinerie de la peur. Après la guerre contre le virus, voici déjà poindre la guerre contre le gaspillage de l’énergie. Comme l’affirment déjà certains commentateurs proches du pouvoir, le gouvernement prépare déjà les esprits infantiles de français.

Verra-t-on dès septembre le sieur VERAN, portant la noble blouse blanche de celui qui sait, nous vanter la version macronienne du « c’est pas Versailles ici ! ». Je veux bien prendre le pari.

Je m’interroge toujours de constater qu’un gouvernement se mêle tant de notre vie personnelle et quotidienne. Et, je m’interroge plus encore de la docilité de nos concitoyens à l’accepter. Gabriel ATTAL, prédécesseur d’Olivier VERAN au porte-parolat vous répondrait que toute l’action gouvernementale est là pour « protéger les français ». Que l’état me protège oui, j’y suis favorable s’il s’agit de la sécurité sociale par exemple ou du versement de ma pension de retraite. En revanche, qu’il me « protège excessivement » non. Définitivement non. L’état n’a pas à se mêler de me dire comment dois-je saluer mon prochain ? Avec les mains ? Sans les mains ? Combien de fruits et légumes dois-je ingérer quotidiennement pour soi-disant rester en bonne santé ? Quand vais-je donc remplacer mon véhicule âgé de 10 ans dont la valeur vénale est inférieure à 3 000 € pour un véhicule électrique de 30 à 40 000 € pour soi-disant sauver la planète ? Et je pourrais continuer d’égrainer encore longuement la liste des absurdités gouvernementales.

Pour finir sur une note positive, permettez-moi de suggérer quelques idées à M VERAN pour ces prochaines interventions.

Je propose la suppression des trottinettes électriques (il faut bien recharger leurs batteries) face à l’augmentation dramatique des accidents corporels dans lesquelles ces engins sont impliqués. Ainsi, si elles avancent à la force des jambes et à la sueur du front de leurs conducteurs, elles iront moins vite et sauveront plus de vies.
 

Je propose à l’échelle européenne une mesure simple pour réduire les émissions de GES : limiter la vitesse sur autoroute à 100 km/h et à 80 km/h dès le 1er janvier 2023.

 

Je propose d’allonger de 15 jours la durée de validité de la date limite de consommation de produits frais (les yaourts par exemple). Ainsi, les consommateurs achèteront en moins grande quantité ces produits qu’ils pourront consommer plus longtemps.

Une façon concrète et quotidienne pour chacun d’entre nous de tester la sobriété que notre grand timonier lui-même a appelé de ses vœux lors de son allocution du 14 juillet dernier.

 

Comme vous le savez, cher lecteur, je ne suis pas, fort heureusement pour vous à la lecture de ces quelques suggestions, en poste au gouvernement. Pourtant, je m’interroge de savoir si certains ministres ou secrétaires d’état ont bien, comme le dit l’adage populaire, la lumière à tous les étages.

 

 Bertrand RENAULT – 21 juillet 2022

 Les surlignages - je devrais surligner 90% de l'article de ce maître à penser et à infantiliser macronien - sont de Pedrito

LA PHRASE DU JOUR....

.... ARTICLE PUBLIÉ CE JOUR 23/07/22 SUR AGORA VOX,  LE JOURNAL CITOYEN....à lire,  passionnément....

LE CERVEAU HUMAIN, UNE ARME SEMI-SECRÈTE DE L'OCCIDENT

"Si nous croyons encore au beau conte de fées de la liberté, des droits de l'homme, de la démocratie et de la supériorité éthique du modèle libéral occidental, alors la guerre cognitive nous a probablement déjà atteints, manipulés et changés en profondeur."

Roberto Pecchioli 

L'INFLATION ET LA GUERRE POUR LES NULS

Le PAYS où fleurit L’INFLATION

Il s’agit bien sûr des Etats-Unis mais aussi de leurs proches vassaux que l’on proclame les seules démocraties de la planète et qui à ce titre s’arrogent tous les droits de sanction, de pillage, de guerre au nom de leur monnaie autant que de leur armée et de leur domination sur le marché de l’information. Dans tous ces pays, les prix à la consommation ne cessent de grimper et la cote de popularité de leurs dirigeants souvent élus récemment ne cesse de s’effondrer. Dans le monde entier les travailleurs n’en peuvent plus devant cette hausse des prix et les salaires de misère, les conditions infâmes dans lesquelles on les oblige à vivre, mais c’est aux Etats-Unis et dans les pays riches que la contradiction entre le haut développement technologique, les profits gigantesques et la pression sans cesse accrue sur le travail et la classe ouvrière est la plus flagrante et l’épidémie a servi de révélateur. La seule politique qu’un parti communiste devrait avoir à coeur de développer serait d’organiser la classe ouvrière, les travailleurs au lieu de les laisser en proie à des mouvements utilisés pour assurer la répression, comme on le voit au Sri Lanka ou avec les gilets jaunes, des maidan, des révolutions de couleur utilisées par le capital. Une de leur tâche devrait être la lutte contre la guerre et les campagnes de xénophobie. Chacun constatera que nous n’avons pas en France les forces politiques aptes à mener une telle politique et capable d’éclairer les travailleurs et les couches populaires sur leur nécessaire intervention. Marianne m’a interrogée sur mon affirmation récente: “ce n’est pas la guerre en Ukraine qui explique l’inflation, c’est parce que le capitalisme est incapable d’inventer une politique face à sa propre crise qu’il a besoin de la guerre en Ukraine et ailleurs." Donc voici une description de l’inflation et de la guerre pour les nuls.

La description du  Washington Post est sans appel  :

« L’inflation a flambé de 9,1% en juin, par rapport à l’an dernier, atteignant ainsi un nouveau sommet sur fond de hausse des prix de l’essence.

Les chiffres de l’inflation de juin, publiés par le Bureau of Labor Statistics, révèlent que le poids de la hausse des prix du logement, de l’alimentation et de l’énergie pèse toujours sur les familles et les entreprises américaines. »

« Le pétrole dégringole sur des craintes de récession, les prix de l’essence enregistrent la baisse hebdomadaire la plus prolongée depuis 2020, aux Etats-Unis. »

Les Américains économisent environ 140 M$ par jour dans un contexte où les prix de l’essence enregistrent la plus longue série de baisses en deux ans, sur fond de violent recul des marchés mondiaux du pétrole brut. Comment comprendre dans un contexte de hausse des prix que tout à coup on assiste à une anticipation telle de la récession que cela pèse sur la demande d’énergie et crée cette baisse ? Le marché a de ces brutalités il décide, il anticipe la récession et la provoque alors que les taux d’intérêt montent pour tenter de donner quelque valeur à la masse de monnaie qui a été gonflée artificiellement, en tentant bien sûr de préserver le dollar en le faisant surnager sur l’effondrement du yen et de l’euro qui eux payent l’état réel de l’économie de marché. Parce que cette baisse n’est que le constat de la récession et donc la baisse de la demande et l’impossibilité d’en limiter les effets, leur accélération.

Selon Forbes :

« Ce géant du crédit immobilier supprime des milliers d’emplois et met en garde contre une baisse ‘accélérée’ alors que le marché de l’immobilier chute brutalement    

La société de crédit loanDepot a dévoilé mardi un plan de suppression de milliers d’emplois, et de réduction ‘significative’ des coûts, dans un contexte où la hausse des taux d’intérêt fait sombrer la demande en faveur des prêts : elle devient ainsi la dernière entreprise à alerter sur le fait que le marché immobilier pourrait se retourner de façon plus abrupte après la frénésie d’achats immobiliers de l’ère de la pandémie. »

Comme le soulignent mes trotskistes favoris du WSWS, dans le monde entier les travailleurs n’en peuvent plus devant cette hausse des prix et les salaires de misère, les conditions infâmes dans lesquelles on les oblige à vivre, mais c’est aux Etats-Unis que la contradiction entre le haut développement technologique, les profits gigantesques et la pression sans cesse accrue sur le travail et la classe ouvrière est la plus flagrante. La description est saisissante, on se croirait devant la littérature des années 1930 ou devant du Brecht (Sainte Jeanne des Abattoirs) à la seule différence près que cela ne choque plus personne et que les écrivains sont trop occupés à se contempler le nombril pour s’y intéresser.

Les accidents industriels mortels sont quotidiens nous dit WSWS. La semaine dernière, le docker et immigrant nicaraguayen Uriel «Popeye» Matamoros est mort écrasé dans le port de Newark lorsque l’équipement qu’il utilisait est tombé sur lui. Selon ses collègues, la direction les a maintenus au travail, les faisant travailler autour du site de l’accident sans même avoir complètement nettoyé. «Ça sentait terriblement mauvais», a déclaré un travailleur au WSWS.

OUI cela sent terriblement mauvais, des odeurs de charnier…

Et pendant ce temps-là, la crise de l’exploitation en particulier dans la jeunesse diplômée et que l’on invite à s’auto-exploiter s’aggrave ce qui permet à nos idéologues de dénoncer la “crise du travail”: L’équilibre vie professionnelle-vie personnelle est devenu très important aussi.” Julia de Funès en conclut que “tout ce qui concerne le bonheur immédiat de l’individu prime maintenant sur le travail en tant que tel, qui n’est plus du tout une finalité, un but en lui-même, mais qui devient un moyen pour s’épanouir dans l’existence”, explique la dite Julia de Funes sur France culture la radio de son maître … qui en diffuse l’idéologie…

Nous sommes donc bien à tous les niveaux devant la contradiction forces productives / rapport de production qui exige un changement de société et qui ébranle tous les fondements institutionnels, représentations, organisations, droit, etc…

Une crise de confiance

Il y a des marchés haussiers et il y a des marchés baissiers :  nous nous situons sur un marché baissier avec hausse des taux d’intérêt et cela s’appelle la stagflation qui met à mal à la fois le néolibéralisme et le keynésianisme, les uns proches des conservateurs et de la droite, les autres les démocrates et les sociaux démocrates, une manière de conserver la domination du capital avec ou sans régulation.

C’est donc dans ce contexte d’échec de toutes les solutions face à l’inflation que les capitalistes considèrent comme le principal problème puisque refusant d’améliorer la situation des travailleurs, ils continuent leur pression et utilisent à plein leur domination idéologique.

La presse américaine et même celle des pays vassaux occidentaux fonctionne pour une part pour des initiés et tentent d’influencer les décideurs. Sinon on ne comprendrait pas que les capitalistes achètent des organes de presse qui ont pour mission d’envoyer ces messages. Aux Etats-Unis, le New York Times joue ce rôle et leur livre une vision du sommet de l’Etat. En France, on peut penser que l’élection de Macron comme le choix de ses adversaires s’est joué dans les mêmes conditions. Et ces derniers jours, le vénérable quotidien, New York Times nous a communiqué un tuyau : Biden ne se représentera pas en 2024 et sa vague tentative de relance est abandonnée avant toute mise en oeuvre.

Ce week-end :

« M. Biden fait plus âgé qu’il y a quelques jours, un risque politique qui ne peut être résolu par les traditionnels stratagèmes de la Maison-Blanche tels que les remaniements… Certains assistants le surveillent discrètement. Il traine souvent les pieds, quand il marche, et les assistants ont peur qu’il trébuche sur un câble. Il butte sur certains mots, au cours d’événements publics, et ils retiennent leur souffle pour voir s’il va s’en sortir jusqu’à la fin sans faire une gaffe. »

Et puis lundi :

« Les inquiétudes généralisées concernant l’économie et l’inflation ont contribué à assombrir résolument l’humeur nationale, tant à l’égard de M. Biden que de l’orientation du pays… pessimisme répandu dans tous les coins du pays. »

Et Yahoo! News en rajoute :

« La cote de popularité du président Biden chute à 33% alors que la grande majorité des Démocrates recherche un nouveau candidat pour 2024.    

Selon un sondage réalisé la semaine dernière par le New York Times/Siena College, seul 1 Américain sur 3 approuve l’action de Biden. Mais [élément] peut-être plus inquiétant encore, pour l’avenir politique de Biden, seuls 26% des Démocrates inscrits souhaitent qu’il soit nommé par le parti démocrate aux prochaines élections présidentielles. 

Et nous remarquons en premier lieu que cette désapprobation généralisée ne concerne pas que M. Biden. La cote de popularité de Donald Trump a sombré à 30%, à la fin de son mandat. Et au cours de la crise financière de 2008, encore moins de monde faisait confiance à George W. Bush.

Et cela ne se limite pas aux Etats-Unis.

Boris Johnson vient juste d’être prié de quitter son bureau.

Emmanuel Macron est très critiqué : 62% des Français désapprouvent son action.

Le chancelier allemand Scholz est à peu près au même niveau, avec une cote de popularité de 36%.

Et le gouvernement italien vient de démissionner.

Que se passe-t-il ?

Pourquoi les gens font-ils si peu confiance aux dirigeants qu’ils élisent ?

Qu’est-ce qui ne tourne pas rond, avec les démocraties occidentales ?

(Vladimir Poutine, en revanche, aurait une cote de popularité de 83% et le rouble enterre l’euro) constatent les commentateurs, sans parler de l’adhésion à la Chine, du faible effet relatif des sanctions et de l’étranglement de l’économie sur certains pays dont on attribue le succès à l’autocratie.

Est-ce un problème qui va au-delà de l’argent ? s’inquiètent les investisseurs…

Que faut-il faire?

Ce qui ne doit pas, ne peut pas être remis en cause c’est le formidable endettement des Etats-Unis, leur utilisation de la planche à billet et du dollar comme étalon or. Depuis le choix de Nixon de refuser l’étalon or, tout l’art des Etats-Unis a consisté à reporter le poids de cette dette abyssale sur d’autres pays, à commencer par l’URSS. L’attaque réussie contre l’URSS leur a donné de la respiration jusqu’à la crise asiatique de 1997 puis celle dite des subprimes de 2008 avec de plus en plus de tentatives d’émancipation des pays du sud en particulier, derrière la Chine…

Et la lutte contre les effets par la baisse jusqu’à zéro des taux d’intérêt, tout en poursuivant une énorme accumulation du capital financier et une inégalité croissante, ne repose que sur la puissance des USA et donc sa capacité à faire payer son surendettement par les autres pays, sur le rôle joué également par le pétrodollar.

Nous sommes entrés dans une phase de remise en cause de cette hégémonie qui se double partout du passage possible à une monnaie numérique avec la quasi interdiction du cash. Si les Etats-Unis conservent leur domination monétaire, l’interdiction du cash devient avec le contrôle numérique le moyen de jouer à la fois avec la planche à billet numérique et les taux d’intérêt les plus bas. Mais d’autres pays y compris la Chine et maintenant la Russie sont en train de s’émanciper de ce licol, l’inflation est le résultat de ces processus complexes sur lesquels les grands argentiers de l’occident ont de moins en moins la haute main comme on l’a vu avec le G 20. Mais on peut également voir que c’est la contradiction croissante au sein du pays où fleurit l’inflation, contradiction interne et externe, qui est à la base de cette inflation ou stagflation.

C’est dans un tel contexte qu’intervient le sauve qui peut du relèvement des taux d’intérêt. Une manière en catastrophe de répondre à ce qu’on appelle la stagflation, elle-même le produit de cette financiarisation et du système de sanction, de pillage aggravé à partir de 1991. Une notion qui décrit une situation économique dans laquelle se conjuguent  la stagnation de l’activité économique  (faible croissance économique et chômage élevé) et la hausse des prix (inflation). Avec un double effet de la part de la FED, tenter d’attirer les capitaux pour mieux faire payer l’excès de dollars, le matelas de monnaie pourri aux autres pays à commencer par les chers alliés européens et japonais. C’est le recours à America first de Trump à Biden.

Un des effets pervers de la situation (qui ne fait qu’accentuer l’effet désastreux de la manière dont les Etats-Unis ont utilisé le dollar et leur mainmise sur les circuits financiers pour s’emparer des dépôts afghans et russe) est que dans leur tentative de créer des coalitions militaires contre les pays en proie à des sanctions (et qui sont devant la nécessité de se libérer de l’emprise donc), ils n’ont rien à offrir pour faire face à la crise qu’ils continuent à aggraver.

Il faut mesurer le fait que le capital n’a pas de solution et si l’on combine ce qui s’avère la catastrophe du marché financiarisé avec les autres défis de la période en matière de climat, de santé, le relèvement des taux d’intérêt signifie que la dette de la France s’accroit et sa capacité d’investissement dans les services publiques, le rattrapage du pouvoir d’achat s’amenuise alors qu’augmentent la facture du capital et celle de l’armement.

Mais du côté de l’intervention keynesienne ce n’est pas miraculeux non plus. La stagflation a considérablement dégradé l’image du keynésianisme auprès des dirigeants économiques. Cette école de pensée prévoyait en effet un arbitrage entre inflation et chômage, de telle sorte qu’une augmentation de l’un provoquait une baisse de l’autre (principe de la courbe de Phillips). Face à une situation de chômage, une stimulation de l’activité économique par des politiques de relance étaient préconisées ; or, face à une situation de stagflation, ces politiques ne fonctionnaient plus. Elles restent au milieu du gué en tant que tentative de régulation d’un système capitaliste dont les principaux protagonistes sont en situation de faire sauter toutes les régulations. La fin de l’ultime régulation que représentait l’URSS a consacré sans doute la fin du keynesianisme.

La stagflation a alors laissé le champ libre aux préceptes du monétarisme (Milton Friedmanécole de Chicago…) et de l’ordolibéralisme, qui, eux, visaient une baisse de l’inflation. Les politiques de la demande ont été remplacées par les politiques de l’offre, et les politiques expansionnistes par des politiques de rigueur, mettant un terme à la forte inflation. Ces politiques n’ont toutefois pas toujours permis une sortie du marasme économique, elles l’ont généré. Elles tentent de nous faire croire que c’est la hausse des salaires qui génère l’inflation alors que les faits sont là, non seulement les salaires, les pensions étaient déjà à un niveau insuffisant encore aggravé par la destruction des services publics mis en coupe réglée depuis au moins les années quatre vingt dix, mais l’inflation rend la pression intolérable.

L’idée d’un retour à l’intervention de l’Etat est certes dans l’air mais toutes les interventions de l’Etat ne signifient pas l’intérêt public, la guerre en est l’exemple le plus illustratif. On ne peut pas simplement opposer marché et Etat, il faut encore comprendre la nature de l’Etat et sa relation au marché. Le retour à l’Etat et on le voit avec la proposition de nationalisation d’EDF peut être simplement une tentative pour faire payer un peu plus la gabegie du capital à la classe ouvrière et aux travailleurs.

Bref, face à leur incapacité à trouver une issue, les capitalistes et le pouvoir politique qui leur est inféodé tendent à n’avoir plus que le recours à la guerre et au fascisme.

La seule politique qu’un parti communiste devrait avoir à coeur de développer est d’organiser la classe ouvrière, les travailleurs au lieu de les laisser en proie à des mouvements utilisés pour assurer la répression, comme on le voit au Sri Lanka ou avec les gilets jaunes. Une de leur tâche devrait être la lutte contre la guerre et les campagnes de xénophobie. Chacun constatera que nous n’avons pas en France les forces politiques aptes à mener une telle politique et capables d’éclairer les travailleurs et les couches populaires sur leur nécessaire intervention.

Danielle Bleitrach