samedi 16 mars 2024

 

Macron s’en va, clopin-clopant, en guerre en Ukraine - Quand un exercice de pédagogie se transforme en un immense raté

Agora Vox

 

Ainsi le président de la République française, Emmanuel Macron, a-t-il tenté de justifier ce jeudi 14 mars 2024, lors d’un entretien en direct sur les deux principales chaînes de télévision de l’Hexagone, sa récente déclaration le 26 février dernier, à l’issue de la conférence internationale de soutien à l’Ukraine, concernant le possible envoi de troupes militaires françaises sur ce même sol ukrainien.

Un exercice de pédagogie qui s’est cependant bien vite révélé, dès les premiers échanges (dont une analogie bancale, et même contreproductive tant elle s’est finalement retournée contre son propre raisonnement, sur les positions « assises » ou « debout » de ses deux interlocuteurs), confus, contradictoire, mal assuré, approximatif, suscitant plus de questions qu’il n’a offert de réponses, et donc, au bout du compte, complètement raté !

LOGORRHÉE BELLICISTE : UNE POSTURE AUSSI MALADROITE QU’ARTIFICIELLE TANT ELLE FORCE LE TRAIT

La raison de cet étonnant mais lamentable fourvoiement intellectuel, tout autant que politico-diplomatique ? Le fait que Macron ne réussit pas à se dépêtrer de cette posture, aussi maladroite qu’artificielle tant elle force le trait, qui, il y a donc quelques jours seulement, lui fit déclarer de manière impromptue et totalement improvisée, dans sa réponse élyséenne à un journaliste lors de la récente conférence de presse dédiée à cette aide à apporter à l’Ukraine, que la France était prête à envoyer des soldats sur le territoire ukrainien, précisément, si, d’aventure, la Russie l’emportait, dans ce conflit, sur le terrain. Et la machine guerrière, sa logorrhée belliciste tout autant que le péril qu’elle recèle intrinsèquement, de s’emballer aussitôt, dangereusement, aux quatre coins de la planète !

Ainsi n’a-t-on toujours pas compris, en substance, cette assertion, du même Macron, selon laquelle « la Russie ne devait pas gagner cette guerre ». Qu’est-ce à dire, en effet, concrètement, de manière plus précise, tangible et efficace ? Car, dans la réalité des faits, c’est bien la Russie qui, malgré la sincérité de notre soutien à l’Ukraine depuis le début de ce conflit, est en train de gagner, effectivement, sur le terrain !

Davantage : il est même fort probable, au train où vont les choses (dont notre propre faiblesse militaire aussi bien que le retrait progressif des États-Unis d’Amérique de ce champ de bataille) et compte-tenu surtout de la disproportion des forces en jeu (la terrible puissance russe face à la vaillante mais désormais précaire résistance ukrainienne), que la Russie finisse par gagner, qu’on le veuille ou non, définitivement.

Alors quoi, si l’on suit, à la lettre, la logique macronienne, qui, du reste, n’est toujours pas claire ? La France, dans ce malheureux mais réaliste cas, va-t-elle véritablement entrer en guerre contre la Russie ? Au risque, face à ces deux puissances nucléaires, de faire exploser dès lors, sinon la terre entière, du moins notre bonne vieille Europe, avec, dans ce carnage qui s’avérera ainsi d’une ampleur inédite, des centaines de millions de morts ?

OÙ SONT PASSÉS LES MOTS « NÉGOCIATION » ET « DIPLOMATIE »?

Mais il y avait pire encore, si cela est possible, dans cette mauvais charpente argumentative d’Emmanuel Macaron lors de ce pitoyable entretien télévisé de ce 14 mars : jamais les mots de « négociation » ni même de « diplomatie » n’y ont été ouvertement prononcés, sinon par rapport à de vagues, vains, anciens et dérisoires pourparlers, hélas, d’il y a plusieurs mois déjà !

Au contraire : ceux qui optent aujourd’hui pour la paix, pourtant seule solution rationnelle dans cet horrible conflit, y ont été traités, par ce même Macron, de « défaitistes », sinon implicitement, telle l’outrageuse conséquence d’un très malhonnête, injuste et fallacieux procès d’intention, de « complices », à l’instar du funeste esprit munichois d’autrefois, de la dictature poutinienne (ce qu’elle est, nul ne peut objectivement en douter, en effet, pour le malheur et triste sort des Russes eux-mêmes) !

Diantre ! Emmanuel Macron, soudain pris lui aussi d’un inapproprié prurit manichéen, aurait-il soudain perdu là, parce que la situation l’arrange en cette pénible circonstance, son légendaire sens de l’ « en même temps », comme si l’on ne pouvait à la fois soutenir l’Ukraine, dans son très légitime droit à la défense de sa souveraineté nationale tout autant qu’à la préservation de ses frontières internationales, et œuvrer, parallèlement, en faveur de la paix avec la Russie ?

PRÉFÉRER UNE PAIX RAISONNÉE A UNE GUERRE INSENSÉE

C’est en tout cas là – privilégier une paix raisonnée, nuance oblige, plutôt qu’une guerre insensée, où tous seraient dramatiquement perdants – ce que les authentiques humanistes, pour qui l’intelligence du cœur vaut également principe de raison, appellent très sincèrement, et sans pour autant verser là en je ne sais quelle indigne capitulation face à l’ennemi (car, de fait, il y a bien là un agressé, l’Ukraine, et un agresseur, la Russie), de leurs vœux ! 

 DANIEL SALVATORE SCHIFFER

*Philosophe, écrivain, auteur d’une quarantaine de livres, directeur de l’ouvrage collectif, autour de 33 intellectuels majeurs, « L’humain au centre du monde – Pour un humanisme des temps présents et à venir. Contre les nouveaux obscurantismes » (Éditions du Cerf).

 

Comité Olympique et FIFA : bannissez Israël des compétitions internationales dès maintenant

jeudi 14 mars 2024 par Ekō

L’armée israélienne se prépare à envahir Rafah, où se réfugient plus de la moitié des 2,3 millions d’habitants de Gaza.
Cependant, malgré le génocide en cours, les équipes sportives israéliennes continuent de participer à des compétitions internationales.

La Russie a été menacée de bannissement des compétitions sportives internationales immédiatement après l’invasion de l’Ukraine et a finalement été exclue des Jeux olympiques de 2024.
Alors que l’équipe de football israélienne se prépare à disputer des matchs européens majeurs dans les semaines à venir, et avec les Jeux Olympiques cet été, les fédérations sportives doivent agir sans plus attendre pour mettre un terme à la violence du gouvernement israélien.

Demandez au Comité Olympique, à toutes les fédérations majeures de football et autres sports d’interdire Israël jusqu’à ce que cesse le génocide palestinien.

L’idéal olympique est censé "contribuer à la construction d’un monde pacifique..." Pourtant, le Comité Olympique et toutes les autres fédérations sportives maintiennent la participation d’un pays qui a bafoué ce principe. Les attaques israéliennes ont déjà coûté la vie à plus de 30 000 Palestiniens à Gaza, dont des athlètes comme Abu al-Abed, l’entraîneur de la sélection olympique de football de la Palestine.

Cette question dépasse le cadre du sport.

Les Jeux Olympiques sont regardés par plus de 3 milliards de personnes dans le monde tous les quatre ans. Imaginez le symbole que représenterait l’exclusion d’Israël des Jeux Olympiques en signe de solidarité avec la Palestine.

C’est pourquoi plus de 300 équipes sportives en Palestine se sont jointes à cet appel. Rejoignons-les et montrons un soutien mondial massif pour bannir Israël de ces jeux.
Demandez au Comité international olympique, à la FIFA et à l’UEFA de bannir Israël de toute compétition dès maintenant. Après le siège israélien de 9 jours sur Gaza en 2021, 140 000 membres d’Ekō comme vous ont exhorté l’une des plus grandes marques de sport au monde, PUMA, à renoncer à son contrat de sponsoring avec l’Association Israélienne de Football.

Nous avons rencontré le PDG de PUMA pour lui transmettre notre message. Et grâce à notre mobilisation collective, et le travail sans relâche des militants de la cause palestinienne, PUMA a annoncé la fin de son partenariat avec la fédération israélienne de football l’année dernière, quelques mois après l’actuelle invasion.

Cela prouve que le sport peut être un vecteur de changement en Israël, mais seulement si nous agissons maintenant.

PÉTITION POUR L’EXCLUSION DE L’ÉTAT GÉNOCIDAIRE SIONISTE DES COMPÉTITIONS INTERNATIONALES

 

Comment on réécrit l’histoire !

L’une des toutes premières études de l’IFOP, plus vieux institut de sondage français, a posé cette question à la fin de la Seconde Guerre mondiale et 70 ans plus tard : «  Quelle est, selon vous, la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ?  » La Grande-Bretagne, les Etats-Unis ou l’URSS ? A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Français répondent (1) à plus de 60% que les Russes sont ceux qui ont le plus contribué à la défaite des Nazis. Les Etats-Unis et l’Angleterre ne recueillent respectivement que 20% et 12%. Soixante-dix ans plus tard, la réponse au même sondage donne des résultats totalement différents, l’opinion publique est complétement renversée, et c’est aux Etats-Unis avec 58 % que les français attribuent le rôle principal dans la défaite de l’Allemagne (2). C’est vrai que le cinéma américain a revisité la seconde guerre mondiale avec contrevérité, inexactitude et même un certain charlatanisme qui a permis de refaçonner cette partie de notre histoire à la sauce hollywoodienne !

En 2020, lors de la commémoration du 8 mai marquant la victoire sur l’Allemagne Nazie, la Russie n’a pas été invitée, et l’URSS n’a simplement pas été citée, comme si elle n’avait pas participé au conflit ! Pourtant, sur le) s 60 millions de morts de cette guerre, c’est l’Union Soviétique qui a payé le plus lourd tribut avec 25 millions de victimes (3! Le total de morts pour les Etats-Unis s’élève à 418 500 et pour la France à 567 600. Mais quelle aurait été la position des USA, si Hitler, ne leur avait pas déclaré la guerre après le bombardement de Pearl Harbour par les japonais en 1941 (4) ? Les américains, à ce moment, n’avaient aucun intérêt à une guerre avec l’Allemagne (5-6).

Récemment un média américain a annoncé que c’était les troupes américaines qui avaient libéré Auschwitz, avant de s’excuser de son erreur. Mais que restera-t-il de la vérité historique dans 30 ans ? Il n’y a qu’à voir comment est présenté « le pacte germano-soviétique », et comment nous avons passé aux oubliettes les accords de Munich, signés entre Hitler et les britanniques, mais aussi entre Hitler et le gouvernement français. L’on a oublié que la Pologne s’était entendue avec Hitler pour récupérer une partie de la Tchécoslovaquie. Il est également mensonger, et manipulateur, de faire croire que les communistes français ne se seraient engagés dans la résistance qu’après l’entrée en guerre de l’Union soviétique (7). Bientôt l’on va nous faire croire que c’est Staline qui a déclenché la guerre. L’Union Européenne qui veut assimiler nazisme et communisme (8) est en train de réécrire l’histoire. Réécrire l’histoire (8) c’est l’un des préceptes fondamentaux des régimes totalitaires …

http://2ccr.unblog.fr/2024/03/15/comment-on-reecrit-lhistoire/

 

Ref ;

(1) Les crises.fr., le 08/05/2019 « L’enseignement de l’ignorance : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ? ». (3) Wikipédia, « Pertes humaines pendant la Seconde Guerre mondiale ». (4) Par ce geste Hitler espérait que les japonais, « reconnaissants », aideraient l’Allemagne de se sortir du bourbier russe en ouvrant un nouveau front à l’est de la Russie, mais le Japon ne le fit pas, poursuivant plutôt sa politique expansionniste en Chine et en Asie du Sud-est. (2) Regarder « Le Mythe de la bonne guerre » de Jacques Pauwels sur You Tube (5). De 1933 à la fin de la guerre, l’ère hitlérienne fut un « paradis » pour les industriels allemands et américains. Les filiales allemandes des banques Morgan et Chase, de même que Standard Oil, Ford, GM Opel, ITT, IBM, etc., réalisèrent des profits colossaux, résultant de commandes d’Etat inépuisables et d’une surexploitation inouïe des travailleurs, déportés inclus. Le Monde Diplomatique d’Aout 2013, page 26. Lire également « Big business avec Hitler », de Jacques Pauwels aux éditions Aden. (6) Ptb.be, le27/09/2019 : « Quand le Parlement européen vote une résolution dangereuse qui réécrit l’histoire ». (7) Café Marxiste sur Youtube, le 07/01/02024 : « Léon LandiniI, résistant communiste répond à Michel Onfray (ainsi qu’à Macron et Ruffin) (8) Je vous conseille les livres et les conférences que vous trouverez sur YouTube d’Annie Lacroix-Riz, historienne, agrégée d’histoire, docteur-ès-Lettres.

 


Il y a dix ans la Crimée retrouvait la Russie

Posté par 2ccr le 16 mars 2024 Conscience Citoyenne et responsable

L’un des événements les plus marquants de la Russie moderne sont les 20 jours du premier semestre 2014, le « Printemps de Crimée ». Tout a commencé le 27 février, en réponse au coup d’État organisé en Ukraine par des nationalistes radicaux à Kiev. Le Conseil suprême de la République de Crimée a annoncé un référendum sur le territoire de la péninsule. Les Criméens ont été invités à voter pour la réunification avec la Fédération de Russie. Le vote, censé changer à jamais le sort de la Crimée, a été décidé pour le 16 mars. Lors du référendum, plus de 96 pour cent des habitants de la péninsule étaient favorables à l’adhésion à la Russie. Ses résultats ont été annoncés dès le lendemain. C’est le 17 mars que les dirigeants de la péninsule ont officiellement déclaré leur indépendance de l’Ukraine, puis le Conseil suprême de la république s’est adressé aux autorités russes pour leur demander d’accepter la Crimée dans la Fédération de Russie. Le lendemain, le 18 mars, les dirigeants de Crimée signaient un accord correspondant avec Moscou, deux nouvelles régions sont ainsi apparues : la République de Crimée et la ville fédérale de Sébastopol. Par la suite, le pont de Crimée a été construit pour relier la péninsule au « continent » via le détroit de Kertch.

Depuis 2014, cette date est considérée comme un jour férié et est célébrée chaque année comme le Jour de la réunification de la Crimée avec la Russie, et le 16 mars a commencé à être célébré comme le Jour du référendum de Crimée de 2014.

En fait, la Crimée a fait pendant des siècles, mentalement et culturellement, partie intégrante du monde russe. Lors de la dislocation de l’URSS, un référendum est organisé en Crimée le 12 février 1991 sur la question de savoir si cette république entend redevenir une République socialiste soviétique autonome de l’URSS : le résultat en est sans équivoque avec 94,3% de « oui » et 81,37% de participation. La RSSA de Crimée est pourtant dissoute le 26 février 1992 et reçoit la qualification de République autonome. On oublie, du côté de Kiev, que c’est d’une décision personnelle de Nikita Khrouchtchev, en 1954, qu’est résulté le rattachement de la Crimée à l’Ukraine. Deux ans plus tard, un nouveau référendum est organisé par la République autonome de Crimée portant sur son éventuel rattachement à la Fédération de Russie. Une fois encore, le résultat en est sans équivoque ave 96,6 % de « oui ». Le caractère majoritaire du vote est indéniable. Pourtant, le gouvernement ukrainien dénie aux Criméens le droit de disposer d’eux-mêmes alors qu’il le reconnait aux Bosniens ou aux Kosovars. Le président de la Serbie, Aleksandar Vucic, ne s’est pas fait faute de dénoncer l’hypocrisie de l‘Occident à la tribune de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre 2023.

Jusqu’en 2014, les États-Unis envisageaient sérieusement Sébastopol comme leur nouvelle base navale afin d’établir un contrôle total sur la mer Noire, et d’en expulser la Russie. Lorsque la péninsule faisait partie de l’Ukraine, des navires américains faisaient escale dans les ports de Crimée, mais les protestations actives des Criméens n’avaient pas permis à l’armée américaine de s’y installer.

Ref :

CF2R, mars 2024 : « Ukraine : les enjeux cachés d’une guerre prévisible »

Top War, le 16/03/2024 : « Le 16 mars est le jour du référendum en Crimée en 2014 »

Le Monde, le 15/03/2014 : « D’un simple décret, Khrouchtchev fit don de la Crimée à l’Ukraine en 1954 »


 

Du déclin de l’occident, un mode de pensée incapable de concevoir l’autre… en passant par la “gauche”…

Voici ce que l’on peut recevoir comme courriel et que je vous économise en général . Si aujourd’hui exceptionnellement j’ai décidé de publier ce genre de chose c’est dans un souci pédagogique par rapport au “consensus” qui est en train de s’établir sur un mode de pensée qui interdit toute issue concrète. Hier j’ai reçu un commentaire sous le titre “la question juive ou pourquoi l’antisémitisme est de rigueur“, de la part d’un certain Charlie Ducasse et vous aurez en prime en fin cette prose que je supprime en général. Cette fois il m’a paru intéressant de tenter un lien entre la manière dont s’est répandu en Europe à la fois chez les intellectuels et dans le grand public ce qui va bien au-delà du retour de l’antisémitisme, c’est le même mode de fonctionnement mais il est question de l’incapacité européenne à penser le monde en train de naitre. Il s’avère que Charlie Ducasse place ses éructations sous le patronage de Nietzsche, et j’étais en train de lire un très court livre (83 pages) de Aymeric Monville chez Delga : Misère du nietzschéisme de gauche (de Georges Bataille à Michel Onfray). Par parenthèse ce type de livre très court est une formule d’avenir qui se concilie avec les moments d’attente… Ne vous en privez pas, il est roboratif.

Aymeric Monville démonte les thèses qui veulent que sa sœur soit la responsable de la manière dont Nietzsche et le nazisme (l’antisémitisme en particulier) ont été confondus, la sœur aurait plutôt édulcoré les thèses et il démontre à quel point ceux qui ont prétendu s’inspirer de cette pensée ont tous glissé vers l’extrême-droite.

il s’interroge : “Comment un penseur antirationaliste, apologiste de la domination et de la violence, de l’écrasement des faibles, de l’aristocratie, antiféministe et même antisémite a pu devenir une des grandes références de l’intelligentsia française de gauche. » Et il n’est pas le seul à avoir été réhabilité par une gauche qui était d’abord souvent anticommuniste ou se prétendant “antistaliniste”. Il montre comment Nietzsche a opéré un retour par la gauche qui a fait de lui “le penseur européen” mais ce retour autorise le consensus irrationaliste, individualiste et anticommuniste, de la « gauche morale » à la réaction. Ce travail sur la “gauche” a été “total”.

Et c’est en ce sens qu’il est intéressant de publier cet adepte des réseaux sociaux, ce Charlie Ducasse qui n’est pas un intellectuel mais un de ces individus qui exhibent la signification politique d’un tel engouement parce que cette dérive des “intellectuels” qui se surajoute à d’autres comme les nouveaux philosophes, la manière dont a été pris d’assaut la forteresse ouvrière et comment le pilonnage politicomédiatique, celui des pseudos experts et “éditorialistes” autoproclamés de la presse, de la télévision fait jonction avec ces idéologues pour détruire au sein de la gauche le matérialisme des Lumières et in fine l’ensemble de la philosophie issue du marxisme et du mouvement ouvrier.

Ce qui est intéressant chez ce Charlie Ducasse c’est le salmigondis qu’il place sous le parrainage de Nietzsche.

En se proclamant Nietzschéen (et des tas d’autres du même acabit) cet individu dont il existe des tas de clones qu’en général je supprime, revendique l’antisémitisme comme le nec plus ultra de la pensée occidentale et on pourrait partir de là pour dire le désagrément que j’éprouve : Oui c’est vrai qu’avoir subi depuis l’enfance cette chose-là vous rend sensible au fait qu’en ce moment l’antisémite le plus imbécile reprend du service mais ce qui me préoccupe c’est à quel point il y a là un mode de pensée plus général, plus polymorphe. Jadis réservé à la droite, aux réactionnaires, l’antisémitisme est désormais plus largement partagé et cela illustre ce que nous analysons par ailleurs : la manière dont la diabolisation fait partie de la crise des “universels” de l’occident, avec un brouillage des lignes qui veut que l’incapacité colonialiste à penser l’autre aille désormais jusqu’à l’adhésion de tous, de fait à l’apocalypse nucléaire. Les juifs n’en sont pas exempts, il suffit de voir un Glucksmann. Dans un tel brouillage des lignes, où chacun est invité à adhérer à un mode de pensée qui ressemble à l’antisémitisme millénaire… On pourrait même dire que ce n’est pas l’antisémitisme qui renaît, mais plutôt le mode de pensée qu’il consacrait et sa contagion. Ce qui disparait c’est le matérialisme des Lumières et in fine l’ensemble de la philosophie issue du marxisme et du mouvement ouvrier. Comme si sa disparition était le produit de l’incapacité des Lumières et du marxisme occidental à demeurer offensif dans le monde occidental d’abord capitaliste et colonialiste.

Comment s’étonner que dans une telle résurgence, des gens éprouvent à nouveau la haine viscérale du juif et la déversent tout en prétendant militer à vos côtés, des gauchistes, des membres du PCF qui utilisent ce qui se passe à Gaza pour alimenter cette obsession maladive avec des croquis qui ne cessent de se référer au “juif” depuis le rabbin jusqu’à l’analogie systématique avec Auschwitz… Alors que comme le prouve le texte du dit Charlie Ducasse cet antisémitisme était contradictoire avec le marxisme et l’on peut dire effectivement que son retour en force n’a eu lieu que dans la mutation de la gauche. Cette haine du “juif” a une origine européenne. Le monde arabe ne la pratiquait pas quelles que soient les périodes de fanatisme et d’exclusion il n’était jamais question du “juif” plutôt que du chrétien, celui-ci était le “cousin”. Si L’Amérique latine comme toutes les terres chrétiennes est la proie d’un antisémitisme violent, il n’y a pas cette recherche maladive du juif qui caractérise l’Europe…

C’est pourquoi au-delà de l’antisémitisme stricto sensu ce qui m’intéresse c’est la manière dont le mode de fonctionnement de l’antisémitisme européen est en train d’être exporté comme d’autres vestiges du colonialisme, et surtout devient la mouture de la pensée occidentale en plein déclin ce qui est dans le fond revendiqué naïvement par Charlie Ducasse.

Il a une certaine perspicacité sur le fait que son obsession serait désormais l’universel européen tout entier. Le déclin du mode occidental c’est d’être passé de la négation de l’autre à la diabolisation de toute différence politique et même culturelle. Il y a – il suffit de lire ce texte de Charlie Ducasse pour le percevoir – une sorte de panique, une soif de “citations”, de références qui tient lieu de démonstration. C’est pathétique et le sentiment dominant qu’inspire ce genre de texte, quelle que soit d’ailleurs l’obsession autour de laquelle il creuse son charnier, est une profonde tristesse face à un tel mode de raisonnement totalement disloqué mais qui tient sur la seule existence supposée de ce qui est le “mal”, ce qu’il suffirait d’extirper pour que tout aille mieux.

A la complexité du réel qu’est un mode de production, des formations sociales, on substitue une cause et une seule qui devient à la fois l’obsession et son mode de soulagement, le cas Poutine ou la sinophobie fonctionne sur le mode de l’antisémitisme… C’est exactement le mode de fonctionnement analysé par ailleurs justement à propos de l’Ukraine sur le plan politique et qui tend aujourd’hui à justifier y compris d’aller à propos de l’Ukraine jusqu’à l’affrontement nucléaire, comme d’ailleurs la manière de penser l’immigration comme une islamisation et de ne voir pour justifier l’injustifiable de ce qui se passe à Gaza que ce qui se serait passé le 7 octobre… Cette manière de tout ramener à une seule cause, à éliminer la pensée dialectique ne concerne pas que les seuls antisémites, cet appauvrissement se barde de “citations” souvent tronquées, d’accumulations de références, le tout s’économisant la démonstration. S’économiser la preuve est d’ailleurs le grand avantage de l’antisémitisme (c’est la faute aux juifs et aux cyclistes, pourquoi les cyclistes?) mais cette volonté d’économiser la preuve est devenue le mode de pensée dominant.

On peut lutter contre des idées fausses mais il est de plus en plus difficile d’affronter cette déchéance, qui à des degrés divers est devenue le mode de pensée français, il ne s’agit plus de la haine irrationnelle des “juifs” mais bien d’un recours systématique à la diabolisation imbécile, inculte, qui interdit la recherche de solutions concrètes… Le poids du consensus est devenu tel qu’il interdit le moindre raisonnement qui ne commence pas par dire à quel point il adhère au narratif ce qui rend totalement impossible une intervention populaire, une adhésion à des solutions qui ne soient pas la guerre.

Je dois dire que ces derniers jours, il m’est difficile vu le contexte politique, d’alimenter histoireetsociete et de conserver ce qui me permet de continuer à éprouver une inlassable curiosité pour tout ce que l’humanité, la vie, la lecture, les longues ballades apportent… Il fallait que je vous dise ce qui peut rendre ce week end un peu moins copieux, la nécessité d’un peu de distance.

Le véritable problème est que ce qui était le meilleur rempart face à ces dérives, l’existence d’un parti communiste plongeant ses racines dans l’intervention de la classe ouvrière et des couches populaires est en train d’être pris dans le piège de l’électoralisme, de l’absence de formation, la destruction de l’organisation, l’incapacité de fait à résister et si ce piège se referme sur lui sur une question aussi gravissime que la guerre ou la paix, les tentatives des intellectuels seront étouffées.

La question juive ou l’antisémitisme de rigueur…

De Voltaire à Céline, en passant par Proudhon, les plus grands penseurs Français ont toujours été antisémites… Une raison s’impose… Je me contenterai de l’aborder en une analyse toute superficielle (à fleur de nerfs, Nietzsche será mon fil d’Ariane), laissant le soin aux lecteurs interessés de creuser la question, ou leur tombe…
Voltaire, incarnation de la reaction face à la révolution bourgeoise, dernière tentative de sauver ce qui fit la grandeur de la France avant le “contra-social”, ce fils de Ninon de l’Enclos, impuissant, stérile, une merveille du raffinement de l’Esprit… À part Candide on ne l’étudie guère plus au Lycée…
Céline, ce brave médecin du bon peuple, le plus Grand écrivain du XXème siècle, le seul Dostoievski Français… curieusement (à la folie, pas du tout) ces textes les plus antisémites (l’école des cadavres et bagatelles) sont ceux qui nous éclairent le plus sur les courants d’air courrent en guerre actuels (allez y lire vous même si vous ne voulez pas me croire), il a été tellement diabolisé qu’on ne le mentionne même pas au Lycée et les intellectuels de gauche (encore moins gauchistes) en ont tellement peur qu’ils l’on offert en cadeau à l’extrême droite, je n’insisterai donc pas…

Proudhon enfin, et cela vous va (si bien) Madame Bleitrash… Je ne sais d’où vient cette idée de qualifier le petit père de l’anarchisme de “petit bourgeois”… En fait je ne le sais que trop bien, c’est la jalousie maladive (juive en somme) de Marx pour un esprit bien plus innovant que le sien… lisont un instant qu’est ce que la propriété? (le vol de la plus-value exponentielle de la force ouvrière) Pour comprendre à quel point son analyse dépasse le Marxisme… Marx à été imposé par la ruse dans la science sociale tout comme Einstein dans les sciences physiques ou Freud en psychologie… Voyons rapidement la célèbre phrase de Marx sur Hegel (chez qui, soit dit au passage, il pille toute sa philosophie) “quand J’ai connu Hegel, il marchait sur la tête, Je l’ai remis sur ces pieds”… Pour de pas m’étaler (comme la confiture) sur la fin de la société si vile et de l’Histoire, je citerai (encore) Nietzsche: “il faut aprendre à marcher sur la tête (Rosch) mais levez donc moi plus haut encore ces jambes!”, mais tout de même, pour amputer le système hégélien à sa moitié, il faut être un vrai fils de pute…
Enfin pour ma défense (impersonelle), j’apprendrai aux lecteurs que “Ducasse” (Ducassé pour être exact) est un patronyme pour les habitants du ghetto juif (Ciboure) de Saint Jean de Luz…

À bon entendeur, comme disait Bakounine, l’Esprit qui anime Proudhon est le même qui anime Montaigne…

Carlos Ducasse du Nicaragua (le país le plus appauvri au Monde après Haiti et dont personne de pense du bien malgré l’exemple de nos sacrifices).

“Le peuple Juif, le plus singulier de l’Histoire de l’Humanité, est le seul qui placé face à la question existentielle de l’être et du non-être, choisit l’être à tout prix” (Nietsky, Juif Polonais)

 

LA DIABOLISATION DE LA RUSSIE SAPE L'UNIVERSALISME OCCIDENTAL

Un cadre manichéen a empêché une analyse significative de la guerre en Ukraine, garantissant que d’autres guerres évitables éclatent à l’avenir. Voici un article intelligent et qui dit non seulement ce qui décrédibilise “l’occident libéral” sa droite comme sa gauche, mais ne laisse en son sein pas d’espace pour penser autrement qu’en légitimité des guerres au nom de “la démocratie” et des catégories élaborées autour de ce concept favorable au seul occident. La “gauche” il suffit d’étudier le cas Glucksmann est à l’avant poste, mais il parait de plus en plus difficile de croire en un PCF. Ces PC profondément marqués par l’eurocommunisme ont été dans l’incapacité de penser l’URSS autrement que selon les catégories libérales, et cela est vrai aussi de la Chine.. Ce refus d’analyse joint encore aujourd’hui au manque total de courage, l’opportunisme électoral les condamne à dériver jusqu’à l’acceptation de fait d’une guerre nucléaire plutôt que d’avoir l’intelligence de défendre la confrontation des systèmes politiques qui caractérisent l’actuelle mondialisation. Ce consensus “atlantiste” dans la diabolisation est aujourd’hui à l’œuvre autour de la folie de Macron et les rares objections de détail ne remettant pas en cause le fond décrit ici. Cet occident est incapable non seulement de penser les causes des conflits autrement que dans “la diabolisation” et de penser donc la paix, mais ce que n’analyse pas l’article c’est à quel point “la diabolisation” s’appuie sur les divisions et les haines : (antiislamisme et antisémitisme sont des frères jumeaux), mais de plus en plus les campagnes de dénonciation prennent le pas sur le “droit”. (note et traduction de Danielle Bleitrach)   Histoire et Société

Par HENRY HOPWOOD-PHILLIPS15 MARS 2024


Vladimir Poutine est un fouet commode pour les commentateurs occidentaux. Image : X Capture d’écran

« [Il y a] la possibilité que l’Ukraine se divise en deux, une séparation dont les facteurs culturels laisseraient présager qu’elle pourrait être plus violente que celle de la Tchécoslovaquie mais beaucoup moins sanglante que celle de la Yougoslavie. » – Samuel Huntington, « Choc des civilisations » (1996).

Le drame de l’ouverture de la guerre en Ukraine, impliquant des tirs de drones, des convois ressemblant à des fourmis et des plans si secrets que la plupart des commandants russes ont reçu des ordres seulement 24 heures avant l’invasion, a eu tendance à faire dérailler une analyse significative.

Plutôt que de concentrer leurs efforts sur l’examen des motivations de Moscou et d’une série de conflits qui seraient imbriqués, les commentateurs ont préféré la tâche plus prestigieuse de prévoir les résultats et les calendriers.

En la personne du président Vladimir Poutine, l’Occident a trouvé un bouc émissaire qui a uni la gauche et la droite, cette dernière se débarrassant des chaînes du pacifisme et du relativisme, et la première se délectant de l’identité réactionnaire de l’adversaire. Définir les préoccupations de sécurité russes comme autre chose que des sophismes entrainait le risque d’être considéré comme faisant non seulement partie d’une cinquième colonne, mais aussi comme une dupe.

À cette époque grisante, il y avait une catharsis tangible visant à esquiver les questions entourant le casus belli et à se concentrer sur l’essai de matériel et de tactiques militaires. En bref, célébrer la destruction – une option qui n’est pas disponible contre des opposants moins politiquement acceptables.

Plus de deux ans plus tard, des récits moins désinvoltes ont peut-être été mis en avant, mais la diabolisation de la Russie persiste – bien qu’elle soit enracinée précisément dans le solipsisme qui a canalisé des intérêts divergents dans un affrontement d’armes en premier lieu ; un conflit qui a permis à Moscou d’annexer quatre régions, soit environ un cinquième de l’Ukraine.

Ce narratif s’appuie également sur plusieurs récits historiques qui ont perdu de leur contact avec la réalité. Les fantasmes incluent l’idée que la guerre froide s’est terminée par la soumission totale de Moscou plutôt que par une implosion échelonnée dans laquelle seuls des éléments idéologiquement hostiles se sont avérés capables de discipliner les kleptocrates.

Et l’idée que la paix, le commerce et la mondialisation étaient les cadeaux d’une corne d’abondance libérale qui deviendrait virale, une affirmation difficile à concilier avec la montée de puissances non libérales telles que la Chine, la Russie, l’Iran et l’Inde.

De tels discours complaisants laissent également l’Occident terriblement mal préparé aux changements de cap de la part des dirigeants non libéraux. En mars 2024, par exemple, le Premier ministre hongrois Viktor Orban a révélé la position du candidat à la présidentielle Donald Trump sur le conflit, en déclarant qu’il « ne donnera pas un centime dans la guerre entre l’Ukraine et la Russie, c’est pourquoi la guerre prendra fin ».

Dans un tel environnement, il est clair que l’Occident sait ce qu’il soutient : l’Ukraine est un pays libre et les institutions occidentales ont le droit de rassembler tous les pays qui souhaitent souscrire à leur idéologie. Peu de gens en Occident, cependant, sont sûrs de ce que l’opposition représente, si ce n’est une variété de jardin de l’impérialisme de l’Étoile de la Mort.

Il est rare, par exemple, de trouver beaucoup de gens qui se préoccupent du fait que la neutralité a été inscrite dans la déclaration de souveraineté de l’Ukraine de 1990 et la constitution de 1996, toutes deux répudiées lors de la volte-face de Kiev en 2019. Une poignée d’entre eux se soucient de rappeler que la pensée basée sur les blocs a été fondamentale pour la sécurité collective de l’Europe pendant la majeure partie de son histoire.

Formalisé dans la période d’après-guerre sous le nom de principe d’« indivisibilité », qui stipule que la « sécurité d’une nation » est considérée comme « inséparable des autres pays de sa région », il a été inscrit dans l’Acte final d’Helsinki, la Charte de Paris et d’innombrables autres textes, et récemment promu par la Chine dans le cadre de son Initiative de sécurité mondiale (GSI).

Au cœur du conflit se trouve un fait essentiel : la Russie a été exclue d’un Occident politique en expansion, qui n’était pas disposé à compromettre ses ambitions hégémoniques tout en restant vulnérable à l’érosion progressive de ses appendices. Les tentatives de Moscou de rejoindre l’Occident selon ses propres conditions ont été systématiquement repoussées, notamment en 2000-2001 lorsque Poutine a lancé l’idée que la Russie rejoigne l’OTAN.

En bref, Moscou est confronté à un pacte de défense dont elle est exclue, alors qu’un cadre de sécurité collective qui l’inclut est absent, provoquant une vague de craintes enracinées dans la campagne de bombardement de 78 jours de l’OTAN contre la Serbie en 1999 et son implication en Afghanistan, en Irak et en Libye. Pour Poutine, cela suggère que, loin d’entrer dans une nouvelle ère éclairée, les ordres de sécurité restent hégémoniques.

Son prédécesseur, le président Eltsine, avait averti en 1994 que l’élargissement de l’OTAN entraînerait la perspective d’une « paix froide » caractérisée par la méfiance et la peur. L’activisme de l’OTAN en Serbie, qui a culminé avec le sommet de Bucarest (2008), la déclaration selon laquelle la Géorgie et l’Ukraine deviendraient membres, a indiqué que l’OTAN visait à envelopper Moscou.

Si le Blizhnee Zarubezhe (Proche étranger) de la Russie venait à disparaître dans une masse d’États satellites occidentaux, il ne faudrait pas longtemps pour que le Kremlin soit noyé par une vague de changements de valeurs discréditant son pouvoir. Plus concrètement, il y avait aussi le risque que des actifs majeurs tels que la base navale de Sébastopol, qui abrite la flotte de la mer Noire, tombent entre les mains de mandataires américains.

De plus, il n’est pas certain qu’un large consensus sous-tende la position hostile de Kiev à l’égard de la Russie. Jusqu’en 2014, un fort électorat préférait des liens plus étroits avec Moscou et aujourd’hui, la guerre totale a fatigué même ses plus fervents partisans.

Pourtant, les élites ukrainiennes ont approfondi la dérussification, supprimant la langue russe dans la vie civique par exemple, et encouragé les États-Unis et le Royaume-Uni à transformer les forces armées ukrainiennes, ce qui a amené Poutine à se plaindre en 2022 que le pays avait été converti en une « tête de pont » hostile. La perspective d’une répudiation de l’Ukraine de son statut non nucléaire, évoquée par le président Volodymyr Zelensky lors de la Conférence de Munich sur la sécurité 2022, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le président américain Joe Biden partagent un moment privé. Image : Capture d’écran X / CNN

Une vérité démodée est que les petites nations sur le paillasson des hégémons sont rarement autorisées à contester les agendas de ces derniers. Il y a une raison pour laquelle la dernière fois que l’Irlande a été en mesure d’organiser des offensives à grande échelle contre la Grande-Bretagne, c’était à l’âge des ténèbres ; pourquoi le Cambodge et le Laos sont essentiellement des États clients ; pourquoi l’Amérique a pu détacher le Texas du Mexique en toute impunité.

En Amérique du Sud, la doctrine Monroe de Washington n’a fait que rendre explicite ce que les grandes puissances gardaient généralement implicite, et pourtant Cuba a tenté de la défier pour être confrontée à la perspective d’un holocauste nucléaire.

Tenant le haut du pavé géopolitique, l’Occident peut se permettre de rejeter des mécanismes plus anciens tels que les « sphères d’influence » et des objectifs tels que « l’équilibre des pouvoirs » comme des reliques, le genre de pensée qui n’a récolté que des guerres mondiales.

La Russie, cependant, considère l’abandon de ces concepts comme une tentative de convertir la victoire en impérialisme idéologique, une escalade qui n’est pas sans rappeler le développement ottoman dans lequel un ennemi n’était pas seulement vaincu, mais forcé de ressembler à l’ancien adversaire.

L’absence d’un cadre capable de résoudre des logiques ou des idéologies d’ordre inférieur est palpable dans de telles circonstances, non seulement intellectuellement – ce qui est ironique étant donné l’obsession des universitaires occidentaux pour le respect et la compréhension de l’autre – mais aussi systématiquement dans le sens où la seule partie véritablement coercitive de l’appareil international, le Conseil de sécurité de l’ONU, est soumise à des vétos paralysants.

Les fausses représentations de la Russie peuvent augmenter les chiffres des sondages à court terme, mais elles aident rarement à résoudre les guerres. L’accusation la plus populaire d’impérialisme n’est guère un modèle explicatif engageant pour les actions russes.

Il n’y a aucune preuve de plans d’invasion de la Moldavie, de la Pologne ou des républiques baltes. La Russie est déjà le plus grand pays du monde et peut à peine gouverner son territoire actuel – des faits aggravés par des souvenirs pénibles d’avoir tenté de diriger un bloc d’Europe de l’Est rebelle.

Il est beaucoup plus probable que le souhait de l’Ukraine de se débarrasser de l’influence néocoloniale implique une « dérussification » systémique, que Moscou trouve géopolitiquement troublante et émotionnellement insultante, notamment en raison du rôle formateur de Kiev dans l’histoire russe qui, selon Poutine, la rend « inaliénable ».

De nombreuses nations sont polycentriques avec des patries qui ne sont pas particulièrement proches des capitales contemporaines. Pour faire preuve d’empathie, imaginez l’impact psychologique d’une entrée dans l’orbite d’une puissance étrangère, d’une patrie franque autour de Reims s’écartant d’un alignement avec le Bassin de Paris ou le Triangle de Weimar, ou de la réponse de Washington à une tentative britannique de s’allier avec la Russie. Madrid, en fait, s’est arrêté juste avant la guerre pour maintenir Barcelone et son arrière-pays liés à une union.

Avec le recul, le triomphalisme de l’Occident a détaché la Russie de la prétention d’être une puissance occidentale – un alignement dont les racines remontent au règne de Pierre le Grand – l’encourageant à s’identifier à un Orient renaissant qui rejette la politique des blocs et insiste sur l’égalité souveraine de ses membres.

L’Orient, en substance, adhère à l’internationalisme souverain que l’ONU a célébré immédiatement après la Seconde Guerre mondiale. Son soutien à ce mode de relations aplati est une réaction à une légère augmentation de la volonté politique de l’Occident d’imposer des valeurs universelles – en multipliant les interventions si nécessaire – sous la rubrique des droits de l’homme.

Bien que ces idéaux semblent acceptables dans l’abstrait, l’Occident est souvent accusé de s’approprier des idéaux pour poursuivre des ambitions géopolitiques plus larges, générant deux poids, deux mesures dans une application partielle et sélective.

Selon ce point de vue, l’Occident a délégitimé – ou du moins créé une hiérarchie – d’autres systèmes de valeurs à un point tel que les puissances montantes peuvent souhaiter risquer la guerre plutôt que de se soumettre à l’intimidation morale et à la condamnation qui accompagnent le non-respect des scripts occidentaux, ce qui signifie que le système actuel risque d’aggraver plutôt que d’entraver les conflits mondiaux.

La perception de la menace par la Russie a peut-être été exagérée, mais ce qui compte en diplomatie, c’est la façon dont un protagoniste voit le monde et non la façon dont l’Occident voudrait qu’il le voie. Les principaux acteurs occidentaux savaient que l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN – formulée comme un objectif dans l’amendement constitutionnel de 2019 – serait la plus épaisse des lignes rouges pour Moscou, un défi direct à ses intérêts, mais elle est restée prête à plier jusqu’au dernier Ukrainien.

Il y a de fortes raisons de penser que la démocratie vaut la peine d’être défendue par les armes, quelles que soient ses décisions erronées, mais de tels arguments de moralité tombent à plat lorsqu’ils risquent d’induire des guerres mondiales ou des menaces nucléaires. Bien que les normes internationales aient sans aucun doute été compromises, elles ont sans doute été transgressées, ni plus ni moins que les décisions américaines d’envahir le Vietnam ou l’Irak.

Dans le passé, de telles déclarations auraient été considérées comme anodines, mais aujourd’hui – à l’apogée du monopole idéologique du libéralisme – elles sont signalées comme du haw-hawisme. Avec le recul, la guerre froide a inculqué à l’Occident une humilité épistémique qui s’est évaporée depuis longtemps.

Les prémisses politiques deviennent des normes juridiques, qui sont finalement traitées comme des lois naturelles, obligeant les nations qui n’ont pas réussi à se développer de la même manière à déduire leur statut de subordination.

Le résultat n’a pas seulement été une monoculture à l’intérieur et de l’orgueil à l’étranger, mais aussi une naïveté mieux résumée par l’espoir que la guerre puisse être interdite, ou que les trois anciennes civilisations de l’Eurasie – la Chine, la Russie et l’Iran – soient vouées à disparaître dans un ordre libéral sans limites. Le fanatisme est tel que lorsque les événements s’écartent des théories, les premières sont dénigrées plutôt que les secondes révisées.

Derrière des idéaux mièvres se cache la vanité selon laquelle le monde partage une trajectoire occidentale ; que la rationalité telle qu’elle est conçue par les Occidentaux est conçue et déployée à l’identique par d’autres ; qu’il s’agit d’un principe unificateur. Pourtant, la rationalité sous-tend plusieurs systèmes politiques – autoritaires, communistes, hybrides, etc. – qui sont tous capables d’exercer ou d’imposer des versions très différentes de la réalité.

L’Occident est actuellement pris entre deux chaises, échouant soit à commencer la construction d’un État mondial – avec les compromis politiques qu’un tel projet impliquerait – soit à se retirer dans un libéralisme de clocher qui reconnaît ses idéaux comme historiquement et géographiquement contingents.

Au lieu de cela, il se trouve dans un no man’s land dans lequel les institutions mondiales, dans la mesure où elles existent, rejettent l’hégémonie occidentale même lorsqu’elles l’utilisent, ce qui rend l’utilisation de la puissance de feu militaire très attrayante pour les puissances émergentes qui n’ont pas les mêmes ressources de soft power à exploiter.

Au cœur du conflit ukrainien se trouve une tension sur la façon dont la politique est conçue. Les Russes souscrivent à un ordre ancien dans lequel la res publica naît de la volonté d’un peuple de tuer ou de mourir à sa place. L’acte de prendre des vies ou de les donner – d’où l’importance du sacrifice dans la plupart des États à un stade précoce – identifie une communauté : le peuple et ses mythes sont dans une certaine mesure l’œuf et la poule de la souveraineté.

Deux soldats attachent un drapeau sur un véhicule militaire russe. Photo : Handout / Ministère russe de la Défense

À la base, il s’appuie ouvertement sur la violence comme outil coercitif. L’Occident est passé de cet ordre à un ordre plus pacifique – qui dépend de formes de coercition beaucoup moins violentes – dans la période d’après-guerre, arguant de manière excentrique que les conceptions conventionnelles du pouvoir étaient obsolètes après la dévastation des deux guerres mondiales et la partition du conflit qui a suivi.

Il l’a fait en remplaçant les restrictions explicites de la foi chrétienne par ses modèles souples comme le « Weltburgerbund » de Kant et l’appel de Habermas à un ordre cosmopolite qui établissait un régime de « gouvernance mondiale sans gouvernement mondial » – des changements de registre qui rendaient les normes occidentales plus faciles à exporter sans inviter les accusations d’impérialisme.

Plutôt que de se livrer à un jugement sur le cadre le plus vrai ou le plus moralement louable, il convient de souligner que l’Occident perd son avantage moral s’il se montre plus disposé à risquer une guerre nucléaire que d’établir un cadre qui reconnaisse la validité des préoccupations qui découlent de différents systèmes politiques.

S’il reste possible de se demander si les cultures post-chrétiennes des démocraties occidentales peuvent servir de paradigmes pour le reste du monde, une image réaliste de la résolution des conflits doit concevoir une diversité d’ordres sociopolitiques en termes de pluralité méta-éthique ou méta-politique si l’on veut redécouvrir les résolutions à la pointe d’un stylo plutôt qu’à la pointe d’un fusil.

Henry Hopwood-Phillips est le fondateur de Daotong Strategy (DS), un cabinet de conseil politique basé à Singapour. Il a contribué à plusieurs magazines, dont American Affairs, Spectator et The Critic dans le passé


 

Le spectre d’une défaite militaire en Ukraine

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Personne n’aurait pu imaginer que l’Ukraine se retrouverait dans la situation actuelle, où elle a perdu sa place dans les priorités occidentales et où son sort ne préoccupe plus les cercles politiques occidentaux, du moins pas comme au début de la crise.

Cela n’est cependant pas surprenant, car les priorités changent et l’attention de l’opinion publique et des cercles politiques se déplace en fonction de l’évolution et des conséquences des événements. Il en va de même pour l’attention des médias, qui évoluent rapidement.

Lors de la récente conférence de Munich sur la sécurité, il est apparu clairement que l’Ukraine n’a aucune perspective positive dans sa guerre contre la Russie et que, par conséquent, les projecteurs sur cette guerre sont en train de s’éteindre.

L’événement le plus marquant de la guerre en Ukraine est le retrait de l’armée ukrainienne de la ville d’Avdiivka, l’une des villes stratégiquement importantes de l’est de l’Ukraine, qui est tombée complètement aux mains des forces russes.

Ce qui est frappant dans ce retrait, c’est que, selon les médias, il a dégénéré en déroute un jour avant que le commandant en chef des forces armées ukrainiennes, Oleksandr Syrskyi, n’ordonne l’évacuation de la ville. Cela laisse présager des indicateurs négatifs pour la situation de l’armée ukrainienne sur le terrain.

La situation sur le terrain montre également que l’armée ukrainienne souffre depuis des mois d’un manque de munitions et d’équipements et que le moral des troupes s’est dégradé, ce qui a conduit à une stagnation puis à une détérioration de la situation en faveur de l’armée russe.

L’armée russe est passée de la défense des territoires qu’elle contrôlait à l’attaque, essayant de conquérir de nouveaux territoires ukrainiens ou de reprendre ce que l’armée ukrainienne contrôlait auparavant.

Cela signifie que le cours des opérations sur le terrain a changé en faveur de l’armée russe, ce qui explique les déclarations des responsables ukrainiens selon lesquelles leur armée est confrontée à des conditions difficiles sur le terrain. Au niveau politique, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, a clairement indiqué que les autorités ukrainiennes n’ont pas l’intention de reconnaître leur défaite et de céder les territoires qu’elles considèrent comme les leurs au nom du rétablissement de la paix dans le pays.

Il est intéressant de noter que la partie ukrainienne mentionne la capitulation, mais sous la forme d’un rejet et d’une dénonciation, ce qui laisse entrevoir la situation précaire de l’armée ukrainienne sur le champ de bataille. Cela a incité le représentant permanent de la Russie auprès des Nations Unies, Vasily Nebensya, à déclarer au Conseil de sécurité qu’il était encore possible de préserver l’Ukraine en tant qu’État, mais que pour ce faire, elle devait devenir neutre et cesser de représenter une menace pour la Russie.

Il semble également que la situation de l’armée ukrainienne ne préoccupe plus les Américains, qui cherchent plutôt un moyen de sauver la face ou un bouc émissaire pour expliquer ce qui s’est passé en Ukraine. Le président Biden a expliqué que la récente défaite des forces ukrainiennes à Avdiivka s’expliquait par le retard pris par le Congrès dans l’approbation de l’important contrat d’armement que son administration avait proposé pour soutenir la capacité des forces ukrainiennes à poursuivre le combat et à défendre leurs positions. La Maison-Blanche tente donc de faire porter la responsabilité de l’échec en Ukraine au GOP plutôt qu’au président Biden, alors que le soutien à l’Ukraine existe depuis environ deux ans et n’a diminué qu’au cours des derniers mois, en particulier depuis le déclenchement de la guerre à Gaza.

De toute évidence, l’administration Biden cherche à assumer le moins possible la responsabilité de l’échec attendu en Ukraine et à œuvrer à la poursuite des combats, ne serait-ce que dans un cadre défensif et tactique, en empêchant l’armée ukrainienne de s’effondrer avant la fin de l’élection présidentielle américaine. Après tout, la Maison Blanche est consciente de l’impact catastrophique qu’aurait une défaite en Ukraine sur les espoirs électoraux du président Biden.

L’échec militaire en Ukraine pourrait avoir des répercussions sur le président Biden, qui a subi une série de revers tout au long de son mandat, du retrait humiliant de l’armée américaine d’Afghanistan à la gestion ratée de la crise de Gaza, en passant par l’enlisement de plusieurs dossiers, au premier rang desquels l’Ukraine, l’Iran, la dissuasion de la milice Houthi et le déclin de l’influence américaine dans plusieurs régions du monde, notamment en Irak, où les forces américaines ont été attaquées plusieurs fois d’affilée.

Enfin, l’Ukraine est devenue un point de discorde entre démocrates et républicains américains, et le dernier recours est d’acquérir des missiles ATACM américains de longue portée (300 km) pour tenter de stopper l’attaque russe et de remonter le moral de l’armée ukrainienne.

Cependant, la décision de la Maison Blanche d’envoyer ces missiles à l’Ukraine pourrait être le dernier clou dans le cercueil des chances d’élection de Biden en novembre prochain, étant donné la réaction furieuse de la Russie, surtout si l’Ukraine attaque des zones situées au fin fond de la Russie avec ces missiles. Biden veut donc que l’armée ukrainienne continue à se battre, non pas pour gagner ou même pour défendre le territoire qu’elle contrôle, mais pour empêcher la capitulation et l’effondrement du terrain, ce qui signifierait une défaite militaire dont Biden paierait certainement le prix.