La prochaine première ministre britannique, Liz Truss, se dit prête à l’anéantissement nucléaire mondial
samedi 27 août 2022
par Chris Marsden Blog ANC
À la fin des années 70, pour les
jeunes adolescents français les petites anglaises avaient une réputation
sulfureuse, affriolantes et désirables. Puis madame Thatcher est passé
par là et d’un seul coup la réalité est devenue incontournable. Homme ou
femme, en Grande-Bretagne comme en France, pour être élu et défendre
les intérêts de la classe des très riches tous les moyens sont bons.
Celle qui brigue le poste de Premier(e) Ministre, Liz Truss, se dit
prête à appuyer sur le bouton et déclencher un holocauste universel.
Peut-on la croire ?
Ce qui me semble extrêmement dangereux c’est que l’idée est dans l’air.
Le système capitaliste ne souhaite pas la paix. Alors, détruisons ce
système mortifère ! (JP-ANC)
Liz Truss, ministre des
Affaires étrangères et très probablement prochaine première ministre
conservatrice du Royaume-Uni, a déclaré qu’elle lancerait une frappe
nucléaire sur la Russie, même si le résultat serait un « anéantissement
global ».
Lors d’un débat du Parti conservateur à Birmingham mardi pour
déterminer qui remplacera Boris Johnson, John Pienaar du Times Radio a
dit à Truss que si elle devenait première ministre, on lui montrerait
rapidement les procédures de lancement de missiles nucléaires depuis les
sous-marins britanniques Trident. « Ce serait l’annihilation
mondiale », a déclaré Pienaar. « Je ne vous demanderai pas si vous
appuieriez sur le bouton, vous direz oui, mais face à cette tâche, je me
sentirais physiquement malade. Comment vous sentez-vous devant cette
pensée ? »
Avec des yeux morts et une expression sans émotion, Truss a répondu : « Je pense que c’est un devoir important de la première ministre et je suis prête à le faire ».
’Je suis prête à le faire’, a-t-elle répété, sollicitant une salve d’applaudissements de la part des conservateurs réunis.
La réponse robotique et instantanée de Truss doit sonner l’alarme
pour les travailleurs du monde entier sur la proximité de l’Armageddon
nucléaire.
Elle s’exprime en tant que l’un des principaux faucons parmi les
puissances de l’OTAN à soutenir la guerre par procuration contre la
Russie menée par le régime ukrainien et en tant que propagandiste de
premier plan pour un conflit militaire direct avec Moscou.
En février, le président russe Vladimir Poutine a placé les forces
nucléaires russes en état d’alerte maximale, son porte-parole Dmitri
Peskov citant les remarques « inacceptables » de « divers représentants à
divers niveaux » sur d’éventuels « affrontements » entre l’OTAN et
Moscou : « Je n’appellerais pas les auteurs de ces déclarations par
leur nom, bien qu’il s’agisse de la ministre britannique des Affaires
étrangères ».
Truss avait récemment déclaré à Sky News : « Si nous n’arrêtons
pas Poutine en Ukraine, d’autres pays seront menacés : les pays baltes,
la Pologne, la Moldavie, et cela pourrait se terminer par un conflit
avec l’OTAN ».
Mais Truss parle également au nom de toute la classe dirigeante
britannique. Non seulement son rival au leadership, Rishi Sunak, aurait
également répondu par l’affirmative, mais aussi tout autre membre de
l’establishment politique britannique qui brigue la plus haute fonction
du pays.
Depuis que les tensions avec la Russie et la Chine ont commencé à se
faire attiser par Londres et Washington, il est devenu nécessaire de
déclarer ouvertement qu’on est prêt à déclencher une guerre nucléaire.
Cela a commencé en 2015 lorsque Jeremy Corbyn a remporté pour la
première fois la direction du parti travailliste sur la base, avant
tout, de son opposition à la guerre en Irak et de son rôle dirigeant
dans la coalition « Arrêtez la guerre » (Stop The War).
Quand on lui a demandé, s’il devenait premier ministre, est-ce qu’il
donnerait l’ordre aux chefs de la défense du Royaume-Uni d’utiliser le
système d’armes nucléaires Trident, Corbyn a répondu par la négative.
Par la suite, il a fait l’objet d’attaques incessantes, le parti
conservateur, les Blairites et les personnalités militaires le déclarant
inapte à exercer ses fonctions.
Et il a capitulé sur tous les fronts.
Lors d’un débat le 18 juillet 2016, la première ministre
conservatrice Theresa May, alors nouvellement installée, a déclaré
qu’elle était prête à lancer une frappe nucléaire dans une flèche
dirigée contre Corbyn. Le remplaçant de Corbyn à la tête du Labour, Sir
Keir Starmer, a également été interrogé par la BBC le 10 février de
cette année pour savoir s’il serait prêt à utiliser des armes nucléaires
et a répondu : « Bien sûr ».
C’était juste 14 jours avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Starmer s’exprimait à la suite d’une réunion avec le secrétaire
général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, à propos de laquelle il a
commenté : « Quels que soient les défis que nous avons avec le
gouvernement, quand il s’agit de l’agression russe, nous sommes
solidaires ».
C’est la signification internationale plus large de la déclaration de
Truss pour la guerre nucléaire. Non seulement est-ce la politique de
l’impérialisme britannique, c’est la politique activement poursuivie par
toutes les puissances de l’OTAN, les États-Unis en tête.
Le sommet de l’OTAN tenu en juin à Madrid, en Espagne, a adopté un
document de stratégie qui décrit les plans pour militariser le continent
européen, intensifier la guerre avec la Russie et préparer la guerre
avec la Chine. Il contenait l’engagement spécifique à « fournir la gamme complète des forces » nécessaires « pour des combats de haute intensité contre des concurrents pairs dotés de l’arme nucléaire ».
La Russie et la Chine ont été désignées respectivement comme une
« menace » et un « défi » pour « nos intérêts ». La « posture de
dissuasion nucléaire » de l’OTAN, centrée sur les armes nucléaires
américaines « déployées en avant en Europe », est placée au centre d’une
stratégie qui vise à « dissuader, défendre, contester et repousser dans
tous les domaines et toutes les directions ».
Les personnalités militaires de l’OTAN se sentent déjà libres de
discuter ouvertement de la possibilité d’une guerre nucléaire. Lors d’un
symposium en juin, le chef de la Luftwaffe allemande, Ingo Gerhartz, a
déclaré : « Pour une dissuasion crédible, nous avons besoin à la fois
des moyens et de la volonté politique de mettre en œuvre la dissuasion
nucléaire, si nécessaire », avant d’ajouter : « Poutine, ne nous cherche pas ! ».
Le 13 août, Hamish de Bretton-Gordon, l’ancien commandant du Régiment
interarmées chimique, biologique, radiologique et nucléaire du
Royaume-Uni, a écrit dans le Telegraph pour insister :
« La Grande-Bretagne doit se préparer à une guerre nucléaire ».
Truss a traduit ces discussions en grognements fascistes qui ont fait d’elle la coqueluche du parti conservateur.
Comment les travailleurs doivent-ils répondre à une telle folie politique ?
Les armes nucléaires modernes sont bien plus puissantes que celles
larguées sur Hiroshima et Nagasaki. Une cinquantaine seulement
pourraient tuer 200 millions de personnes, soit les populations
combinées de la Grande-Bretagne, du Canada, de l’Australie, de la
Nouvelle-Zélande et de l’Allemagne. Mais ce ne serait que le début.
Les modèles de l’université Rutgers prévoient qu’une guerre nucléaire
à grande échelle provoquerait des incendies massifs et des nuages de
suie qui bloqueraient le soleil et dévasteraient les cultures. L’ère
glaciaire nucléaire qui s’ensuivrait entraînerait la famine pour les
trois quarts de la population et tuerait jusqu’à cinq milliards de
personnes en deux ans. Même un conflit nucléaire « plus petit »
entraînerait probablement 2,5 milliards de morts.
Il est tout d’abord nécessaire d’accepter ce qui a longtemps été
considéré comme impensable : les puissances impérialistes envisagent
activement d’utiliser des armes qui détruiraient l’humanité et peut-être
toute vie sur terre.
Le 26 mars, Joseph Kishore et David North ont décrit avec justesse cette situation dans un article du WSWS intitulé « Franchir le Rubicon psychologique ». Il mettait en garde contre le conflit ukrainien :
- « Le monde est amené au bord d’une catastrophe
nucléaire par les États-Unis et les gouvernements des autres grandes
puissances de l’OTAN, dont les dirigeants prennent des décisions en
secret tout en dissimulant les véritables intérêts géopolitiques et
économiques au nom desquels ils agissent. »
Deuxièmement, il faut comprendre les causes profondes de la guerre.
Les grandes puissances impérialistes ont entrepris un nouveau partage du
monde. Les gouvernements américain et européens ne répondent pas à un
acte d’agression russe « non provoqué ». Ils cherchent à achever une
politique d’encerclement militaire menée depuis la dissolution de l’URSS
en décembre 1991, préparatoire à la chute du régime Poutine et à la
prise de contrôle des vastes ressources de la Russie pour le compte du
capital financier.
La seule force sociale qui peut arrêter cette éruption
catastrophique de violence militaire impérialiste est la classe ouvrière
internationale, en menant une lutte contre le capitalisme et pour le
socialisme.
Dans sa résolution adoptée à son Congrès de 2022 sous le titre
« Mobilisez la classe ouvrière contre la guerre impérialiste ! », le
Parti de l’égalité socialiste des États-Unis explique :
- À son niveau le plus fondamental, la guerre
impérialiste découle des contradictions de base du système capitaliste –
celles entre une économie mondiale et la division du monde en
États-nations rivaux, dans lesquels la propriété privée des moyens de
production est enracinée. Ces mêmes contradictions, cependant,
produisent la base objective de la révolution socialiste mondiale. Déjà,
les conséquences de la guerre intensifient énormément les conflits
sociaux aux États-Unis. L’impact de l’inflation galopante alimente la
lutte des classes, y compris l’éruption de grèves et de protestations
parmi les travailleurs de l’automobile, les travailleurs des compagnies
aériennes, les travailleurs de la santé, les éducateurs, les
travailleurs des services et d’autres sections de la classe ouvrière.
Cela est vrai au niveau international. Au Royaume-Uni, par exemple,
une vague de grèves est en train de prendre de l’ampleur et peut balayer
Truss et les conservateurs du pouvoir.
Il est nécessaire dans chaque pays que les travailleurs mènent la
lutte de classe sur la base d’un programme socialiste, en se mobilisant
contre la guerre et contre tous les efforts de la classe dirigeante,
entrepris par ses gouvernements et ses partis ainsi que la bureaucratie
syndicale, pour leur faire payer pour la guerre par des réductions de
salaire, des pertes d’emploi et des hausses de cadence.
Avant tout, les travailleurs doivent se tourner consciemment vers
leurs frères et sœurs de classe pour mener un combat commun contre
l’ennemi commun. Le choix ne pourrait être posé de manière plus
frappante : guerre mondiale et anéantissement nucléaire ou révolution
socialiste mondiale.