Aujourd’hui je n’ai pas envie de dire ce que je pense à toute cette
presse de merde, celle de gôche, celle dite communiste et qui n’en finit
pas de censurer, de diffamer les communistes, les vrais pour mieux
soutenir les expéditions de l’empire, voilà votre victoire, regardez ce
cadavre il est vôtre, vous avez accompagné ceux qui voulaient détruire
ce combattant talentueux et sincère. Vltchek, en bout de course comme un
cerf traqué par une meute qu’il a voulu affronter jusqu’au bout. A ses
côtés tous les damnés de la terre et ceux qui comme les Cubains ne
renoncent pas à soigner les plaies que votre civilisation de l’horreur
leur inflige, pendant que, vous les gavés, vous prétendez leur donner
des leçons de maintien. Et je ne parle pas seulement du capital,
malheureusement… (note de Danielle Bleitrach, traduction de Diane
Gillard)
La mort d’Andre Vltchek, un combattant passionné pour la vérité
Par Edward Curtin, le 17 septembre 2020
« Si le monde est sens dessus dessous comme il l’est actuellement, ne
devrions-nous pas le retourner pour qu’il se tienne droit ?
Eduardo Galeano, Sens dessus dessous (1998)
Pendant des décennies, André Vltchek, un journaliste et un artiste de
la vieille école (mais un jeune homme) qui a parcouru le monde à la
recherche de la vérité et qui s’est toujours tenu droit, a essayé de
retourner le monde et d’encourager les gens à se révolter contre
l’injustice.
En cette époque de reporters en chambre, il s’est distingué par son audace et son courage infatigable. Il l’a dit sans détour.
Cela a irrité certaines personnes et certaines publications pseudo de
gauche, qui ont senti en lui une férocité sans baratin et un flair pour
l’hypocrisie qui les effrayait, alors ils ont cessé de publier ses
écrits. Il est allé là où tant d’autres craignaient d’aller, et il a
parlé à des gens dans des lieux qui étaient souvent victimes de la
violence impérialiste occidentale. Il a défendu les sans-défense et les a
encouragés à se défendre.
Maintenant, il est mort. Il est mort sur la banquette arrière d’une
voiture de location avec chauffeur lors d’un voyage de nuit vers
Istanbul, en Turquie. Il dormait, et lorsque sa femme a tenté de le
réveiller à leur arrivée à l’hôtel, elle n’a pas pu. Il avait 57 ans.
Qu’il dorme en paix, mais que résonnent ses paroles, ses cris
passionnés pour la justice et la paix dans un monde de prédateurs
violents.
Ceux qui l’ont connu, lui et son travail, éprouvent un immense
sentiment de perte. Son ami et collègue Peter Koenig lui a écrit un
adieu émouvant.
Comme le dit Koenig, Vltchek a toujours défendu ceux qui, dans le
monde entier, sont considérés comme des non-personnes jetables, les
Autres, les non-Blancs, victimes des guerres occidentales, tant
militaires qu’économiques, dans des endroits comme la Papouasie
occidentale, l’Irak, la Syrie, l’Afrique, etc. Il était agressif, une
agressivité tout à fait justifiée, à l’égard des médias occidentaux
partiaux et de leurs élites qui donnent toujours des leçons au reste du
monde à propos de leurs réalités.
Récemment, il était aux États-Unis, et voici ce qu’il a écrit :
Mais remarquez une chose : ce sont eux qui nous disent, de nouveau,
qui disent au monde ce qu’il est et ce qu’il n’est pas ! Vous
n’entendriez jamais de telles déclarations en Afrique, au Moyen-Orient
ou en Asie. Là-bas, les gens savent parfaitement de quoi il retourne,
s’il s’agit d’une question de race ou non !
Je viens de passer deux semaines aux États-Unis, où j’ai analysé les
crises profondes de la société américaine. J’ai visité Washington DC,
Minneapolis, New York et Boston. J’ai parlé à de nombreuses personnes
dans tous ces endroits. Ce que j’ai observé, c’est de la confusion et de
l’ignorance totale du reste du monde.
Les États-Unis, un pays qui brutalise notre planète depuis des
décennies, est absolument incapable de se voir dans le contexte du
monde. Les gens, y compris ceux des médias, sont scandaleusement
ignorants et provinciaux.
Et ils sont égoïstes.
J’ai demandé à plusieurs reprises : « Les vies des Noirs
comptent-elles partout dans le monde ? Ont-elles de l’importance en
République démocratique du Congo et en Papouasie occidentale ? » Je le
jure, je n’ai reçu aucune réponse cohérente.
Quelqu’un doit leur dire… Quelqu’un doit les forcer à ouvrir les yeux.
Il y a quelques années, j’ai été invité en Californie du Sud pour
montrer mon travail documentaire réalisé en Afrique (mon long métrage
documentaire Rwanda Gambit, sur les génocides déclenchés par
l’Occident au Rwanda et plus tard en République démocratique du Congo),
où des millions de Noirs meurent afin que la grande majorité des Blancs
américains vivent dans une opulence de porcs.
Mais avant d’être autorisé à présenter mon film, on m’a averti :
« Souvenez-vous, les gens ici sont sensibles. Ne montrez pas trop de
réalité brutale, cela pourrait les perturber. »
En entendant cela, j’ai failli quitter l’événement. Seul le respect que j’avais pour l’organisateur m’a incité à rester.
Maintenant, je suis convaincu : il est temps de les forcer à regarder
; à voir les rivières de sang que leur paresse, leur égoïsme et leur
avidité ont déclenchées. Il est temps de les forcer à entendre les cris
d’agonie des autres.
Mais comme chacun le sait, il est presque impossible de forcer les
gens à ouvrir les yeux et les oreilles quand ils sont fermement décidés à
ne pas le faire. André s’y est efforcé, et sa frustration a cru avec
ces efforts qui semblaient tomber dans l’oreille d’un sourd.
Il était un combattant acharné, mais il était aussi rempli d’amour.
Son amour pour les peuples et les cultures du monde était
profond. Comme Albert Camus, il a essayé de servir à la fois la beauté
et la souffrance, la plus noble des vocations. Amoureux de la
littérature et de la culture, le meilleur jamais produit de l’art et de
la beauté, il était consterné par la façon dont tant de gens en Occident
étaient tombés dans le puits de l’ignorance, de l’analphabétisme et
tellement sous la dure emprise de la propagande que « ce qui manque,
c’est la vie. L’euphorie, la chaleur, la poésie et, oui — l’amour — y
sont extrêmement rares ».
Il sentait, et il l’a dit, qu’aux États-Unis le nihilisme régnait aux
sous le consumérisme compulsif et la négation de la violence qu’ils
infligent aux gens à travers le monde. C’était de l’égoïsme à l’état
pur. Moi, moi, moi. C’était, selon lui, la mort de l’âme, le contraire
de toute la religiosité ostensible, qui est le masque du désespoir. Il a
écrit :
« Il faut arrêter ça. Je le dis parce que j’aime cette vie, la vie
qui existe encore en dehors du monde occidental ; elle m’enivre, elle
m’obsède. Je la vis pleinement, avec grand plaisir, en profitant de
chaque instant. La poésie, la musique, la grande littérature, celles
qu’il aimait lorsqu’il combattait pour la paix sur les barricades. »
Je vous invite à lire son article Love, Western Nihilism and Revolutionary Optimism (Amour, nihilisme occidental et optimisme révolutionnaire — apparemment pas traduit).
C’était un homme rare et courageux. Sonnons des cloches en son honneur.
Voici un poème de Kenneth Rexroth pour André, le combattant au cœur de poète :
Pas un mot
Les arbres se taisent
Dans la chaleur…
Dénouez votre cœur
Dites-moi vos pensées
Ce que vous étiez
Et ce que vous êtes…
Comme les cloches, personne
N’a déjà sonné
Philosophe, cinéaste, journaliste d’investigation exceptionnel, il
manquera à des millions d’anonymes parce qu’il a combattu pour la
justice et la dénonciation des forces du colonialisme, passées et
présentes.
Il est mort subitement au milieu de la nuit du 22 septembre alors
qu’il voyageait dans une voiture avec chauffeur avec sa femme à Samsun
sur la mer Noire en Turquie à Istanbul. Quand ils sont arrivés tôt le
matin à l’hôtel, sa femme a essayé de le réveiller, mais il était mort.
La police turque a ordonné une analyse médico-légale de sa mystérieuse
mort inattendue.
Il a dénoncé les atrocités commises de l’Afghanistan à la Syrie, en
Irak, en Iran, au Soudan, en Argentine, au Chili, au Pérou, à Hong Kong
et au Xinjiang. Non seulement il a exposé la cruauté des élites
dirigeantes par la plume, il a voyagé pour voir ce qui était vrai, ce
qui était faux, ce qui était horrible. Suivre ses traces conduit à une
litanie inquiétante de l’ « horreur ».
Ce n’est que récemment à Hong Kong qu’il a accordé une interview
vidéo personnelle de 20 minutes à DotDotNews. Voici un lien vers André
Vltchek racontant sa propre histoire. C’est vraiment une histoire
remarquable:
Dans l’interview, il déclare : « Je me bats contre tout ce qui
pourrait être décrit comme de l’impérialisme… comme quelque chose qui
renverse les gouvernements des gens … impose de force une idéologie aux
gens… fondamentalement, ce que l’Occident fait depuis des décennies et
des siècles à travers la domination colonialiste, puis impérialiste du
monde … Donc, je vais partout où les pays sont détruits.
Au Timor oriental, où il filmait en 1996, l’armée indonésienne l’a
arrêté et pendu au plafond et torturé pendant 24 heures. Par la suite,
il n’a pas pu utiliser son bras gauche pendant un an. Il faisait un
reportage sur le coup d’État indonésien soutenu par les États-Unis en
1965 dans un film intitulé « Downfall », produit et réalisé par André.
Il lui a fallu 15 ans pour terminer le film au cours de laquelle il a
été condamné à mort à deux reprises. Il est probablement l’un des seuls
journalistes au monde dont le corps est rempli de cicatrices de combat
par la torture et /ou la proximité directe des zones de combat.
Dans ses mots: « L’état horrible du monde que j’ai vu dans tous les
pays dans toutes les parties du monde dans plus de 160 pays … Je suis
convaincu que seule la lutte contre l’impérialisme peut sauver des
milliards d’êtres humains qui sont torturés et détruits depuis tous ces
siècles… L’impérialisme occidental est le seul problème de cette
planète.
RIP André Vltchek.