Le
rapport de la Confédération syndicale internationale (CSI) est
accablant, il révèle une vérité connue de tous : le Qatar, ami des
Sarkozy et Hollande, est le pays de l'esclavage moderne, 1 400 ouvriers
immigrés sont déjà morts sur les chantiers du
mondial 2022.
Combien vaut la vie d'un ouvrier Népalais, quelle
est la valeur des droits de l'Homme ? Bien faible à voir la discrétion de nos dirigeants sur leur situation révoltante au Qatar, eux si prompts à s'indigner quand
leurs intérêts sont en jeu, en Ukraine, en Libye, en Syrie ou au Mali.
Dans
des conditions de corruption à peine dissimulées, le Qatar a obtenu en
2010 l'organisation de la Coupe du monde
de football 2022, avec la complicité des grandes puissances. Tout
comme le gouvernement Sarkozy lui avait offert sur un plateau le
Paris-Saint-Germain.
Quatre
ans après, le rapport de la CSI peut ouvrir les yeux des hypocrites :
« Le dossier contre le
Qatar » révèle des violations des droits des travailleurs à une
échelle sans précédent dans l'organisation des grands événements
sportifs, au mépris des libertés, de la vie des
ouvriers.
Le
Qatar compte 1,5 millions de migrants sur 2 millions d'habitants. Une
armée d'esclaves au service d'une caste
dominante, dans le pays au PIB par habitant le plus élevé du monde.
Un résumé édifiant de ce que nos dirigeants cautionnent au nom des
« jeux du cirque » modernes :
Le « kafala », un système de parrains contre les droits des migrants
Les
ouvriers migrants travaillant sur les chantiers sont privés de toute
liberté dans le cadre du système du
« kafala » : tout ouvrier migrant est sous la responsabilité d'un
« kafil », un parrain qui a contrôle total sur les mouvements du
travailleurs, dans le pays et à
l'extérieur.
Le « kafil » peut confisquer le passeport de l'ouvrier – c'est le cas de 90 % des migrants – le priver de
toute protection juridique.
Il est alors à la merci des sinistres « camps de détention »,où sont entassés plusieurs centaines d'ouvriers
dans une même pièce, soumis à l'arbitraire, sans conseiller juridique ni satisfaction des besoins les plus élémentaires.
Le travail forcé, la norme au Qatar
Le régime de travail forcé est
la norme pour les migrants au Qatar. Quasiment tous les ouvriers
immigrés sont passés par une « agence de recrutement » qui charge
les migrants népalais, indiens, philippins, indonésiens de 1 000 à 10
000 $ par tête.
Cette
situation endette les migrants à des taux exorbitants. Misérables au
pays rêvant de salaires permettant de faire
vivre leurs familles au Népal ou en Inde, ils héritent de dettes qui
les forcent à rentrer dans une situation de dépendance économique
permanente avec leurs employeurs.
Les salaires paraissent attractifs – au minimum 250 $ pour les migrants asiatiques – par rapport au salaire dans le
pays d'origine.
Les chiffres sont trompeurs, une bonne partie du salaire est prélevé par l'employeur pour le logement, la nourriture,
les transports, dans un pays où le coût de la vie est comparable à celui des pays riches.
Sans oublier qu'un tiers (34%) des ouvriers, selon une enquête de l'Inspection du travail qatari (sic)
n'ont eu aucune rémunération ces derniers mois.
L'esclavage au XXI ème siècle : c'est au Qatar que cela se passe !
Les conditions de travail sur les chantiers dépassent celles des pires mines, usines du XIX ème siècle. Des journées
de 8 à 12 heures de travail, entre juin et septembre, sous près de 50 ° à l'ombre.
Et encore ceux-ci apparaissent presque comme des privilégiés face aux travailleurs domestiques. Composés
essentiellement de femmes, celles-ci passent du travail forcé à l'esclavage pur et simple.
Elles
ne sont protégées par aucune loi, souvent privés de nourriture, d'un
logement décent, du moindre salaire,
soumises aux coups, aux tortures, aux viols. L'Ambassade d'Indonésie
accueille chaque jour 5 à 10 travailleurs domestiques, demandant un
refuge pour fuir l'esclavage domestique.
Les conditions de vie ne sont pas meilleures pour les migrants. Cantonnés dans des « camps de travail »,
dans des quartiers à l'écart du reste de la ville, inconnus même des autorités internationales.
Payés
par prélèvement sur salaire, leur logement n'a rien d'un « logement
social » : un taudis d'une
pièce occupé par huit ou dix ouvriers, souvent sans les conditions
sanitaires adéquates. Nombre de logements sont équipés d'eau … salée
pour se laver ou faire la cuisine !
Pour défendre de meilleures conditions salariales, de travail, de vie, bien entendu les migrants n'ont droit à aucune
négociation collective, aucune organisation syndicale.
Tout mouvement de protestation peut conduire à la levée de la protection du « kafil », mettant l'ouvrier à
la merci de l'arbitraire des autorités, lui empêchant même le retour au pays.
Encore plus pervers, le gouvernement qatari a créé un « Qatar National human rights
committee », soi-disant pour enquêter sur les violations des
droits de l'Homme. En réalité, cet organisme vise à identifier les
éléments perturbateurs, protestataire pour mieux les
isoler et les punir.
1 400 ouvriers morts … 4 000 d'ici 2022 ?
Effrayant, le décompte du nombre de morts est pourtant impossible à faire. La CSI part juste des chiffres de pertes
révélés par les ambassades népalaises et indiennes, qui représentent la moitié des ouvriers migrants.
Selon
l'ambassade népalaise, 400 ouvriers migrants sont morts depuis 2010
(dont 191 en 2013). Du côté indien, ce
serait près de 1 000 ouvriers qui seraient morts, à un rythme de 20
travailleurs morts par mois pour l'an dernier. Pour deux pays seulement,
cela fait 1 400 pertes en trois ans.
SELON LES ESTIMATIONS TRÈS PRUDENTES DE LA CONFÉDÉRATION SYNDICALE INTERNATIONALE, 4000 OUVRIERS IMMIGRÉS POURRAIENT ÊTRE VICTIMES DE CE SYSTÈME D'ESCLAVAGE MODERNE, SACHANT QUE 500.000 OUVRIERS SUPPLÉMENTAIRES DEVRAIENT ÊTRE TRANSPORTÉS AU QATAR D'ICI 2018.
Par
rapport aux autres grands événements mondiaux, la comparaison est
effarante : la coupe du monde 2010 en
Afrique du sud a fait 2 morts, celle au Brésil en 2014 a fait 7
morts, celle en Russie a déjà causé la perte de 8 ouvriers. Comparés aux
1 400 déjà morts au Qatar, cela donne le vertige.
Les grandes entreprises françaises du BTP complices !
Alors que le Qatar va dépenser au moins 200 milliards de $ en infrastructures – stades, TGV, métro, tramways, centres
commerciaux, villes nouvelles – il rechigne à verser quelques milliers d'euros à près de 1,5 millions d'esclaves modernes.
Parmi les complices de ce système, les grandes entreprises françaises qui font la cour à l'émirat : Bouygues,
Vinci mais aussi Keolis (filiale de la SNCF) sont en lice pour de gros contrats liés à l'organisation du mondial 2022.
La
CSI propose de « peser » sur le Qatar pour obtenir un assouplissement
des conditions d'exploitation au
Qatar, la normalisation des relations avec un État gouverné comme
une « monarchie absolue », niant les droits les plus élémentaires des
travailleurs.
Le
rôle des syndicalistes de classe, des communistes est autre : il faut
lancer un vaste mouvement pour pousser
au retrait des entreprises françaises du Qatar ; au boycott du
mondial 2022, et des activités liées au Qatar ; aux sanctions envers cet
Etat qui finance partout dans le monde les
groupes les plus réactionnaires, des activités criminelles contre
les peuples, arabes avant tout.
Boycott,
désinvestissement, sanctions : c'est valable pour le Qatar, enfer des
travailleurs, ne faisons
pas des mirages des « pain et des jeux » modernes une caution pour
la violation la plus ignominieuse des droits des travailleurs.