18 septembre 2018 Blog Le Grand Soir
L’irréductible village andalou est en danger
APPEL : SAUVONS MARINALEDA !
Jean ORTIZ
Une
certaine « mode Marinaleda », à gauche, est plutôt passée, tout comme a
quasiment passé le Chiapas, l’EZLN et le sous-commandant Marcos... Le
« tourisme révolutionnaire », fût-il bien intentionné, solidaire, a
fondu comme neige au soleil et montré ses limites. Le « tourisme
politique » s’évapore, les problèmes restent, retombent souvent dans la
pénombre médiatique, sur ceux qui en souffrent le plus...
Réactiver
les « réseaux solidaires » n’est pas facile. Une fois de plus,
Marinaleda est en danger et il faut la sauver. Sa population, ses élus,
en appellent à une solidarité redoublée.
Juan Manuel Sanchez
Gordillo [photo], maire depuis 1979 de ce « pueblo » (village) andalou
agricole insoumis, de 2 800 habitants, autogéré par sa population, vient
de nous confirmer que, ce qu’il appelle « l’utopie concrète » de
Marinaleda, est une nouvelle fois menacée. En effet, le gouvernement
socialiste andalou de Susana Diaz a perdu le soutien de « la droite
troglodyte ». PSOE et CIUDADANOS viennent de mettre fin à la gestion,
ensemble, pendant trois ans, de la « communauté » (gouvernement
régional). Rappelons que CIUDADANOS, contrairement aux efforts des
médias pour le présenter comme « centriste », reste un parti bien de
droite, à la couenne droitière endurcie. La machine à recycler le
néo-franquisme a tenté de siphonner le parti populaire, pendant que le
PSOE andalou draguait à droite.
Des élections pointent en mars 2019 et chacun veut faire oublier son bilan, et laver plus blanc que blanc.
Le
Parti « Ciudadanos », aux mains aussi propres qu’un fond de poêle,
accuse aujourd’hui ses ex-alliés, socialistes andalous, de corruption...
Un véritable scoop ! Il ne lui manque que les ailes pour voler !!
Les autorités socialistes de la « Junte d’Andalousie » veulent tuer
Marinaleda, un symbole dérangeant, en obligeant les coopérativistes de
Marinaleda à acheter la terre qu’ils ont gagnée de haute lutte, et
qu’ils travaillent collectivement, en usufruit, depuis ; ils refusent
catégoriquement qu’elle soit assimilée à une marchandise, et donc
privatisée.
Souvenons-nous... En 1980 commence, à Marinaleda, la bataille pour la
terre, menée par le SOC (aujourd’hui le SAT)... La terre, de grandes
propriétés à perte de vue, appartient ici au Duc latifundiste de
l’Infantado (17.000 hectares), grand ami du roi. Commencent près de
quarante ans d’occupations de terres par les « jornaleros » (ouvriers
agricoles sans terre), de grèves de la faim massives, de manifestations
réprimées sans ménagement par le « terrorisme social » de la « junte ».
Les militants de Marinaleda s’inscrivent dans une économie sociale et
solidaire, anticapitaliste .
Acculé, le grand duc de
« l’Infantado », finit en 1991 par céder 1200 hectares ; ils sont
achetés par l’Etat et mis à la disposition de la Mairie de Marinaleda
pour une « exploitation coopérative », collective, par les sans terre de
Marinaleda. Une victoire qui entrave encore le gosier de la droite et
des (ex)sociaux-démocrates. Les marinalédistes construisent sur ces
« terres de tous », une coopérative (en 1997) « Marinaleda SCA », « el
Humoso » dotée en 2000 d’une conserverie, pour diversifier la
production, d’un moulin à huile d’olive... (production majoritaire sur
ces terres)
Marinaleda reste emblématique pour sa « démocratie
directe » ; ce sont toutes les AG de la population qui décident,
contrôlent, proposent et évaluent les projets. L’auto-construction a
permis de résoudre le problème du logement. La mairie livre gratuitement
aux maçons improvisés le terrain, le matériel et l’architecte. La
maison terminée, les familles rembourseront 15 euros par mois. Pour 6,5
heures de travail quotidien, chacun, quelle que soit sa responsabilité
gagne le même salaire. 47 €. Les bénéfices sont tous destinés à créer
des emplois, car si le chômage reste à Marinaleda très réduit, c’est
parce que le travail est partagé. Mais il demeure toutefois des jeunes
sans travail, des naufragés de la bulle financière immobilière, souvenir
amer des années PSOE.
Dans l’immédiat, pour sauver Marinaleda, on
peut se solidariser avec ce village rebelle, comme l’ont déjà fait
plusieurs associations, notamment le village Emmaüs-Lescar Pau, en
envoyant messages pétitions, motions, à :
alcaldia@marinaleda.com
Jean ORTIZ