Qu'est ce qu'un "média mainstream"?
                                                                        
                                                                        
    
                                                
                                                
                                                    10 Janvier 2023
                                                                        
                                    ,                                   
                      Rédigé par Réveil Communiste
                                                                        
                                                                        
                
                                                                        
                                                                        
                                                Publié dans
                                                                        
                                                        #Ce que dit la presse,
                                                                        
                                                                        
                                             #Impérialisme,
                                                                        
                                                                        
                                             #Théorie immédiate,
                                                                        
                                                                        
                                             #GQ,
                                                                        
                                                                        
                                             #Mille raisons de regretter l'URSS,
                                                                        
                                                                        
                                             #États-Unis,
                                                                        
                                                                        
                                             #Royaume-Uni,
                                                                        
                                                                        
                                             #l'Europe impérialiste et capitaliste                                                                                                                    
                                                                                                    
                                                                                                    
  
      
    
     
  
 
Qu’est ce qu’un « média mainstream » ?
 
C’est
 un média qui relaye les messages de propagande capitalistes et 
impérialistes, en les présentant comme de l’information objective.
 
On
 le reconnaît notamment à ce qu’il participe aux campagnes mondiales qui
 ciblent un pays non occidental : en 2020 nous avons eu droit à la 
Biélorussie, Hong Kong, le Xinjiang, la Bolivie, et dans un passé récent
 aux campagnes infructueuses contre la Russie, la Corée, la Chine, le 
Venezuela, l’Iran, Cuba, la Syrie, ou victorieuses en Ukraine, en Libye,
 en Birmanie, en Irak, etc. et début 2021, "l'affaire Navalny". Depuis 
le début de la guerre en Ukraine, la campagne anti-russe effrénée et 
délirante.
 
Une
 seule cause anti-impérialiste a eu une certaine ouverture dans les 
médias, mais de moins en moins, celle de la Palestine, sans doute parce 
que la situation est verrouillée, et peut servir à montrer de manière 
répétée et redondante qu’il n’y a pas d’autre alternative à l’Empire que
 la défaite.
 
Ces
 médias peuvent aussi se révéler dans leur participation unanimiste à 
des campagnes politiques considérées par leurs propriétaires comme de 
grande importance, comme la campagne en faveur du oui au TCE en 2005, ou
 contre le Brexit britannique en 2016, et ses suites, et bien sûr la 
campagne belliciste globale de désinformation et de guerre contre la 
Russie depuis le 24 février 2022.
 
Un média mainstream est ou bien : 
 
Un
 média capitaliste, qui appartient à des capitalistes qui le financent 
et dépensent beaucoup d’argent pour ça, et qui fait sous ses diverses 
variantes la promotion idéologique du capitalisme par la diffusion des 
idéologies libérales qui sont variées, mais qui tournent principalement à
 notre époque autour d’un consensus libéral-libertaire qui va allouer 
aux conservateurs traditionalistes le rôle d'une alternative-repoussoir,
 comme les barbons ridicules des comédies de Molière. 
 
Comme
 par hasard, les médias professionnels de droite qui doivent assumer ce 
rôle peu flatteur (le Figaro, certains titres de la presse éco) en 
deviennent un peu plus crédibles que les autres, tant que le 
portefeuille du propriétaire n’est pas directement en jeu.
 
La
 quasi totalité des médias privés, qui ont une notoriété dans le grand 
public, et qui sont bien diffusés sont de tels médias. Il faut remarquer
 que l’essentiel du contenu réel de l'information qui circule dans les 
"réseaux sociaux" consiste en relayage et délayage des produits de ces 
médias globaux ou de leurs filiales locales, ou en "théories 
alternatives" loufoques qui leur servent de faire-valoir.
 
Ou
 bien c’est un média d’État d’un État capitaliste relevant de la sphère 
impériale occidentale où l’information est encore plus verrouillée, et 
qui a surtout une mémoire plus longue : alors que les médias privés 
considèrent souvent qu’en ce qui concerne le communisme la partie est 
gagnée, la messe est dite et qu’il n’y a plus à s’en occuper, les médias
 d’État comme la BBC, Arte ou France Culture organisent la prison 
mémorielle où ils veulent le placer, en falsifiant, salissant, ou 
détournant l’histoire révolutionnaire, et celle du socialisme. Ces 
médias font aussi la promotion des intellectuels gauchisants inoffensifs
 qui ont tour à tour leur moment de célébrité.
 
Et
 un média mainstream c’est de toute manière un média occidental 
(nord-américain, européen, océanien) qui recycle avec une tonalité 
compassionnelle dans le langage des ONG les préjugés occidentaux 
néocoloniaux, et qui est nourri exclusivement par les récits émanant des
 agences de presse occidentales qui produisent la plus grande partie de 
l’information accessible au grand public : Reuters, AP, AFP. Il n’y a en
 dehors de quelques grandes capitales occidentales, à domicile, presque 
plus aucun correspondant étranger attitré de ces médias qui pourrait 
produire une information originale.
 
Ce
 monde des médias gravite autour d’un petit nombre de titres de presse 
ou de stations de radio historiques qui sont considérés comme des 
références de sérieux et d’objectivité, palme qu’ils ne manquent pas de 
se décerner à eux mêmes : le Monde, le New York Times, le Washington 
Post, le Wall Street Journal, le Guardian, Le Financial Times, la BBC, 
etc., et qui ne valent pas mieux que les autres. La seule différence 
étant que leurs rédacteurs principaux ont un statut des notables dans 
les milieux politiques décisionnels occidentaux qui dépasse celui que 
devrait leur apporter le niveau de leur rémunération.
 
Il
 y a des médias capitalistes ou d’État extérieurs à cette sphère 
géographique et culturelle, en Russie, en Chine, et dans la plupart des 
pays non occidentaux, mais leur contenu est jugé suspect à moins qu’il 
ne reflète servilement le contenu des grandes agences de presse 
occidentales, et dans ce cas il aura les honneurs d’une sélection dans 
« Courrier International ». Un média non-occidental n’est coopté dans le
 circuit de l’information mondialisée que s’il soutient les 
interventions de l’Occident dans le monde non-occidental, ou s’il 
reflète des positions caricaturalement réactionnaires pour servir de 
faire-valoir au discours de propagande du premier monde. Depuis la 
guerre en Ukraine, ils sont carrément censurés, illégalement d'ailleurs,
 ou placés en quarantaine sur les réseaux sociaux gérés par les GAFAM.
 
C’est
 pourquoi les médias russes étaient devenus indispensables à qui voulait
 s’informer aujourd’hui en Occident : ce sont les seuls médias 
dynamiques et professionnels qui ont un intérêt objectif partiel à un 
dévoilement du réel. Ce qui explique qu'on les ait fermés 
administrativement dans l'ensemble de cette région du monde.
 
Sinon
 la censure habituelle porte plutôt que sur la publication et l’édition,
 sur la diffusion et le référencement, comme le savent bien les 
animateurs de sites socialistes ou communistes.
 
Le
 point le plus important à retenir est en même temps le plus banal et le
 plus facile à comprendre : l’information sur le réel est aliénée à des 
intérêts privés. 
 
La
 justification libérale de cet état de fait, selon laquelle un média 
honnête aurait plus de succès à long terme (et donc rapporterait 
davantage de profits à son propriétaire) et éliminerait naturellement 
les médias malhonnêtes ne tient pas la route une seule seconde : ces 
médias perdent presque tous de l’argent, à part les nouveaux médias des 
GAFAM, dont l’information est un produit secondaire. A part le fait que 
la concurrence développe au détriment de l'information sérieuse l’espace
 dévolu à la distraction aux faits divers, et aux mythologies de la 
consommation, il est patent que les médias sont les danseuses des grands
 groupes capitalistes, qui leur servent à distiller des messages qui 
favorisent leur intérêts, mais aussi dans leur croisade permanente 
contre tout ce qui n’est pas capitaliste et occidental (après tout ces 
gens peuvent être désintéressés!).
 
Ce
 problème est ancien : les législateurs de la Libération avaient à cet 
effet interdit la concentration dans les entreprises de presse.
 
En
 gros le message mainstream est le suivant : le capitalisme produit des 
marchandises en abondance pour tout le monde, et une société tolérante 
où chacun fait ce qu’il lui plaît, et si ce n’est pas encore le cas 
partout, ce le sera bientôt grâce aux interventions de l’Occident. Nous 
ne vivons pas au sein d’un Empire mais dans une communauté 
internationale respectueuse de tous ses membres, et d’ailleurs cet 
empire qui n’existe pas est l’empire le plus bienveillant de l’histoire,
 auquel on ne peut reprocher qu’une seule chose : ne pas envahir assez 
de territoires pour y apporter la paix et la prospérité. Mais il 
s’affaire pour porter la démocratie et la liberté partout où le 
capitalisme ne règne pas, ou pas autant qu’on le voudrait, comme en 
Chine ou en Russie.
 
Toutes les information dites sérieuses qui sont diffusées doivent concourir à ce récit.
 
Lorsque
 des voix s’éloignent de ce consensus, elles deviennent de moins en 
moins audibles, sont diabolisées par la « théorie de la théorie du 
complot », ou s’enferrent d’elles-même dans des contradictions ou des 
polémiques stériles, parce qu’elles acceptent une partie des présupposés
 de la presse capitaliste en rejetant arbitrairement le reste.
 
Dans
 le passé, les médias appartenaient déjà à des capitalistes, mais 
l’impression reste que des messages opposés au capitalisme pouvaient 
davantage s’y exprimer. C’est en partie une impression fausse, car 
l’information dont on a disposé sur des points cruciaux, sur l’URSS et 
les pays socialistes est-européens, tant qu’ils existaient, et qui s’est
 déposées dans les livres d’histoire, est encore moins fiable que le 
contenu de l’actualité d’aujourd’hui. Mais le capitalisme avait des 
contradictions internes, des contradictions internationales, et il y 
avait une contradiction principale entre le capitalisme et le 
socialisme, et de par le monde un nombre non négligeable de situations 
socio-économiques mixtes qui reflétaient un compromis instable entre les
 deux systèmes. Une minorité intellectuelle dans la bourgeoisie 
occidentale, petite mais impossible à négliger, avait même fait le choix
 du socialisme, entre 1945 et 1975 environ, pour des raisons objectives 
qu’on ne peut pas développer ici sans sortir du sujet, et la bourgeoisie
 du Tiers Monde s’affichait volontiers marxiste.
 
Il
 y avait donc grâce aux contradictions dans le réel une ouverture vers 
l'expression de la vérité, qui n’existe plus aujourd’hui.
 
Maintenant
 pour s'y orienter, on doit conjuguer les deux principes opposés : a 
priori, rien de ce qu’annonce la presse capitaliste n’est crédible ; et 
d’autre part, qu’il est très difficile de s’en passer complètement pour 
s’informer de ce qui se passe vraiment. Il faut mettre au point des 
grilles de déchiffrement au cas par cas.
 
Ne
 croire en rien de ce que propage la presse capitaliste ne signifie pas 
croire en tout ce qu’elle ne propage pas, ou en ce qu’elle propage en 
lui affectant un coefficient négatif. 
 
La
 règle de bon sens est de ne pas prendre position, de ne même pas 
évoquer les questions sur lesquelles on n’a pas de connaissance, ou pour
 lesquelles on n’éprouve pas d’intérêt ou d’attirance. Ne pas en parler 
signifie ne même pas dire qu’on n’en parle pas.
 
Cela
 semble assez facile de conserver assez de recul de jugement, mais il 
est incroyable de voir à quel point le public, et notamment le public 
militant relativement cultivé qui se recrute dans la classe moyenne, 
peut être crédule, ou au moins sidéré par les informations d’officines 
qu’il sait pourtant clairement se situer dans le camp ennemi.
 
L’affaire
 Biélorusse [de l'été 2020] est assez exemplaire d’un autre aspect de la
 situation actuelle : les médias capitalistes occidentaux interviennent 
comme des partis politiques dans les affaires des petits pays. Ils 
suppléent aux partis pro-empire qui n’y existent pas spontanément. En ce
 sens le journaliste indépendant en vient à nourrir le camp politique 
qui attaque les institutions ou l'État visés par les groupes de médias 
capitalistes. Les trouvailles du reporter free lance seront 
sélectionnées selon leur conformité à l’objectif. En Biélorussie 
l’impression qui en résulte est que le pouvoir n’a absolument aucun 
soutien, ce qui serait quand même bien surprenant, puisqu’on avoue 
maintenant qu’il en avait beaucoup auparavant (ce que l'on n'avait 
jamais dit).
 
Les mensonges actuels sont pour une part les aveux des mensonges précédents.
 
Le
 parallèle avec le mouvement en Bolivie contre le régime de facto qui 
avait lieu au même moment, et qui a triomphé, montre aussi comment un 
vrai mouvement populaire qui ne bénéficie pas des soutiens massifs des 
médias et des services occidentaux peut être occulté par les images 
d’une foule savamment manipulée dans une situation émotionnelle et 
hystérisée où on ne fait même pas semblant de vérifier les informations.
 
Dans
 le cas de la guerre en Ukraine à partir de février 2022, un nouveau 
palier vient d'être franchi : l'opinion publique mondiale est devenue un
 théâtre principal de la guerre par procuration de l'OTAN contre la 
Russie, et les médias mainstream vont directement au combat, et assument
 toutes les incohérences, les absurdités, les distorsions de faits, et 
les mensonges nécessaire de la propagande du régime de Kiev. Ils ont 
renoncé au spectacle du pluralisme des opinions qui sert à crédibiliser 
le message principal que veulent faire passer les politiques occidentaux
 et les propriétaires de médias qui adhèrent tous aux mêmes postulats 
idéologiques, et recourent de nouveau au matraquage goebbelsien de 
mensonges éhontés et participent à la censure directe des opinions 
alternatives.
 
Comme disait Gil Scott-Heron the revolution will not be televised !
 
Il
 existait autrefois une presse liée à la classe ouvrière qui pouvait 
totalement ou partiellement relayer un message anti-capitaliste ou 
anti-impérialiste. Mais le conformisme social et l’intimidation produite
 sur les journalistes par des médias mainstream qui se confirment les 
uns les autres sont tels que petit à petit ces espaces se ferment, de 
l’Humanité au Guardian. 
 
L’affaire
 Assange quant à elle est la chronique de la mise au pas du journalisme 
d’investigation, et témoigne de la fin des perspectives libératrices 
liées à l’agitation anarchisante dans le cyber-espace, au hacking et au 
piratage sur la toile. La persécution cruelle et l'emprisonnement 
indéfiniment prolongé dont ce journaliste indépendant de grand format 
fait l’objet est une manière d’avertissement pour tous les autres.
 
Ce
 tableau peut paraître sombre, mais il faut tenir compte du 
renouvellement incessant des contradictions, et des efforts renouvelés 
aussi d’une partie des professions médiatiques d’être à la hauteur de 
leur déontologie, en créant des espaces indépendants. Le monde des 
réseaux sociaux et notamment Youtube offre aussi malgré la censure 
arbitraire et la circulation débridée des "fakes" mainstream ou 
pseudo-critiques qui s’y exerce, des opportunités de communication et de
 diffusion des médias non-capitalistes.
 
Et on peut, en attendant mieux, relayer au maximum Réveil Communiste et ses blogs associés !
 
GQ, 14 août 2020, relu le 29 août 2022
 
PS, 15 août 2020
Commentaire de Bruno Drweski :
Les médias
 russes RT et Sputnik sont fondamentaux certes, mais Presstv iranien, 
Télésur vénézuéliennes, CGTN chinoise pour ce qui est de la Télé et 
internet sont aussi très intéressant ainsi que les sites internets de 
nombreux journaux des pays du tiers monde. Par ailleurs, le gros 
problème des médias alternatifs est la monopolisation des informations 
par quelques agences de presse occidentales qui empêchent d’avoir accès 
aux informations importantes à la source.
PS, 14 décembre 2020
Exemples en vrac de polémiques mainstream 
qui nous mènent en bateau depuis des années,, parfois passionnantes 
comme des feuilletons, mais où il est judicieux de ne pas s'enliser si 
on a la moindre ambition révolutionnaire :
Le bien fondé du confinement, le pass 
vaccinal,  être "Charlie" ou pas, le voile à l'école, les réunions 
non-mixtes, les usages et les paroles de l'hymne national, le 
réchauffement climatique, la PMA pour tous, l'affaire Polanski, 
l'écriture inclusive, le mariage gay, la statue de Colbert, la 
repentance pour l'esclavage, le colonialisme, ou la collaboration, le 
contenu de l'éducation sexuelle à l'école, "iel", les spectacles de 
Dieudonné, la réintroduction des ours et des loups, l'interdiction de la
 fessée, les caméras de surveillance, la montée du végétarisme, les 
péchés du mâle occidental blanc, l'identité nationale, la limitation de 
vitesse sur les routes, les abus des trottinettes, les éoliennes, 
l'interdiction du tabac, l'autorisation du cannabis ...
En ce moment (fin août 2022), les réseaux 
sociaux de gauche n'ont rien de mieux à faire que polémiquer sur un 
tract du Planning Familial qui montre un homme enceint et une femme à 
barbe, au moment où Macron, l'UE et l'OTAN envisagent une guerre 
nucléaire contre la Russie !
PS, 30 août 2022 : un commentaire de Georges Gastaud :
très juste, mais tu peux ajouter un critère
 d'identification, c'est qu'il s'agit d'un média méprisant la langue de 
son pays (dans laquelle il travaille pourtant, quelle différence avec 
les ouvriers défendant leur outil de travail) et promouvant de mille 
façons le tout-globish de la mondialisation capitaliste... Voir les 
"Society", "We demain", "My TF1", etc.