jeudi 21 juillet 2022

Dans son dialogue avec l’Amérique, la Chine adopte la tactique du “loup guerrier”, par Tatiana Kosolapova

Les Russes se délectent devant le changement de ton de la diplomatie chinoise, les propos sont effectivement durs et directs. Loin d’être de l’ordre du caprice ce langage signifie simplement que la Chine n’autorisera plus le moindre viol de souveraineté sous des prétextes hypocrites. Encore un effet de l’intervention russe face à l’avancée de l’OTAN et le surarmement à ses frontières. Mais comme nous le verrons demain dans un article, ce ton correspond à une conception chinoise: “les faits sont têtus et disent la vérité que les mots veulent masquer”. Les faits c’est la prétention de l’occident à imposer sa loi et ses intérêts comme l’ordre du monde et le fait que la majeure partie du monde n’accepte plus, sa volonté de paix et de souveraineté se renforce en mettant les USA et leurs vassaux en minorité. (note de danielle Bleitrach

https://vz.ru/world/2022/7/15/1167728.html

15 juillet 2022, Photo : Katherine Cheng/Global Look Press

Ces derniers temps, Pékin a mené son dialogue avec l’Occident collectif sur un ton dur, voire grossier. L’ancien tact, l’habituelle diplomatie orientale construite sur de vagues allusions, a disparu. Et depuis février le ministère chinois des affaires étrangères a commencé à intercéder plus énergiquement en faveur de la Russie. Il s’avère que ce changement est dû au fait que l’Empire céleste a décidé d’employer dans sa diplomatie les tactiques du “loup guerrier”.

Jeudi, le ministère chinois des affaires étrangères a une fois de plus surpris la communauté internationale avec un commentaire bref mais efficace. Le porte-parole du ministère des affaires étrangères, Zhao Lijian, a noté la différence de compréhension de l’expression “communauté internationale” par le monde et la presse occidentale. “Que signifie ‘communauté internationale’ ?” – RIA Novosti a rapporté son message sur les médias sociaux jeudi.

À des fins de démonstration, le diplomate a joint une carte montrant que seuls l’OTAN et les autres alliés des États-Unis sont comptés dans une telle communauté par les journalistes occidentaux. La carte montre que ces États sont nettement minoritaires dans le monde, tant en nombre qu’en superficie.

La même idée, mais d’une manière différente, a été récemment exprimée par le même Zhao lors du sommet du G7 en Allemagne à la fin du mois de juin. Zhao Lijian a rappelé que le G7 n’est qu’une partie de la communauté mondiale. Le diplomate a posté un message avec une photo montrant la population des pays de la coalition des BRICS (environ 3,2 milliards de personnes) et le nombre de personnes vivant dans les pays du G7 (777 millions au total). “La prochaine fois que vous parlerez de la “communauté mondiale”, gardez à l’esprit ce que cela signifie réellement”, a déclaré Gazeta.ru, citant le diplomate.

Et un autre porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhang Heqing, a accusé mi-juin Washington de vouloir déclencher un conflit éternel avec la Russie, signant ainsi une caricature. Dans le dessin, la Russie est représentée par un ours debout sur le seuil d’une maison, a rapporté Lenta.ru. Sous la porte se trouve une boîte brûlante étiquetée “crise ukrainienne”. Pendant ce temps, caché derrière la clôture de la maison, se trouve un Oncle Sam américain avec un bidon d’essence dans les mains. L’image montre un fusible allumé atteignant la boîte depuis les États-Unis.

“Les diplomates chinois communiquent désormais avec l’Occident dans la même langue, postent des mèmes* sur les médias sociaux et n’ont pas peur des déclarations tranchantes. “Le langage dur exige de répondre coup pour coup, crachat pour crachat, et les mèmes sont souvent utilisés dans les messages”, a déclaré Alexei Maslov, directeur de l’Institut d’études asiatiques et africaines de l’Université d’État de Moscou et professeur à l’École supérieure d’études orientales.

Les personnes comme Zhao ou Zhang sont appelées “guerriers loups” ou “diplomates loups”, une expression qui est apparue il y a trois ans par analogie avec un film populaire en Chine. “Les diplomates loups sont prêts à répondre aux critiques non pas de manière confucéenne, mais de manière assez dure. Beaucoup d’entre eux parlent couramment l’anglais parce qu’ils ont étudié aux États-Unis et connaissent la psychologie occidentale de l’intérieur”, explique le sinologue. La précédente rhétorique du ministère chinois des affaires étrangères, les “réponses polies et sans fin” manquaient de spécificité, et les déclarations ressemblaient aux aphorismes de l’ancien stratège chinois Sun Tzu. Ils contenaient des indications compréhensibles par les Chinois eux-mêmes et par les Asiatiques du Sud-Est, a expliqué M. Maslov : “Le public occidental, quant à lui, ne comprenait pas du tout de quoi il s’agissait. De l’extérieur, il semblait que Pékin avait une diplomatie édulcorée”.

Le sinologue Nikolai Vavilov souligne que sous Xi Jinping, le cours de la politique étrangère a changé – l’idéologie de la montée pacifique de l’Empire du Milieu a été remplacée par “la grande renaissance de la nation chinoise”. “Quelques années après l’arrivée au pouvoir de Xi, des acteurs tels que Zhao Lijian, Hua Chunying et d’autres sont apparus au ministère des affaires étrangères”, a expliqué Vavilov.

Selon l’expert, la nouvelle orientation de l’Empire céleste implique une rivalité ouverte avec l’Amérique, une tentative de conquête du statut de leader non seulement en Asie du Sud-Est, mais aussi dans le monde entier. “La RPC a presque égalé les États-Unis en termes de part de l’économie mondiale. Elle en représente désormais environ 20 % et les États-Unis environ 24 %. Ce changement de paradigme se traduit dans la rhétorique des “loups guerriers”. Cela reflète les processus sous-jacents d’une rupture avec les États-Unis, un rejet des politiques pro-américaines qui ont été menées sous Hu Jintao”, a déclaré l’universitaire chinois.

“Les mêmes ‘diplomates loups’ siègent non seulement au bureau de presse du ministère des affaires étrangères, mais aussi à l’ONU, dans les ambassades. Ils n’ont pas peur de se montrer aux Occidentaux, de jurer et même d’utiliser l’argot anglais. La tâche des “guerriers-loups” est d’expliquer à l’Occident l’essence de la diplomatie chinoise et de montrer qu’ils ne sont pas des mauviettes”, ajoute M. Maslov.

Le ton des discours publics des responsables chinois sur les États-Unis et l’OTAN a déjà commencé à changer depuis fin 2019, lorsque l’Amérique de Trump a activement “tapé” sur l’Empire du Milieu. “Cette année, après février, la rhétorique de la Chine est devenue plus concrète ; jusque-là, la Chine percevait les États-Unis comme un pays avec lequel il fallait négocier. Maintenant, Pékin comprend que presque toutes les réalisations du pays au cours des 40 dernières années sont en danger si la position sur les raisons pour lesquelles la Chine agit de telle ou telle façon n’est pas clairement formée”, a conclu l’interlocuteur.

M. Vavilov note également que depuis février, avec le déclenchement du conflit ukrainien, non seulement M. Zhao, mais aussi d’autres responsables de Pékin, ont durci leur discours sur la Russie, les États-Unis et l’OTAN. “Les tentatives de rivaliser avec Washington pour le leadership mondial ne sont possibles que si Moscou leur est loyal et s’engage à établir des relations de bon voisinage avec Pékin. Sinon, la concurrence avec les États-Unis est impossible”, a déclaré l’expert.

Cette orientation a déjà été confirmée lors de la visite du président Vladimir Poutine, début février, à l’ouverture des Jeux olympiques de Pékin, estime M. Vavilov. “Ce n’est pas une coïncidence si le dirigeant russe a été le premier chef d’État en deux ans à venir en Chine après le verrouillage du coronavirus. Le cours anti-américain de la Russie est en phase avec le cours anti-américain de la RPC. Il s’agit d’un élément intrinsèque de la volonté de l’Empire céleste de construire un leadership mondial. Dans l’histoire moderne, la Chine n’a jamais soutenu quelqu’un de manière rhétorique autant qu’elle soutient actuellement notre pays. C’est même un soutien plus important que celui que Mao Zedong a apporté à Pyongyang pendant la guerre de Corée au début des années 1950”, déclare M. Vavilov.

Il convient de rappeler que Pékin, par exemple, soutient activement les accusations de Moscou contre Washington, qui l’accuse d’avoir installé en Ukraine des laboratoires biologiques présentant un danger pour les civils. “Les laboratoires biologiques américains en Ukraine sont très préoccupants”, a déclaré M. Lijian en mars, citant des rapports militaires russes selon lesquels les États-Unis utilisent ces installations pour des “plans de guerre biologique”.

La semaine dernière, Zhao a déclaré : les faits ont pleinement prouvé que ce sont les États-Unis qui constituent la plus grande menace pour le monde. “Les États-Unis ont récemment célébré le 246e anniversaire de l’indépendance, si vous regardez les plus de 240 ans passés, dont seulement 16 ans sans guerre, c’est certainement le pays le plus belliqueux de l’histoire mondiale”, a déclaré le diplomate à RIA Novosti.

Quelques jours auparavant, il avait publié un collage de cinq photos – de la Yougoslavie en flammes, de l’Afghanistan, de l’Irak et de la Libye, victimes des interventions de l’OTAN. Les photos étaient accompagnées d’une citation du secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg : “L’OTAN est une alliance défensive”, et de la légende : “Les bombes sont un symbole de la défense de l’OTAN.” En bas, le diplomate chinois a laissé la légende suivante : “L’OTAN est une alliance défensive ? La blague du siècle”.

 

L’Europe entreprend de soutirer du gaz aux plus faibles, par Olga Samofalova

Nous sommes simplement au début de la catastrophe générée par la capitalisme, déjà les pillards des pays riches, les fauteurs de guerre privent les pays pauvres, ceux qui abritent l’essentiel de l’humanité de toutes ressources mais ce darwinisme social ne leur suffit plus, c’est de manière interne également qu’ils envisagent la distribution des ressources essentielles. Un article qui aide à comprendre ce qui est déjà là et ce qui nous attend si nous ne changeons pas. Pendant ce temps là, tandis que la France prétend fêter la prise de la Batille en ayant Macron en chef des armées, héros de la guerre par procuration en Ukraine, les crétins de la Nupes applaudissent à ‘Assemblée nationale les fascistes qui ont réussi à éliminer un pass vaccinal face à ‘épidémie. Pas un pour sauver l’autre… (note de danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)

https://vz.ru/economy/2022/7/12/1167213.html



Texte : Olga Samofalova

La pénurie de gaz a touché non seulement l’Europe, mais aussi d’autres régions du monde, beaucoup plus éloignées de la Russie. La situation est telle que les principaux fournisseurs refusent tout simplement d’honorer leurs contrats et de livrer du gaz aux clients. Quels sont les pays les plus durement touchés et quel est le lien avec les livraisons de gaz russe à l’Europe ?

Les pays en développement, de l’Inde au Brésil, ne peuvent souvent pas concurrencer les pays européens pour le GNL à ces prix – environ 40 dollars par million d’unités thermiques britanniques (Btu) ou environ 1 500 dollars par millier de mètres cubes. Ils sont donc contraints de réduire leurs importations de GNL, indique le WSJ.

Par exemple, le Pakistan a demandé 10 expéditions de 140 000 mètres cubes chacune, d’une valeur de plus de 100 millions de dollars par expédition, de juillet à septembre. Cependant, personne n’a répondu. Trois précédents appels d’offres pour du GNL au cours des dernières semaines ont donné lieu à une offre de 40 dollars par million de BTU (près de 1 500 dollars par millier de mètres cubes), ce que le pays ne peut tout simplement pas se permettre.

Les importations européennes de GNL ont augmenté de 49 % entre le début de l’année et le 19 juin, selon la société de conseil Wood Mackenzie. Parallèlement, les exportations vers l’Inde, la Chine et le Pakistan ont chuté de 15 à 21 % au cours de la même période.

Les pays les plus pauvres doivent faire des économies. Le Bangladesh, par exemple, coupe l’électricité pendant la journée. L’Inde se remet rapidement au charbon et à son propre gaz. Les experts affirment que, dans certains cas, des cargaisons destinées à des pays pauvres ont été détournées vers l’Europe.

“Le Pakistan et le Bangladesh ont été bernés de manière flagrante. Ils avaient signé des contrats à long terme pour du GNL, mais on leur a simplement dit qu’ils ne seraient pas honorés. Il s’est avéré plus rentable pour les fournisseurs de GNL de payer des pénalités contractuelles aux pays en développement mais d’expédier la cargaison en Europe, qui paiera davantage. Le Pakistan et le Bangladesh doivent donc commander du gaz sur le marché à terme aux prix énormes actuels. Nous assistons à une néo-colonisation du marché du gaz”, a déclaré Igor Yushkov, expert à l’Université des finances sous l’égide du gouvernement russe et du Fonds national de sécurité énergétique.

Les responsables pakistanais affirment qu’ils continuent à recevoir du GNL uniquement dans le cadre d’un contrat à long terme avec le Qatar. Alors que deux entreprises européennes n’ont pas respecté les contrats à long terme. Il s’agit de la société énergétique italienne Eni, qui n’a pas livré cinq cargaisons depuis août dernier, et de la maison de commerce Gunvor Group, basée à Genève, qui n’a pas livré sept cargaisons depuis novembre, rapporte le WSJ. Le prix de ces contrats était plus de trois fois inférieur à celui d’aujourd’hui, c’est-à-dire moins de 500 dollars par millier de mètres cubes.

“L’Europe pourrait bien glisser vers le darwinisme gazier pour cette saison de chauffage. Si vous ne pouvez pas payer, vous serez privés d’électricité”, a déclaré M. Yushkov. Il est donc certain que si l’Europe connaît un effondrement gazier cet hiver, Bruxelles exigera légalement des entreprises européennes (négociants et transporteurs) qu’elles envoient tous les volumes de GNL en Europe.

Il y a dix ans, le marché du gaz, contrairement à celui du pétrole, était un marché régional. “Il y avait trois marchés plutôt fermés pour le gaz – l’Amérique du Nord, l’Europe et l’Asie”, explique M. Yushkov.

Le marché européen était différent dans la mesure où il recevait du gaz par des gazoducs en provenance de Russie et des pays voisins, où les volumes d’approvisionnement étaient déterminés par des contrats à long terme et où les prix dépendaient du prix du pétrole. Le combustible bleu était lié par des contrats et des pipelines à un fournisseur spécifique et à un acheteur spécifique.

Cependant, la révolution du schiste aux États-Unis et les nouvelles technologies ont conduit à l’apparition du gaz naturel liquéfié et des terminaux GNL qui peuvent être installés dans n’importe quel pays ayant accès à la mer. Finalement, le GNL a commencé à être transporté par des cargos, comme le pétrole. Cela a permis de déplacer le gaz dans le monde entier. D’année en année, le marché du gaz s’est mondialisé. Et maintenant, ce qui se passe en Europe – pénuries de gaz et flambée des prix – a une forte influence sur les autres acteurs du marché dans d’autres parties du monde.

Pendant longtemps, l’Europe, qui construisait des terminaux GNL, ne les a pas réellement utilisés. “Les terminaux GNL en Europe n’étaient utilisés qu’à 25-30% à une époque où il n’y avait pas de pénurie de gaz. Si les Européens avaient besoin de plus de gaz, ils l’achetaient à la Russie”, a rappelé M. Yushkov. Il n’y avait pas de concurrence pour le GNL sur les marchés à cette époque. Ces deux dernières années, cependant, l’Europe a connu une pénurie de gaz et les autres acheteurs de GNL ont souffert.

Pourquoi le gaz est-il devenu si cher et si rare en Europe ? Tout d’abord, explique notre interlocuteur, la demande de gaz en général a fortement augmenté ces dernières années et dans le monde entier. En Chine, par exemple, la demande de gaz connaît une croissance à deux chiffres.

Deuxièmement, l’Europe a systématiquement fermé des centrales au charbon et des centrales nucléaires, ce qui a entraîné une augmentation de la production d’électricité à partir du gaz. Troisièmement, la production propre de gaz de l’Europe est en baisse depuis les années 80.

Quatrièmement, le taux de croissance de l’offre de GNL a commencé à diminuer. “La politique climatique a joué un tour cruel ici. Les compagnies pétrolières et gazières étaient tout simplement intimidées par la transition énergétique. L’opinion dominante est que les investissements dans les projets pétroliers et gaziers ne seront pas rentables et qu’il est préférable d’investir dans les énergies renouvelables. En conséquence, les anciens champs sont épuisés et les nouveaux ne sont pas remplacés”, explique un expert du Fonds national de sécurité énergétique.

Cinquièmement, l’Europe reçoit physiquement moins de gaz de la Russie. Au printemps, cinq pays ont refusé d’acheter du gaz russe dans le cadre du nouveau système de règlement (en roubles). Et en été, le transport par pipeline a diminué. Une seule station de compression de gaz est en service via l’Ukraine. La route via la Pologne vers l’Allemagne via Yamal-Europe est fermée en raison des sanctions polonaises et de la réponse du Kremlin. Enfin, dans un développement très médiatisé, le transport de gaz de Nord Stream 1 vers l’Allemagne a été réduit de 60 % parce que le Canada n’a pas renvoyé de réparation une turbine Siemens pour la station de compression de gaz. En Allemagne, on craint même que l’oléoduc, qui a été fermé le 11 juillet, ne soit pas rouvert après les travaux de maintenance prévus.

Enfin, les erreurs et les mauvais calculs de Bruxelles ont joué un rôle majeur dans les problèmes actuels.

“Le marché européen était autrefois dominé par des contrats à long terme liés au prix du pétrole, ce qui permettait de maintenir les prix du gaz à un niveau relativement bas. Mais les Européens sont passés aux prix formés sur les marchés spot, où les fluctuations de prix sont constantes. Les Européens s’attendaient à ce qu’il y ait toujours un excédent d’offre sur le marché spot et une concurrence entre les fournisseurs, de sorte que les prix du gaz resteraient toujours bas. Mais il s’avère que les acheteurs doivent se faire concurrence pour la livraison du gaz, ce qui fait grimper les prix. Nous constatons aujourd’hui que les marchés du gaz sont de plus en plus connectés grâce au développement du segment du GNL”, conclut notre interlocuteur.

 

COVID 19 . FABRIQUE DE LA PANIQUE.

LE MYTHE DE LA CONTAMINATION ÉPIDÉMIQUE


Cette vidéo est le cinquième épisode de la série réalisée avec le média Kairos.

Dans le premier épisode, nous avons vu qu'il n'y a eu aucune hécatombe nulle part en Europe, ni en 2020, ni en 2021.

Dans le deuxième épisode nous avons vu qu'il n'y a pas eu la saturation hospitalière annoncée.

Dans le troisième épisode nous avons vu qu'il n'y a pas non plus eu un "déferlement" de malades. Il y a eu bien moins de malades comptabilisés que pendant les épisodes dit "grippaux" du passé. Nous vivons une épidémie de "cas" entretenue par les fameux "tests" qui n'ont pas de rapport avec la moindre maladie.

Dans le quatrième épisode nous avons vu le moteur même de la fraude : l'utilisation de codes spécifiques par les hôpitaux de façon à produire les "bonnes" statistiques.

Dans ce cinquième épisode nous découvrons le socle de l'idéologie sanitaire actuelle qui ne repose sur aucune expérience et est contredite par les statistiques : la contamination

 

La Russie est-elle enlisée en Ukraine ? Est-ce que les médias occidentaux ont raison en parlant du fait que l'on ne peut gagner des guerres avec l'artillerie ? Quelles seraient les stratégies cachées de la Russie dans ce tempo jugé lent de l'avance russe ? Je réponds à beaucoup de questionnements à ce sujet, les effectifs, l'artillerie reine des batailles, la bataille d'attrition en cours, l'érosion rapide des moyens militaires des alliés européens de l'Ukraine et une possibilité que la Russie vise justement l'affaiblissement général de l'OTAN, du moins en Europe, afin de se préserver pour l'avenir du moins pendant quelques annéeLa Russie est-elle enlisée en Ukraine ? by Laurent Brayard une voix pour le Donbass Insideranchor.fm

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Le bataillon Mirotvorets, une unité du Ministère de l'Intérieur d'Ukraine qui s'illustra dans les répressions politiques, les crimes de guerre, la chasse aux résistants du Donbass et dans l'Est de l'Ukraine, travaillant main dans la main avec la police politique, le triste SBU. Cette unité sévit toujours à l'arrière du front, mais elle fut aussi utilisée à l'époque comme chair à canon, se faisant tailler en pièce à la bataille d'Ilovaïsk en août 2014. Son premier chef Teterouk fut député à la Rada, un fanatique haineux qui se fit remarquer par ses frasques en frappant avec une bouteille à la tête, une députée dans l'hémicycle de l'assemblée ukrainienne, il est responsable comme commandant des crimes de guerre qui furent commis et devrait s'il était pris être traduit devant un tribunal.Bataillon Mirotvorets, police auxiliaire dans la tradition de la Schutzmannschaft - Donbass Insiderdonbass-insider.com

 

Personne n’a la solution

mardi 19 juillet 2022 Blog Agora Vox
 

Nous nous trouvons dans une situation totalement inédite où le problème n’est pas rendu public pour ne pas paniquer les populations, où personne n’a la solution et où toutes les peurs sont activées pour vérifier que les peuples accepteront par avance les efforts qui leur seront demandés quand on y verra plus clair. Cela en devient même caricatural.

Le problème n’est évidemment pas sanitaire et pas plus climatique que terroriste. La Russie n’est là que pour porter le chapeau de la responsabilité de ce qui va nous arriver alors qu’elle seule semble raisonner encore à peu près sainement.

Mais quel est donc le problème ?

Le problème est que le trio théoriquement pensant, universitaire politique et médiatique, s’est d’abord convaincu lui-même, et a par la suite convaincu quasiment tout le monde, que nous créons collectivement de la richesse. Cela est malheureusement complètement faux et très peu de gens acceptent d’en prendre conscience car c’est profondément dérangeant.

Pour continuer à vivre dans notre rêve, nous avons volontairement oublié que la richesse n’est qu’un regard partagé, et qu’un regard ne se crée pas, il se constate. Une production est regardée comme une richesse quand elle est échangée ou échangeable avec une autre richesse, généralement de l’argent. C’est l’échange qui constate la richesse. Nous ne créons que des productions qui ne sont pas systématiquement des richesses.

Tant que la monnaie, regardée comme une richesse, en était réellement une comme l’or, l’argent, le cuivre, du sel, du bétail ou une plume d’oiseau rare, elle était limitée et peu de productions réussissaient à être regardées comme des richesses. Ce fut le cas toujours et partout depuis que la monnaie existe jusqu’en 1971 lorsqu’aux USA, Nixon a rendu légal ce que la FED faisait déjà illégalement depuis plus de 20 ans.

La folie actuelle depuis un demi-siècle qui contamine le monde entier, consiste à créer arbitrairement, et d’une façon continue et illimitée, de la monnaie pour nous faire croire que ce que nous achetons avec, est une richesse que nous avons collectivement créée.

Nous devons réapprendre que la monnaie n’est qu’un véhicule d’énergie humaine. Jusqu’en 1971 cette énergie avait déjà été jugée bien utilisée par la société puisqu’elle avait créé de l’or, de l’argent, du cuivre, du sel, du bétail ou des plumes d’oiseau rare qui charriaient cette énergie. Depuis ce fameux 15 août, la monnaie ne véhicule plus qu’une énergie humaine à trouver demain, ce qui nous permet depuis 50 ans de croire tous nos fantasmes réalisables puisque c’est le futur qui paye.

Il y a aujourd’hui deux types de monnaies.

Les crypto monnaies dont l’énergie humaine n’est que celle des « mineurs » qui se battent entre eux pour créer ces monnaies. Cette énergie humaine n’a objectivement aucune valeur durable et les crypto monnaies ne sont qu’un jeu spéculatif où l’on peut gagner beaucoup d’argent en faisant tout payer par les derniers propriétaires de ces crypto monnaies quand on s’apercevra que ces monnaies ne véhiculant aucune énergie, ne valent absolument rien. Là encore les petits futés qui auront gagné beaucoup d’argent avec les crypto monnaies le feront payer par une multitude de braves gens crédules qui perdront tout. Il y a là une malhonnêteté toujours légale mais très dérangeante.

Et il y a les monnaies créées par les banques centrales et commerciales qui sont tenues d’avoir un bilan équilibré. Fini le temps où les banques commerciales prêtaient à leurs clients l’argent d’autres de leurs clients avec lesquels elles partageaient les intérêts. Fini est aussi celui où les banques centrales équilibraient l’argent mis en circulation par l’or qu’elles détenaient dans leurs coffres.

Aujourd’hui les banques, quelles qu’elles soient, ne créent de l’argent que par la double écriture d’un argent mis à disposition aujourd’hui, compensé par une créance de même montant à récupérer demain. Cette folie non seulement légale mais justifiée exclusivement par la création future de richesse, renforce la croyance en la création de richesse puisque des productions totalement inutiles sont achetées en les transformant en richesse grâce à cette monnaie dont l’énergie humaine devra être trouvée sans contrepartie dans le futur par la réapparition d’esclavages à mettre en place. Dans ces productions non seulement inutiles mais néfastes, il y a la douceur de vivre sans effort avec toutes les perversions qu’elle entraîne et qui nous envahissent de toutes parts.

Tout le monde est coincé et personne n’a la solution tellement il faut commencer par revoir toute notre façon de penser.

La dette mondiale monte sans fin et sans jamais redescendre d’un seul centième d’unité. Elle dépasse déjà largement les 30.000 euros pour chacun des bientôt 7 milliards d’humains. Elle permet à l’occident de transformer apparemment en richesse de plus en plus de services inutiles et de réalisations de fantasmes reconnus arbitrairement comme des droits. Cela attire évidemment la Terre entière car, quand la stupidité est érigée en valeur morale, qui ne chercherait pas à en profiter ? Les dirigeants des pays artificiellement créés au XXe siècle, comme l’Ukraine ou la plupart des pays d’Afrique, louchent sur notre mode de vie en le croyant éternel et universel alors qu’il n’est ni l’un ni l’autre. Il n’est au contraire qu’une jouissance anticipée du fruit des esclavages futurs.

Mais notre élite autoproclamée continue à croire et à nous faire croire que nous créons des richesses chiffrées par le PIB dans lequel nous ne prenons que de faibles pourcentages pour transformer en richesses tout ce qui nous arrange. Le problème continue à se compliquer sans que personne ne s’en inquiète puisque le PIB augmente et que seule sa répartition poserait soi-disant problème. Les peuples occidentaux s’amollissent dans un pays de Cocagne artificiel « shooté » à la fausse monnaie. Leurs jeunesses sont écartelées entre un réalisme inné et les fadaises qu’ils doivent répéter pour avoir un diplôme qui ne leur sert plus à rien si ce n’est à être reconnus comme soumis à la norme.

La seule question restante est de savoir qui sonnera le réveil. La seule réponse certaine est que ce ne sera ni nos gouvernants, ni nos enseignants, ni nos intellectuels installés. Nous les choisissons au contraire pour qu’ils continuent à nous faire rêver. Pour ceux qui ont du temps à perdre, ils peuvent lire le tissu d’âneries auto satisfaites que l’un d’eux a commis sans bien sûr effleurer le problème de la monnaie La seule certitude que nous pouvons avoir c’est que le réveil sera d’autant plus violent que notre prétendue élite l’aura retardé en s’inventant des fausses solutions à répétition, en jouant simplement comme elle le fait, sur le temps et sur l’espace, sur l’ailleurs et le plus tard.

 

LA PHRASE DU JOUR

Elle est de Pascal BONIFACE, dans l'émission C DANS L'AIR... 

 

Il a dit :

 "C’en est fini de l’Amérique gendarme du monde et de l’Occident qui gère le monde. Chaque pays suit son agenda sans obéir à un patron, aux ordres envoyés par Washington. Il n’y a plus que les Européens qui le font finalement".  

Ce sont des mots qui doivent compter. En tout cas, ce n'est pas dans ce blog qu'on lira le contraire. C'en est fini du monde capitaliste unipolaire. Il n'est peut-être pas trop tard pour limiter les dégâts provoqués par un "libéralisme" débridé, suicidaire. Le monde est en train de changer, et c'est juste le début . Pourvu que les principaux responsables occidentaux, jusqu'ici valets dociles de l'impérialisme guerrier US, en prennent conscience.... Et s'attachent enfin, faute de mieux, et dans l'urgence, à embrasser la cause de la PAIX.

La PAIX !  

 (La preuve de la phrase du jour par cette carte du monde)

En rouge, les pays qui sanctionnent la Russie, et donc qui obéissent au gendarme US

En vert, les autres, ceux qui refusent d'obéir à Washington.

Clair, non ?

 omments

Non, la hausse des prix n’est pas due à la hausse des salaires


Ce n’est pas la hausse des salaires des travailleurs qui est à l’origine de l’inflation galopante, mais les profits des entreprises.

Source : Jacobin Mag, Grace Blakeley
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Les politiciens et les technocrates appartenant à tout l’éventail politique du Royaume-Uni se sont permis de réprimander les travailleurs qui réclamaient des augmentations de salaire afin de suivre l’inflation. (Images Money / Flickr)

 

Ces appels à la modération salariale étaient déjà intolérables lorsqu’ils émanaient du directeur de la Banque d’Angleterre, Andrew Bailey, qui gagne plus d’un demi-million de livres par an. Aujourd’hui, Boris Johnson – dont on sait qu’il trouve si difficile de survivre avec un salaire de Premier ministre de 190 000 euros par an qu’il a dû demander à un donateur conservateur de lui acheter de nouveaux rideaux – est entré dans la danse.

Johnson a mis en garde contre une « spirale salaires-prix » si les travailleurs ne modèrent pas leurs exigences salariales – comme l’ont fait plusieurs députés conservateurs et même travaillistes. Des politiciens bien payés qui ont voté à plusieurs reprises pour augmenter leurs propres salaires tout en maintenant ceux des infirmières et des enseignants à un bas niveau, disent maintenant au reste du pays de ne pas demander d’augmentation de salaire. Le spectacle pourrait être drôle s’il n’était pas aussi élitiste.

Le Parti conservateur n’a pas semblé avoir de problème quand il s’agissait de distribuer des milliards de livres en prêts et subventions aux mega – entreprises qui avaient besoin de soutien pendant la pandémie. Et ce, après plusieurs années de bénéfices élevés pour les plus grandes entreprises du Royaume-Uni, en partie grâce aux réductions drastiques de l’impôt sur les sociétés introduites par George Osborne.

Dans le même temps, au cours de la décennie qui a suivi la crise financière, le travailleur moyen au Royaume-Uni n’a pas reçu d’augmentations de salaire dignes de ce nom, laissant le Royaume-Uni avec l’une des plus faibles performances en matière de croissance des salaires au sein de tous les pays de l’OCDE. Aujourd’hui, avec la hausse des coûts de la vie, des millions de familles se retrouvent dans l’incapacité de chauffer leur maison.

Les taux de syndicalisation ayant baissé presque chaque année depuis la fin des années 1970 (avec un redressement notable ces dernières années), les travailleurs de la plupart des secteurs ne sont tout simplement pas en mesure d’exiger des salaires plus élevés. Ceux qui sont davantage syndiqués – notamment dans le secteur public – continuent de limiter leurs exigences à des augmentations de salaire correspondant à l’inflation. C’est une autre façon de dire qu’ils tentent de se protéger contre les réductions de salaire.

Les statistiques montrent très clairement que la crise du coût de la vie n’est pas provoquée par les travailleurs qui réclament des salaires plus élevés. La combinaison de la guerre en Ukraine et des perturbations des chaînes d’approvisionnement qui ont eu lieu pendant le grand confinement sont les principaux facteurs expliquant la hausse des prix. Comme je l’ai soutenu dans La Tribune la semaine dernière, la crise du transport maritime mondial est un facteur particulièrement important quand on veut expliquer pourquoi les prix ont tant augmenté au cours des dernières années.

Mais le problème ne réside pas seulement dans les changements macroéconomiques qui échappent à notre contrôle – il s’agit aussi des profits réalisés par les grandes entreprises en réponse à l’environnement inflationniste.

Les niveaux de concentration du marché n’ont cessé d’augmenter au Royaume-Uni ces dernières années, et les secteurs monopolistiques et oligopolistiques ont connu des hausses de prix plus importantes pendant la pandémie que les secteurs plus compétitifs. Ces sociétés se servent de l’augmentation des prix à l’échelle de l’économie comme d’une excuse pour augmenter leurs prix dans une proportion bien supérieure à l’augmentation de leurs coûts. En d’autres termes, une grande partie de la hausse des prix est due à l’augmentation des bénéfices et non à celle des salaires.

Toujours et partout l’inflation est un phénomène politique – il s’agit de savoir qui paie. Le gouvernement actuel veut faire payer aux travailleurs la crise du coût de la vie, tout comme il leur a fait payer la pandémie et la crise financière qui l’a précédée.

L’approche impitoyable du gouvernement face à la crise du coût de la vie est précisément la raison pour laquelle il est si important que les travailleurs se syndiquent. Les travailleurs ne peuvent pas compter sur les patrons pour leur accorder des augmentations de salaire « équitables » par intérêt personnel éclairé, ni sur le gouvernement pour soutenir la reprise. Ils doivent exiger le salaire qu’ils méritent en étant en position de force.

La réaction tant du parti travailliste que du parti conservateur aux récentes grèves ferroviaires montre très clairement à quel point les politiciens se sentent menacés par les travailleurs qui osent s’organiser pour défendre leurs intérêts. Dans les secteurs largement syndiqués, les patrons ne peuvent tout simplement pas transférer les coûts de la hausse des prix sur le personnel faiblement rémunéré – ils doivent négocier avec les gens qu’ils tentent d’exploiter.

Ce gouvernement – et la plupart des politiciens de l’opposition – aimerait bien que les travailleurs s’assoient et se taisent devant la chute des salaires réels. Mais ils ont une autre option : ils peuvent aussi s’organiser.

Contributeurs :

Grace Blakeley est rédactrice à La Tribune et l’auteur de Stolen : How to Save the World from Financialisation [Spoliés : comment sauver le monde de la financiarisation, NdT].

Source : Jacobin Mag, Grace Blakeley, 18-06-2022

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

 

 

Accélération de l’Histoire et défaite de l’Occident

L’intervention russe en Ukraine du 24 février a constitué une grande surprise en Occident. Y compris chez ceux qui, comme l’auteur de ces lignes, considéraient que la responsabilité de l’OTAN et de l’Union européenne était lourdement engagée. Cette surprise est finalement le symptôme de ce sentiment de supériorité occidentale si présent dans les têtes, y compris chez ceux qui tentent de ne pas trop s’éloigner du réel et assistent, consternés, au basculement des élites dirigeantes dans un délire inepte. À base de refus d’évidences, de décisions absurdes, de propagande imbécile, de racisme sommaire, de pulsions suicidaires, et pour tout dire d’aveuglement assez terrifiant.

Nous avions dit dans ces colonnes qu’il était possible que l’intervention militaire du 24 février 2022 enclenche un processus pouvant mettre fin à la domination multiséculaire de l’Occident sur le monde. Les événements qui se déroulent depuis quatre mois semblent confirmer cette hypothèse, et en tout cas c’est manifestement la voie que la Russie et les pays « du Sud » ont décidé d’emprunter.

L’Histoire change par bonds, et c’est irréversible

L’aspect militaire de la guerre en Ukraine, sans être secondaire, apparaît comme un élément parmi d’autres de cette soudaine accélération de l’Histoire. Nous assistons en parallèle de la conduite méthodique par la Russie de son « opération spéciale », à la recomposition géostratégique de la planète où l’Occident, isolé, affronte le reste du monde. Ce qui est impressionnant, c’est que l’enjeu de cet affrontement est très clair. Nous avons d’une part une puissance, les États-Unis, qui se considère exceptionnelle et destinée à conduire le monde en organisant sa globalisation comme forme moderne de sa domination. Son système économique est celui du néolibéralisme financier assis sur sa monnaie, son système politique celui de la démocratie représentative abâtardie en oligarchie voire ploutocratie aujourd’hui, son outil juridique le fameux « ordre international fondé sur les règles » qu’il est le seul à connaître et produit en fonction de ses besoins, et son moyen principal la violence militaire. En face, les pays qui représentent l’énorme majorité de la population mondiale, ne veulent plus de cette hégémonie, aspirent à une organisation multipolaire d’États-nations territoriaux, régulée par le droit international issu du dispositif juridique mis en place à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Et dont les économies rejettent le néolibéralisme au profit de schémas où l’État garde sa place.

Les deux systèmes sont incompatibles. Arrêtons-nous quelques instants sur une anecdote qui renvoie à cette différence fondamentale et à l’incompatibilité qui en découle. 

Deux événements se sont télescopés au début de l’année 2021. Dans le tumulte qui a suivi le scrutin présidentiel américain de novembre précédent, Donald Trump a mis en cause la légitimité démocratique de l’élection en invoquant des fraudes. Son compte Twitter rassemblant près de 90 millions « followers » a été, d’autorité, supprimé par Jack Dorsey, le milliardaire propriétaire du réseau et partisan de Joe Biden. Au même moment, Jack Ma, milliardaire chinois propriétaire du site de vente en ligne Alibaba s’est livré publiquement à une critique virulente du régime chinois. Il a été immédiatement « exfiltré » du monde des affaires, et prié, s’il souhaitait conserver une partie de son immense fortune, de bien vouloir se taire. Par conséquent, en Amérique, ce sont les milliardaires qui ont le pouvoir de retirer la parole au Président en exercice, en Chine, c’est le contraire… Cette anecdote montre la différence entre deux systèmes, avec deux protagonistes identiques, président et oligarque. Il ne s’agit pas d’un jugement moral ou qualitatif, mais simplement du constat d’une différence irréductible.

Il est manifeste aujourd’hui que la Russie, soutenue par la Chine, a décidé avec sa guerre en Ukraine d’initier le processus destiné à mettre fin à l’hégémonie américaine sur le monde. Le social-démocrate britannique Tony Blair, complice des crimes de guerre américains en Irak et quintessence de ce que l’Occident produit de plus cynique et corrompu, reconnaissait récemment : « Nous arrivons à la fin de la domination politique et économique de l’Occident. Le monde va être au moins bipolaire et peut-être multipolaire ». Eh oui…

Il est parfois possible d’importer des concepts de sciences dures dans les sciences dites molles, en l’occurrence les sciences humaines. Pour appréhender la révolution qui vient de commencer, et en particulier cette accélération de l’Histoire, on peut s’inspirer du concept introduit par Stephen Jay Gould dans la théorie de l’Évolution, celui « des équilibres ponctués ». Par opposition à une vision gradualiste lente, le savant américain considérait que l’Évolution progressait par bonds succédant à de longues périodes de stabilité. C’est un peu la même chose en Histoire, comme le démontre par exemple la Révolution française qui commença avec la première réunion des États généraux le 5 mai 1789. Sept jours plus tard, les institutions d’un royaume quasi millénaire étaient à terre et un bouleversement fulgurant allait secouer toute l’Europe.

L’invasion du 24 février en Ukraine a bien évidemment servi de catalyseur à la mise en mouvement d’éléments préexistants qui, finalement, ne demandaient qu’à bouger. L’Occident domine le monde depuis un demi-millénaire, il a conduit la deuxième mondialisation du XVe siècle avec la conquête de la planète, la troisième avec la Révolution industrielle et impériale du XIXe siècle, et la contemporaine comme la forme moderne de sa domination. Comme le dit Tony Blair – et pas seulement lui – il est possible et peut-être probable que cette phase se termine.

Juste un autre petit détour par les sciences dures avec le deuxième principe de la thermodynamique qui établit l’irréversibilité des phénomènes physiques. Il en est de même en Histoire, et il n’y aura pas de retour à la situation antérieure au 24 février 2022.

Le problème est que cette accélération et le principe d’irréversibilité sont contre-intuitifs, car pour les appréhender, il faut accepter la fin du monde ancien, renoncer à ses convictions rassurantes, et gérer l’anxiété de l’imprévisibilité de ce qui vient. Parce qu’il faut être clair, quiconque prétend savoir quel sera l’état de notre maison humaine dans trente ans est un charlatan. Y compris que parmi les hypothèses qui ont actuellement court, celle de la destruction nucléaire n’est pas la moins probable. Mais on sait en tout cas que l’on ne reviendra pas au 23 février 2022.

Examinons trois domaines où l’impact de cette révolution et son étonnante rapidité se fait sentir. C’est tout d’abord la brutale inversion des rapports de force mondiaux, quand l’Occident bardé de son arrogance et de sa conviction d’incarner la « communauté internationale », ne mesure pas que c’est lui-même qui est désormais isolé. Il y a ensuite la « panique cognitive » qui a saisi les élites occidentales, panique qui se manifeste par un refus furieux du réel. Et enfin les conséquences sociales et politiques que ne vont pas manquer de provoquer les décisions économiques délirantes mises en œuvre pour provoquer « l’effondrement de l’économie russe », selon l’expression de Bruno Le Maire, l’incapable puéril qui sert malheureusement de ministre de l’Économie à la France.

Isolement de l’Occident

La réaction à l’invasion russe a été immédiate surtout dans l’Union européenne qui, sous l’égide d’Ursula von der Leyen s’attribuant des compétences qui n’étaient pas les siennes, a adopté un train complet de sanctions de toutes natures. Première erreur, puisque aucune modulation postérieure n’était possible qui n’apparaisse pas comme un recul, et qu’à l’évidence cette réaction ne pouvait que rebuter, même les pays du Sud favorables à l’Occident. La condamnation de l’invasion a été adoptée à l’ONU, mais sur la base du droit international, précisément celui que les États-Unis ne veulent plus appliquer au profit de leur conception de « l’ordre international selon les règles ». Concernant les sanctions, la grande majorité des pays a regardé ailleurs. Les dirigeants occidentaux ont pourtant multiplié les déplacements pour les amener à obéir. Ils se sont fait claquer la porte au nez plus ou moins poliment. Dernier exemple pathétique avec le désastre Biden en Arabie Saoudite. On peut aussi citer la liste absolument ridicule des 40 pays (sur 195) qui se sont prononcés pour des « poursuites pénales contre la Russie », où figurent triomphalement les principautés de Monaco, Andorre et San Marin. On imagine la terreur de Vladimir Poutine.

Le problème, c’est que le refus massif de la part de pays représentant près de 90 % de la population mondiale d’appliquer les sanctions se combine avec des réticences et des comportements à la carte de la part des pays occidentaux. Comme avec totale duplicité les États-Unis qui les ont levées sur les engrais russes considérés comme indispensables, où le pétrole dont les importations ont été massivement augmentées…

Mais surtout, beaucoup de grands pays ont parfaitement vu l’ouverture que fournissait l’initiative russe. Et s’y sont engouffrés, comme l’a montré le parallèle – consternant pour les Occidentaux – des réunions du G7 et des BRICS. L’organisation qui rassemble la Russie, la Chine, l’Inde le Brésil et l’Afrique du Sud représente près de 3,5 milliards d’habitants, contre 750 millions pour les pays du G7. Dont les dirigeants ridicules (et pour certains en sursis) se sont comportés en bras de chemise comme des galopins de cour d’école devant les caméras. Pendant que ceux des BRICS manifestaient ostensiblement leur solidarité avec Vladimir Poutine. Avant de recevoir les candidatures empressées de plusieurs autres grands pays. Les médias du système français se sont par ailleurs bien gardés de faire écho à la catastrophe politique du « Sommet des Amériques » organisé en Californie par Biden. Sommet largement boycotté par l’Amérique latine et en particulier par le Mexique, grand voisin des USA. Que dire également du G20 organisé en Indonésie où les Occidentaux se sont fait en général sévèrement rembarrer, comme Anthony Blinken le secrétaire d’État américain par son homologue chinois ou le pitoyable Josep Borrell qui représentait l’UE ? On retiendra de ce dernier une extraordinaire réflexion : « Certains diplomates du G20 sont plus préoccupés par les conséquences de la guerre pour leur pays que par le fait de s’en prendre au coupable présumé. » Vous vous rendez compte, ces gens pensent à leur intérêt national au lieu de défendre le nôtre !

Il y a également quelque chose d’étrange c’est le silence en Occident sur la supériorité militaire stratégique de la Russie. Le contexte dans lequel se déroule « l’opération spéciale » est quand même celui où la Russie a fait la démonstration de sa maîtrise des missiles hypersoniques qui avec d’autres équipements lui ont conféré une supériorité nucléaire stratégique. Pendant que les États-Unis ont privilégié « la guerre contre le terrorisme » après le 11 septembre, et accepter de passer sous les fourches caudines d’un complexe militaro-industriel corrompu jusqu’à l’os. Il y a désormais et pour moi une dizaine d’années un déséquilibre stratégique entre les États-Unis et la Russie. Au profit de celle-ci…

La liste de tous ces exemples qui donnent une idée de la rapidité d’un monde qui change s’allonge tous les jours. On citera celui-là pour terminer qui raconte en creux le processus de la chute du dollar. D’ici novembre, les cinq plus grandes économies d’Asie du Sud-Est (les Philippines, la Malaisie, l’Indonésie, Singapour et la Thaïlande) signeront un accord sur l’intégration de leurs systèmes de paiement mobile. Cela rendra les transferts transfrontaliers beaucoup plus efficaces, et ce sans utiliser le dollar.

Panique cognitive

Plutôt que de psychiatriser Vladimir Poutine et de s’inventer un monde qui n’existe pas, il vaudrait mieux écouter ce qu’il dit et essayer de comprendre le basculement qui vient de s’opérer. Le problème est que les élites au pouvoir dans le bloc occidental sont devenues incapables d’appréhender le réel, et en sont réduites à tanguer sur un sol qui se dérobe sous leurs pieds. Parler du caractère suicidaire de la stratégie de l’UE vis-à-vis de la Russie est devenu un lieu commun banal. Nous sommes complètement à sa merci, elle qui pourrait tout à fait couper nos approvisionnements énergétiques au seuil de l’hiver. Provoquant instantanément l’effondrement économique de l’Europe. Sans parler bien sûr de l’arme alimentaire, et des autres matières premières indispensables. La seule chose qui nous en protégerait serait justement la construction de ce nouvel ordre international multipolaire dont la Russie est un des acteurs principaux. Ordre qu’elle entend préserver en ménageant ses grands partenaires. Jusqu’à présent, elle a respecté ses engagements internationaux, y compris vis-à-vis d’un Occident qui lui a pourtant déclaré la guerre. Pas pour des raisons morales évidemment, mais parce que c’est son intérêt. Et sûrement pas non plus par bienveillance vis-à-vis de l’Occident dont elle se moque désormais et dont elle sait que la rupture avec lui est irréversible.

Quant aux élites au pouvoir, il ne s’agit pas seulement de ces très médiocres dirigeants de rencontre qui sont à la tête des États, mais également de l’ensemble du dispositif institutionnel. Et en particulier l’alliance frauduleuse entre l’oligarchie et le système médiatique à base de journalistes dévoyés, d’experts stipendiés, et de gradés incompétents. On ne reviendra pas sur l’ineptie des « narratifs », en particulier militaires, qui nous ont été servis depuis cinq mois, si ce n’est pour préciser qu’il s’agit autant de propagande que d’auto-intoxication. Dans ce domaine, la France a été particulièrement lamentable, les médias se contentant de reproduire servilement et exclusivement les discours ukrainiens, même les plus grotesques. Mais, ce qui est tout à fait étonnant c’est le spectacle de cette presse-système que l’on sent de loin en loin fléchir et commencer, face à l’évidence du réel, à nuancer sa présentation. Pour se reprendre très rapidement et revenir au bout de quelques jours à un descriptif dont la principale, sinon essentielle motivation n’est pas de dire la vérité, ni même de poursuivre sa propagande, mais finalement de se rassurer. Malheureusement, la défaite de l’Occident commence à prendre tournure, et pas seulement sur le terrain militaire en Ukraine. C’est la raison pour laquelle le terme de « panique cognitive », semble s’imposer pour caractériser leur attitude. Et qui est le fruit de la difficulté à appréhender un changement majeur du monde qui leur est insupportable.

J’invite, sans qu’il faille y voir le moindre point Godwin, à la lecture du journal de Joseph Goebbels et en particulier la partie qui concerne la dernière année du IIIe Reich. Comme la majorité du peuple allemand, alors qu’il est un professionnel de la propagande et qu’il est aux premières loges pour accéder au réel, il refuse celui-ci de manière pathétique et suicidaire. Jusqu’à la catastrophe finale.

Veillée d’arme

La France a connu un épisode politique bizarre, avec une réélection d’Emmanuel Macron assez confortable, suivie d’une défaite de la Macronie aux législatives qui a pour effet de la ligoter. Ses marges de manœuvre sont très faibles, et la façon qu’a Emmanuel Macron de gouverner, si tant est que l’on puisse qualifier ainsi sa méthode consistant exclusivement à se mettre en scène, le conduit directement à l’impuissance. Il y a bien sûr la situation économique, due notamment à la crise du Covid, à la récession et à l’inflation, que l’effet boomerang des stupides sanctions anti-russes va considérablement aggraver. Une partie des versements Covid par la BCE est subordonnée à la mise en œuvre d’un train de réformes impopulaires comme celle des retraites ou la finalisation de la privatisation/destruction des services publics. La combinaison des crises économiques, politiques et financières peut, de ce point de vue, confronter Emmanuel Macron à une situation inextricable. Et cet été caniculaire commence à ressembler à une veillée d’armes politique et sociale.

Face à ces perspectives dangereuses, quand l’hypothèse d’un conflit nucléaire ne peut pas être écartée de façon désinvolte, répétons encore une fois, que plutôt que de traiter Vladimir Poutine de fou ou de prétendre qu’il développe une collection de cancers, il aurait mieux valu l’écouter. Par exemple ce qu’il dit à propos des « élites » occidentales :

« Ils auraient dû comprendre qu’ils ont déjà perdu dès le début de notre opération militaire spéciale, car son début signifie le début d’une rupture radicale de l’ordre mondial à l’américaine. C’est le début de la transition de l’égocentrisme américain libéral-mondialiste vers un monde véritablement multipolaire – un monde fondé non pas sur des règles égoïstes inventées par quelqu’un pour lui-même, derrière lesquelles il n’y a que le désir d’hégémonie – [……] Et nous, nous devons comprendre que ce processus ne peut plus être arrêté ».

La guerre en Ukraine n’est qu’un des aspects de l’affrontement « Occident contre reste du Monde ». La défaite de l’Ukraine bien sûr, mais en fait celle de l’OTAN est consommée. Ce sera probablement la « Bataille d’Andrinople » de l’empire américain.

Bienvenue dans le Nouveau Monde.

Fermeture des urgences, casse de l’hôpital public : la mise en danger de la vie des patients par manque de services public conduit à des morts – entretien avec Christophe Prudhomme, porte parole de l’association des médecins urgentistes de France

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Entretien avec Christophe Prudhomme. Médecin  au Samu de Seine Saint Denis c’est un fin connaisseur de la réalité du terrain et de l’hôpital. Syndicaliste, c’est un spécialiste du système de santé ; il est porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf) . Voici l’entretien qu’il a accordé à Fadi Kassem pour www.initiative-communiste.fr ce  vendredi 15 juillet 2022.


Initiative Communiste – Peux-tu nous présenter François Braun, le nouveau ministre de la Santé ? Se différencie-t-il de ses prédécesseurs, et notamment d’Olivier Véran ?

Christophe Prudhomme :   Président du syndicat Samu-Urgences de France (de fait, un intérêt corporatiste), François Braun est le faire-valoir de la société civile dont se vante Macron. Mais en réalité, il a participé depuis 15 ans (donc, depuis Sarkozy) à toutes les négociations au sein des instances ministérielles. Sollicité pour préparer la prétendue loi dite d’accès aux soins pour tous, il a été le conseiller Santé de Macron pendant la campagne présidentielle : connu de l’establishment, il représente le prototype du corps intermédiaire connaissant certes le terrain, mais servile et acceptant tout ordre ou décision de ses supérieurs.

Le choix de Braun est cependant un choix par défaut : d’abord pressenti, Philippe Juvin, chef des services d’urgence à l’hôpital Georges Pompidou à Paris et candidat LR à la primaire pour la présidentielle, avec une orientation clairement fascisante (quand il était vice-président des Hauts-de-Seine, il avait voulu attribuer le nom de Kléber Haedens, l’ancien secrétaire particulier de Charles Maurras, à un collège de la commune de La Garenne-Colombes, ville dont il est encore maire !), a refusé ; de même pour Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France, membre d’Agir (le mouvement de Pécresse), maire de Fontainebleau et député LREM. Je pensais alors que Nicolas Revel serait le mieux placé : directeur général de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP), il a également été directeur de la Caisse nationale d’Assurance maladie (CNAM) et directeur de cabinet de Jean Castex à Matignon, et a même grenouillé à l’Elysée sous François Hollande ; mais il a lui aussi décliné.

 

  Depuis qu’il est ministre, Braun ne cesse de multiplier les sorties contradictoires : alors qu’il défendait la réintégration des personnels soignants non-vaccinés il y a un an, il s’y oppose désormais farouchement. Ceci illustre une réalité plus profonde : le ministère de la Santé est un ministère sous la tutelle de la direction de la Sécurité sociale présente à Bercy, au sein du ministère de l’Économie. D’ailleurs, Braun conserve le même cabinet qu’Olivier Véran, cabinet mis en place directement par l’Élysée : de fait, le directeur de cabinet du ministère de la Santé est le vrai ministre.

Braun tente de s’appuyer sur les copains et les coquins : non pas les personnels soignants constamment sur le terrain, mais sur les médecins passant leur temps en réunion (et jamais au contact des malades et des soignants). Praticien hospitalier, Braun n’est respecté ni au niveau médical, ni au niveau institutionnel : en réalité, les personnes qui impulsent réellement la ligne politique sont des médecins membres des LR, et notamment Pierre Carli, directeur du Samu de Paris.

La politique de long terme demeure la même depuis au moins Sarkozy, comme pour d’autres secteurs publics comme l’Éducation Nationale : appliquer les principes de l’école de Chicago en marchandisant tout, en prétextant des dysfonctionnements pour fermer des unités publiques et en transformant les hôpitaux en boîtes rentables – notamment en favorisant l’émergence des cliniques privées.

 

Initiative Communiste – Le nouveau ministre de la Santé vient de te répondre publiquement que, avec sa gestion hospitalière, aucun patient ne resterait à la porte des urgences. Qu’en est-il alors que la situation de l’hôpital public inquiète de nombreux malades en pleine remontée épidémique?

 

Christophe Prudhomme : Braun a lancé une Mission Flash, qui visait à empêcher que l’on parle de la situation des urgences pendant la campagne des élections législatives. Parmi les 41 mesures préconisées émerge l’idée que les urgences peuvent filtrer les patients la nuit : concrètement, cela signifie que les patients doivent appeler le 15 pour savoir s’ils ont le droit d’accéder aux urgences ! Et comme les citoyens et les travailleurs ont un vrai esprit civique, ils appliquent globalement cette préconisation en réalité mortifère car elle aboutit tout simplement à la mise en danger de la vie des patients par manque de services publics. Récemment, à Manosque (Alpes-de-Haute-Provence), un enfant victime d’un accident de la route n’a pas été immédiatement transporté aux urgences, sa situation n’étant pas jugée grave ; or le lendemain, le pédiatre a remarqué un gros hématome au niveau du foie : cet enfant aurait pu mourir dans la nuit !

 

  La préconisation de filtrer les urgences la nuit est déjà appliquée dans des métropoles : à Bordeaux, la municipalité multiplie les affiches « publicitaires » incitant à limiter l’accès aux urgences la nuit ; la situation est même pire à Grenoble, où cette préconisation vise aussi bien les hôpitaux publics que les cliniques privées ! En outre, plusieurs dizaines de services d’urgence ont déjà fermé la nuit, y compris dans des villes de taille importante comme Manosque, Draguignan (Var) ou Laval (Mayenne). Il en résulte une surmortalité, notamment pour les patients souffrant de maladies graves nécessitant une prise en charge immédiate mais qui n’osent plus se rendre aux urgences ; à quoi s’ajoute un terrible manque de lits.

 

La situation est tellement grave que même Les Échos, à qui j’ai accordé un entretien, a titré « Il va y avoir des morts », du fait d’une véritable mise en danger de la population. Un autre élément illustrant la dramatique dégradation des services d’urgence tient au fait que ce ne sont plus des médecins qui organisent le protocole au Samu mais des infirmières, souvent débordées et qui n’ont pas toujours les compétences nécessaires face à certaines situations urgentes et spécifiques.

Aujourd’hui, il n’y a plus de « dialogue social » de la part du ministre qui refuse d’aborder les problèmes de fond concernant les urgences. Il n’a d’ailleurs voulu rencontré ni la CGT-Santé, ni l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), les deux organisations les plus représentatives des personnels soignants en souffrance, et ce alors que les démissions sont massives. C’est d’autant plus inquiétant face à la remontée des cas de Covid.

 

Initiative Communiste – Quelles sont les mesures d’urgence et de plus long terme qu’il faut prendre pour empêcher l’écroulement du service public de la Santé ?

Christophe Prudhomme :  Au-delà du fait qu’il est impossible d’échanger avec le ministre, ce dernier a proposé, dans le cadre de la Mission Flash, de faire appel aux médecins retraités pour suppléer le manque de personnel et de majorer les heures supplémentaires. Or ce que veulent les personnels soignants, ce sont des vacances (au moins pour se reposer) et de vraies augmentations de salaires !

Dans l’immédiat, deux mesures d’urgence peuvent être appliquées face à la situation catastrophique :

  1. Le rétablissement de l’obligation de garde pour tous les médecins, aussi bien généralistes que spécialistes (sauf pour des spécialistes aux caractéristiques très spécifiques) en ville, en clinique ou à l’hôpital. Cela permettrait de répartir la charge de travail afin que tout patient puisse accéder aux urgences de jour comme de nuit ; et c’est d’autant plus possible qu’il y a assez de médecins pour faire appliquer cette mesure.
  2. L’augmentation des moyens pour que les médecins effectuent des visites à domicile car ces dernières, mal payées, se sont effondrées. Aujourd’hui, on stigmatise les patients qui viendraient aux urgences « pour pas grand-chose », moyen fourbe de faire silence sur le fait que 20 à 25% des personnes hospitalisées aux urgences n’ont pas de lit ! Aussi, les visites des médecins, accompagnés d’une infirmière, au domicile propre du patient ou dans les EHPAD (où l’absence de médecins et d’infirmières est criante – et nous voyons le résultat avec le scandale Orpéa), peuvent permettre de résoudre en partie les problèmes des urgences. Et si les médecins estiment que cela leur revient cher car il faut se déplacer, des solutions existent : à Libourne (Gironde), les médecins bénéficient d’une voiture avec chauffeur.

 

Au-delà de ces mesures d’urgence non mises en place par crainte du lobby médical désireux de démanteler la Sécurité sociale, nous portons trois grandes revendications depuis au moins 2019 – qui auraient d’ailleurs pu déboucher sur de premiers résultats assez rapidement si elles avaient été appliquées :

  1. Un grand plan de formation et d’embauche de personnel (100.000 à l’hôpital et 200.000 dans les EHPAD). La fin de non-recevoir arguait le fait qu’il faut une année pour former un(e) aide-soignant(e) et trois années pour une infirmière/un infirmier ; mais si cette mesure avait été adoptée dès 2019, nous aurions eu les premiers aides-soignants dès 2020 et une première cohorte d’infirmières en cette année 2022 !
  2. Une hausse des salaires, non par majoration des heures supplémentaires mais par volonté politique. Cela est d’autant plus urgent qu’à l’heure actuelle, en parité de pouvoir d’achat, une infirmière française gagne moins qu’une infirmière mexicaine ! Et ce, alors que les cadences de travail ont explosé – et l’épuisement avec.
  3. L’arrêt des fermetures de lits d’hôpitaux et des « restructurations » qui débouchent sur la fermeture d’hôpitaux. Ainsi, en Île-de-France, Aurélien Rousseau, ancien directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) et désormais directeur de cabinet d’Elisabeth Borne, a fermé les hôpitaux Bichat (Paris 18e) et Beaujon (Clichy, Hauts-de-Seine) pour un projet d’hôpital Grand Paris Nord, entraînant la perte de 300 lits et 800 emplois ; parallèlement, il a autorisé une « restructuration » à Neuilly, à savoir le regroupement de trois cliniques privées en une seule unité comprenant 420 lits et 30 blocs opératoires – le tout, évidemment, avec un reste à charge aux patients croissant et de plus en plus inaccessible. Pendant ce temps, en Seine-Saint-Denis, le nombre de médecins traitants s’est effondré et les patients se rendent aux urgences saturées en cas d’évolution de la pathologie…

 

Il faut ajouter qu’il est fondamental de rétablir un principe constitutionnel : celui d’assurer des soins à tous les patients sur l’ensemble du territoire national au nom du principe d’égalité républicaine. Or ce principe nécessite de réguler l’installation des médecins, donc de mettre fin à la liberté d’installation pour officier là où il y a des besoins (et ainsi, mettre fin aux déserts médicaux) ; parallèlement, il est nécessaire de trouver un autre mode de rémunération pour les jeunes personnels soignants qui arrivent. C’est pourquoi nous appelons à la création de Pôles santé publics et collectifs au sein desquels travaillent des salariés : ce ne seraient pas forcément des fonctionnaires car ils pourraient dépendre de l’Économie sociale et solidaire (ESS), des mutualités et des collectivités territoriales ; il est même possible d’élargir un système coopératif existant déjà depuis la loi Hamon de 2014.

 

L’enjeu de la Santé est aussi un enjeu politique : comme dans d’autres domaines comme l’Éducation nationale, Macron – véritable VRP d’Uber quand il était ministre de l’Économie sous Hollande – souhaite importer le modèle états-unien en France, alors que l’espérance de vie diminue depuis 2014 aux États -Unis car les jeunes ne peuvent plus se faire soigner correctement. Pire : le combat des symptômes (et non de la maladie en tant que telle) par des antidouleurs provoque actuellement la mort de 60.000 personnes par an par overdose de produits morphiniques, soit deux fois plus de morts que par les armes à feu !

Le combat des urgences, c’est aussi un combat politique urgent !