vendredi 9 février 2024

 2024

Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

capture d'écran

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Ouf, les commentateurs zavisés de la politique politicienne aux ordres du capital n'en pouvaient plus. A longueur d'antennes et de Unes, comme dans les micros,  c'était à qui pronostiquerait qui remplacerait qui comme chambellan de l'Elysée ou qui ledit palais renierait.

Bon, désormais, on est fixé. Bayrou a refusé d'être ministre de la Guerre, il préférait l'école. AOC, qui tenait ce portefeuille, après quatre toutes petites semaines, est remplacée par Nicole Belloubet, ex-militante socialiste et anciennement ministre macroniste de la justice. Comme quoi, en politique politicienne, quand on a des convictions!

Pour les retraités, c'est madame Fadila Khattabi qui s'y recolle comme ministre déléguée. Elle aussi fit ses premières armes politiques au sein du Parti socialiste, comme vice-présidente de la région Bourgogne. Comme quoi, en politique...

Question social, elle semble avoir de bons restes. En juin 2023, le Conseil de prud'hommes de Dijon la condamne à verser 6 522,27  à son ancienne collaboratrice parlementaire, pour non-paiement d'heures supplémentaire. Elle était devenue députée macroniste.

Dans son communiqué du 5 février 2024, la CGT Retraités remarque que dans son rôle de perroquet, durant 1h 30 sur la politique générale qu'il doit mener pour l'Elysée, Gabriel Attal n'a jamais prononcé le mot "retraité".

"Déclaration qui se situe dans la droite ligne des gouvernements précédents : poursuite de la libéralisation, précarisation accrue de la population avec la suppression de l’allocation spécifique de solidarité pour les privés d’emplois et bascule vers le RSA, sanction pour les rendez-vous médicaux non honorés, attaques contre le logement social et remise en cause de la loi SRU, suppression de normes environnementales, etc.

Un seul paragraphe concernant le bien vieillir sans objectifs clairs et sans référence à une future loi grand âge alors que les attentes sont fortes, tant du côté des personnes âgées et dépendantes que du côté des aidants.

Aucune allusion à une nouvelle revalorisation des retraites et pensions de base, ni sur celle du taux de pension de réversion alors que 50 % des 17,3 millions de retraités ont des pensions en dessous du Smic et que 1,4 million sont considérés comme pauvres, c’est-à-dire avec des retraites inférieures à 965 €. Pour l’UCR-CGT, les retraites doivent être revalorisées immédiatement de 10 % et des mesures doivent être prises pour qu’aucune retraite ne soit en dessous du Smic.

Alors que le « bien manger » participe du maintien en bonne santé de la population, le Premier ministre annonce un recul sans précédent sur les normes environnementales dans l’agriculture au bénéfice de l’agriculture business et des grands groupes de l’agroalimentaire sans se soucier de l’impact sur la santé des paysans, des salariés agricoles, des consommatrices et consommateurs et de celle de la planète. Pour l’UCR-CGT, l’agriculture française doit avoir la capacité de répondre aux besoins alimentaires, en quantité et en qualité, de la population, respectueuse de l’environnement et soucieuse de sauvegarder les ressources naturelles.

Tous les signaux d’alerte sont allumés et virent au rouge !

La politique imprimée par le gouvernement Attal vise à sanctionner les plus précaires, à déstructurer ce qui faisait la solidarité dans notre pays. L’adaptation des règles, des normes en fonction des particularités territoriales va cultiver la division au sein de la population.

Ne laissons pas le gouvernement et le patronat détruire notre bien commun, remettre en cause nos conquis sociaux.

Mobilisons-nous massivement les 8 mars et 26 mars !"

 

L’Agrobusiness contre les paysans

vendredi 9 février 2024 par Unité CGT   Bloc ANC


Le mouvement social simultané d’agriculteurs en Europe (France, Espagne, Allemagne, Pays Bas, Italie, Grèce, Roumanie…) a provoqué en ce début d’année 2024 l’irruption dans le débat public de la question « agricole ». Si la mobilisation des Agriculteurs en France a pris fin, du moins sous la forme qu’on a connue en janvier, les mouvements se poursuivent dans différents pays d’Europe.

En France, la mobilisation des Agriculteurs, fortement cadenassée par la mafia patronale FNSEA et JA (dominés par l’agrobusiness) a provoqué une crise de deux semaines, scellée (du moins, en apparence) par un nouveau deal extrêmement avantageux pour (comme d’habitude) les mêmes profiteurs et « gros » du monde agricole.

Le gouvernement a « lâché » quelques 150 millions d’euros d’aide indirecte (défiscalisations), une somme à la fois très élevé mais qui, « en même temps », est plus que largement insuffisante (dans le fond comme dans la réforme) pour répondre à l’urgence sociale chez les paysans. Cela s’ajoute à des faux reculs comme la suspension de la fin de la défiscalisation du carburant agricole.

Les ultras libéraux qui nous dirigent et ouvrent toute l’économie à la concurrence européenne et internationale ont menti lorsqu’ils ont parlé de leur refus « en l’état » de l’accord de libre-échange avec le Mercosur.

Les gros exploitants vont pouvoir utiliser toujours plus de phyto, au détriment de l’environnement, de notre santé, et de celle des ouvriers qui travaillent sur ces exploitations.

La séquence agraire de janvier aura également permis de constater la différence de traitement, médiatique et policier, de la mobilisation des Agriculteurs.

Le pas de deux calculé entre le gouvernement et la FNSEA a accouché d’une souris pour les petits et moyens Agriculteurs. La mobilisation, impactante de par les actions organisées et l’aspect commun à tous et toutes de la revendication du « mieux vivre de son travail », pouvait pourtant porter un espoir, dans le secteur primaire, comme pour tous les salariés et employés.

Sans parler encore de convergence, hormis bien sûr en pratique par des actions et blocages menées par la Confédération paysanne, des évidences se sont manifestées dans cette séquence. La réalité de nombre d’Agriculteurs se sont manifestées. L’appel de la Confédération Paysanne et d’autres organisations comme les Soulèvement de la Terre, ont démontré la possibilité de fissurer des murs artificiels qui séparent et divisent notre camp social.

Au vu de l’inégalité consécutive du modèle d’organisation du secteur primaire (et son articulation avec l’agro-alimentaire et la grande distribution), de la pénibilité et de la précarité du métier, l’arrêt de la mobilisation « générale » des Agriculteurs, décidée par la mafia patronale ne change en rien la situation dramatique et réelle vécue dans le réel par des dizaines de milliers de petites et moyens agriculteurs.

La Confédération Paysanne poursuit d’ailleurs la mobilisation en axant notamment sa stratégie autour des revendications du revenu paysan, de la fin des accords de libre-échange, d’un changement de logique, hors agro-industrie, afin également de rompre avec la « fin » programmée du monde paysan – un tiers des agriculteurs en activité doit partir à la retraite d’ici dix ans.

Dans l’immédiat, des points de convergences et d’unité :

La question du revenu paysan pose en miroir la question du salaire ; alors que l’inflation bat encore des records, la revendication de l’indexation des salaires, revenus, pensions, allocations sur l’inflation est centrale.

Les traités de libre-échange, prétexte et prélude à l’éclatement des industries et services publics portent préjudice à tous et toutes et il convient donc de les dénoncer et d’en réclamer le retrait.

La question du « mieux vivre » qui implique un certain nombre de solutions implique de croiser et la réponse aux besoins sociaux (comme se nourrir) avec la prise en compte de normes environnementales pour, ne pas se tuer, et au travail pour les producteurs, et au repas pour les consommateurs.

Il y a, en vérité, du grain à moudre. Pour les paysans, les usagers, les salariés.

Le modèle actuel, fondé sur le couple agro-industrie et industrie de l’agroalimentaire, subventionné par l’UE et l’Etat est en fin de cycle. Les ouvertures à la concurrence, qui ont dopé les exportations françaises à l’étranger, ont poussé à une concentration maximale du secteur primaire ainsi qu’à une intégration très poussée avec la chaine de l’agroalimentaire. Ces éléments expliquent d’ailleurs en partie la disparition progressive du corps social des paysans (500 000 en France aujourd’hui), condamné à une très brutale « loi de la jungle » capitaliste.

Ce crépuscule du monde paysan, couplée à la sur-exploitation des derniers petits exploitants, se double également d’une perte de vitesse inexorable sur le marché international pour le patronat français rattrapé par ses concurrents brésiliens, allemands, argentins, néerlandais, mexicains, canadiens…

La survie, résilience et résurgence du monde paysan passe donc par un changement de paradigme qui suppose et impose un démantèlement de l’oligarchie de l’agro-business, un secteur qu’il convient de refonder de la cave au grenier.

Le modèle de l’agrobusiness, pompe à subventions publiques et communautaires, fondé sur une fuite en avant permanente, et la course insatiable au profit (en dépit des dommages) et la recherche de parts de marchés à l’étranger ne sert pas à « nourrir la France » comme le prétendent les lobbyistes de l’agrobusiness et de l’agro-alimentaire.

La réponse aux besoins, l’intégration totale, « de la fourche à la fourchette » et au bénéfice de tous et toutes passent aussi, outre la recomposition de l’agrobusiness, par la planification et également la nationalisation des secteurs de l’agroalimentaire et de la grande distribution.

 

La recette du monde de demain est en train d’être écrite par les cuisiniers du Moyen-Orient

Le club Valdai est à l’origine un club très conservateur regroupant des gens comme ceux du club de l’horloge, des personnalités comme François Fillon, qui non seulement avaient salué la fin de l’URSS et le retour de la sainte Russie à la manière d’une Carrère d’Encausse, mais se sont rapidement inquiétés de la manière dont les appétits capitalistes étaient en train de remettre en cause leur rêve de régression harmonieuse. Poutine a indéniablement accueilli avec sympathie cette force réactionnaire considérée comme stabilisatrice. Mais avec le temps, si l’orientation initiale demeure et ici on la sent à l’œuvre dans la vision du Moyen orient, entre route de l’énergie, pétrodollar et terre sainte, le débat s’est élargi comme dans toute la société russe, post soviétique y compris avec des communistes des milieux scientifiques. Cela donne ce site et ce genre de texte qui reflète l’existence d’un dialogue entre courants venus d’horizons opposés comme cela a pu exister entre les communistes et Theilhard de Chardin du temps où les communistes français représentaient la garantie d’un échange où chacun savait qui il était mais tentait une approche des réalités et du devenir à partir des expériences et des connaissances scientifiques. La rencontre crée des perceptions plus aiguës : Les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont multiplié les possibilités de manipulation, elles ont même créé une situation étonnante où le manipulé et le manipulateur sont, en général, une seule et même personne. Ce qui est facile si l’on conçoit que ce sont des algorithmes qui produisent les “groupes” identitaires dans lesquels on enferme la pensée et on divise à volonté en éliminant tout ce qui peut de près ou de loin conduire à une véritable connaissance, des références qui ne soient pas simples citations de l’almanach Vermot. Bref lisez ce texte qui donne la nostalgie d’échanges dont la France pourrait faire son profit entre gens qui savent d’où ils parlent. (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)

Illustration : @ Ashraf Amra/Keystone Press Agency/Global Look Press

https://vz.ru/opinions/2024/2/8/1252306.html

Le Moyen-Orient a joué un rôle exclusif dans le développement de l’humanité. Et, selon toute apparence, il continue à jouer un rôle considérable, car c’est dans cette région que se déroulent des processus qui façonneront en grande partie l’avenir dans lequel l’humanité devra vivre.
Par Andrei Bystritski, Doyen de la Faculté des communications, des médias et du design, École supérieure d’économie de l’Université nationale de recherche, président du conseil d’administration de la Fondation pour le développement et le soutien du club Valdai.

L’ensemble du monde moderne est en mouvement. Toutes les régions, tous les pays participent dans une certaine mesure à la création d’un nouvel ordre mondial. Cherchant à résoudre leurs propres problèmes, à rendre leur développement durable et rapide et leurs frontières sûres, ils créent un nouveau tissu de liens, d’alliances, de traités, de relations, d’obligations, de règles de comportement sur la scène internationale et bien d’autres choses encore – tout ce qui constitue l’ordre mondial, le système de régulation du comportement des différents acteurs sur la scène internationale.

Pourtant, le Moyen-Orient reste une région unique où les intérêts d’une grande partie du monde se croisent. Les États-Unis, la Chine, l’Europe occidentale, la Russie, l’Inde, l’ensemble du monde musulman, de nombreux pays d’Afrique et même d’Amérique latine, et pas seulement eux, sont plus ou moins impliqués dans les problèmes de la région. Par conséquent, les décisions prises ici, qui peuvent réduire l’acuité des problèmes régionaux, peuvent en quelque sorte devenir un modèle à l’avenir, et les approches des solutions susmentionnées peuvent être utilisées dans d’autres régions.

Comme nous le savons, la situation au Moyen-Orient s’est brusquement aggravée à l’automne dernier et, malheureusement, elle continue de s’aggraver. Il ne fait aucun doute que la violence s’intensifie et que de plus en plus de forces y sont entraînées. Le nombre de victimes augmente également, ce qui est compréhensible. Dans le même temps, il existe un espoir de règlement, que la raison et le sens des responsabilités politiques l’emportent et que des mesures soient prises pour réduire le niveau de tension dans la région.

Cet espoir repose sur la qualité de l’élite moderne des pays du Moyen-Orient et sur le fait que le monde moderne, et par conséquent le Moyen-Orient, est devenu beaucoup plus connecté à l’information, plongé dans une communication intensive entre pratiquement tout le monde. Cette dernière circonstance peut, hélas, jouer un double rôle : non seulement promouvoir une approche rationnelle des conflits, mais aussi fomenter la discorde, semer la haine et désinformer les gens par tous les moyens possibles.

Dans de nombreux pays du Moyen-Orient, une élite jeune et éduquée est aujourd’hui au pouvoir, pleine d’estime de soi et apparemment consciente de sa responsabilité dans le développement de son pays et de la région dans son ensemble. Ce point de vue est étayé par l’amélioration progressive des relations entre les pays de la région, qui s’est poursuivie jusqu’à récemment. Par exemple, entre l’Arabie saoudite et l’Iran ou Israël et les Émirats arabes unis.

Les élites de la région semblent avoir choisi une voie plutôt indépendante, quoique prudente. Elles ne veulent évidemment pas se brouiller avec qui que ce soit, mais en même temps, elles ne vont pas se mettre à dos, par exemple, les États-Unis ou les pays d’Europe occidentale.

Hélas, toute manœuvre a ses limites, car il y a des problèmes qui ne peuvent être résolus sans des mesures lourdes et de grande ampleur, sans la capacité de faire des compromis, parfois très douloureux. La question palestinienne est certainement l’un de ces problèmes, sans le règlement duquel il ne peut y avoir de paix durable au Proche-Orient. Il convient de noter que c’est précisément cette question qui a fait échouer le plus fatalement de nombreuses tentatives d’accord entre les parties belligérantes. Des prix Nobel ont même été décernés pour sa résolution, mais, en général, cela n’a pas abouti à quelque chose de particulièrement bon.

L’histoire des Houthis ajoute également des couleurs et des éléments à la mosaïque générale des problèmes de la région et montre très clairement que l’océan d’informations dans lequel le monde en général et le Moyen-Orient en particulier sont immergés est plein de récifs dangereux.

Le fait est que l’influence de ce que l’on appelle l’opinion publique sur la politique des pays s’accroît. Certes, le rôle des masses a toujours été grand ; en quelques jours, elles ont balayé nombre de grandes puissances qui semblaient auparavant inébranlables. Il n’est pas nécessaire d’aller bien loin pour trouver des exemples : l’Empire russe, comme l’a écrit Vassili Rozanov, s’est effondré en trois jours. Certes, les masses ont toujours été manipulées, les peuples montés les uns contre les autres, mais aujourd’hui la situation est sans précédent.

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont multiplié les possibilités de manipulation, elles ont même créé une situation étonnante où le manipulé et le manipulateur sont, en général, une seule et même personne. Je le répète, les nouvelles technologies et les nouvelles possibilités de communication ne peuvent être toutes mises dans le même panier. Elles ont de nombreux avantages, elles rendent les gens plus actifs, dans de nombreux cas plus instruits, et conduisent généralement au fait que l’influence des gens “ordinaires” sur la politique et la prise de décision augmente. Bien qu’il s’agisse d’un processus non linéaire.

Il y a donc à la fois de nouvelles élites et de nouvelles masses qui opèrent actuellement au Moyen-Orient. Toutes deux n’aiment pas le passé colonial (lorsqu’il a existé), ne veulent pas tolérer l’habitude de nombreuses personnalités occidentales d’enseigner et de commander, et veulent construire l’avenir qu’elles souhaitent. En même temps, et c’est très important, ils sont généralement prêts à s’entendre, à coexister avec d’autres pays, d’autres peuples, dont les idées sur l’avenir peuvent différer des leurs. L’amélioration déjà mentionnée des relations entre au moins l’Arabie saoudite et l’Iran en est la preuve.

Bien sûr, il y a des désaccords entre les pays du Moyen-Orient, il y a activité démesurée des pays occidentaux qui, dans de nombreux cas, contribuent à alimenter les conflits, il y a des groupes et des communautés actifs et très agressifs. Mais c’est précisément à cause de cela, à cause de la complexité exceptionnelle de la région, que tout règlement réussi peut être considéré comme une étape importante sur la voie de la construction d’un avenir acceptable pour tous.

Nous pouvons nous attendre à ce que, les 13 et 14 février à Moscou, la XIIIe conférence sur le Moyen-Orient du Club de discussion international Valdai et de l’Institut d’études orientales de l’Académie des sciences de Russie, intitulée “Le moment d’une action décisive : un règlement global au service de la stabilité dans la région”, soit un événement intéressant, d’autant plus que le temps nécessaire à l’élaboration de solutions efficaces s’écoule rapidement. Comme cela a déjà été dit, nous assistons jusqu’à présent à une escalade des conflits et à un risque croissant de guerre majeure.

 

Les “ idle games ” : simulateurs de petite bourgeoisie

Ces dernières années, dans les catalogues des jeux dématérialisés, et notamment parmi les jeux mobiles, un type de jeu nouveau s’est répandu comme une traînée de poudre : les jeux incrémentaux, ou jeux inactifs, beaucoup plus connus sous leur appellation anglaise, les « idle games ». Un jeu qui promet de ne pas avoir besoin d’être joué... Comment un truc pareil aurait-il pu intéresser qui que ce soit ?

Apparu au début des années 2000 dans les bibliothèques de jeux flash gratuits, puis dans les mini-jeux Facebook, ce style connaît une réelle percée en 2013 avec un jeu qui va créer le standard indépassé du genre : Cookie clicker. On prend ici le rôle d’un entrepreneur qui fabrique des cookies. Première étape : cliquer. On utilise sa force de travail pour fabriquer quelques cookies. Ces cookies vont petit à petit nous permettre d’acheter des cliqueurs automatiques. Puis des grands-mères, qui vont cuisiner les cookies. Puis des usines de cookies, des mines de cookies, des opérations spatiales qui ramènent des cookies, des accélérateurs à neutrons qui produisent des cookies à partir du vide. Face à toute cette production massive et exponentielle de cookies, on arrête bien vite de cliquer.

Alors on a vu çà et là apparaître tout un tas de dérivés esthétiques. Castors minant des émeraudes, villages exploitant les ressources, héros partant tuer des escouades de monstres à la chaîne, ou fabrication à la chaîne de monstres pour vaincre des héros. Alors on calcule son investissement, on choisit ceux qui sont les plus rentables, on part à l’aventure pour trouver davantage de ressources (en cliquant sur un logo de casque de colon... sympa), on évalue la chaîne d’approvisionnement pour qu’elle soit sans cesse sous tension sans être insuffisante, et on fait rapidement deux constats.

Le premier : quand j’arrête de jouer, l’argent rentre tout seul. Pas besoin de cliquer, les usines produisent d’elles-mêmes. Si j’en ai assez d’attendre pour un investissement, je n’ai qu’à laisser les autres travailler. La douleur de ceux qui travaillent ? Aucune alerte ne vient jamais m’en informer. Ce ne sont que des pixels sur mon écran, des millions de pixels qui s’agitent, et qui feraient mieux de continuer. Une grève, ce serait un désastre.

Le deuxième constat : l’expérimentation de la règle qui hante fatidiquement le capitalisme en dépit des économistes néolibéraux qui s’époumonent à nier son existence : la baisse tendancielle du taux de profit. Chaque nouvel investissement est de plus en plus cher pour une rentabilité sans cesse moindre. Il faut toujours attendre plus longtemps pour renflouer davantage les caisses. Alors on est à l’affût du moindre investissement nouveau, de la moindre opportunité, celle qui va nous donner encore un petit coup de pouce.

Puis un jour, on se lève, deux mois après avoir installé Rogue Excavateur, encore un matin, où l’on allume son téléphone avant sa cafetière, parce qu’au bout de neuf heures de veille c’est le bon moment pour investir ses crânes de gobelin dans une nouvelle usine à bûches de Noël, on se retrouve traversé d’un sentiment, celui de la lassitude, qui produit une idée : mais pourquoi je fais ça ?

Pourquoi fait-on ça ? Pourquoi jouons-nous à un jeu qui promet de ne pas être joué, mais auquel on joue quand même à des intervalles définis par les règles du jeu ? Parce que celui-ci se cale sur une résonance particulière de notre esprit, un frisson particulier, c’est le rêve petit bourgeois. Celui de l’entrepreneur, qui monte son entreprise géniale, qui fait des logiciels dans son garage, et petit à petit, d’investissement en investissement, ne devient plus qu’un homme d’affaires, qui peut arrêter de travailler manuellement, et gérer son empire. Alors, en quête d’investissements plus rentables, et afin de ne pas se faire dépouiller par la concurrence, on investit à l’étranger, on poursuit l’exploitation dans d’autres contrées. Et c’est ainsi que le capitalisme devient impérialisme.

C’est ainsi que, dans le marxisme, nous étudions le lien entre l’infrastructure, c’est-à-dire le mode de production économique, ici le capitalisme, et les superstructures, c’est-à-dire les autres phénomènes de la société qui en sont des émanations indirectes et en revêtent ses formes : la justice, la législation, la politique, les arts, la culture, l’école, l’éducation, les loisirs... et les jeux vidéo, qui sont dans leur conception, dans le contexte du capitalisme, les reflets des règles et des valeurs du capitalisme.

Mais Cookie clicker nous mettait en garde. Afin de repousser encore la chute tendancielle du taux de profit, quand les prismes à génération de cookies par la lumière ne sont plus suffisants, une option nouvelle se rend disponible. Vendre grand-mère au diable. Les gains de productivité seront au rendez-vous, mais progressivement, la musique devient sordide, les êtres difformes envahissent l’écran, le monde devient un océan de désolation habité par des créatures hideuses, le ciel rouge plaque sa lumière blafarde sur une terre de ruines, et c’est ainsi que le capitalisme, devenu impérialisme, devient exterminisme, détruit la planète, les animaux, l’humanité, n’en laisse qu’un champ de terres brûlées et dévastées, sacrifiées pour produire toujours plus de cookies.

Il est encore temps d’arrêter la partie.

 


Le bénéfice du doute

Tout ceci est bien sûr le point de vue de celui qui peut tirer une fois encore des failles et des faiblesses de l'enquête pour se prétendre blanc comme neige. La métaphore en période de réchauffement verra sans doute, tôt ou tard, fondre des enquêteurs plus zélés que ceux d'un ministère de la justice prompt à ne pas troubler les amis du pouvoir.

 

Du côté des braves gens, l'expression : « Au bénéfice du doute » a le goût amer du mensonge, de la combine et du déni de justice. Mais qu'importe notre opinion, nous ne sommes plus rien qui vaille dans ce système des canailles et des crapules qui parviennent en dépit des tempêtes à se faire réélire par un électorat désabusé. L'essentiel est sauf, il s'agit assurément de préserver les apparences, de garder la tête haute en dépit de bien des vicissitudes.

Je leur rends cependant ici la monnaie de la pièce, non point l'argent plus trébuchant que sonnant qui sait opportunément partir en fumée, mais cette comédie du financement des partis qui ne tourne jamais en tragédie pour les acteurs de cette éternelle farce. Ce bénéfice du doute pèse lourd dans les jugements des braves gens qui se moquent éperdument des arcanes d'une justice aux ordres. La tâche demeure en dépit des cris de victoire des acteurs de la farce.

Il y aura des AGIOS sur le compte de cette bande prise la main dans le sac sans qu'il y ait assez de preuves pour condamner un système qui est commun à tous les autres groupes. Le citoyen n'est pas dupe, il sait à quoi s'en tenir sur cette démocratie du fric qui ne cesse de trouver des ressources fussent-elles douteuses pour tuer tout risque de voir apparaître des rivaux. Une élection se gagne non pas avec des arguments, un dessein, des idées mais surtout avec des frais de campagne qu'il convient d'accumuler sans vergogne.

Il y a longtemps que le doute à leur propos amasse des réserves, des incertitudes, des colères et désormais la plus totale défiance. De mandature en mandature nous savons désormais que les comptes bien que faux, mensongers, malhonnêtes ne remettront jamais en cause le résultat. Ne plus leur faire crédit est la seule posture qui s'impose avec ou sans ce bénéfice hypocrite qui ne laisse planer aucun doute derrière lui.

Illustrations

Martine DINET

Jean-François FERBOS

Plantu