é8 Mars 2018
Les monstres
par Jean Ortiz
Je
voulais écrire sur les crimes commis par un islamo-fasciste qui ont
ensanglanté mon département de l'Aude. Je voulais décrier la politique
politicienne de la droite et de son extrême qui surfent démesurément
sur cet attentat terroriste. Et puis, une fois encore, la plume de Jean
Ortiz pour dire tout ça et un peu plus. Bienvenue, camarade, sur mon
blog:
Notre
société, notre monde, en crise, produisent des monstres. Pourquoi ? Que
faire ? D’abord, ne pas hurler avec la meute, ne pas se tromper de
combat. Ne pas en rajouter à des fins d’instrumentalisation
politicienne.
Des
gamins capables de prendre en otage des innocents, de tuer sans
sourciller sont des criminels. Ils n’ont aucune circonstance atténuante.
Comment en sommes-nous arrivés là, au pays jadis des Lumières, des
Droits de l’homme, de la Résistance ? Poser la question sous cette
forme, n’est-ce pas en partie lui répondre ? Effectivement, parce que la
France, son image, sa politique, ne sont plus tout ce qu’elles ont
été ; désormais perçues comme inféodées à Washington, redevenues
(ont-t-elles vraiment cessé de l’être ?) « gendarmes du monde »,
guerroyant dans des expéditions militaires aux objectifs impérialistes à
peine cachés. Qu’est-ce que tout cela peut avoir comme relation avec
les crimes de Trèbes ?
Cela
n’explique pas tout, mais beaucoup... La seule politique à efficacité
réelle, c’est d’essayer de comprendre, en profondeur, ne pas se laisser
aveugler par l’écume des choses, les amalgames faciles. Aucun moyen dit
de « dé-radicalisation » ne débouchera sur une solution inclusive à long
terme. Pour récupérer ces gamins devenus terroristes, il faudra
beaucoup plus d’enseignement, d’éducation, de formations, de débouchés,
d’emplois, d’éthique... Il faudra ne pas fermer des écoles, des gares,
ne pas sélectionner les étudiants à l’entrée de l’université, permettre à
chacun, avec un statut solide, de trouver sa place dans une société qui
ne soit pas une jungle. Il faudra un monde de justice et de paix, basé
sur des valeurs de coopération, de partage, et non sur un cynisme
jupitérien, pas plus que sur les oukases, les éructations fascisantes et
va-t-en guerre du président de la « première puissance » mondiale.
Daesh
n’est que le fruit pourri des dérèglements du monde, engendré dans les
entrailles du capitalisme, nourri par la haine « des autres »,
boucs-émissaires commodes... Il est facile d’oublier maintenant que l’on
a fait joujou, pendant longtemps, avec Daesh, Al Qaïda, et consorts.
Tant que la France ne (re)deviendra pas un pays ouvert, fraternel,
souverain, indépendant, solidaire, il sera difficile de désarmer le
terrorisme, d’en assécher durablement la source : le désespoir,
l’injustice, les inégalités, la colère, l’obscurantisme, la mort des
Palestiniens...
Cependant,
les crimes de Trèbes montrent aussi combien certaines valeurs sont
encore prégnantes dans notre société, qui heureusement, malgré les
politiques néolibérales successives, n’a pas totalement basculé dans la
sauvagerie. Un homme a donné sa vie pour sauver une femme. Il avait une
haute idée de ses missions, un idéal humaniste à en mourir.