vendredi 21 avril 2023
Macron, se prend un Pain de foule !
Visite de Macron à Sélestat. Tout est installé par l’équipe de com. Macron avance sous les huées, passe devant les photographes et se dirige droit vers les officiels. Au lieu de tourner à droite pour entrer dans la mairie, il va droit sur un groupe de mémères et pépères ; ça sent le ballet bien rodé, car rien de ce qui va se passer pendant les deux minutes suivantes n’est spontané. Là, deux rombières en rang d'oignons, comme dans un supermarché, ce que l’on appelle des têtes de gondoles qui ont pour but de mettre en avant un produit phare ; elles sont là, pomponnées comme des juments de cirque, habillées en orange et vert pomme, avec des bijoux d’arbre de noël ; On ne voit quelles, afin de bien ressortir de la masse pour que la caméra de BFM aille tout droit sur les groupies et recueille leurs douces paroles, style : « continuez monsieur le président, on est avec vous, vous êtes courageux » et blablabla... On les sent toute emmouscaillées, proche de l’orgasme par ces secondes de gloire qui resteront dans l’album familial pour des décennies. Puis, un pas vers la gauche, c’est au tour de deux vieux smocks tout contrits, bégayants et si farauds de respirer le même air que le "grand" homme que leurs dentiers sautent presque à la face de Manu militari. Un peu en retrait, y’en a un moins décati qui regarde le Manu, avec des yeux tout ronds de koala, et n’en revient pas d’être en face de son idole…Tout ça sent la manip à gogos et voir ces badernes endimanchées donne la gerbe, tellement ils sont de la race des courtisans, veules et larmoyants, d’une France irréconciliable interrelationnelle. Le Manu, c’est sûr, car il a besoin de ces petites mises en scène pour flatter son ENORME égo, tout en continuant de serrer des pognes.
Au lieu de s’engouffrer dans la mairie après ces effusions salvatrices, il continue vers la gauche, dans la mauvaise direction, là où ça beugle fort les Macron démission ! Le service d’ordre mouille le caleçon. Il ne peut pas s’en empêcher de vouloir jouer avec le feu. Et ça ne rate pas. Un papy, en second rideau lui balance un jouissif, car BFM retransmet le sacrilège explosif : « on n’en veut pas de ta retraite, qu’est-ce que tu ne comprends pas là-dedans trou du cul ! » Ouais, ça c’est envoyé, clair, net, reçu 5 sur 5 ! Le président fait celui qui n’a rien capté et continue sa déambulation. Les visages se tendent, souriants, ce sont des physionomies populaires qui n’ont rien à voir avec celles les proutprouts précédemment observés ; Ca s’esbaudie, tout faraud de pouvoir toucher la main… De celui qui les traite plus bas que terre…Chez le franchouille, peuple de souche paysanne, saluer avec dévotion le Maître fait partie de sa génétique ; de tout temps, on enlève son chapeau, lorsque le nobliau passe devant le serf, en marmonnant et en faisant le signe de croix, « bonjour monseigneur » tout en le vouant aux gémonies par-derrière. C’est comme ça. Ils le détestent, et pourtant lorsque devant lui au lieu de balancer ses 4 vérités et accessoirement des tomates, ils sont là tout contrits plantés comme des glands à lui faire risette ; alors dites-moi citoyen comment faire une révolution sociétale avec de tels larbins ? Bon d’accord, ce n’est pas du 100%. Y a bien un autre papy qui lui lance bien en face que jamais la France n’a eu un gouvernement aussi corrompu ! Et l’autre qui répond à cette apostrophe par un « ce n’est pas gentil… » Le papy ne lâche rien en entendant l’Manu dire de ne pas véhiculer cette image. Hey, mec, tu manques d’arguments structurés ! Faut dire que c’est un peu ta spécialité de brasser de l’air s’pas ! Puis un pas plus loin, une cacochyme en plein orgasme énamourée qui le regarde et n’en revient pas. Fin de la séquence ci-jointe.
Macron suscite des vocations…Musicales. Des concerts de casseroles se font entendre partout dans le pays, de plus, la plèbe se casse la voix à chanter « on est là, on restera ! » et « Macron démission ! ». A Muttersholtz, commune de 2026 habitants, les sbires de Macron quelques heures avant son arrivée ont fait dégager les CGT et autres hurleurs/tapeurs de casseroles. Y’a un journaleux de FRANCE24 chaine d’état à la botte, qui dresse à sa façon à peine téléguidée l’état des lieux. « à peine une petite centaine d’opposants à la reforme des retraites » - Mouais, en fait ce n’est pas si mal rapporté au nombre d’habitants de la commune, mais il est en mission Mister flatteur. « Macron vient là pour parler de la France qui fonctionne, de la France qui réussit, c’est pour cela que…Blablabla » Aussi, le journaleux/porte parole/porte voix, rappelle les J.O 2024, les fameux 100 jours et patati et patata, de la vraie Pravda de la belle époque. Et pour finir, il annonce l’emploi du temps de « son président » : l’Manu fera 2 déplacements par semaine afin de remotiver les frenchies après les avoir bien, insultés, humiliés, traités plus bas que terre…Et le pire c’est qu’il y aura toujours ces 25%, comme les deux rombières Orange/ vert pomme pour l’acclamer.
C’est sans issue ce truc ? Allez, j’men retourne taper sur mes casseroles faute de mieux, pendant que lui, le prèze traine les siennes !
Georges ZETER/avril 2023
Photo montage illustrant l’article : captures d’écran du la vidéo.
Séquence filmée par BFM à Sélestat.
Histoire d’une involution : de la politique structurelle au moralisme hystérique
Je me demandais l’autre jour comment il a pu se faire que la capacité opérationnelle d’une opposition politique se soit éteinte et soit aujourd’hui à reconstruire pratiquement à partir de zéro.
Etant entendu que c’est aujourd’hui le problème des problèmes, et étant entendu que, comme pour tout processus historique, ses causes sont plurielles, je veux uniquement m’arrêter, brièvement, sur une cause de nature spécifiquement culturelle.
L’époque de la démocratie et de l’opposition politique à partir du bas a été une période bien délimitée qui commence aux environs du milieu du XIXe siècle, et où la leçon marxienne a joué un rôle fondamental.
Plus précisément, la leçon marxienne a été fondamentale pour comprendre, et faire comprendre, que, dans le monde moderne, tout changement de mœurs et d’opinion qui devient hégémonique a toujours une racine primaire dans la « structure », c’est-à-dire dans la sphère de la production économique et de la gestion du pouvoir correspondante.
Si, dans une description de ce qui se passe, il manque la conscience de cette racine structurelle, s’il manque la compréhension de la façon dont le problème dont on traite se situe par rapport aux mécanismes de distribution de l’économie et du pouvoir (qui coïncident souvent), on finit par perdre de vue la seule sphère où l’on peut mettre en action les leviers décisifs au niveau des causes.
Une fois ce fait rappelé, la pensée ne peut pas ne pas considérer la répartition générationnelle de la conscience politique actuelle. Des expériences répétées, depuis les recueils de signatures aux débats publics, aux élections, dessinent un même tableau : la répartition générationnelle de la conscience politique suit parfaitement une courbe décroissante. Ceux qui témoignent de la plus grande urgence d’action par rapport aux leviers du pouvoir sont les plus âgés, et à mesure qu’on descend dans les âges, les rangs des politiquement conscients se réduisent, jusqu’à presque arriver à zéro dans le groupe des jeunes et très jeunes (disons dans la fourchette entre 18 et 24 ans).
Or, il est important d’observer à quel point c’est là un fait historiquement inédit. Jusqu’à une époque récente, les jeunes ont fait partie des rangs des « incendiaires », les universités ont forgé la protestation, la passion politique naissait sur le seuil biographique entre les études et l’entrée dans le monde du travail. Et c’est tout à fait naturel, parce que l’engagement et l’énergie requis par une participation politique critique se trouvent plus facilement chez les 20 ans que chez les sexagénaires ; et, de même, contraintes, charges et responsabilités croissent généralement avec l’âge.
La question est donc : qu’est-ce qui s’est passé ?
Pour trouver un indice, il suffit de considérer l’activisme politique des jeunes qui, certes, existe encore, mais dont la forme est instructive. Il est intéressant de noter les thématiques sur lesquelles se concentre cet activisme.
Un examen rapide mettra en évidence :
1) Un environnementalisme focalisé sur le changement climatique ;
2)Des problèmes d’identité de genre, violence de genre, égalité de genre, autodétermination de genre, langage de genre ;
3)
Un animalisme de type disneyen et des pratiques alimentaires
auto-flagellatrices (véganisme, éloges de la viande synthétique et de la
farine d’insecte, etc) ;
4) Pour les plus audacieux,
quelques appels aux « droits humains » dans une version hautement
sélective (où, comme par hasard, les violations se produisent toujours
et uniquement chez les ennemis de l’Amérique).
Ce qu’il est essentiel de souligner, c’est que, par contre, il peut exister, et il existe :
1) un authentique environnementalisme « structurel » ;
2) une conscience historico-structurelle de la division sexuelle du travail (et de ses conséquences dans les mœurs) ;
3) une analyse des formes de « réification » de la nature sensible (animaux) dans l’industrialisme moderne ;
4) une conscience politique de l’exploitation et des violations de la nature humaine.
Et dans chacun de ces cas, il est possible de reconnaître des problèmes réels en les plaçant dans le cadre d’ensemble des processus de production économique et de répartition du pouvoir dans le monde contemporain.
Mais rien de tout cela ne fait généralement partie de l’activisme politique des jeunes qui, en revanche, reçoit son ordre du jour de « contestation » d’en haut, dans un format rigoureusement nettoyé de ses implications structurelles.
En d’autres termes, les secteurs dans lesquels on peut exercer sa contestation, et les formes dans lesquelles on peut identifier les problèmes, descendent de hauteurs impénétrables, à travers l’appareil médiatique, l’endoctrinement scolaire et universitaire. On crée ainsi de confortables bulles de contestation, pourvues de certificats de qualité progressistes, fournis par des sources accréditées.
Le vieux système de contrôle social faisait alterner la répression violente des effervescences juvéniles et des conflits guerriers périodiques où elles pouvaient se donner libre cours ; par contre, le nouveau système de contrôle fournit des terrains déjà équipés où l’on peut faire des révolutions fictives avec des épées en carton, sur des îles sans communication avec cette terre ferme où le pouvoir réel joue ses parties.
Cependant, ce processus de construction de zones artificielles, dépourvues d’ancrage structurel, n’est pas nouveau et on se trompe si on se focalise seulement sur ceux qui sont jeunes aujourd’hui. Il s’agit d’un processus entamé dans les années 80 au moins, qui s’est simplement, avec le temps, étendu et perfectionné. Tout l’effort conceptuel accompli par la réflexion marxienne (en partie déjà hégélienne) et qui s’est ensuite développé pendant plus d’un siècle, a été effacé – « cancellé » – grâce à la lessive effectuée par la nouvelle puissance médiatique.
Aujourd’hui, ces agendas « politiques » soigneusement émasculés se diffusent et font entendre leur voix, d’une stridence caractéristique, qui trouve ensuite l’écho – avec peut-être de bienveillantes réprimandes pour certains de leurs excès, finalement sanctifiés –, des porte-voix du pouvoir.
Nous sommes ainsi retombés dans une analyse de l’histoire, de la politique et la géopolitique qui, oubliant les leviers réels du pouvoir, se consacre corps et âme à des lectures moralisatrices du monde, aux faits divers sanglants, au goût bien-pensant du scandale, au politiquement correct, aux ragots politiques.
Ce qui prolifère et prospère, ce sont des lectures géopolitiques où Poutine est méchant et les Russes sont des orques ; des lectures où les critiques des diverses idéologies du genre sont abominablement homophobes ; où qui n’embrasse pas un Chinois sur commande est fasciste, et qui l’embrasse après le contrordre est « stalinien » ; des lectures écologiques où l’on barbouille les musées parce qu’« il n’y a plus une minute à perdre », avant de rentrer à la maison dans son centre-ville piétonnier pour jouer sur sa Smart TV de 88 pouces, etc.
Cette infantilisation de l’analyse historico-politique réduit fatalement à l’impuissance tout « activisme » qui considère le monde comme si la distribution des épithètes morales en constituait le cœur. Et si on fait observer que toute cette épuisante agitation hystérique ne donne même pas le moindre bouton au pouvoir, qui, bien plutôt, applaudit, on a un autre qualificatif tout prêt à vous lancer : vous êtes cynique.
La compartimentation de la protestation suivant les aires idéologiques préparées en amont produit, outre un effet d’impuissance pratiquement totale, une perte complète d’équilibre et de capacité à évaluer les proportions des problèmes. Chacun de ces jeux idéologiques compartimentés apparaît, aux yeux de ceux qui s’y escriment, comme un univers, le seul point de vue à partir duquel on peut le mieux voir le monde entier. Et cela produit chez les usagers de ces prés carrés une susceptibilité insensée, parce qu’ils investissent toute leur énergie et leur passion dans ce petit arpent soigneusement délimité : il y a des gens qui passent deux fois par jour devant la petite vieille qui crève de misère dans l’appartement d’à côté, mais qui bondissent, les yeux injectés de sang, si on utilise un pronom de genre inapproprié ; il y a des gens qui se scandalisent devant les violations des droits humains en Biélorussie (où ils n’ont jamais mis les pieds), et qui ensuite vous expliquent qu’il est juste de licencier les « novax » et de les priver de soins hospitaliers ; il y a même des étudiants qui revendiquent la méritocratie et après votent pour Carlo Calenda [disons, en France : pour Macron].
Voilà quel est dans l’ensemble le tableau, tandis que le pouvoir véritable nous conseille la résilience, parce que si on adopte la forme de la botte qui vous piétine on souffre moins, tandis qu’il nous conseille de ne pas faire d’enfants et de ne pas prendre notre retraite pour l’amour de l’avenir, tandis qu’il nous explique tous les jours qu’il faut être mobile pour travailler là où il y a des emplois et que, toutefois, il faut s’arrêter de bouger parce qu’on détruit le climat, tandis qu’il nous pisse sur la tête en expliquant qu’on économise ainsi sur les douches : tandis que tout cela et bien d’autres choses se passent, les fameuses « masses » se chamaillent avec fureur pour des astérisques respectueux, pour l’indispensable urgence de l’anti-fascisme et pour les droits des asperges.
Parce qu’aucune injustice ne restera impunie !
Traduction de Rosa Llorens
Les descendants des esclavagistes continuent de martyriser l’Afrique, par Sergei Kojemiakine
- admin5319Histoire et Société
- 21 avril 2023
Auteur : Sergei KOZHEMYAKIN, chroniqueur politique à la Pravda.
La transformation de l’Afrique en une arène de rivalités géopolitiques provoque l’instabilité. En Éthiopie, elle s’est transformée en une guerre civile sanglante, et au Nigeria en une lutte féroce entre clans lors des élections générales.
Fractures politiques
Pour décrire les charmes du capitalisme, ses idéologues utilisent une gamme restreinte d’exemples. Leur “matériel d’illustration” se limite à l’Amérique du Nord, à l’Europe occidentale, au Japon et à quelques autres pays. En même temps, les propagandistes du marché se taisent pudiquement sur le prix du “progrès”. Par exemple, les régions qui ont participé pleinement à l’histoire du capitalisme. Non pas en tant que bénéficiaires, mais en tant que “matériaux de construction”.
L’Afrique a fourni l’accumulation initiale de capital pendant des siècles. Le nombre d’esclaves exportés du continent est estimé à 17 millions. Au 19e siècle, l’Afrique a été divisée par les puissances capitalistes, ce qui a gelé son développement. En 1900, la population du deuxième plus grand continent du monde ne représentait que 6 % de la population mondiale.
Au prix de souffrances inimaginables, l’Afrique a constitué la base de la prospérité de l’Occident et attire aujourd’hui les prédateurs mondiaux avec ses ressources. Ces derniers mois, le continent a été au centre d’intrigues diplomatiques. Vers la fin de l’année, un sommet États-Unis-Afrique s’est tenu à Washington. Les hôtes ont séduit les invités en promettant d’abord d’accorder à l’Union africaine une place au sein du G20, puis d’investir 55 milliards de dollars dans des projets communs et de contribuer à la lutte contre la faim. L’apparente générosité cache un calcul cynique. Il s’exprime dans la stratégie américaine pour l’Afrique subsaharienne, qui identifie ouvertement la Chine et la Russie comme les principaux obstacles à la construction des liens entre les Etats-Unis et le continent.
L’activité d’autres acteurs rend l’Occident tatillon. En janvier, le nouveau ministre chinois des affaires étrangères, Qin Gang, a effectué son premier voyage à l’étranger en Éthiopie, au Gabon, en Angola, au Bénin et en Égypte. Presque simultanément, son homologue russe Sergei Lavrov s’est rendu en Afrique. L’Afrique du Sud, l’Eswatini, l’Angola et l’Érythrée ont été choisis comme étapes.
Craignant de perdre l’Afrique, l’Occident exploite habilement ses difficultés – pauvreté et instabilité. Lorsque les enjeux sont particulièrement importants, cette dernière est provoquée de l’extérieur. C’est ce qui s’est passé en Éthiopie. Le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, n’a pas répondu aux attentes, refusant de se plier à la volonté des États-Unis et de couper les liens avec la Chine. Sa punition a été le soutien de l’Occident à la révolte qui a éclaté en 2020. Elle a été déclenchée par le Front populaire de libération du Tigré (FPLT), qui gouverne la région du même nom et qui, avant l’arrivée au pouvoir d’Ahmed, contrôlait de facto l’ensemble du pays. La guerre civile s’est déroulée avec un succès mitigé. Le FPLT a failli s’emparer de la capitale éthiopienne, Addis-Abeba, mais a finalement été repoussé et a demandé la paix.
Un accord de cessez-le-feu a été négocié par l’Union africaine. Les rebelles ont rendu leurs armes lourdes et se sont engagés à respecter l’intégrité territoriale de l’Éthiopie. Cette victoire a amélioré la position d’Ahmed sur la scène internationale. La Maison Blanche, qui l’avait accusé de quasi-génocide et menacé de sanctions sévères, a été contrainte de saluer l’accord et d’inviter le premier ministre au sommet États-Unis-Afrique. Les relations entre l’Éthiopie et le Soudan se sont normalisées. Des affrontements frontaliers avaient eu lieu entre les deux pays ces dernières années, Addis-Abeba dénonçant le soutien de ses voisins au FPLT. Le conflit s’est aggravé à cause de la centrale hydroélectrique Hidase (Renaissance) en construction en Éthiopie, qui, selon le Soudan et l’Égypte, limiterait le débit du fleuve.
Lors d’une visite du ministre éthiopien des affaires étrangères, Demeke Mekonnen, à Khartoum en décembre, les deux parties ont convenu de résoudre les différends de manière pacifique. Cette visite a été suivie, dès cette année, d’une rencontre entre M. Ahmed et le président du conseil souverain transitoire du Soudan, M. Abdel Fattah al-Burhan. Proclamant une alliance, les deux dirigeants ont pris des mesures réciproques. Al-Burhan a marqué sa solidarité sur tous les sujets, y compris la construction de la centrale hydroélectrique, tandis que le premier ministre éthiopien a appelé au respect de la souveraineté politique de Khartoum.
Il est toutefois prématuré de croire que les nuages au-dessus de l’Éthiopie se sont dissipés. Le conflit, qui dure depuis deux ans, a infligé de graves blessures au pays. Le nombre de morts est estimé à 600 000 et le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays dépasse les 2 millions. En reconnaissant que le FPLT continue à gouverner au Tigré (une récente rencontre entre Ahmed et les dirigeants du mouvement en témoigne), le gouvernement a de fait gelé le conflit. Mais si les conditions redevenaient favorables, l’insurrection reprendrait de plus belle.
Et les conditions sont en train de mûrir. À peine les autorités se sont-elles occupées du Tigré que la situation s’est détériorée dans la région la plus peuplée du pays, l’Oromia. Les rebelles de l’Armée de libération de l’Oromo (ALO) y sont actifs. Un manifeste qu’ils ont publié affirme que de longues années d’oppression par les Amhara, le groupe ethnique dominant de l’Éthiopie, n’ont pas pris fin avec l’arrivée au pouvoir d’Abiy Ahmed, un Oromo. L’ALO défend “le droit à l’autodétermination, la libération de l’exclusion politique, de l’exploitation économique et de la marginalisation socioculturelle”. Après avoir accusé le gouvernement de répression, le mouvement a appelé la communauté internationale à intervenir.
Des milices auparavant dispersées ont récemment émergé comme une force redoutable, dotée d’un armement sophistiqué qui pourrait indiquer l’existence d’une aide étrangère. L’ALO a occupé plusieurs grands centres de population, dont Najo et Mandi, et a assiégé la ville de Nakemte, qui compte 200 000 habitants. Les autorités, qui avaient auparavant rejeté tout contact avec les rebelles, admettent désormais la possibilité de négociations.
Les milices amhariques sont une autre source d’inquiétude pour le gouvernement. Elles ont aidé le gouvernement à vaincre le FPLT, mais pourraient retourner leurs armes contre leurs anciens alliés. Parlant de “nouvelles menaces extrémistes”, Ahmed les a accusées de porter atteinte à l’intégrité de l’Éthiopie. Les massacres mutuels perpétrés par les Oromo et les Amhara ont entre-temps fait des centaines de victimes.
La situation s’est envenimée à la suite d’une scission de l’Église. Les évêques d’Oromia ont accusé les dirigeants de l’Église orthodoxe éthiopienne de discrimination. Selon eux, la plupart des sièges du synode sont occupés par des représentants amhariens et les offices sont célébrés en amharique dans la région. Les “dissidents” ont alors proclamé la création de leur propre synode et leurs partisans ont commencé à occuper les églises. Cela a conduit à des affrontements sanglants. Le patriarche Abouna Matthias a excommunié les fauteurs de troubles et les a poursuivis devant la Cour suprême. Le premier ministre a refusé d’intervenir dans le conflit, ce qui lui a valu d’être réprimandé par les évêques amhariques pour “schisme”.
La politique économique n’a pas permis d’apaiser les tensions. Après la défaite du FPLT, un programme de réforme a été dévoilé dont l’objectif, comme l’a annoncé le ministre des finances Ahmed Shide, est de “faire de l’Éthiopie un phare africain de la prospérité en construisant un système de marché pragmatique et en l’intégrant dans l’économie mondiale”. Dans le cadre de cette transformation, il est prévu de privatiser les banques, les télécommunications, les services de distribution d’eau et les parcs industriels. Les prêteurs étrangers seront autorisés à acheter des parts dans les banques commerciales et les institutions financières étrangères pourront ouvrir des succursales. Une politique d’élimination de la propriété foncière de l’État a été adoptée.
La détérioration de la situation ne manquera pas d’être exploitée par Washington, qui exige déjà “la fin de l’instabilité en Oromia”. L’attaque contre des citoyens chinois, qui a entraîné la mort de l’un d’entre eux, est un signal alarmant. Elle a eu lieu en Oromia peu après la visite de Qin Gang dans le pays. L’étranger rêve d’un retour à l’époque où l’Éthiopie était l’un des plus proches alliés des États-Unis, et il ne recule devant rien.
Un pays à la fois pauvre et riche
Le Nigeria, le plus grand pays du continent avec une population de 225 millions d’habitants, intéresse tout autant Washington. Son environnement économique et politique se dégrade rapidement, ce qui facilite les intrigues. La particularité du Nigeria est que, contrairement à de nombreux États africains, il n’a pas eu de gouvernement de gauche depuis son accession à l’indépendance. Au contraire, le gouvernement a suivi docilement les recommandations libérales. Cela a été particulièrement évident dans les années 1980 et 1990, lorsque le Nigeria a adopté un plan d’ajustement structurel imposé par la Banque mondiale et le FMI.
Les résultats ont été immédiats. L’extrême pauvreté est passée de 28 % en 1980 à 80 % en 2000 et est restée très élevée depuis. Même selon les statistiques officielles, 133 millions de citoyens vivent dans une pauvreté multiforme. Chaque minute, six “nouveaux arrivants” tombent dans la pauvreté. 20 millions d’enfants en âge scolaire ne sont pas scolarisés et deux tiers des habitants n’ont même pas accès aux soins de santé primaires. En conséquence, l’espérance de vie est de 52 ans. Seul le Tchad a une espérance de vie inférieure.
Il ne faut cependant pas croire que le Nigeria est une “république bananière” sous-développée. Son économie est la plus importante d’Afrique, grâce au pétrole qu’il produit et exporte. Toutefois, ce sont les sociétés étrangères et une poignée d’hommes d’affaires locaux qui en profitent. Des milliards de dollars circulent à l’étranger ; la fortune combinée des trois Nigérians les plus riches dépasse les avoirs de 83 millions de leurs concitoyens. Autre signe de la nocivité du système, les principales importations du Nigeria sont… les produits pétroliers. Avec ses énormes réserves de pétrole brut, le pays n’a pratiquement aucune capacité de raffinage.
La situation n’a fait qu’empirer ces dernières années. Lorsque le président Muhammadu Buhari est arrivé au pouvoir en 2015, il a promis de créer 100 millions d’emplois et de mettre le pays sur la voie du développement. Au lieu de cela, la dette extérieure a quadruplé et la chute des exportations de pétrole a encore accentué le resserrement du crédit. Le service de la dette a absorbé 90 % du budget l’année dernière. Le taux de chômage est de 33 %, et de 43 % chez les jeunes. L’inflation a atteint son niveau le plus élevé depuis vingt ans. Le pays est confronté à de graves pénuries de carburant et d’autres produits de base. Cette situation a provoqué une recrudescence de la rébellion. Bien qu’elle revête des “couleurs” différentes – islamistes dans le nord, séparatistes dans le sud-est, tribales dans les régions centrales – elle a toujours des causes socio-économiques sous-jacentes.
Les autorités proposent des solutions que l’on peut qualifier d’absurdes. Par exemple, le gouvernement s’est engagé à effectuer une “transition verte” vers les sources d’énergie renouvelables. Pourtant, pour la grande majorité de la population, le charbon est un luxe. Ils utilisent le bois pour cuisiner. Le trésor public ne dispose pas des fonds nécessaires aux réformes, mais la nouvelle mode peut enrichir les fonctionnaires corrompus.
Une autre initiative a consisté à remplacer les anciens billets de naira, la monnaie nationale, par de nouveaux. Selon les autorités, cette mesure contribuerait à la lutte contre la corruption, mais les principales victimes sont encore une fois les citoyens ordinaires. Le calendrier serré de la réforme, les restrictions sur le montant des échanges et l’absence d’agences bancaires dans les zones rurales ont créé un véritable chaos. Début février, les anciens billets n’étaient plus acceptés, ce qui a provoqué des émeutes dans tout le pays.
Dans ce contexte, des élections présidentielles et législatives ont été organisées le 25 février. Dix-huit candidats étaient en lice pour le siège de Buhari, les principaux étant le vice-président à la retraite Atiku Abubakar, l’ancien gouverneur de l’État de Lagos Bola Tinubu et l’ancien chef de l’État d’Anambra Peter Obi. Malgré la concurrence acharnée et les courants de compromis mutuels, les favoris de la course représentaient l’establishment, sont entachés de scandales financiers et sont favorables à la poursuite de la politique néolibérale. Par exemple, les trois candidats ont promis de supprimer les subventions aux carburants, essentiellement la seule mesure d’aide sociale, s’ils gagnaient.
Tinubu a été déclaré vainqueur, mais les autres candidats ont qualifié les résultats de truqués et ont appelé à des manifestations. L’instabilité profite à l’Occident. Le Nigeria est son bastion depuis des décennies. Des exercices navals sont régulièrement organisés dans le golfe de Guinée avec la participation des États-Unis. Il existe un accord d’adhésion entre les ministères de la défense des deux pays, et Washington forme l’armée nigériane et lui fournit des armes. En outre, Buhari a demandé aux États-Unis de déplacer le siège du commandement militaire américain pour l’Afrique [AFRICOM en anglais, NdT] de l’Allemagne vers le continent.
Toutefois, l’influence occidentale s’érode progressivement. Les échanges commerciaux entre le Nigeria et la RPC ont augmenté de 142 % au cours des sept dernières années, pour atteindre 26 milliards de dollars. Les entreprises chinoises construisent des chemins de fer, des centrales électriques, le port en eau profonde de Lekki, etc. dans le pays. Alors qu’ils contribuent au développement du Nigeria, ces projets ne sont pas dans l’intérêt de l’Occident. Ceux-ci préfèrent voir le pays, comme le reste de l’Afrique, comme pauvre, fragmenté et dépendant.
Carte : les régions d’Afrique selon l’ONU (2016)
Réforme des retraites : un poison lent
Il ne faudrait pas croire que la réforme des retraites se limite au seul âge de départ assorti d’un nombre de trimestres cotisés. Elle emporte bien d’autres conséquences à moyen ou long terme permettant de dire qu’il s’agit de la remise en cause définitive du système d’accompagnement et de protection sociale issu de l’après-guerre et de l’effacement de l’Etat devant le libéralisme effréné des « marchés », le tout grâce à son meilleur représentant, Macron en personne.
C’est la dose qui fait le poison…
Jusqu’à présent nous n’avions eu droit qu’à des demi-mesures : un petit allongement par ci, ou un rallongement de la durée de cotisations par là. Cette fois-ci nous avons eu droit à la seringue complète.
L’âge de départ à 64 ans, assorti d’un allongement du nombre de trimestres cotisés va se traduire par un départ en retraite au-delà de cet âge pour bon nombre de salariés ayant commencé leur activité tardivement, à moins qu’ils acceptent de subir une décote. C’est bien la combinaison des deux paramètres qui vont produire les économies principales pour les régimes de retraites. Encore faudra t’il que les salariés soient encore en activité, ce qui n’est pas assuré, car rien dans la loi promulguée ne traite de l’emploi des seniors et il n’est pas du tout écrit que le patronat veuille s’engager sur ce point. L’effet induit sera le transfert de nombreux seniors sur les budgets sociaux via un RSA « vieux ». Tout bénéf pour le patronat avec, à la clé, appauvrissement des salariés en attendant une retraite misérable.
Autre économie sur les pensions, dont on s’apercevra plus tard : les rémunérations sous forme de primes de fin d’année, de « partage de valeur », de prime Macron, d’heures supplémentaires défiscalisées et désocialisées, ce qui veut dire qu’elles ne sont pas incluses dans le calcul de la retraite, car non soumises aux cotisations sociales. Cadeau là encore pour le patronat et mauvaise surprise pour les futurs retraités dont la pension ne sera calculée que sur le salaire fixe, hors primes. Au fil du temps, les salariés devraient s’apercevoir par ailleurs que l’engouement pour ce type de rémunération, non inscrit dans les conventions collectives, diminuera sous des prétextes divers et variés (mauvaise conjoncture, difficultés financières,…) et disparaîtra. Mauvais plan pour ceux qui croient à ce système. Le réveil sera dur.
Tout cela a pour objet de ne pas « augmenter les cotisations sociales » et explique très bien le silence assourdissant du patronat qui a déjà largement bénéficié d’allègements, et de réductions des cotisations sociales sous des prétextes divers et variés, dispositifs jamais évalué ni remis en cause (comme le souligne la Cour des Comptes), auxquels s’ajoutent aussi pour ceux qui en bénéficient de la suppression de l’ISF, de la réduction du taux de l’impôt sur les bénéfices ou encore de la flat tax. Il y a donc un profond déséquilibre entre le traitement réservé aux salariés avec cette réforme et le flou artistique dont bénéficient les entreprises, au nom du ruissellement, bien entendu, que l’on attend toujours.
La réforme des retraites : le droit de mourir dans l’indignité
Outre les surprises sur les niveaux de pension et sur le travail des seniors soulignées ci-dessus, les salariés doivent s’attendre à d’autres joyeusetés comme les conséquences de l’usure au travail et son corollaire, la diminution de la durée de vie et celle de l’âge de vie en bonne santé. Mauvaise nouvelle pour les enfants des personnes âgées qui espéraient des miettes d’héritage et qui devront se contenter d’abonder les paiements mensuels aux EPHAD, étant entendu que les maigres retraites ne suffiront plus à couvrir les frais de ces établissements, une fois l’appartement et les meubles vendus.
On comprend dès lors que Macron semble s’intéresser à la question de la fin de vie pour accélérer le processus
L’arrivée prochaine des fonds de pension
A ce stade, compte tenu des transferts annoncés (baisse généralisée des pensions, et donc baisse du rendement de l’IRPP et de la TVA, maintien de la politique pro business, augmentation des prises en charge de retraités seniors exclus du marché du travail et baisse des transmissions intergénérationnelles…), la prochain combat de l’oligarchie sera la promotion des fonds de pension, seule issue pour mettre du beurre dans les épinards et vivre décemment (sauf crise financière qui lessivera les avoirs, comme cela s’est déjà passé dans d’autres pays) avec bien entendu une incitation fiscale qui videra un peu plus le budget de l’Etat.
Macron, meilleur représentant des « marchés »
Voilà, mission accomplie pour Macron, porte-parole des « marchés » qui a réussi la réforme demandée par le monde économique et financier qui avait tout fait pour qu’il soit élu. Il pourra retourner vers son milieu d’origine, la banque avec la satisfaction du devoir accompli et 3000 Milliards de dettes après avoir préparé le terrain pour le RN.
En attendant, il nous a, comme d’habitude, promis la lune, lundi dernier, en faisant miroiter le mythique plein emploi, du mieux pour l’hôpital, la justice ou l’éducation et l’écologie, comme un vulgaire bateleur de foire alors que son ambition a surtout été d’être le digne représentant d’un oligarchie mafieuse vivant sur le dos de la population et prête à tout nomment à s’envoler vers des cieux fiscaux accueillants en cas de mauvais temps.