Texte écrit avant l'intervention de Poutine, d'où son intérêt
RUSSIE
Le « Barbarossa financier » qui s’annonce.
Par le Capitaine de Vaisseau (H) Yves Maillard
Ancien attaché naval en URSS, puis Russie.
Et anticommuniste par surcroi...
Ne
croyez pas un mot des soi-disant négociations en cours entre les
Etats-Unis et la Russie pour résoudre la "crise ukrainienne". Il n'en
ressortira rien. Rien qu'une accusation de plus contre ce dernier pays
de ne pas avoir voulu jouer le "jeu diplomatique", et pour l'Amérique
l'argument de pouvoir en tirer parti pour prétendre justifier de le
frapper durement, comme l'Amérique sait le faire.
L'Ukraine ?
Un
pays de malheur et de misère ravagé par un siècle de terribles
tourments : la guerre de 14-18, la révolution bolchevique, la guerre
civile, l'effroyable famine répressive stalinienne, la seconde guerre
mondiale, le totalitarisme soviétique...On est loin de ce que Maria
Gagarine écrivait et décrivait dans "Blonds étaient les blés
d'Ukraine"...
Les
Américains n'en ont rien à f... de l'Ukraine, et encore moins du
Donbass. Ils ne voient dans ce pays et l'abcès qu'ils y ont mis
délibérément que l'instrument de la guerre qu'ils entendent mener contre
la Russie, qu'elle soit dirigée par Poutine ou un autre. Guerre,
véritable guerre avec tout ce que cela veut dire, pour avoir commis,
pour commettre encore, le crime impardonnable à leurs yeux que constitue
le fait de s'attaquer au dollar, le dieu-dollar qui règne sans ambage
et sans justification, ni économique, ni politique, ni morale surtout,
sur la planète entière depuis longtemps, trop longtemps.
Forts
de leur participation à la destruction de l'Allemagne nazie en 1945, de
leur victoire sur le Japon, de leur KO debout de l'Union Soviétique en
1991, et s'appuyant sur une force militaire à la supériorité mondiale
écrasante, ils inondent depuis soixante-quinze ans le monde entier d'une
quantité invraisemblable de dollars, des milliards de dollars, des
milliers de milliards de dollars, des dizaines de milliers de milliards
de dollars, plus de 30.000 milliards de dollars aujourd'hui rien que
pour l'état Fédéral, qui ne leur coûtent rien, mais avec lesquels ils
achètent tout, ils polluent tout, ils corrompent tout, ils pillent la
planète.
Dollars
émis pratiquement sans contrepartie par la planche à billets, comme
Jacques Rueff, du temps du général de Gaulle, l'avait très bien dénoncé
et avait conduit à convaincre ce dernier de prendre les mesures qui
s'imposaient alors pour la défense des intérêts de notre pays.
Les
pays qui amassent des dollars en grande quantité en paiement des biens
vendus et services rendus à l'Amérique seront tôt ou tard les dindons de
la farce car ils finiront par se rendre compte, c'est inévitable, que
ces créances ne valent rien, ou pas grand chose. La détention de
dollars, sous quelque forme que ce soit, que ce soit par des
particuliers , des entreprises ou des états, ce n'est pas autre chose
qu'une créance sur l'Amérique.
Or
il n'y a pas, et il n'y aura jamais, et de loin, en Amérique, de bien à
vendre ou à produire, pour apurer ce qui de l'autre côté s'appelle la
dette. Mais du fait du leadership mondial, militaire essentiellement, de
l'Amérique, personne n'ose bouger.
L'Amérique
vendue à la découpe, si on pouvait le faire, ne permettrait pas
d'apurer sa dette, tellement elle est énorme, monstrueuse. Les rares
pays qui, par le passé récent, ont osé s'élever contre cela, comme
l'Irak de Saddam Hussein et la Libye de Kadhafi, forts croyaient-ils, de
leurs ressources pétrolières sur lesquels ils espéraient pouvoir
construire une indépendance financière et monétaire libérée du dollar,
ont connu le sort tragique que l'on sait, justement pour avoir essayé de
faire ça.
Qu'a fait la Russie ?
Pourquoi
a-t-elle déclenché une telle haine de l'Amérique à son égard ? 2 Parce
que depuis une quinzaine d'années, petit à petit, elle s'est défaite de
l'essentiel de sa créance en dollars sur l'Amérique. Une centaine de
milliards de dollars, ce qui peut paraître modeste au regard des trente
mille précédemment cités, quand on sait que des pays comme la Chine en
détiennent mille, ou le Japon mille trois cents.
Mais
c'est une brèche insupportable pour les Américains dans leur citadelle
dollar, qui ne manquera pas de faire école dans le monde entier, si la
Russie n'est pas "punie".Et de conduire à l'effondrement total du dollar
sur lequel se fonde la prospérité imméritée de l'Amérique et sa
domination impérialiste du monde.
L'enjeu
de ce qui se passe en ce moment en Ukraine, ce n'est bien évidemment
pas l'Ukraine, dont tout le monde se f..., et encore moins le Donbass,
dont tout le monde ou presque ignorait l'existence même jusqu'à ce jour,
mais la pérennité du roi-dollar américain qui ne tient et n'existe que
grâce à l'écrasante supériorité militaire américaine sur le monde.
S'attaquer au dollar, ce qu'a donc fait la Russie en réclamant ce qui
n'était que son dû légitime, c'est, pense l'Amérique, s'attaquer à elle,
s'attaquer mortellement à elle car elle est insolvable de l'ensemble de
ses dettes, et quand les autres pays créanciers du monde réclameront,
eux aussi, leur dû, c'est inéluctable, ce sera sa déroute financière et
morale.
L'Amérique
se comporte comme ce débiteur insolvable, ce voyou, qui n'a,
pense-t-il, que le recours de tuer son créancier qui réclame son dû, ou
celui qui dénonce qu'il est un voyou.
L'Amérique n'a qu'une réponse, c'est la guerre. La guerre totale.
C'est
ce qui se passe. Son problème c'est qu'elle ne peut pas ouvertement
déclarer la guerre à la Russie. Il y a quasiment tous les jours des
responsables politiques ou des généraux américains qui réclament le
bombardement atomique de la Russie ! En violation flagrante de ce tout
ce qui a pu être construit en matière de paix et de sécurité dans le
monde depuis la fin de la seconde guerre mondiale, à commencer par
l'Organisation des Nations Unies.
C'est
épouvantable ! Et personne ne le dénonce. Ils n'oseront sans doute pas
le faire. Le système de dissuasion russe, bien dimensionné, bien
déterminé, ne le leur permettra pas. Nul doute que Poutine, approuvé
certainement par la totalité du peuple russe, répondrait à une attaque
atomique américaine par une riposte atomique à niveau, sans crainte
d'une quelconque "escalade".
L'Amérique
n'a pas envie, non plus, de perdre un seul soldat pour l'Ukraine en
Europe, Biden vient de le rappeler. Alors il leur faut, il leur a fallu,
trouver autre chose pour punir la Russie de s'être débarrassée de ses
dollars. Il y a une évidence, pour ceux qui connaissent un peu ces pays,
c'est que la Russie et l'Ukraine sont des pays, culturellement,
anthropologiquement, très proches. Ils sont aussi proches que le sont le
Nord et le Sud de la France, que l'étaient les Allemagne de l'Ouest et
de l'Est. Les Américains ont cyniquement créé la la situation dont ils
espèrent pouvoir tirer parti en provoquant une réaction des Russes qui
justifierait, selon eux, l'action de "punition" qu'ils entendent
infliger à la Russie.
Quitte à agir contre la nature des peuples
C'est
la partition de l'Ukraine. Ils ont chassé un régime qui pour n'être pas
un modèle n'en avait pas été moins démocratiquement élu, pour le
remplacer par un régime nationaliste et fascisant, tenu à bout de bras
économique, après avoir pillé le maigre avoir financier de ce pauvre
pays quasi miséreux. Changement de régime qui a eu pour conséquence
inévitable le soulèvement d'une partie de la population qui ne
l'acceptait pas, et s'est fatalement retournée vers la Russie pour
demander son aide.
Le
Donbass russophone et russophile. Celui-ci a aujourd'hui, de fait,
quasiment fait sécession. Moscou, à présent, avec ses roubles, paye tout
: les salaires des fonctionnaires, des entreprises, des retraités.
L'Etat ukrainien n'y existe pratiquement plus. Aucune activité
économique ne traverse la frontière entre l'Ukraine et le Donbass. Deux
postes frontières restent ouverts pour les seules visites
inter-familiales, car les liens familiaux entre les deux parties de
l'Ukraine sont très forts, comme ils sont toujours très forts entre la
Russie et l'Ukraine.
Le
scénario de guerre et de "punition" mis en place par l'Amérique, avec
l'appui de la Grande Bretagne. Contrairement à ce qu'affirme la
propagande américaine, la Russie n'a aucune intention d'envahir
l'Ukraine.
Ils
font tout pour pousser l'Ukraine à attaquer le Donbass. Ils donnent en
ce moment à l'Ukraine argent, armes et munitions en grandes quantités.
Justement de ces grandes quantités de munitions dont on a besoin pour
soutenir une guerre qui doit durer. C'est criminel, délibéré, ciblé,
signé.
Avec
l'odieux chantage sur un pays économiquement et financièrement aux
abois : "Si vous n'attaquez pas, on vous coupe les vivres", et c'est la
population qui en souffrira. Comme ils ont su faire souffrir le peuple
irakien, interdit de vendre ses hydrocarbures, ce qui aurait permis de
ne pas laisser mourir de faim, de manque de médicaments et d'eau
potable, des centaines de milliers d'enfants.
Comme
en ce moment les maigres avoirs du peuple afghan sont gelés du fait
américain à l'extérieur du pays alors que la population connaît la
famine. Crimes contre l'humanité à mettre au même rang que la Shoah. Les
Américains ont promis aux Ukrainiens qu'ils récupèreront non seulement
le Donbass, mais aussi la Crimée. Promesses irresponsables
L'attaque
du Donbass entraînera immédiatement la réaction de Moscou qui tentera
de s'y opposer militairement, en intervenant sur un territoire,
officiellement, encore ukrainien. L"agression", clairement contraire aux
dispositions de la charte des Nations Unies, sera caractérisée.
Les
Américains s'estimeront en droit de "punir la Russie". Bien que
personne ne leur ait jamais conféré ce "droit de punir", mais ils le
prendront. Ils n'attaqueront pas militairement la Russie. Ils ne le
peuvent pas, on l'a vu ci-dessus, ni à l'arme atomique, pour cause de
riposte russe probable, ni par armes classiques, ne voulant perdre aucun
soldat. Mais ils ont la capacité de nuire à ce pays pratiquement autant
que s'il l'avait militairement attaqué.
C'est ce qu'on pourrait appeler un "Barbarossa financier".
Tout
est en place. Tout a été annoncé. Tout peut être déclenché du jour au
lendemain. Tous les avoirs russes, que ce soient les avoirs d'Etat, des
entreprises ou des particuliers, en dépôt dans les banques
anglo-saxonnes, seront gelés, confisqués.
Il
faut s'attendre aussi à ce que les Etats-Unis et la Grande Bretagne
fassent pression sur tous les pays du monde pour que eux-aussi gèlent
aussi les avoirs russes, notamment par les établissements bancaires où
les anglo-saxons ont des intérêts ou des participations, et où ils sont
en mesure de dicter leurs volontés.
Tout
commerce avec la Russie sera interdit. Le blocus sera total. Biden a
d'ores et déjà averti que "North Stream 2 aurait cessé d'exister". Il ne
précise pas si ce serait avec ou sans bombardement. Les Allemands n'ont
pas réagi à ce jour.
La
Russie sera débranchée du système de paiements et de compensations
financières international et planétaire, mais contrôlé par les
anglo-saxons, SWIFT.
Bref,
ce sera l'asphyxie financière pour la Russie. Tous les pays du monde
recevront toutes sortes de pressions, sous peine de sanctions, s'ils ne
s'y plient pas, pour contribuer à cette asphyxie. Il n'y a guère que la
Chine et quelques pays qui se comptent sur les doigts de la main qui
seront en mesure de résister.
Pour
la Russie cela risque d'être terrible. Eux aussi ont besoin des
ressources de leurs exportations pour vivre, simplement se nourrir. Ils
paieront cher d'avoir voulu s'affranchir du dollar-roi.
Ce qui était pourtant leur droit le plus strict.
La
Russie sera assommée, durablement et profondément assommée, espèrent
les Américains, de quoi dissuader quelque 'autre pays d'en faire autant,
en particulier les pays d'Asie, ce qui est le but de l'opération.
Pour
eux la Russie n'est plus qu'un "petit pays de moins de cent cinquante
millions d'habitants" au sort duquel ils sont indifférents.
C'est
probablement là une grave erreur. Ils ont oublié l'Histoire, et en
particulier que la Russie a survécu....à Barbarossa d'Hitler.