lundi 4 décembre 2023

Juifs/Arabes : le « deux poids deux mesures » de la France

"La France ne pratique pas de double standard ... toutes les vies se valent et il n’y a pas de hiérarchie" a récemment déclaré Emmanuel Macron a propos de notre façon de considérer les victimes civiles, selon qu'elles soient israéliennes ou palestiniennes, depuis les évènements du 07 octobre. Une phrase lancée comme ça, sans explications ni exemples, qui rappelle un peu le principe de dénégation freudien (en niant un phénomène que je décris moi-même, je prouve en réalité son existence) et sonne comme un aveu de culpabilité.

En affirmant son "soutien inconditionnel à Israël", trois jours seulement après l'attaque du Hamas, la présidente de l'assemblée nationale Yaël Braun-Pivet (4ème personnage de l'état et figure de la Macronie) avait donné le ton. Celui d'un refus d'objectivité dans la façon de considérer ce qui allait suivre, à savoir la réponse d'Israël face à l'attaque du Hamas ; une réponse qui, comme le laissait entrevoir les déclarations (et la personnalité même) de Netanyahou, allait se matérialiser par des frappes aveugles et indiscriminées dans la bande de Gaza. Et comme si cela ne suffisait pas, la même présidente Braun-Pivet s'était rendue en Israël 12 jours plus tard (soit le 22 novembre), en présence du très islamophobe Eric Ciotti et du très israëlophile (et proche de Netanyahou) Meyer Habib.

Un "soutien inconditionnel" partagé par une grande partie de la classe politique (LREM, LR, RN) et appuyée par les grands médias (BFM, CNEWS ...), lesquels rappellent en boucle depuis le 07 octobre les crimes commis par le Hamas (1.200 victimes civiles) et le "droit d'Israël de se défendre". Et ce, malgré tout ce qu'il s'est passé depuis : malgré la postériorité de la riposte (qui ressemble plus à une vengeance qu'à une légitime défense), malgré les déclarations tonitruantes de Netanyahou et autres dirigeants israéliens (évoquant Gaza comme "cité du mal", suggérant de "raser la zone" ...), et surtout, malgré les crimes de guerre commis par Israël (reconnus par l'ONU et de nombreuses ONG) et la catastrophe humanitaire à Gaza (plus de 14.000 victimes civiles à ce jour).

Pour contrecarrer ces faits sordides (et canaliser l'opinion publique dans la bonne direction), on allume des contre-feux. On revient à l'actualité française et on claironne sur l'antisémitisme. Ainsi en est-il des quelques (soi-disant) 1.500 actes antisémites recensés sur la plate-forme Pharos (dont BFM et CNEWS font la publicité à longueur de journée). Du déclaratif seulement ... les exemples concrets/prouvés n'étant quant à eux pas légion. Deux cas parmi les plus médiatisés : l'agression d'une femme juive chez elle à Lyon et les dessins au pochoir d'une étoile de David sur des murs parisiens. Dans les deux cas, l'affaire s'est rapidement dégonflée. Dans le premier cas, elle s'oriente désormais vers un faux-témoignage lié à des problèmes conjugaux et dans le second vers une tentative de déstabilisation liée à l'étranger (Moldavie/Russie).

On peut par ailleurs s'interroger sur le rôle des médias, et en particulier des chaînes d'infos en continu, dans tout ce raffut. Il est communément admis, en sociologie, que la (sur)médiatisation d'un phénomène participe à sa propagation (par mimétisme), voire en est parfois l'origine (cf l'effet Werther, l'affaire des chevaux mutilés, les piqûres en boite de nuit ...). On est également en droit de se demander "à qui profite le crime", à l'évocation d'actes sans victime(s) et dont on ne retrouve pas les auteurs. On fait des "unes" sur des tags antisémites, on enchaîne sur "les juifs ont peur" (en pointant éventuellement la responsabilité de la communauté arabe/musulmane au passage) et on occulte pendant ce temps le martyr de milliers de palestiniens à Gaza.

Les anciens se souviennent sans doute dans les années 80-90 de nombreux faux-tracts soi-disant anti-France (ou prônant le racisme anti-blancs) mais provenant en fait de l'extrême droite. Les ficelles étaient grosses ("nous les musulmans, détestons la France, allons envahir votre pays et nous remercions la gauche pour son aide"), et heureusement, n'attrapaient pas grand monde. Épisodiquement, le phénomène a depuis refait son apparition, donnant même lieu ici ou là à quelques condamnations (jusque dans les rangs du Front/Rassemblement National). A l'époque (et jusqu'il y a peu), aucun média "sérieux" ne donnait crédit ni ne divulguait ce type d'informations (sauf à en évoquer le dénouement judiciaire).

Mais les choses ont changé. L'heure est désormais à l'immédiateté de l'information ... avec tout ce que cela implique de manque de recul et de dérives. Les médias font flèche de tout bois, les plateaux télés se transforment en tribunaux médiatiques et les éditorialistes en enquêteurs ou en juges. Ainsi a-t-on pu voir récemment certains d'entre eux débattre sur des faits sans importance (des tags sur un mur par exemple), spéculant sur leur mobile (l'antisémitisme) ou leur origine (la communauté arabe/musulmane), et ce, en l'absence de preuves, suspects et en dehors de toute procédure judiciaire ; les mêmes faisant ensuite mine de s'étonner de la recrudescence de tels actes, voire, plus globalement, de l'importation en France du conflit israélo-palestinien.

Bien sûr, il ne s'agit pas ici de nier l'existence d'actes antisémites, ni leur gravité. On se souvient par exemple des meurtres odieux d'Ilan Halimi, Sarah Halimi, Mireille Knoll ... agressés parce que juif.ve.s. Il s'agit par contre d'éviter de tout mettre sur le même plan (des tags vs des agressions physiques) et de refuser les accusations sans preuves. Il s'agit aussi de dénoncer le dévoiement d'une idée (la lutte contre l'antisémitisme) et son utilisation comme "écran de fumée" dans un contexte de politique étrangère (et de parti-pris mené par la France). Notons que des agressions physiques avérées (comme l'attaque d'une conférence sur la Palestine à Lyon), dont les auteurs et le mobile ont été identifiés, n'ont pas donné lieu à la même couverture médiatique.

Répétons le encore : s'en prendre à un personne parce qu'elle est juive (porte une kippa ...) est grave. Cela s'appelle du racisme (ou de l'antisémitisme) et cela doit être condamné. En revanche, lorsque cette même personne, qui dispose qui plus est d'une aura médiatique, devient un militant nationaliste, on n'est plus tout à fait dans le même registre. Ainsi en est-il de certains acteurs/animateurs... qui soutiennent publiquement Israël, s'en font les avocats inconditionnels, s'indignent des morts d'un côté et pas de l'autre ... et viennent ensuite s'étonner qu'on leur renvoie leur identité à la figure. Quelle différence entre J.J. Goldman (personnalité préférée des français) et Arthur (actuellement sous protection policière) ? Je vous laisse deviner ...

Bien entendu là encore, il ne s'agit pas de justifier la violence verbale (ou les insultes), mais de distinguer ce qui relève du fond et de la forme ; de distinguer des propos impersonnels, contextualisables, d'une véritable menace pour les autres ou la société. La chasse aux actes antisémites prend d'ailleurs des allures de "moustique tiré au bazooka", quand on voit la disproportion des moyens employés (plus de 600 interpellations depuis le 07 octobre) et des peines prononcées : des gamins poursuivis pour des chants débiles dans le métro, de la prison ferme pour des tags sur un mur ... Des propos idiots, outranciers, à l'évidence, mais depuis quand traquent-on de tels propos au sein du "petit peuple" ? Qu'on se penche du côté des Zemmouriens/Lepenistes, des supporters de foot, ou de certains circassiens contrariés ...

Cette hystérie philosémite se trouve assez bien illustrée par l"affaire Guillaume Meurice". Qualifié d'antisémite suite à un sketch sur France Inter, l'animateur a fait l'objet d'un dépôt de plainte (de l'OJE), d'un "lâchage" et d'une sanction de la part de sa direction, d'une mise en garde de la part de l'Arcom, d'interventions politiques (à l'assemblée nationale ...), en plus d'un lynchage médiatique et de menaces de mort. Tout ça pour quoi ? Pour avoir comparé Netanyahou à "une sorte de nazi sans prépuce". Pendant ce temps, certains politiques ou journalistes ont pu tenir des propos ouvertement racistes et violents (assimilant les arabes au terrorisme, justifiant le massacre d'enfants palestiniens) sans être inquiétés le moins du monde (exemples ici, ici ou ici).

On peut également citer l"affaire Mohamed Kaci", du nom de ce journaliste de TV5 Monde rabroué par sa direction pour avoir osé porter la contradiction à un officier de l'armée israélienne. Alors que ce dernier revendiquait ouvertement la loi du Talion ("œil pour œil, dent pour dent") face aux Gazaouis, le journaliste l’a pris de court, lui demandant : "Donc vous vous comportez comme le Hamas, c’est ce que vous nous dites ?". Une question qui a provoqué la colère du propagandiste, obligeant le journaliste à écourter l’entretien. Il faut dire que le militaire isralien, invité à venir dérouler sa propagande de guerre sur tous les plateaux télés (qui s'en étonne d'ailleurs ?), n'a pas l'habitude qu'on vienne lui porter la contradiction.

Même partialité au sommet de l'état. Les président(e)s de l'assemblée et du sénat organisent des manifestations contre l'antisémitisme pendant que des préfets interdisent un peu partout des manifestations pro-palestiniennes. Au nom de quoi ? D'un risque de trouble à l'ordre public ? Des actes ou propos antisémites ? Lorsqu'elles ont lieu, ces manifestations se déroulent dans le calme et aucun problème n'a été signalé à ce jour. Ces décisions sont purement politique. Elles visent à museler l'opinion publique et à affaiblir/décourager le soutien à la cause palestinienne. Notons que les tribunaux administratifs viennent parfois casser ces interdictions, lesquelles ont également tendance à diminuer dans le temps. Il faut dire que la France fait figure d'exception, ce type de manifestations étant autorisé dans la plupart des autres pays.

Ces dérives autoritaires trouvent leur paroxysme dans les prises de position de certains parlementaires de droite. On se souvient de la proposition de loi en 2019 d'une trentaine de députés LREM (emmenés par S. Maillard) visant à délictualiser "l’antisionisme" en l'associant à une forme d’antisémitisme (un texte adopté en première lecture puis finalement abandonné). Plus récemment, ce sont 16 sénateurs LR (emmenés par S. Le Rudulier) qui sont revenus à la charge en proposant de pénaliser l'antisionisme par ... des peines de prison : un an d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende pour "contestation de l’État d’Israël", deux ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende pour "injure envers l’État d’Israël", cinq ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende pour "provocation à la haine envers Israël" ...

Un "sens de la mesure" qui a poussé le même député LR (Le Rudulier) a demander la dissolution de LFI (+ NPA ...), pour cause ... "d'apologie du terrorisme et du Hamas". Ce qui ressemble à de la diffamation, quand on se penche sur les réels propos des responsables LFI. Refusant (sous pression constante des journalistes) d'utiliser le terme de "terrorisme", pour des raisons qu'ils ont expliqué (à savoir que ce terme n'est pas reconnu en droit international), ces derniers n'en n'ont pas moins condamné les attaques du Hamas (les qualifiant de "crimes de guerre"). Notons qu'Amnesty International (qu'il est difficile d'accuser de sympathie pro-Hamas, vu ses rapports à charge pour le groupe) a fait l'objet des mêmes accusations, avec la même mauvaise foi ...

Dans cette "chasse aux sorcières" où l'on est sommé de condamner çi ou ça (ou çi mais pas ça), manifester ici ou là (surtout si on est d'origine étrangère), en reprenant bien les idées/formules du système ("Hamas = terroristes", "Israël = démocratie", "Israël à le droit se défendre", "tous les morts sont la faute du Hamas" ...), où même le silence (ou les "non tweets") deviennent suspects ("untel a tweeté pour les palestiniens mais pas pour les israéliens oulala") ... on pourrait presque s'étonner de se considérer encore dans un pays libre. On semble en tout cas assister à une dérive autoritaire, un "fascisme d'atmosphère" pourrait-on dire, cherchant à verrouiller la pensée et mettre tout le monde au pas.

En cherchant à associer toute critique d'Israël à de l'antisémitisme, c'est un peu de notre démocratie qu'on abime. En distinguant les victimes civiles juives et palestiniennes au proche-orient, c'est un peu (plus) de clivage (de racisme, de rancœur) qu'on installe dans notre pays. Et en traitant différemment les propos/actes "anti-juifs" et "anti-arabes", c'est un peu le principe même de nation ("une et indivisible") qu'on remet en cause. Et ce, sans parler des tensions à l'international que cela engendre (adieu la "politique arabe"/"non alignée" de la France). La société se droitise c'est un fait. Et ce sont les mêmes qui génèrent des tensions identitaires/communautaires/sociales (en cherchant à nous dresser les uns contre les autres), qui font ensuite mine de les condamner et de les combattre. Que faire ? Résister.

D'où cette citation Howard Zinn (un juif de gauche, donc probablement antisémite) pour terminer : "La désobéissance civile n'est pas notre problème. Notre problème c'est l'obéissance civile. Notre problème ce sont les gens du monde entier qui obéissent aux dictats de leurs gouvernements et qui ont donc soutenu des guerres ; des millions de personnes sont morts à cause de cette obéissance ... Notre problème c'est l'obéissance quand la pauvreté, la famine, la stupidité, la guerre et la cruauté ravagent le monde. Notre problème c'est que les gens sont obéissants alors que les prisons sont pleines de petits voleurs et que de grands délinquants dirigent leurs pays. C'est ça notre problème".

 

Un magnifique article de Pierre Barbancey dans l'Humanité tranche avec le pessimisme ambiant. Il est vrai qu'en apparence c'est la sauvagerie qui triomphe.   Mais les rapports de forces sont ce qu'ils sont , et Netanyahou  devra à un moment ou à un autre s'en accommoder.

Le directeur de la CIA William Burns s'est rendu à Doha.   Il est porteur d'un plan américain élaboré en collaboration avec l'Egypte, la Turquie, le Qatar et la Jordanie. Il prévoit la tenue d'élections en Palestine y compris à Jérusalem Est et la mise en place d'un gouvernement de transition avec un nouveau gouvernement. Le nom de Marwan Barghouti est avancé.

Le Hamas a fait officiellement savoir qu'un accord existe entre le Hamas et Barghouti . Il demande la libération des condamnés à vie et a établi une liste sur laquelle Marwan figure. Le FPLP bien absent quand il le fallait joue désormais la surenchère en refusant le Hamas.  Il ne pèsera guère.

Les Palestiniens ont aussi indiqué à Barbancey leur déception devant l'attitude de la gauche française. Le blog ne saurait lui donner tort.

Il est temps désormais de faire de la libération de Barghouti la revendication de toute la gauche. Le tempos n'est plus à des" périodes de transition" illusoires.  Et Abbas doit s'en aller.

 

La gauche perd toutes les élections à cause de l'insécurité, et on dirait qu'elle s'en glorifie

4 Décembre 2023 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #GQ, #Théorie immédiate, #Élections, #Qu'est-ce que la "gauche", #Positions, #classe ouvrière

Ravachol

Ravachol

La droite libérale, qui contient aussi la pius grande partie de ce qu’on appelle encore la gauche ne s’intéresse à la criminalité et à la délinquance violentes que lorsqu’elles violent les frontières invisibles des ghettos qui protègent sa vie quotidienne, elle est tolérante à la criminalité en col blanc à laquelle d'ailleurs elle participe activement (tout comme la droite conservatrice) et considère que l’insécurité, comme l’éducation ou tout autre service peut très bien se traiter par la privatisation.

N’est immoral au fond pour les libéraux que la remise en question de la propriété, et ils tendent à considérer le délinquant avec indulgence, comme une sorte d'approximation encore grossière de l’entrepreneur, son idéal humain, et qui apporte du piquant dans son salon (c’est d’ailleurs pour cela que les sanguinaires Viking ont remplacé les sympathiques Gaulois dans le rôle du mythe du barbare originel enseigné à l'école primaire).

La gauche "de gauche" (au sens réel du terme, c’est à dire le courant politique qui prétend représenter les intérêts des travailleurs et des classes populaires), considère quant à elle avec détachement que la délinquance est un fait social objectif qui relève de sociologues, de psychologues et de statisticiens et qui ne doit pas être traité sur le plan moral, et que la répression aurait tendance à aggraver. Les délinquants sont des victimes (ce qui est absolument exact, mais ce sont des victimes d’un genre particulier, qui créent d’autres victimes). Ces postulats avaient toutes les apparences de la réalité il y a un siècle, ou plus dans le monde des Jean Valjean ou des Ravachol, dans une société qui était encore orientée vers la satisfaction (ou la privation) des besoins de base, mais dans le contexte de la loi du désir (et donc de la perversion) qui prévaut dans la société libérale de consommation de masse, ils sont très contestables.

La gauche en restant sur cette position idéologique construite sur des analyses dépassées s’éloigne du vécu des classes populaires, et se coupe de leur soutien. Il semble en fait que les cadres et les milieux actifs du militantisme de gauche sous-estiment complètement l’insécurité, voire en nient l’existence, pour le réduire à un problème de perception (en fait tout va très bien, bien mieux qu’au temps de Jean Valjean, et les prolos sont stupides et hystériques) et éthique (les prolos sont des primitifs alcoolisés, assoiffés de lynchages et de vengeance, racistes, autoritaires ou fascistes et il faut leur faire la morale). Les délinquants seraient des rebelles primitifs plus proches de Robin des Bois que de Michel Fourniret, et on les admire secrètement.

Du coup les classes populaires ne se sentent pas du tout représentées sur cette question, et lorsqu’elle devient décisive pour elles, elles votent , quand elles votent, pour l’extrême droite.

Elles y sont aidées par le monde des médias qui lui tient à peu près ce langage : « tu ne nous crois pas, tu ne veux pas admettre que tu vis dans le meilleur des mondes possibles ? et bien tu n’as qu’à voter Marine Le Pen si tu n'es pas content ! ». Le vote lepéniste est le vote proposé par le spectacle capitaliste et marchand à ceux qui n’aiment pas le spectacle capitaliste et marchand. Et comme par hasard, peu avant chaque élection importante, l’actualité est envahie de crimes odieux et de faits-divers abominables …

Pourtant l’extrême droite n’offre pour y remédier que des éléments de langage autoritaires qui ne font que balayer le problème sous le tapis, ou alors l’accroissement de la répression, jusqu’à l’usage spectaculaire de la contre violence qui aggrave tout comme on a pu en voir les effets épouvantables au Mexique. Le succès de son discours s’explique donc moins par sa substance interne, que par la grande faiblesse des propositions de gauche sur la question, qui se répercute aussi dans les syndicats.

Parce que pour lutter contre la peur insidieuse qui envahit petit à petit la vie quotidienne des gens ordinaires, il faut au moins avoir le courage de l’exprimer.

L’insécurité dans la rue et la vie quotidienne est un des principaux fléaux qui afflige les classes populaires de toute origine. On peut dire qu’elle leur gâche littéralement la vie. Le probabilité d’être la victime d’une incivilité, d’un délit ou d’un crime s’accroît vertigineusement en raison inverse des revenus et du patrimoine. Les services publics sont affectés, le droit à la santé est remis en question, les biens péniblement acquis à crédit sont constamment volés ou détériorés, les femmes en sont réduites à raser les murs et à baisser les yeux, et ne peuvent pas sortir de chez elles après la tombée de la nuit, les enfants sont détournés par le mauvais exemple des délinquants qui affichent ostensiblement leurs activités lucratives, et tombent sous l'emprise de la drogue ou sous l'influence des caïds et des violeurs dont le rap commercial fait l’éloge permanent.

Elle aggrave tous les autres problèmes : emploi, logement, santé, éducation, elle alimente le racisme et pousse les prolétaires à l’exil périphérique dans le non-lieu géographique des ronds-points, des parkings et des lotissements où ils vont hériter des emplacement les plus enclavés. La géographie du pays a été entièrement remodelée en alvéoles cloisonnées, peuplées de « voisins vigilants » plus ou moins pauvres qui se regardent en chiens de faïence, et qui évoluent en ghettos. Les gens ne se rencontrent plus que dans les centres commerciaux, ou plutôt ne font que s’y croiser. Cette nouvelle organisation de l’espace en fait autant et plus pour l’isolement et la perte de conscience du prolétariat que toutes les transformations des techniques industrielles.

La délinquance quand elle se généralise dans un pays rend la répression directe presque inutile. Dans une situation de colombianisation des relations sociales, qui oserait se syndiquer, si le prix à payer est devenir la cible des bandes organisées qui se mettent au service du patronat, comme de Coca-Cola en Colombie ? Quelle organisation prendra le risque de défendre la cause des milliers (sic) d'ouvrières mexicaines violées et massacrées depuis plus de vingt ans par les hommes de main des patrons de Juarez et de toute la zone-frontière étatsunienne ?

Dans ce contexte avec une superbe hauteur l'industrie du divertissement et l'art contemporain font l’éloge direct ou indirect du vice pur et simple (violence, pornographie, argent facile, drogue, justice privée, serial killers) au nom de la liberté de création.

Proposer des solutions concrètes , matérielles et crédibles pour arrêter cette spirale de barbarisation est une priorité.

L’action de la gauche morale porte alors complètement à faux et ne sert les intérêts de personne. Elle donne souvent l’impression d’excuser les délinquants, non pas en examinant à fond les circonstances pour voir si des excuses existent, mais en minimisant la gravité morale des actes, voire même en niant l’existence même d’une morale (ce qui ne l’empêche pourtant pas de faire perpétuellement la morale à tout le monde !).

Un exemple de son incongruité : elle se fait remarquer par son opposition à la construction de prisons ; on peut ergoter à l’infini sur le bien fondé de la prison pour réhabiliter les délinquants, mais une telle démarche aboutit dans les faits non à diminuer le nombre de détenus, mais à augmenter la surpopulation carcérale, à favoriser la récidive, et à laisser en liberté des individus dangereux pour leur communauté.

Autre exemple : la gauche n’a cessé de vitupérer inutilement contre les caméras de surveillance, dont le seul effet tangible sur les libertés publiques a été au final de limiter les bavures policières, et contre les fichiers génétiques qui ont permis d’interrompre la carrière de nombreux prédateurs sexuels.

Une vraie politique urbaine de gauche se donnerait pour but de faire disparaître les tags et d’empêcher les dégradations du mobilier urbain qui défigurent les quartiers populaires sans jamais atteindre les quartiers riches et de lutter contre le vandalisme des métros, des bus, des écoles, et des cages d’escalier. Ce vandalisme généralisé ayant des effets appauvrissant bien concrets et avérés pour les habitants des quartiers concernés. Or il semble bien au contraire que ces « expressions » soient élevées par la gens intelligente de gauche au rang d’une esthétique bien caractéristique de cette époque informe.

Les mouvements contre les violences faites aux femmes et contre les violences policières sont en réalité à placer dans ce contexte, ce sont des aspects de la lutte nécessaire et universelle contre l’insécurité, qui nécessite le renforcement de l’État et l’embauche de fonctionnaires, et ils ne peuvent pas être traité avec succès autrement, et certainement pas par la communication, ni par des campagnes de délation.

Ayant vécu et travaillé toute ma vie adulte dans des quartiers populaires, j’ai pu constater avec tristesse qu’ils étaient profondément divisés, entre des micro-centres bien desservis et proches des principaux services publics, relativement agréables à vivre où habitent les élus municipaux et les fonctionnaires (enseignants, etc) et les cités des périphéries dans la périphérie, où si on se trouve toujours en France parce que les habitants n’ont pas ou n’ont plus de place nulle part ailleurs, on se trouve dans une France nouvelle où l’État est en voie de disparition, où personne n’a envie de vivre (notamment les militants communistes qui en étaient les résidents historiques) et qui évolue vers la tiers-mondialisation, l’économie informelle, où Uber (profit über alles) est le principal employeur légal.

La ghettoïsation des villes met en panne le logement social en bloquant la rotation de l’habitat, en créant des zones de sous-éducation et de sous-urbanisme, de non-droit et de non-service où ne viennent ni les plombiers ni les médecins. Des zones où personne ne va plus à part la police, et juste pour faire du bruit et frapper au hasard ; et ce sont justement dans ces ghettos qu’aboutissent les migrants illégaux qui font l’objet de tant d’hypocrite sollicitude et qui deviennent les victimes désignées pour les mafias.

Si la gauche était de gauche, elle agirait sans faiblesse pour résoudre ces problèmes, et couper l’herbe sous les pieds des fascistes qui les utilisent pour avancer tranquillement leur agenda antisocial, antidémocratique et suprématiste.

Mais de toute manière, un gouvernement de gauche populaire et souverain par sa simple existence contribuerait puissamment à les résoudre. S’il mettait vraiment en œuvre son programme économique, il créerait presque immédiatement et sans même le vouloir des conditions subjectives défavorables à la criminalité en s’attaquant à l’argent facile, aux zones grises de l’économie, et aux échanges dérégulés qui lui sont si favorables. A plus long terme, il contribuerait aussi à modifier les mentalités en remettant en cause l'individualisme de masse qui sert de morale à la société libérale.

Dans ces conditions, qu’un candidat de gauche cherchant à mobiliser l’électorat populaire ne mette pas avant cette priorité est carrément incompréhensible, voire suspect. On dirait bien que ce que redoute le plus un politicien étiqueté « à gauche de la gauche » de nos jours, c’est de gagner.

A moins qu’il ne soit lui-même intimidé par l’insécurité globale crée par l’action des États-Voyous-Unis ! Si on se souvient du sort d’Allende, ou même du suédois Olaf Palme, ou bien sans aller jusque là, aux déboires judiciaires de Lula et l’assassinat moral de Corbyn, on comprend un peu mieux l’origine de cette « peur de gagner » des Poulidor de la gauche de la gauche !

Toi-même, préférerais-tu vivre une vie facile et gratifiante et te flatter de passer à la télé de temps en temps pour vitupérer contre la Chine ou la Russie, enfoncer des portes ouvertes contre le racisme et l’homophobie comme si on vivait encore en 1967, bavasser philosophiquement pour ou contre l’identité et la différence, ou bien finir prématurément assassiné physiquement ou moralement ?

Ne le laisse pas tomber, il est si fragile, être un homme libéré, c’est pas si facile !

GQ, 8 mai 2021, relu le 3 décembre 2023

PS : Il faut distinguer les policiers de leur commandement, et distinguer la police ordinaire du maintien de l'ordre (lequel est largement tributaire de la doctrine gouvernementale. Le slogan "tout le monde déteste la police" est l'un des plus idiots qui ait été pondu par les gauchistes, depuis "CRS-SS").

 

Gérard Collomb, Bernstein, Kautsky, Lénine et le PCF

, blog faire vivre le pcf (°)

Après ces temps d’hommage à Gérard Collomb, il n’est pas inutile de rappeler à quel point il symbolise ce qui fracture la gauche depuis 1920, ce qui a conduit à la trahison de l’espérance de 1981, puis à cette fracture avec les milieux populaires qui a failli détruire totalement le parti communiste.

Il faudra faire le bilan de l’ère Collomb pour Lyon et son agglomération. Un formidable développement, creuset de terribles inégalités, une formidable transformation accélérant des ségrégations toujours plus fortes. Il faut penser dialectiquement pour n’oublier ni le formidable ni l’injustice...

Mais la première leçon pour les communistes, c’est l’impasse d’une stratégie de rassemblement dans une union de la gauche d’en haut et électoraliste. Si Deferre avait exclu les communistes, le très mitterrandien Collomb les avait associé, les intégrant dans l’institution jusqu’à pousser leurs élus à s’oublier dans le jeu politicien, et à s’opposer en 2014 aux militants qui les avaient choisis.

La leçon lyonnaise de Gérard Collomb, c’est que le parti communiste n’a aucun avenir dans une gauche électorale, médiatique, politicienne. Il n’a aucune force ailleurs que dans ses racines populaires, travailleuses, militantes... Et ce sont les seules forces qui vaillent pour construire un rassemblement populaire majoritaire

Témoignage de Pierre-Alain Millet pour le groupe communiste et républicain de la métropole du Grand Lyon, le 27/11/2023

Gérard Collomb, une vie engagée dans la recherche d’une troisième voie

Gérard Collomb a été une personnalité politique lyonnaise de premier plan. Il restera dans l’histoire dans la lignée d’Edouard Herriot, ces maires de consensus qui sont rattachés d’abord à l’histoire de cette ancienne capitale des gaules marquée par un christianisme progressiste, le radicalisme, un équilibre politique que les moments révolutionnaires comme ceux des canuts n’ont jamais vraiment déstabilisé.

L’histoire fera plus tard le bilan, mais ce ne serait pas rendre hommage à l’homme politique, au penseur du réformisme, au formidable débatteur public craint par tous ses contradicteurs, dans cette enceinte notamment, que de masquer nos désaccords, nos divergences, et parfois de durs combats politiques. Il avait à la fois une étonnante connaissance de si nombreux dossiers, et un sens de l’histoire au cœur de tout engagement politique. Porté au siège de maire par l’union de la gauche, il a construit un régime politique élargi, ce vieux projet d’un centre progressiste qui avait échoué avec Deferre en 1969 et qu’il a pu construire pendant 20 ans à Lyon, déstabilisant ses adversaires comme ses alliés, les communistes s’en souviennent en 2014...

C’est en tentant de le porter au plan national, comme un des pères fondateurs de la macronie, qu’il a butté sur une impossibilité. Il ne peut y avoir de gauche, fut-elle centriste, sans les milieux populaires, et le capitalisme pousse toujours les contradictions à leur forme la plus violente, poussant comme il le dira en quittant le ministère de l’intérieur, à vivre face à face plutôt que cote à cote...

Il laisse ouvert ce vieux débat historique du rapport entre la gauche et les classes sociales. J’en garde un souvenir personnel dans le mandat de 2008. J’avais utilisé une citation de Marx qui m’avait valu une réplique surprenante de sa part, dénonçant l’attaque du réformiste Berstein [1] par le révolutionnaire Kautsky [2], celui pourtant dénoncé comme renégat par Lénine. Au-delà de sa culture historique et politique hors du commun, il m’avait sans équivoque rappelé le vieux débat entre réformisme et révolution, un débat qui reste plus ouvert que jamais.

En pensant à tous ses proches, je garde le souvenir de son incroyable énergie redevenu conseiller d’opposition, de notre dernière rencontre dans les couloirs de la métropole et de son tutoiement amical et souriant, malgré la maladie.

 

(°) Il est bien tard pour s'en préoccuper !!!!!!!

(point de vue de Pedrito, ancien militant déboussolé par les  leçons du passé  - les trahisons  - et la tournure actuelle enclenchée par Fabien Roussel, à mon humble avis  guère plus engageante d'union au sommet mortifère avec des politiciens m'as tu vu sociaux démo. plus enclins à la collaboration de classes avec la droite qu'aux choix nécessaires de la nécessaire abolition du capitalisme impérialiste. Rien à voir avec une union populaire autour d'un parti communiste débarrassé de ses dérives électoralistes )

[1Eduard Bernstein, né en 1850 à Schöneberg près de Berlin et mort en 1932, est un homme politique et théoricien socialiste allemand, militant du Parti social-démocrate d’Allemagne (SPD)

[2Karl Kautsky est un homme politique et théoricien marxiste allemand et autrichien, né à Prague le 16 octobre 1854 et mort à Amsterdam le 17 octobre 1938

 

Le “petit père” Loukachenko a doublé les impôts sur les riches, tout en rappelant les événements de la Grande Révolution d’Octobre

samedi 2 décembre 2023 par Sergueï Aksionov         Blog A.N.C.

La Biélorussie ne se proclame pas socialiste mais "sociale", prudence verbale post-1991 ...dans les faits, le socialisme ce n’est pas un slogan, c’est la réalité de rapports sociaux et économiques transitoires entre capitalisme et communisme ...alors où en est la Biélorussie aujourd’hui ? (BD-ANC)

La Russie et le Belarus se préparent à approuver un nouveau plan d’intégration pour les trois prochaines années. Ce plan a été discuté lors de la réunion du Conseil des ministres de l’État de l’Union, qui s’est tenue le 29 novembre à Moscou. Le document, préparé par le ministère du développement économique de la Fédération de Russie et le ministère de l’économie du Belarus, prévoit la mise en œuvre de pas moins de 120 tâches regroupées en 11 sections jusqu’en 2026.

Il s’agit d’une intégration purement économique, ce qui est tout à fait compréhensible. La proximité politique entre Moscou et Minsk est aujourd’hui presque absolue. Nous sommes dans la même tranchée. La SVO en Ukraine a rapproché nos pays plus que la Ligue nocturne de Hockey, où Poutine et Loukachenko, encadrés par des équipes d’officiels, se mesurent à coups de crosses et de palets.

Lorsqu’il n’y a pas de conflit politique, les affaires se font. Le plan d’intégration des trois dernières années a été presque entièrement réalisé. Jusqu’à 90 % des activités des 28 programmes d’union ont été mises en œuvre, s’est vanté Mikhail Mishustin. Il y a de quoi être fier. Pendant deux décennies, l’État de l’Union a été chancelant et instable, et maintenant l’ennemi commun, les sanctions, nous a forcés à bouger.

Le rapprochement se fera dans plusieurs directions à la fois. Il est prévu de lancer un système unifié de transport et d’énergie, de développer la coopération industrielle, la coopération en matière d’investissement, les systèmes de paiement nationaux, d’élaborer des règles communes en matière de concurrence, de garanties pour les entreprises et de protection des consommateurs.

Comme tout processus de convergence, l’interpénétration des deux parties de l’État de l’Union suivra inévitablement les lois de la physique politique. La Russie, plus massive, influencera le Belarus et commencera à le transformer en son image. Mais le Belarus (petit mais puissant) commencera également à changer le caractère de son “grand frère”.

Là où Moscou a la quantité, Minsk a la qualité.

Ce petit État de six régions s’est fait connaître par son “atelier d’assemblage” pour toute l’URSS lorsqu’il était une république soviétique. La culture du travail, traditionnellement élevée, a fait du Belarus une plateforme appropriée pour le développement de l’industrie de haute technologie. L’idée et l’exécution étaient locales, les ventes se faisaient dans toute l’Union soviétique.

Aujourd’hui, rien n’a fondamentalement changé. Le caractère national est éternel. Le Belarus peut toujours être un atelier d’assemblage russe en cas de besoin. Mais Minsk a quelque chose de plus précieux pour Moscou : un exemple de la manière de traiter le potentiel et les ressources du pays, de les répartir et de les développer.

Alors que le caractère social de l’État n’a été que déclaré formellement dans la constitution russe, Loukachenko a réussi à construire le pays, en fait, dans l’intérêt de la majorité. Les usines et les fermes d’État fonctionnent. Les salaires sont payés. Le fossé entre les différentes couches de la société est minime. Les routes sont belles. Les villes propres. Aucune migration. La criminalité est faible.

Oui, c’est un peu ennuyeux pour les citoyens "politiquement actifs" de vivre dans un tel pays. Ils attendent avec impatience le week-end pour se rendre à un rassemblement et crier “Lukashenko, dehors !”. Mais ils constituent l’écrasante minorité de toute société. Si on veut les satisfaire, c’est en deuxième lieu. D’abord du pain pour tous, puis des brioches pour quelques-uns, ensuite seulement.

La patrie comprend cela et agit en fonction du bon sens. D’où, d’ailleurs, ses problèmes politiques. L’intelligentsia libérale hurlante, habituée des cafés de Minsk, des barber shops et des hostels de Vilnius le week-end, veut avoir le pouvoir de voler les Biélarussiens avec leurs oligarques – comme c’était et c’est toujours le cas en Russie.

Et maintenant, les deux modèles vont commencer à s’interpénétrer. Il serait utile que Moscou tire parti de la situation et inculque les meilleures approches (et, surtout, éprouvées par la pratique et le temps) d’Alexandre Grigorievitch sur le sol russe. D’autant plus que notre propre politique économique libérale russe est complètement en faillite.

Avant le début de la SVO, on pouvait contester cette thèse. Mais les hostilités ont révélé la monstrueuse faiblesse de notre propre base industrielle. Il s’est avéré que le pays importait de l’étranger la quasi-totalité des biens de consommation et des composants nécessaires à la production, des clous à la microélectronique. Dans cette situation, il est ridicule de prétendre être une superpuissance.

Ce n’est pas le cas de “Batka” (papa) Lukashenko. Ayant instinctivement compris qu’il n’y avait pas d’autre issue pour la Biélorussie, qui n’est pas riche en ressources naturelles, il n’a pas autorisé la vente de la production soviétique à des particuliers, comme cela s’est fait en Russie (souvent pour la détruire afin d’”assainir” le marché). Les ouvriers en bleu de travail continuent d’aller au boulot. Et ils ramènent leur salaire à la maison.

MAZ, BelAZ, l’usine de tracteurs de Minsk, l’usine métallurgique du Belarus, Belshina [pneus], Gomselmash [machines agricoles], Belaruskali [engrais], les raffineries de pétrole de Novopolotsk et de Mozyr, l’usine de remorques de Minsk (châssis pour les Iskanders !), Belkommunmash, ATLANT, Gefest, BelWest, Lidskoye, etc. Toutes ces productions fonctionnent, elles sont bien connues des Russes.
En Biélorussie la propriété publique n’est pas une honte ...et ça marche !

Le résultat de l’intégration devrait être l’émergence en Russie d’un ensemble similaire d’installations de production, dont la simple énumération démontrera de manière convaincante que le pays produit tout par lui-même et ne dépend de personne. Le résultat final ne sera peut-être pas aussi brillant que les meilleurs échantillons mondiaux, mais il fonctionnera, sera peu coûteux et, surtout, il sera à nous.

Les pratiques industrielles prudentes du Belarus devraient être prises comme modèle. La renaissance et le développement des anciennes installations de production et la construction à partir de zéro de nouvelles installations du même type (bien que sans la société mère à Londres) finiront par faire de la Russie un pôle technologique indépendant. C’est ce à quoi nous aspirons, n’est-ce pas ?
Sinon, nous serons écrasés…

Mais aucune révolution industrielle n’est possible sans une solution équitable à la question de la propriété. Il ne suffit pas de déployer la production, il faut la protéger de manière fiable contre les propriétaires peu scrupuleux. L’État et les collectifs de travail doivent devenir les propriétaires de l’industrie nationale. Et ne pas accepter des escrocs qui vivent leur vie en Europe.

Et pour que ce soit clair pour tout le monde, il serait bon de commencer avec la question de la reprivatisation. Non seulement comme un pas vers le rétablissement de la justice, en jetant des bases solides pour la prospérité future du pays, mais surtout comme un acte politique. Un geste qui montrerait de manière convaincante aux gros bonnets et au peuple où le pays a évolué.

Rappelons que c’est sur la base de la politique, et non de la vulgaire économie, que Tchoubais a justifié sa privatisation à l’époque. Les réformateurs, a-t-il avoué, voulaient retirer le pouvoir aux directeurs rouges en les privant de la possibilité de disposer des biens. Tchoubaïs s’est sauvé, et il est maintenant temps de tout remettre en place.
Resserrons les liens avec le Belarus.

Loukachenko n’a pas besoin de reprivatiser quoi que ce soit, car il n’a jamais rien dénationalisé. Et dans les années qui ont suivi, lorsqu’on lui a proposé une telle chose, il est resté fermement sur sa position de ne rien céder des biens du peuple.

C’est le désir des oligarques russes d’acheter les meilleurs actifs du Belarus qui a été à l’origine du retard et de l’atermoiement de Minsk en matière d’intégration. Après avoir ponctionné les oligarques, il serait bon de faire un geste en faveur des gens ordinaires – en révisant le mécanisme de paiement des impôts au Trésor.

Oui, il s’agit du fameux barème progressif d’imposition des personnes physiques, pour lequel la gauche plaide depuis vingt ans. Poutine a fait un effort une fois, il a relevé la barre des millionnaires de 2 %, mais c’est tout. Ce n’est pas le cas de Loukachenko.
Hier encore, le parlement biélorussien a adopté en dernière lecture la loi sur les changements fiscaux pour l’année prochaine. Le taux d’imposition des citoyens dont les revenus sont supérieurs à 200 000 Br (5,7 millions de roubles russes) va presque doubler, passant de 13 à 25 %.
Un vrai radical, contrairement à d’autres.

Ce ne serait pas dommage pour la Russie, qui s’intègre à la Biélorussie, de suivre la voie tracée par le Batka. Plus encore, elle devrait “mettre les bouchées doubles”. Non seulement pour forcer ses citoyens riches à partager avec la société à un taux plus élevé, mais aussi pour exempter les pauvres (et nous en avons encore 20 millions) de paiements.

Que ce soit Loukachenko qui rattrape Poutine, et non l’inverse.

Il est vrai qu’à cette fin, le président russe devra intégrer ses opinions politiques à la position de Batka. Devenir un peu socialiste.

“Plus de cent ans se sont écoulés depuis les événements de la Grande Révolution d’Octobre, et ses idéaux sont toujours d’actualité et significatifs”, a déclaré le dirigeant biélorussien en félicitant ses compatriotes le 7 novembre à l’occasion de l’anniversaire de la Révolution toujours fériée en Biélorussie.
Je me demande ce qu’en pense le Kremlin ?

 

 

L’UKRAINE : LA PRÉPARATION DE LA CAPITULATION

Voici un article qui nous a été proposé par Oleg Nesterenko et qui a le mérite d’une vue synthétique qui rassemble la plupart des informations qui parviennent de diverses sources depuis quelques jours. Il reprend le déroulé du conflit depuis le début de l’opération spéciale et des négociations désavouées par la partie ukrainienne. Toutes les informations crédibles que nous avons vont dans le même sens et elles démontrent l’horreur inutile de cette guerre qui aurait pu être évitée comme la plupart des conflits que tente de provoquer l’impérialisme sur toute la planète. Si partout les Etats-Unis avec leur volonté d’alimenter les brasiers ne sont plus là, les relations régionales sous l’égide de pays neutres peuvent être fructueuses, c’est tout un nouvel ordre international dans lequel la diplomatie peut succéder au fracas des armes, aux morts inutiles et aux dépenses militaires alors qu’il y a tant de défis humains à régler par la coopération. Une fois de plus la Russie aura payé par le prix du sang de ses enfants l’instauration de cet ordre multipolaire que le conflit ukrainien comme celui de Gaza est en train d’imposer. (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Depuis le début du désastre de la contre-offensive ukrainienne face aux troupes russes suivi de la compréhension par les partenaires occidentaux de la faillite de leur projet sur le territoire de l’Ukraine, le pouvoir à Kiev s’est retrouvé devant une réalité effroyable : le refus de la continuation des investissements venus des sources qui lui ont assuré auparavant d’être impérissables – le début de la fin du règne de Zelensky et de son entourage.    

Pourtant, une telle fin était parfaitement prévisible. Seule l’ignorance de l’histoire et du mode opératoire doctrinal des protagonistes nous condamne à sa répétition. Dans mon analyse datant d’un an « La guerre en Ukraine : les véritables raisons du conflit » j’ai déjà mentionné les éléments constitutifs de la future défaite de Kiev :

{… Au moment venu, quand le pouvoir américain considérera que le « retour sur investissement » dans la guerre en Ukraine est suffisant ou bien quand il fera le constat que la probabilité à atteindre le seuil de satisfaction est trop faible – il abandonnera le régime de Kiev. Il l’abandonnera de la même manière que le régime afghan de Ghani a été abandonné et les kurdes en Irak et en Syrie ont été abandonnés après avoir accompli, partiellement, les missions qui leurs ont été attribuées par l’Amérique contre la promesse de la création d’un état kurde. La promesse qui n’engageait que ceux qui l’écoutaient.

De ce fait, et vu que malgré la pression des sanctions occidentales sans précèdent la Russie dispose toujours de finances publiques saines, dette négligeable, balance commerciale excédentaire et aucun déficit budgétaire – le conflit en Ukraine ne peut ne pas être emporté par les Russes, dans une forme ou une autre.

De plus que, élément fondamental : pour la Fédération de Russie ceci est un élément existentiel ; pour les Etats-Unis d’Amérique, comme déjà mentionné, il ne l’est pas. …}

Les intentions initiales des Russes

Les pseudos experts du camp Occidental n’ont trouvé qu’une parade pour justifier leur grave manque de vision, d’anticipation et d’évaluation du potentiel de Moscou : répéter les mantras sur l’impuissance de la Russie à continuer à mener la guerre, vu qu’elle reste sur ses positions et n’avance guère sur le front depuis un an.

La myopie analytique ne leur permet pas de percevoir la réalité dérangeante. Si la Fédération de Russie a eu l’initiative unilatérale au début de la guerre de proposer la signature de l’accord de paix qui devait avoir lieu à Istanbul, à l’époque quand elle était incontestablement en position de force, y compris selon le point de vue du camp « atlantiste » – cela ne signifie qu’une seule chose : au moment d’entrer dans la négociation Moscou avait déjà obtenu la satisfaction au niveau des acquis territoriaux (les territoires pro-russes récupérés à l’Ukraine) et il ne lui restait qu’à obtenir de Kiev l’engagement sur son statut de neutralité vis-à-vis de l’OTAN, soit l’assurance juridique de la non présence des forces armées du camp ennemi sur le territoire de l’Etat tampon qu’est devenu l’Ukraine pour la Russie depuis 1991.

Aujourd’hui, la Russie reste stationnée d’une manière inébranlable sur ses positions acquises sur le front et se contente d’épuiser les dernières forces matérielles et humaines restantes de l’armée ukrainienne. Ceci n’est ni un signe de faiblesse, ni, encore moins, un hasard.

Les thèses ukraino-occidentales stipulant que la Russie a visé la disparition de l’État ukrainien en tant qu’entité étatique sont, tout simplement, fantaisistes et ne sont que le reflet d’amateurisme déconcertant de leurs auteurs. Les événements qui ont eu lieu à Istanbul au début de la guerre en sont la preuve : si Moscou avait comme objectif la disparition de l’Ukraine – jamais elle ne serait mise autour d’une table de négociation de sa propre initiative au tout début de la guerre, tandis qu’elle dominait la situation sur le terrain et quand ses troupes étaient positionnées dans les faubourgs de Kiev qui se trouvaient en état de chaos. Les troupes n’ont été retirées qu’en gage de bonne volonté au moment de la signature de l’accord d’Istanbul par la partie ukrainienne. Une signature suivie de l’annulation au lieu de la ratification

 

 

 La révélation

 Vingt mois se sont écoulés depuis les événements mentionnés. Ce fin novembre 2023, un personnage très controversé de la scène politique ukrainienne a été mis sur le devant de la scène dans l’espace médiatique ukrainien et a fait des révélations qui ont produit l’effet de l’explosion d’une bombe auprès de l’opinion publique ukrainienne. Révélation, considérée par la communauté d’experts ukrainiens indépendants comme la plus scandaleuse de l’année en cours.

Dans une interview accordée à la chaîne de télévision ukrainienne « 1+1 » par David Arakhamia, qui n’est personne d’autre que le chef de la fraction parlementaire du parti « Serviteur du Peuple » (parti politique de V. Zelensky), il a évoqué les circonstances des négociations entre la Russie et l’Ukraine qui ont eu lieu à Istanbul en mars-mai 2022 et dans lesquelles il était à la tête de la délégation ukrainienne.

Arakhamia se souvient de la position des Russes à l’époque : « Ils ont espéré presque jusqu’au dernier moment que nous allions accepter la neutralité. Cela était leur objectif principal. Ils étaient prêts à terminer la guerre si nous prenions la neutralité – comme la Finlande autre fois – et si nous prenions des obligations de ne pas entrer dans l’OTAN ». 

Il a également mentionné que les « conseillers à la sécurité » de Washington, de Londres, de Varsovie et de Berlin ont eu accès à l’intégralité des documents discutés sur la table de négociation.

En parlant des raisons de l’annulation de l’accord, il n’en a évoqué qu’une seule sérieuse – la visite de Boris Johnson à Kiev : « … Boris Johnson est venu à Kiev et a dit que « nous ne signerons rien du tout avec eux. Nous allons, tout simplement, faire la guerre ».

Il est à noter que le parlementaire n’a pas prononcé un seul mot concernant Boutcha. Et, rappelons-nous, l’unique version officielle de Kiev et du camp « atlantiste » de l’époque de la raison de l’arrêt des pourparlers avec les Russes et de l’annulation de l’accord d’Istanbul était le prétendu « massacre de la population civile perpétré par des troupes russes à Boutcha ».

Cet illustre personnage termine son interview avec la grande fierté d’avoir dupé la délégation russe : « Nous avons accompli notre mission de faire trainer les choses avec la note 8 sur 10. Ils se sont (les russes) décontractés, sont partis – et nous avons pris la direction de la solution militaire ».

Cette révélation télévisée a fait découvrir au grand public ukrainien la réalité de la guerre qui aurait pu aisément être arrêtée dans ses débuts et que ce n’est qu’à l’initiative directe de l’Occident collectif via son émissaire Boris Johnson qu’elle a été relancée d’une manière forcée et a eu comme conséquences des centaines de milliers de morts ukrainiens et encore davantage de blessés graves et de mutilés, ainsi que la destruction quasi totale de l’économie et des infrastructures du pays qui prendront des décennies pour se remettre et revenir au niveau d’avant-guerre qui était déjà tout à fait déplorable.

Le rappel

Étant à l’opposé de tout ce qui était servi par l’appareil de la propagande étatique inégalé agissant en Ukraine et dans les pays occidentaux depuis bientôt deux ans, les informations révélées ce fin novembre 2023 ont provoquées une véritable stupéfaction auprès des masses ukrainiennes auparavant formatées et endoctrinées par des récits de toute autre nature.

Pourtant, pour des esprits non aveuglés par des narratifs « otaniens », les choses ont été d’une évidence flagrante dès le début du conflit en cours.

Lors de mon interview du mois de mai 2023 à la publication française « l’Eclaireur des Alpes », cette réalité était déjà évoquée non pas comme l’une des probabilités, mais comme l’unique évidence avec des conséquences immédiates appropriées :

{… L’Eclaireur – La Russie n’a-t-elle pas néanmoins sous-estimé la capacité de résistance des Ukrainiens ?

Oleg Nesterenko  Rappelez-vous les expertises sérieuses qui ont été faites sur la capacité de l’Ukraine à maintenir la résistance contre la Russie. A l’époque, juste avant le déclenchement de la guerre, il était estimé que l’Ukraine ne pouvait tenir qu’un temps très limité face à la Russie.

Contrairement aux informations développées dans les mass médias occidentaux et malgré les événements que l’on observe sur le terrain, j’aimerais souligner que ces experts qui ont prévu que l’Ukraine ne pourrait résister qu’un temps limité n’ont eu nullement tort. Ils ne se sont nullement trompés dans leurs prévisions. 

Mes paroles peuvent paraître étonnantes vis-à-vis de ce qu’on observe depuis plus d’un an. Pourtant, il n’y a pas à s’étonner. Il ne faut jamais oublier que le déclenchement de la phase active des hostilités a eu lieu fin février 2022 et que déjà fin mars 2022, il y a eu des pourparlers à Istanbul entre l’Ukraine et la Russie. Pour quelles raisons une partie qui se sent forte et qui sait qu’elle a encore des capacités considérables de résistance se mettrait-elle autour d’une table de négociation pour convenir d’une forme de reddition ? Ça n’arrive jamais ainsi. Les Ukrainiens se sont mis autour d’une table de négociation en étant conscients que leurs capacités de résistance étaient très limitées.

A Istanbul, quand les deux parties ont trouvé un consensus sur la majorité d’éléments clés de l’accord sur l’arrêt des hostilités, quand ils ont été pratiquement à un pas de la ratification du document de l’accord de paix, il y a eu un virage à 180 degrés du côté ukrainien. Pourquoi ? Il ne faut pas avoir une grande expérience dans le monde des affaires pour savoir : dans le cadre de négociation, quand une des deux parties fait volte-face du jour au lendemain, cela ne signifie qu’une seule chose – cette partie a eu une contre-proposition de la part des concurrents de ceux qui sont en face d’elle. C’est comme cela que cela se passe dans le monde des affaires. Dans la politique, c’est pareil.

Si l’Ukraine a pu se permettre le luxe de faire une croix sur l’accord de paix, c’est tout simplement qu’elle a reçu une contre-proposition. Et cette contre-proposition ne pouvait venir que du camp occidental. Les évènements qui ont suivi ont dévoilé les éléments de cette proposition : l’Ukraine a reçu une proposition pour l’ouverture d’une gigantesque ligne de crédit partiellement payable en armement. En contrepartie, l’Ukraine devait s’engager à s’interdire de conclure un accord d’arrêt de guerre face à la Russie et fournir « la main d’œuvre » combattante. C’était ça l’accord.

Afin de répondre au second engagement de Kiev, les frontières nationales de l’Ukraine pour sortir du pays ont été fermées. En France, on n’en parle pas beaucoup – car c’est une vérité trop gênante – mais au début de la guerre il y a eu un gigantesque exode des populations des territoires ukrainiens, notamment de la population masculine. Les hommes savaient que s’ils ne partaient pas, ils seraient envoyés à la tuerie. Quand on parle à la télévision occidentale de l’héroïsme ukrainien, ça me fait sourire sachant parfaitement que le pays se serait vidé des futurs combattants en un temps très réduit si les frontières n’avaient pas été interdites de passage. …}

https://eclaireur.substack.com/p/sans-le-coup-detat-de-2014-lukraine

La capitulation et le transfert des responsabilités

Dans cet interview de David Arakhamia, l’une des personnes-clés de la politique de l’Ukraine d’aujourd’hui, en parlant de plusieurs sujets il a également évoqué la nécessite d’organiser un référendum national sur la question des éventuelles concessions territoriales à la Russie en échange de l’accord de paix.

La signification de cette déclaration est d’une importance stratégique : le régime de Kiev prépare auprès de l’opinion publique du pays non seulement sa capitulation, mais également, et surtout, le transfert sur les épaules du peuple ukrainien meurtri depuis bientôt deux ans de la responsabilité de sa politique désastreuse mise en place par le camp occidental américano-centrique qui a provoqué des centaines de milliers de morts et a dévasté le pays.

Ainsi, ce n’est pas le régime en place, mais soi-disant le peuple qui devra prendre la décision et sur la cessation de guerre et sur la perte des territoires nationaux.  

Nul doute que ce simulacre de référendum ou une initiative similaire aura lieu. Le fait que Zelensky a déjà annoncé que cela sera à la limite de l’impossible de mettre en place et de réaliser les futures élections présidentielles du 31 mars 2024, car, pour commencer, une partie non négligeable de la population se situant à l’étranger, sur les champs de batailles ou sur les territoires occupés par la Russie n’aura pas l’accès physique aux centres de vote – ce fait ne sera certainement pas un obstacle pour organiser la passation de la lourde responsabilité de la perte de la guerre sur les épaules du peuple ukrainien.

Néanmoins, si son excellence monsieur le président Volodimir Zelensky, étant d’ores et déjà un cadavre politique, n’est pas en train de préparer la passation du pouvoir vers le parlement ukrainien (Verhovna Rada) aussi ultranationaliste et corrompu que lui-même, et ceci en dehors de tout processus électoral – ce qui est hautement probable – des surprises fort désagréables l’attendent dans un avenir proche.

Oleg Nesterenko

Président du CCIE (www.c-cie.eu)

(Spécialiste de la Russie, CEI et de l’Afrique subsaharienne ; ancien directeur de l’MBA, ancien professeur auprès des masters des Grandes Ecoles de Commerce de Paris)

Marat Muzayev au forum de Pékin : “L’anticolonialisme dans le monde moderne et le travail de la Chine et de la Russie pour relier la Ceinture et la Route et l’EAEU”

Voici encore un texte remarquable qui mériterait d’être retenu pour la formation des militants tant il présente une vue synthétique de l’état des deux grands pays que sont la Russie et la Chine. Les tenants de la thèse des deux impérialismes qui le plus souvent manifestent une ignorance crasse des politiques du KPRF, de la manière dont il est intervenu pour empêcher la débâcle inaugurée par le gouvernent Eltsine, et dans le cadre de cet important forum il faut retenir la conclusion de l’article : Le renforcement de la coopération entre la Russie et la Chine manifeste des processus profondément naturels et objectifs. La Chine et la Russie n’acceptent pas de dictat sur la scène mondiale, s’opposent à l’hégémonisme et considèrent comme inacceptables les tentatives visant à faire revivre un nouveau colonialisme au XXIe siècle. Notons qu’il est désigné la présence d’une délégation française, nous voudrions bien savoir qui sont ces touristes clandestins qui ne font jamais le moindre rapport sur leurs fréquentations internationales. Nous leur offrons volontiers pour publication ce texte traduit par Marianne pour histoireetsociete.

https://kprf.ru/party-live/cknews/222817.html

Le Forum mondial du socialisme organisé par l’Académie chinoise des sciences sociales a achevé ses travaux à Pékin. Une délégation du KPRF dirigée par D.G. Novikov, vice-président du Comité central du Parti, a également participé au Forum.

Nous portons à l’attention de nos lecteurs le rapport sur le XIIIe Forum du socialisme mondial de M.S. Muzayev, membre du Comité central du KCRP. Le thème de son discours : “L’anticolonialisme dans le monde moderne et le travail de la Chine et de la Russie sur la conjugaison de la “Ceinture et la Route” et de l’EAEU”

L’un des traits caractéristiques du mouvement communiste est la solidité de ses fondements idéologiques. Les partis communistes s’efforcent de construire leur travail sur la base d’analyses approfondies des principales tendances du développement socio-économique et sociopolitique.

Le 21 octobre 2023, un plénum ordinaire du comité central du KPRF s’est tenu. Au cours de ce plénum, la situation internationale actuelle a été évaluée. Dans le rapport du président du comité central du KPRF, G.A. Ziouganov, les principales tendances du monde moderne ont été formulées sous la forme de douze thèses. Vous pouvez les lire en détail sur le site officiel de notre parti, KPRF.ru.

Caractérisant la situation actuelle, G.A. Ziouganov a notamment relevé les éléments suivants :

  • Il y a une aggravation de la crise générale du capitalisme. Le monde impérialiste ne peut faire face aux contradictions croissantes. La politique économique, militaire et culturelle de l’impérialisme devient de plus en plus dangereuse pour l’humanité.
  • L’agressivité des États-Unis et de l’OTAN s’accroît. Le nombre de conflits augmente. La guerre au Moyen-Orient s’intensifie. La situation en Ukraine, autour de Taïwan, dans le Caucase du Sud et dans d’autres parties du monde est extrêmement difficile. La crise du capitalisme menace d’une nouvelle guerre mondiale avec la perspective d’utiliser des armes atomiques.
  • Les impérialistes américains sont confrontés au problème de la domination mondiale. Leur objectif est d’affirmer l’hégémonie du capital financier mondial.
  • Il s’agit essentiellement d’une tentative d’établir un nouveau système colonial mondial. À cette fin, les États-Unis poursuivent une politique visant à affaiblir la Chine, la Russie et d’autres pays, y compris l’Union européenne. Washington cherche à torpiller le projet Belt and Road. L’objectif est de priver l’Europe, la Chine et d’autres pays des avantages importants du commerce commun.
  • L’attaque du capital contre les acquis sociaux de la classe ouvrière et de tous les travailleurs s’est fortement intensifiée depuis la destruction de l’URSS. Les droits et libertés démocratiques sont réduits. La bourgeoisie renforce l’exploitation des masses.
  • Dans la lutte pour maintenir sa domination, le grand capital utilise de plus en plus le néofascisme, le nationalisme radical et d’autres forces extrêmement réactionnaires. L’anticommunisme et la russophobie se développent dans la propagande des gouvernements occidentaux. L’histoire de la Seconde Guerre mondiale est déformée. Les jugements du tribunal de Nuremberg sont ignorés. Les monuments à la mémoire de ceux qui ont combattu le nazisme sont démolis. Le Parlement canadien a eu la honte d’accueillir un vieux punisseur nazi.
  • La promotion de l’anticommunisme et du néofascisme dans les pays de l’OTAN exige une réponse active de la gauche. La lutte contre le néonazisme fait partie de la lutte générale contre l’impérialisme, le militarisme et le néocolonialisme. C’est une bataille pour la paix, la justice et le socialisme.
  • L’élimination de la menace de guerres mondiales et la défaite du fascisme ne peuvent se faire qu’en mettant fin au capitalisme. La force capable de le faire est la classe ouvrière, les couches laborieuses du peuple et les vrais patriotes.
  • Dans le contexte de l’aggravation de la crise du capitalisme, l’alternative socialiste gagne en importance. La propagande des objectifs créatifs et des réalisations réelles du socialisme est d’une importance fondamentale. À cet égard, le KPRF accorde une attention particulière à l’expérience chinoise.

Ce mois de février a marqué les 30 ans du rétablissement du KPRF. Le parti communiste russe a été interdit par un décret anti-juridique du président Boris Eltsine en 1991. En 1993, les communistes russes ont pu faire renaître leur parti. Au cours des 30 dernières années, le KPRF a joué un rôle majeur dans la transition de la Russie vers une nouvelle plate-forme politique sur la scène internationale.

Bien que la Fédération de Russie tente de se développer sur une base capitaliste depuis 30 ans, sa politique a connu d’importants changements. Dans les années 90 du vingtième siècle, la Russie était à la remorque de la politique du G7 sur la scène mondiale, qui est même devenu temporairement le G8. Les années 2000 ont vu d’importants changements dans la politique de Moscou. Le plus grand parti d’opposition russe, le KPRF, n’a cessé de réclamer de tels changements.

Il y a 20 ans, G.A. Ziouganov publiait son livre “La mondialisation et le destin de l’humanité”. Le dirigeant du KPRF expliquait déjà en détail les tendances mondiales : la Russie ne doit pas chercher d’amis fiables parmi les gouvernements des pays occidentaux. Les autorités de ces pays veulent considérer le peuple russe comme un “matériau consommable” pour le capital mondial. La coopération avec les peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine est la plus prometteuse pour notre pays. La tâche la plus importante de cette coopération est de contrer les tentatives de raviver la pratique du colonialisme.

Progressivement, le désir de la Russie de protéger sa souveraineté a conduit à une confrontation ouverte avec les États-Unis et leurs satellites. Moscou a dû faire face à une guerre de sanctions de la part des gouvernements occidentaux, à l’intensification des activités agressives de l’OTAN, à des attaques informatiques et à des provocations politiques. En réponse, la Russie approfondit sa démarche vers l’établissement de relations internationales justes.

Aujourd’hui, la politique russe est de plus en plus confiante dans un “tournant vers l’Est”, qui est activement défendu par le KPRF. La croissance de la coopération économique avec la Chine en est l’expression la plus frappante. Chaque année, les échanges commerciaux entre nos deux pays battent de nouveaux records. De janvier à août de cette année, il s’est élevé à 155 milliards de dollars. C’est un tiers de plus que le volume du commerce bilatéral pour la même période l’année dernière. D’ici la fin de l’année, les échanges russo-chinois devraient franchir le cap des 200 milliards de dollars. Il y a seulement six ans, le chiffre d’affaires des échanges mutuels était inférieur à 100 milliards de dollars !

Pour la Russie et la Chine, il est important non seulement de renforcer les liens bilatéraux, mais aussi de résoudre un certain nombre d’autres problèmes. Par exemple, nos efforts conjoints devraient empêcher les plans de Washington de subordonner l’Asie centrale à son influence.

Bien entendu, la Russie et la Chine peuvent et doivent construire ensemble la Ceinture et la Route. La pandémie de coronavirus et la guerre des sanctions menée par l’Occident ont quelque peu ralenti la mise en œuvre des plans communs de nos pays. Mais les intérêts à long terme exigent une intensification de notre coopération.

La Russie et la Chine ont des objectifs communs et un système commun de coordonnées dans le monde moderne. Cela en fait des alliés naturels dans la mise en œuvre d’initiatives internationales importantes.

La Russie a été l’un des premiers pays à soutenir l’initiative “la Ceinture et la Route”. En 2015, Xi Jinping et Vladimir Poutine ont publié une déclaration commune sur le jumelage de la construction de la ceinture économique de la Route de la soie et de l’Union économique eurasienne. En 2018, l’accord sur la coopération commerciale et économique entre l’UEEA et la RPC a été signé et est entré en vigueur.

En 2017 et 2019, le président russe a été invité aux premier et deuxième Forums de la Ceinture et de la Route. Une bonne base a été créée pour la troisième réunion à Beijing, qui s’est tenue avec succès cette année.

Le renforcement de la coopération entre la Russie et la Chine manifeste des processus profondément naturels et objectifs. La Chine et la Russie n’acceptent pas de dictat sur la scène mondiale, s’opposent à l’hégémonisme et considèrent comme inacceptables les tentatives visant à faire revivre un nouveau colonialisme au XXIe siècle.

https://kprf.ru/party-live/cknews/222742.html

Article annonçant la rencontre, publié le 29.11.2023 :

Le Forum mondial du socialisme est organisé chaque année par l’Académie chinoise des sciences sociales et aborde des questions d’actualité sur le développement du monde moderne.

Cette année, Dmitry Novikov, vice-président du comité central du KPRF, Marat Muzayev, membre du comité central du parti, et Lyudmila Zhuravleva, membre de la commission centrale de contrôle du KPRF, participent à cet événement scientifique international. Des universitaires russo-chinois issus de plusieurs centres de recherche de Moscou présenteront également leur point de vue au cours de la discussion.

Outre la Chine et la Russie, les participants au forum comprennent des dirigeants de partis politiques et des universitaires d’Afrique du Sud, d’Allemagne, d’Argentine, d’Australie, du Brésil, d’Espagne, de Grande-Bretagne, de Cuba, de France, de Hongrie, d’Inde, d’Italie, du Japon, du Laos, du Népal, du Pérou, du Portugal, de Turquie, des États-Unis, du Vietnam et d’autres pays. Les chercheurs chinois représentent de nombreuses institutions académiques, des universités de premier plan de la République populaire de Chine, des centres d’expertise et d’analyse du pays.

Le treizième forum du socialisme mondial durera plusieurs jours. Outre les sessions plénières, son programme comprend un certain nombre de sujets qui seront débattus lors de sessions en petits groupes.