LA DAME DE CŒUR DE LA STATION
Il est des
jours qui s’annonçaient routiniers, au point qu’un événement
banal, un premier imprévu suivi de peu d’un second, tout aussi
fortuit, peuvent transformer en quelques minutes un petit désagrément malvenu, en un moment rare de bonheur et de reconnaissance,
tellement agréable qu’on ne l’attendait pas, au point qu’il sera difficile de l’oublier. Instants de joie difficiles à traduire, dans ces heures de
souffrances où les proches tournent le dos....
Il suffit
parfois d’un geste et de quelques mots de solidarité d’un-e
inconnu-e pour réchauffer le cœur et redonner confiance et moral pour
le reste de la journée....
C’est ce
qui nous est arrivé, mon épouse et moi, alors que nous sous sentions tout d’un coup
seuls et désemparés..
Lundi matin,
7H45 : départ à la clinique, pour la chimio de mon épouse ….
Pluie,
humidité devenues habituelles, hiver gris, long.... Plus qu’à
l’accoutumée... Triste matinée.
A 10H30,
sortie de la clinique. On va faire le plein de super à la station
voisine. Rien à signaler... Mon Aygo ne donne aucun signe de
fatigue.....Jusqu’au moment où je m’installe au volant, le plein
effectué, pour rejoindre nos pénates, je mets le contact : rien !!
Nada ! La batterie semble avoir rendu l’âme.... Début de
panique. Comment va-t-on faire ? Il nous faut quitter la station
d’essence. Mon épouse, déjà fatiguée, prend le volant .. Point mort … Je me
mets à pousser pour donner un peu d’élan à la voiture, passage
en seconde.... Rien ! Nada ! Et là, je me retourne, et
j’aperçois à côté de moi une dame assez jeune – plus jeune
que nous – qui poussait avec moi, elle nous conseille ensuite de nous
garer un peu plus bas, au bord de la rue, en attendant que nous
trouvions LA solution. Et nous nous retrouvons à nouveau elle et moi
à pousser notre voiture et à tenter de la faire démarrer sur la
rue, jusqu’à l’évidence : essoufflés, rien à faire, madame Aygo nous
laissera là, nous la poussons pour la garer le mieux possible –
c’est lourd, une voiture en panne -sur le bord
de la rue. J’avise un centre de contrôle auto, à 100 mètres, je vais demander de
l’aide, des câbles, puisque la dame, qui avait abandonné sa
propre voiture devant une pompe à essence, m’a proposé que nous
nous branchions sur sa batterie. Mais il y a des clients à servir au
centre de contrôle, c’est un peu plus long que prévu, si bien que
la dame notre ange gardien a compris que nous pourrons nous dépanner
sans elle, et elle a décidé de partir, ce que mon épouse me dira à
mon retour. Quand je reviens, c’est avec un jeune employé du
centre, qui s’est muni d’un démarreur. En quelques secondes,
notre voiture retrouve force et entrain, et nous aussi, et nous pouvons
ainsi reprendre le chemin.
Je n’ai
hélas pas revu cette dame J’aurais tant voulu la remercier, lui
exprimer toute notre gratitude. Ces moments sont si rares... Si
agréables et si surprenants, qu’on voudrait les partager un peu
plus longtemps avec leurs auteurs, le temps de leur dire au moins
merci comme ils le méritent. Pris par mon souci de la panne, je n’ai
pas eu la présence d’esprit de lui demander, non pas son 06....,
mais l’adresse où j’aurais pu lui porter un tout petit gage de
notre gratitude.
Et comme je
ne suis pas sûr du tout de la reconnaître un jour, si je devais la
croiser, même si c’était demain..... J’espère que c’est elle
qui nous reconnaîtra. Si cela pouvait arriver....Que je puisse au moins réparer ….
Ces choses
de la vie, autrefois banales, devenues aujourd’hui l’exception,
dans ce monde plus égocentrique que fraternel et solidaire, quand elles surviennent elles
vous embellissent les moments difficiles, vous offrent un cadeau que l'on attendait pas, au point que je n'ai pu résister à vouloir partager ces instants rares de
bonheur dont nous sommes aujourd'hui et par trop souvent privés.