Les scientifiques chinois apprivoisent le soleil pour se débarrasser du pétrole et du gaz, par Konstantin Olshansky
Dans le cadre de notre réflexion de ce weekend sur le retour au marxisme à partir des “tâches de notre temps” il y a incontestablement l’apport chinois à un mode de développement vers la modernité (le développement industriel des forces productives) qui n’emprunte pas nécessairement la modernité du capitalisme occidental pour dépasser la contradiction entre la bête sauvage (Hegel) des intérêts privés concurrentiels tout en conservant la dynamique, ce qui est au moins une tentative originale. (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)
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Illustration : sur une ligne de production de panneaux solaires, à Suqiang, dans la province de Jiangsu, en Chine. (Photo : VCG/VCG/TASS)
Xi Jinping se rapproche d’une révolution de l’énergie verte. Le dirigeant chinois est aidé par des scientifiques qui créent les dernières technologies d’énergie alternative. Par exemple, des panneaux solaires en silicium flexible. Il est même possible de confectionner des vêtements à partir de ces batteries au silicium.
La révolution énergétique de la Chine éliminera progressivement les combustibles minéraux – le charbon, puis le pétrole et le gaz. Les besoins de l’économie chinoise en pleine croissance seront couverts par l’énergie solaire et éolienne.
Cette révolution est préparée également par les Saoudiens, au coude à coude avec les Chinois
Les panneaux solaires peuvent-ils être pliés ? Il y a peu de temps, il semblait que ce n’était pas possible. Mais des scientifiques de l’Académie chinoise des sciences ont réalisé l’impossible : ils ont réussi à “faire pousser” du silicium flexible. C’est de cette matière que sont faits les panneaux solaires.
Pour ce faire, ils ont dû “réassembler” le réseau cristallin du silicium. Les scientifiques ont passé des mois en laboratoire à essayer de reproduire ce que la nature a mis des millions d’années à créer.
Des scientifiques de plusieurs universités et instituts de recherche – de Shanghai, Pékin, Nanjing et Changsha – ont travaillé ensemble. Des chercheurs de la compagnie pétrolière saoudienne Aramco ont également collaboré avec les Chinois.
Même les Saoudiens se rendent compte que le temps du pétrole se termine inexorablement. Il faut donc créer de nouvelles technologies énergétiques. L’entreprise saoudienne possède même son propre institut de recherche à Pékin. Aramco finance chaque année plus de 100 projets de recherche dans le monde, comme le développement de gaz carburant pour les voitures hybrides ou la capture du monoxyde de carbone (gaz d’échappement), responsable de l’effet de serre.
Une révolution “minérale”. Le titane pour remplacer le silicium
L’Institut des microsystèmes de l’Académie chinoise des sciences à Shanghai a créé en 2010 le Centre des Nouvelles Technologies Énergétiques. Ce centre étudie et développe des cellules solaires à base de silicium. Les développements réalisés à Shanghai ont déjà trouvé des applications, y compris dans les stations arctiques et lunaires. Dans ces conditions extrêmes, chaque particule de lumière est importante : elle doit être captée et convertie en énergie.
Les ingénieurs chinois se sont ensuite intéressés à la création de cellules solaires flexibles. Les plaquettes de silicium cultivées en laboratoire ont une épaisseur de 60 microns et peuvent être pliées comme une feuille de papier et courbées à 360 degrés.
Et il ne s’agit pas d’un prototype. Selon Di Zengfeng, professeur à Shanghai, il sera bientôt possible de produire des cellules solaires flexibles à l’échelle industrielle. Et les scientifiques n’ont pas l’intention de s’arrêter là.
Près de 90 % des cellules solaires dans le monde sont aujourd’hui fabriquées à partir de silicium. Mais l’équipe du professeur He Zhubin, de l’Université des sciences et technologies du Sud, est en train de créer un nouveau type de cellule solaire révolutionnaire, basé sur la pérovskite minérale. Il s’agit de titanate de calcium, l’un des minéraux les plus abondants sur Terre. Ces batteries sont donc nettement moins chères à produire que les batteries au silicium habituelles.
Le rendement des panneaux solaires ne dépasse généralement pas 20 % : c’est la quantité d’énergie solaire qui peut être convertie en électricité. Le professeur He Zhubin, quant à lui, a atteint un rendement apparemment sans précédent de 26 %.
Cela ne semble pas être une si grande différence, n’est-ce pas ? En fait, pour chaque pourcentage d’efficacité “supplémentaire”, les meilleurs cerveaux de la planète s’affrontent. Les scientifiques pensent que d’ici quelques années, les cellules solaires seront capables de convertir la moitié, voire plus, de la lumière. Il s’agira alors d’une solution technique véritablement révolutionnaire.
Les Chinois construisent une “centrale hydroélectrique de Saïano-Chouchensk” [la plus puissante de Russie, avec une puissance installée de 6 400 MW et la onzième au monde] par mois. Sauf que c’est du solaire.
Il serait impossible de développer l’énergie solaire en Chine sans le soutien de l’État. Dès son arrivée à la tête du pays, Xi Jinping a promis de nouveaux tarifs de rachat aux développeurs de panneaux solaires.
En conséquence, l’énergie solaire est devenue moins chère que l’énergie thermique dans certaines provinces de l’ouest de la Chine. Ainsi, dans la province de Qinghai (qui n’est pas la plus densément peuplée selon les normes chinoises – seulement 6 millions d’habitants), certains jours, toute l’énergie consommée est produite à partir de sources renouvelables. Ce n’est que pendant les heures et les jours de forte consommation que les centrales thermiques sont “branchées”, en plus des centrales solaires et éoliennes.
En outre, le nombre de personnes souhaitant construire des centrales solaires a dépassé les plans les plus ambitieux du gouvernement chinois. La taille du programme d’État a même dû être réduite. En 2020, le ministère chinois des finances a réduit le montant des subventions pour l’énergie solaire de 3 à 1,5 milliard de yuans.
Toutefois, la taille du programme public a été augmentée par la suite : en 2021, le gouvernement a alloué près de 3,5 milliards de yuans à l’énergie solaire. Cet argent a été réparti entre les 14 provinces chinoises, mais de manière inégale. La Mongolie intérieure, la province géante où se construisent à un rythme accéléré les parcs solaires et éoliens, se taille la part du lion.
Les autorités provinciales distribuent l’argent pour tous les nouveaux projets par le biais d’enchères publiques, afin d’éviter tout soupçon de corruption ou de partialité. Les entreprises peuvent également demander un financement direct du gouvernement (sans appel d’offres), mais la subvention sera alors minime.
La Chine établit des records chaque année. L’année dernière, 87 GW de centrales solaires ont été mis en service, soit une fois et demie de plus qu’en 2021, l’année du Covid. C’est un peu comme si les Chinois construisaient chaque année 10 centrales hydroélectriques de Saïano-Chouchensk. Sauf qu’au lieu de l’eau, c’est le soleil.