jeudi 4 juin 2020


Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

Ce n'est pas à l'Elysée, ce n'est pas à Matignon que nous obtiendrons satisfaction à nos revendications!
Le "Ségur de la santé" fait du surplace. Aucune proposition chiffrée du gouvernement sur les augmentations de salaire et les créations de postes. Ce ne sont pas des négociations qui se sont ouvertes au ministère de la Santé, mais le ronron entre "partenaires sociaux" autour de "discussions de salon", comme le dit dans son billet quotidien le médecin urgentiste CGT Christophe Prudhomme. Aujourd'hui, autre négociation, mais au palais de l'Elysée.
L'ex-banquier d'affaires et gérant de la banque Rothschild, qui y trône, a convié les syndicats CFDT, CGT, FO, CGC, CFTC et Unsa et les organisations patronales Medef, CPME, U2P, FNSEA pour soi-disant préserver l'emploi.
Après l'approbation par le pouvoir des riches et du patronat du plan de casse organisé par Renault, société dont l'Etat est le principal actionnaire, on ne peut que douter fortement de cette négociation dite sociale. Ci-dessous, Renault à Choisy-le-Roi, en lutte contre sa disparition.
capture d'écran
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Et malheureusement, Renault n'est que l'arbre qui cache les outils made in Macron pour faire supporter la crise au monde du travail. Entre les ordres du patronat à son commis de l'Elysée (prolongation du temps travail, baisse des salaires, retour sur le 13ème mois, les rtt et les congés, précarisation et licenciements) et les revendications légitimes des derniers de cordée, depuis mai 2017, le pouvoir a choisi le côté du capital dans le combat de classes.
Qu'attend-t-on pour déconfiner les luttes? Je dis ça, mais ce n'est pas pour rien.





UN REGARD JURIDIQUE SUR L'ACTUALITÉ AVEC RÉGIS DE CASTELNAU
Il faudra faire les comptes

Emmanuel Macron a donc décidé de valider le premier tour des élections municipales et de fixer le second au 28 juin prochain. Montrant ainsi, une fois de plus le peu de cas qu’il fait du fonctionnement régulier et démocratique des institutions.
C’est une chose entendue, le pouvoir sous la responsabilité d’Emmanuel Macron a été en dessous de tout dans la gestion de ce qui était totalement prévisible dès le mois de janvier, c’est-à-dire une crise sanitaire majeure. Après avoir méthodiquement démoli le système de santé français, ils ont été incapables de prévoir et ont donné l’image d’une gestion administrative faite de gabegie, d’incurie et d’amateurisme. Et pour corser le tout, dans une crise planétaire géante, la voix de la France était celle de Sibeth Ndiaye multipliant impairs et mensonges !
Il faudra impérativement faire les comptes de cette tragédie qui n’a pas encore produit tous ses effets. Et quoiqu’en disent les soutiens d’Emmanuel Macron, ces comptes devront être politiques, mais aussi pénaux pour ceux qui ont commis des fautes avérées relevant du code. Dans un État de droit, cela fonctionne comme ça et ceux qui ont la charge de l’intérêt public ne sont pas pour autant des citoyens à part. On aurait pu espérer que le rappel de leurs responsabilités aux gens qui gouvernent les aurait amenés à plus de circonspection et d’efficacité dans l’élaboration et l’application de leurs décisions. Malheureusement, chassez le naturel il revient au galop. Tel Olivier Véran s’exposant à un ridicule planétaire en prenant fait et cause pour une étude manifestement truquée pour asseoir une décision brutale, inepte et inutile. Ou la nomination de Pierre Moscovici caricature du monde d’avant à la tête de la Cour des Comptes. Hélas il y a pire, comme cette décision de fixer le second tour des municipales au 28 juin prochain.
Un premier tour électoral maintenu malgré les évidences
Alors on va encore une fois rappeler que dans une démocratie représentative, la SINCÉRITÉ du scrutin est quelque chose de fondamental. Il est clair que celle-ci a été complètement altérée par la situation que traverse notre pays, et que la légitimité démocratique des listes élues le 15 mars est égale à zéro. Rappelons que Gerald Darmanin a été élu au premier tour à Tourcoing avec 10 % des inscrits !
Les règles qui président au déroulement des élections sont extrêmement précises et minutieuses. Leur respect destiné à garantir la sincérité de l’expression du peuple est absolument fondamental. Et si elles ont été violées, les scrutins concernés peuvent et doivent être annulés par le juge administratif sous le contrôle du Conseil d’État. En matière d’élection afin d’en assurer la sincérité, la forme est inséparable du fond. Or qu’avons-nous constaté pour le premier tour du 15 mars dernier ?
La campagne a été complètement faussée par la crise sanitaire. La communication, et la propagande qui doivent être libres, ont été perturbées par la menace pandémique et les incertitudes qui pesaient lourdement sur la tenue même du scrutin. L’annonce de son maintien a été effectuée 48 heures avant, dans le même temps où le président de la république annonçait la mesure extrême du confinement de la population française. Rappelons que les écoles ont fermé le 13 mars, et tous les établissements de restauration le 14, veille du scrutin ! Celui-ci a été marqué par une abstention complètement inhabituelle pour cette élection, évidemment due à la peur du virus et au refus de s’exposer. Dans ces conditions, les listes élues au premier tour sont frappées d’une illégitimité démocratique difficilement discutable. Compte tenu du confinement, il n’a pas été possible d’installer comme, c’est la règle le jeudi suivant l’élection, les nouveaux conseils. Ce sont donc ceux élus en 2014 qui ont assuré la mission pendant toute la durée du confinement !
Le gouvernement s’est immédiatement trouvé confronté à l’impossibilité d’organiser normalement le deuxième tour. Or le scrutin municipal s’il se déroule en deux tours séparés de huit jours est un scrutin unique. Pour des raisons juridiques (les textes fondamentaux) et politiques (la dynamique de la campagne), les deux tours sont inséparables. Et ce qui est extraordinaire, c’est qu’Emmanuel Macron a pris la décision de maintenir le premier tour en sachant l’impossibilité du second puisque la décision de confinement était déjà prise le rendant impossible ! Un tel niveau d’inconséquence, voire de duplicité est quand même assez stupéfiant.

Un scrutin démocratique est un tout, s’organise en application de la loi, et n’est pas saucissonnable en fonction des désidératas d’un homme fut-il le chef de l’État.


L’illégalité du premier tour provoque celle du second
Il y a encore plus grave, les caractéristiques juridiques de cette décision de maintien du premier tour entachent nécessairement d’illégalité le second. En effet, à la conséquence de l’absence de sincérité, s’ajoute le problème de l’infraction pénale constituée par ce maintien. En matière d’homicide et blessures involontaires, le code pénal prévoit deux conditions pour que la responsabilité des auteurs indirects puisse être établie. Tout d’abord l’existence de ce que l’article 121-3 du code appelle « une faute caractérisée » et que celle-ci ait eu pour conséquence le dommage corporel. Que dit ce texte de la faute caractérisée : «Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer. » 
Qui pourrait prétendre qu’Emmanuel Macron Édouard Philippe et Christophe Castaner ne savaient pas que le déroulement du scrutin exposerait organisateurs locaux et électeurs à un risque d’une particulière gravité, puisque son existence avérée venait d’imposer le confinement ?
 Quant au dommage, c’est celui des personnes, présidents et assesseurs des bureaux et électeurs, et les électeurs contaminées par le Covid19 à cette occasion, avec toutes les conséquences. En nier l’existence serait une insolence.
Dans ces conditions, on voit mal comment les juridictions administratives saisies des contentieux du deuxième tour du 28 juin, pourraient ne pas constater l’illégalité de la décision de maintien du 15 mars pour son caractère pénal. Et en déduire l’illégalité du deuxième tour inséparable du premier et qui par conséquent devra être annulé. En effet il est de jurisprudence constante que la loi pénale appartient au bloc de légalité que l’administration doit respecter et l’autorité administrative ne peut adopter une décision qui constituerait l’élément matériel d’une infraction pénale.
Le deuxième tour du 28 juin est lui-même illégal
Il se trouvera sûrement des éditocrates pour trouver des excuses à l’équipe au pouvoir dans le maintien du premier tour. L’aggravation brutale de la pandémie, les soi-disant demandes de l’opposition, la revendication de l’ignorance des effets du virus ne manqueront pas de nous être opposées.
Malheureusement, perseverare diabolicum, la décision d’organiser le deuxième tour le 28 juin prochain, démontre à nouveau un total mépris du mécanisme électoral et de son importance dans une république démocratique.
Nous sommes en procédure minutieuse de dé-confinement, énormément de contraintes sont toujours en vigueur, port du masque obligatoire dans certaines circonstances, interdiction de rassemblement de plus de 10 personnes, transports en commun pas encore revenu à la normale, distances de sécurité, gestes barrières et il faudrait organiser pour les candidats une campagne électorale démocratique ?
C’est simplement une plaisanterie.
Quant au scrutin lui-même, alors qu’on sait que le virus circulera toujours, on se doute que l’appréhension entraînera une abstention probablement encore plus massive. Et par ailleurs on nous dit que présidents et assesseurs des bureaux ainsi que les électeurs devront porter un masque, empêchant la vérification de leur identité !
Tout ceci est complètement incompatible avec l’organisation d’un scrutin régulier.
La décision gouvernementale viole ainsi l’article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifiés par la France et par conséquent applicable chez nous. Celui-ci impose que les citoyens des pays signataires puissent participer à des élections assurant que tout citoyen ait une chance d’être choisi librement s’il s’est porté candidat et que les électeurs puissent choisir librement tel ou tel candidat.
Concernant le premier impératif, les conditions sanitaires réglementées sous peine de sanctions empêcheront naturellement de mener une campagne normale, faites de contacts, de réunions, de rencontres, et de meetings. Tout ce qui à l’évidence ne peut se faire par télétravail… À cela s’ajoute un énorme déséquilibre, puisque depuis trois mois, et légitimement, les autorités gouvernementales dont certains membres sont directement candidats ont disposé d’un temps de parole et d’exposition considérable dans les médias provoquant nécessairement un déséquilibre.
Quant à la liberté de choix, la perception du risque sanitaire découragera nombre d’électeurs d’aller voter. Probablement encore plus qu’au premier, même si le Gouvernement assure que la situation sanitaire est bonne et que le « conseil scientifique » partage cet optimisme. Toutes les études ont démontré l’énorme défiance des Français, vis-à-vis du pouvoir dont la parole publique est complètement disqualifiée.
Prétendre qu’ils seraient rassurés par les interventions de Sibeth Ndiaye serait faire preuve d’une joviale subjectivité. Alors, fondées ou non, ces craintes vont dissuader une part très significative des électeurs de se rendre aux urnes pour ne pas affronter le risque. Faussant ainsi le résultat qui ne deviendra pas le fruit de la volonté de tous les électeurs mais de celle des immunisés, des plus intrépides et des jeunes moins exposés.
Il y a également l’article 3 du 1er protocole additionnel à la CEDH Droit à des élections libres qui consacrent le droit de faire campagne. Principe confirmé dans la décision de la CEDH : Parti communiste c. État russe en 2012.
Organiser à nouveau un scrutin dans les règles démocratiques
Organiser ainsi ce deuxième tour complètement séparé du premier d’abord par le temps et ensuite par l’épreuve, n’est pas politiquement sérieux.
Beaucoup plus grave, c’est inconstitutionnel, illégal et antidémocratique et permet de constater une fois de plus les rapports particuliers qu’entretient le système d’Emmanuel Macron avec le respect des normes démocratiques.
Cette décision surprise, alors qu’on nous annonçait une reprise de la totalité des opérations électorales pour les communes non dotées au premier tour à l’automne, obéit à des impératifs vulgairement politiciens évidents.
Il s’agit de faire disparaître une défaite électorale cuisante de LREM, dans les bruits de l’orchestre du dé-confinement, et alors que les Français se remettent de leur enfermement et appréhendent ce qui les attend sur le plan économique.
Il est également possible sinon probable qu’on en profitera pour procéder à un remaniement en renvoyant Édouard Philippe à sa mairie du Havre et Édouard Darmanin à celles de Tourcoing. En présentant aux Français soucieux de passer un été tranquille un nouveau gouvernement, composé d’une poignée de médiocres amateurs de soupe, et dûment qualifié « d’union nationale ».
La seule solution démocratique et décente impose de refaire complètement le scrutin des municipales 2020.

Soulèvement : Le récit de l’Amérique se heurte à la réalité de l’Amérique

Nous assistons à la collision frontale entre l’histoire que les institutions politiques, médiatiques et éducatives américaines racontent aux Américains sur leur pays, et la réalité de ce pays.
Voici une jolie petite histoire
Il était une fois une nation courageuse qui se libéra de la tyrannie de l’empire britannique et donna naissance à la liberté et à la démocratie dans le monde. Avec l’aide de héros tels que les abolitionnistes Abraham Lincoln, Martin Luther King Jr et Malcolm X, elle a surmonté les inégalités raciales systémiques. Aujourd’hui, elle est un brillant exemple de droits de l’homme, l’ami respecté des démocraties libres dans le monde entier et l’ennemi détesté de tous les régimes tyranniques. Elle n’est pas sans fautes et erreurs passées, mais elle est le meilleur leader et protecteur de l’ordre mondial libéral que nous puissions espérer avoir.
Voici une histoire moins jolie.
Il était une fois une nation qui s’était hissée au rang de leader après être sortie indemne de deux guerres mondiales qui avaient endommagé les infrastructures de ses concurrents. Les principales puissances mondiales se sont rapidement regroupées autour de cette nouvelle superpuissance et ont commencé à manœuvrer les autres nations pour former avec elle une alliance étroite de type empire. Après une longue et épuisante guerre froide, cet empire a réussi à renverser la seule autre superpuissance du monde et a commencé à œuvrer pour absorber toutes les autres nations dans une alliance avec lui. Si les nations résistaient, elles étaient subverties, sabotées et attaquées jusqu’à ce qu’elles s’effondrent ou se laissent dissoudre dans le bouillon impérial.
Les structures de pouvoir à l’échelle mondiale sont maintenant centralisées autour de cette nation, qui abrite la plus grande population de milliardaires de la planète et la force militaire la plus puissante de l’histoire de la civilisation. Une quantité insondable de pouvoir tourne autour de cette nation, des mécanismes ont donc été mis en place pour assurer la pérennité de son statu quo. Ces mécanismes comprennent le système de propagande le plus sophistiqué jamais conçu, un réseau orwellien d’espionnage domestique, une censure croissante sur Internet et, surtout, une force de police hautement militarisée.
La dernière ligne de défense
Les dirigeants de cet empire mondial ont toujours été parfaitement conscients que le point le plus faible de leur machine est la possibilité que les centaines de millions de personnes qui vivent dans cette nation décident un jour que le statu quo impérial ne les sert pas et qu’elles ne veulent plus être dirigées. Ils savent que la dernière ligne de défense contre cette éventualité est leur capacité à utiliser une violence extrême sur la population jusqu’à ce qu’elle cesse de se révolter, et ils n’ont donc pas l’intention de renoncer à cette capacité. Un empire planétaire entier en dépend.
Maintenant, si vous avez entendu toute votre vie la jolie version de l’histoire mais pas la moins jolie, vous penseriez naturellement qu’exiger la fin de la brutalité policière est la chose la plus raisonnable au monde. Vous vous attendriez naturellement à ce que, si un policier était surpris sur vidéo en train d’étrangler délibérément un homme à mort et qu’il n’était pas immédiatement arrêté et poursuivi pour meurtre, les gens seraient naturellement outrés et des changements systémiques drastiques seraient rapidement mis en œuvre pour apaiser leur colère. On s’attendrait naturellement à ce que la radieuse cité sur la colline se range du côté des citoyens face aux tendances meurtrières d’une force de police.
Si vous connaissez l’histoire moins jolie, vous ne vous attendriez à rien de tout ça. Vous comprendriez que les disparités raciales n’ont jamais disparu de la nation en question, et qu’une structure qui conserve le nom de J. Edgar Hoover sur le bâtiment du FBI n’a aucune intention de faire quoi que ce soit au sujet du rôle de la police dans ce domaine. Vous comprendriez que le rôle de la police n’est pas de protéger et de servir le peuple, mais de protéger et de servir l’empire, exactement comme c’est le rôle des militaires. Vous comprendriez que l’empire n’est pas plus susceptible de se défaire volontairement des pratiques violentes de ses forces de police de plus en plus militarisées que de se défaire de ses forces aériennes ou de ses ogives nucléaires.
Ils vous fourniront tous les mots creux et les séances de photos à genoux que vous voudrez, mais se désarmer volontairement face à leurs sujets ne fait pas partie de leurs plans.
Point de rupture
Cela ne signifie pas que ceux qui exigent ces changements sont idiots ou déraisonnables ; exiger que la police ne vous assassine pas est la chose la plus sensée et la plus raisonnable au monde, selon ce que les forces de police prétendent être et selon ce que l’Amérique prétend être. C’est juste que ni les forces de police ni l’Amérique ne sont ce qu’elles prétendent être. Le fossé entre les deux versions de l’histoire, la jolie et la moins jolie, ne pourrait être plus grand.
C’est ce à quoi nous assistons ici. Nous assistons à la collision frontale entre l’histoire que les institutions politiques, médiatiques et éducatives américaines racontent aux Américains sur leur pays, et la réalité de ce pays. La disparité entre l’histoire imaginaire et l’histoire réelle a finalement atteint un point de rupture, et maintenant le masque de la démocratie libérale se déchire devant le monde entier.
Nous voyons une population assiégée par le racisme institutionnel, les difficultés économiques et un virus pandémique franchir le seuil de rupture et se heurter à la partie la plus intransigeante d’un empire qui s’étend sur toute la planète. Les jolies histoires se dispersent lentement comme des gaz lacrymogènes, et la dure et froide réalité est de plus en plus visible pour une partie de plus en plus large de la société américaine.
Et maintenant, le dirigeant de cette nation menace ouvertement d’imposer la loi martiale et essaie de désigner les manifestants du Black Bloc comme des "terroristes". Les images vidéo de la brutalité policière saturent les médias sociaux plus vite que les gens ne peuvent les regarder. Les violations du premier amendement [liberté d’expression] se répandent à travers tout le pays tandis que les chefs de police, les maires et les gouverneurs tentent de voir à jusqu’où ils peuvent restreindre les lois sur la liberté de réunion, et que de mystérieux hommes armés en treillis qui refusent de dire avec qui ils sont patrouillent les rues de la capitale. Des spécialistes en émeutes dans les prisons sont recrutés comme experts-conseils car, aux yeux de l’empire, les prisonniers sont en train de se révolter.
Nous observons tous, du monde entier, les citoyens du centre de l’empire affronter leurs oppresseurs dans une bataille de plus en plus violente. La violence arrache le mince vernis qui protégeait depuis tout ce temps la jolie version de l’histoire qu’on nous racontait à l’heure du coucher. Nous voyons tous les jolis rubans se défaire lentement les uns après les autres.
Celui qui contrôle la narration contrôle le monde. L’empire perd le contrôle de la narration. A long terme, cela ne peut être qu’une bonne chose. La lumière du soleil est le meilleur désinfectant, et la vérité est toujours supérieure à la fiction.
Caitlin Johnstone



 


Les dirigeants de Total ont justifié le maintien de leur dividende, malgré l’épidémie du Covid-19, en assurant ne bénéficier d’aucune forme de soutien financier de la part des pouvoirs publics. Une posture trompeuse, car le groupe pétrolier bénéficie bien, en toute discrétion, d’aides financières indirectes.
Renoncer à verser des dividendes ? Hors de question pour Total. Fin mars, le groupe pétrolier annonçait solennellement qu’il « ne sollicitera[it] pas le soutien de l’État pour faire face aux difficultés économiques créées par le Covid-19 que ce soit sous forme de soutien de trésorerie (prêts bancaires garantis, report de paiement des charges sociales ou fiscales) ou de recours au dispositif exceptionnel de chômage partiel » [1].
Une décision que l’entreprise n’a pas hésité à présenter comme une « contribution à la solidarité nationale », mais qui permettait surtout de couper court à la controverse. Beaucoup réclamaient en effet une suspension du versement de dividendes pour faire face à la crise, a fortiori pour les entreprises bénéficiant d’aides publiques. Mais est-il vrai que le groupe pétrolier ne bénéficie d’aucun soutien des pouvoirs publics ? À y regarder de plus près, pas vraiment.

Soutien discret des pouvoirs publics

Il existe en effet plusieurs formes de soutien financier public, et celles qui sont en apparence les plus techniques et les plus absconses ne sont pas les moins importantes. L’organisation espagnole Observatori del Deute en la Globalització (ODG), partenaire de l’Observatoire des multinationales au sein du réseau ENCO [2], s’est penché sur l’une d’entre elles : les achats d’obligations d’entreprises de la Banque centrale européenne (BCE) [3]. Fin mars, alors que l’épidémie s’étendait en Europe, l’institution financière basée à Francfort, et présidée aujourd’hui par Christine Lagarde, a annoncé une forte extension de son programme de soutien à la trésorerie des entreprises via l’achat de leur dette sur les marchés. Depuis cette annonce, selon les données rendues publiques, elle a acheté des obligations de plusieurs dizaines de multinationales européennes, dont quatre émises par Total.
D’autres grandes entreprises tricolores, qui ont maintenu leurs dividendes malgré la pandémie, ont également bénéficié de ce soutien discret des pouvoirs publics, comme Sanofi, Schneider Electric, ou Air Liquide. Les dirigeants de cette dernière entreprise avaient avancé le même argument que Total, se prévalant hypocritement de ne pas avoir « recours au chômage partiel, ni à des aides publiques (délais de paiement…) » [4]. D’autres firmes du CAC 40 qui n’ont fait que réduire leur dividende, comme Veolia, Orange, LVMH, Carrefour ou Capgemini, se trouvent aussi sur la liste. La BCE ne divulgue pas les montants investis, mais seulement le nom de l’entreprise et l’échéance de l’obligation.

Un soutien invisible et sans condition

On parle beaucoup du soutien apporté par le gouvernement français à Air France et à Renault. Il prend la forme de prêts directs de l’État, ou de prêts garantis par lui auprès de grandes banques commerciales : 7 milliards d’euros pour Air France, et 5 pour Renault. On a aussi évoqué à cette occasion les contreparties auxquelles ces entreprises devaient être tenues, sur le plan écologique et en termes de suspension du versement de dividendes. Finalement, il n’y aura aucune condition véritablement contraignante, le gouvernement se contentant de demander aux firmes concernées des « engagements » environnementaux (par exemple, pour Air France, la fermeture de certaines lignes intérieures) dont on ne voit pas bien le statut juridique.
L’émission d’obligations est une autre manière pour les multinationales de renforcer leur trésorerie pour faire face à la crise, à travers un emprunt à long terme sur les marchés financiers. Elle permet d’éviter de faire appel ostensiblement au soutien des États, ce que les dirigeants de Total considéreraient probablement comme une tache sur leur honneur. Cependant, le résultat est, concrètement, le même : ils sont bel et bien dépendants du soutien financier des pouvoirs publics. Autre avantage : cela permet aussi d’échapper à toute forme de contrepartie en échange de ce soutien, même sous la forme d’un engagement purement volontaire.

Un tour de passe-passe similaire en 2008

Le même tour de passe-passe avait eu lieu lors de la crise financière de 2008. Les grandes banques « trop grosses pour tomber », qui avaient été tenues à bout de bras par les États, se sont empressées de rembourser dès que possible prêts et autres aides directes, et de claironner partout qu’elles étaient quittes du soutien des pouvoirs publics. En oubliant commodément comment ces derniers les avaient aidées, de bien d’autres manières, indirectes, et souvent pour des montants autrement importants.
La BCE a bien demandé aux banques qu’elle supervise de ne pas verser de dividendes cette année, mais elle n’a pas spécifié de règles en ce qui concerne les entreprises soutenues via les achats d’obligations. Tout comme elle n’a posé aucun critère social ou environnemental à ses financements, ce qui l’a amenée à soutenir les plus gros pollueurs du continent comme Shell, Total, Airbus ou BMW. Comme la BCE a désormais tout intérêt à ce que ces firmes continuent à prospérer pendant de longues années pour récupérer son argent (au moins jusqu’en 2040 en ce qui concerne les obligations achetées à Total), les institutions européennes seront encore moins incitées à adopter des législations climatiques ambitieuses.
En ce qui concerne les multinationales françaises, ces achats d’obligations sont délégués par la BCE à... la Banque de France, dont le gouverneur François Villeroy de Galhau, ancien haut fonctionnaire et dirigeant de BNP Paribas, incarne à lui seul la consanguinité entre les élites politiques et économiques françaises. Les achats d’obligations françaises représentent près d’un tiers des sommes consacrées par la Banque européenne à son programme, pour un montant d’environ 65 milliards d’euros. Faute de transparence, on ne sait pas quels montants précis ont été alloués à chacune des entreprises concernées.
Olivier Petitjean




  • L'impétrant tel que présenté par la presse bourgeoise, en l'occurrence CAPITAL,  manager et chatelain dans le vignoble, en ligne directe avec le Vatican en 2015
    Le nouveau PDG de Renault - après la chute de Ghosn - est un pur produit du sérail des dirigeants des grandes entreprises, chargés par temps lourd de tailler dans les effectifs.
    Toujours choisi à l'insu de son gré, aux plus hautes responsabilités par les plus hautes fortunes du pays.
    Aujourd'hui, de manière " humaniste " il est chargé de réorganiser Renault en liquidant des emplois massivement TOUT en prétendant sauver l'entreprise ET encaisser les deniers publics, sans avoir de compte à rendre à la nation.
    Pas sûr que l'entourloupe fonctionne si l'on prend en compte la réaction des travailleurs et du peuple ce week-end à Maubeuge !
    Renault: manifestation à Maubeuge contre le plan d'économies ​​​​​​​
    logo-capital - Dolmen
    Jean-Dominique Sénard,  ce grand discret travaillera avec avec Thierry Bolloré, directeur général adjoint du groupe. Voici ce que vous ne savez sûrement pas sur ce gestionnaire rigoureux et réputé humaniste.
    C’est officiel, Jean-Dominique Senard va prendre la tête de Renault. Le futur ex-président de Michelin aura fort à faire. A commencer par renouer les liens distendus avec Nissan - depuis l’arrestation en novembre dernier de Carlos Ghosn et sa récente démission - et relancer le groupe qui subit les turbulences du secteur automobile.
    Jean-Dominique Senard, est entré chez Michelin comme directeur financier en 2005. Six ans plus tard, il en devient le premier gérant non issu de la famille fondatrice. Toujours tiré à quatre épingles, d’une délicatesse et d’une courtoisie délicieusement surannées, cet HEC de 65 ans avait travaillé auparavant dans les directions financières de grands groupes comme Total, Saint-Gobain et Pechiney.
    (Son sale boulot à Pechiney)
    “Chez Pechiney, j’ai vécu l’épreuve humaine la plus dure de ma carrière”, raconte Jean-Dominique Senard. Quand le canadien Alcan a lancé une OPA hostile sur le groupe sidérurgique en 2004, c’est lui qui a été chargé de fusionner les deux ensembles. A la clé, des centaines de suppressions de postes, notamment dans les sièges en France. Dix ans plus tard, certains collègues racontent comment il a tenté de sauver le maximum d’emplois. “Il s’est battu bec et ongles pour préserver les salariés”, confie une ancienne collaboratrice. La mission finira par l’épuiser : alors que l’encre des accords signés avec les syndicats n’était pas encore sèche, il téléphonera à Travis Engen, le patron d’Alcan, pour lui annoncer son départ.
    (Son coup de foudre pour Edouard)
    C’est un coup de fil dont il se souvient encore. Trois semaines après son départ de Pechiney, JDS recevait un appel d’Edouard Michelin en personne. “J’ai cru à une blague”, se souvient-il. Les deux hommes se rencontrent et se découvrent des points communs : même analyse de l’industrie, même vision sociale du management.
    La naissance d'une marque
    Dès lors, Edouard Michelin va tout faire pour que son nouvel ami prenne la direction financière du groupe. Au point de le rappeler pendant ses vacances, alors qu’il était sous la tente avec son épouse dans un coin perdu d’Afrique du Sud, en 2005. “Nous nous sommes mis d’accord ce jour-là, sur une simple parole”, se raconte-t-il. On connaît la suite : le décès accidentel d’Edouard Michelin, un an plus tard, propulsera Michel Rollier au poste de gérant (l’équivalent de P-DG dans la commandite), tandis que Jean-Dominique Senard deviendra cogérant aux côtés de Didier Miraton.

    (Sa victime collatérale)
    Promis, il n’y est pour rien ! Quand on lui parle de la démission de Didier Miraton pendant l’été 2011, Senard l’affirme, la main sur le cœur : “Je suis tombé de ma chaise en apprenant que j’étais choisi pour succéder à Michel Rollier.” Entre 2007 et 2011, les deux lieutenants s’étaient pourtant partagé les rôles et les ambitions. A Miraton, arrivé en 1982 chez Michelin, les pneus de tourisme et la recherche. A JDS les pneus pour poids lourds et les produits spécialisés pour avions ou engins de chantier.
    Mais c’est le petit nouveau que les huit membres du conseil de surveillance, dont Pierre Michelin, Laurence Parisot ou Louis Gallois, ont fini par adouber. Sur proposition de Michel Rollier, faut-il préciser. “Jean-Dominique et Didier n’étaient pas en compétition, ce n’est pas le genre de la maison”, nous assure aujourd’hui l’ancien gérant. Dommage que Didier Miraton, aujourd’hui administrateur du semencier Vilmorin, n’ait pas répondu à nos demandes d’interview…
    Son deuxième métier : viticulteur
    A Saint-Rémy-de-Provence, la famille possède une grande propriété agricole et son château, transmis de génération en génération depuis trois cent cinquante ans. Le clou ? Un vignoble de 18 hectares, où est produit sous la supervision de M. Senard père un vin de pays des Bouches-du-Rhône, le Domaine de Lagoy. Impliqué dans la vie locale, il s’est fait élire conseiller municipal sur une liste de centre droit dans les années 1990. “Pour moi, c’était surtout une étiquette agricole”, souligne le châtelain, qui adorait les veillées avec les paysans du coin.
    Sa ligne directe avec le Saint-Siège
    Comte par la grâce de Dieu, JDS a beaucoup oeuvré en tant que membre de la Réunion de la noblesse pontificale (RNP). Une association très chic, dont les compagnons jouissent d’un titre de noblesse héréditaire donné par les papes pour services rendus à l’Eglise. Jean-Dominique Senard a œuvré pour lui donner une dimension plus internationale et la faire entrer dans la Cilane : la Commission d’information et de liaison des associations nobles d’Europe. Royal.
    Tag(s) : #Capitalisme
    Note de Pedrito 
    Les promesses de Macron n'étaient pourtant pas feintes. Au vu  des  ravages qui se succèdent dans le paysage social du pays, après les preuves qui s'accumulent de son humanisme au seul service des milliardaires, les gens de gauche ne craindront même pas d'en remettre une couche, et pour "barrer la route au fascisme", ils nous imposeront leur choix mortifère.
    Comprenne qui pourra!

    Les deux projets européens, et la nécessité existentielle de les combattre

    4 Juin 2020 , Rédigé par Réveil Communiste Publié dans #l'Europe impérialiste et capitaliste, #Euroboycott, #Impérialisme, #élection 17, #GQ, #classe ouvrière
    Qu’est-ce que l’Union Européenne (UE) ?
    L’UE est un processus historique délibérément très lent dont la limite asymptotique est la formation des « États-Unis d’Europe », grand empire capitaliste continental, à tendance de plus en plus oligarchique, sur le modèle réalisé outre-Atlantique, processus dont les peuples concernés ne veulent pas, et dont il s’agit de contourner patiemment la volonté. Mais c’est aussi un processus impossible à mener à terme, parce que l’agenceur de la construction européenne depuis 1948, l’allié américain, qui prend aussi en charge la défense militaire de l’UE, ne veut pas le voir complètement aboutir, car il se satisfait de la satellisation actuelle du continent européen. l'Europe est donc le lieu où on débat de la meilleure formule pour sauver le capitalisme, sans pouvoir jamais conclure.
    L’UE est aussi une force expansionniste dans la mesure où l’impérialisme états-unien et le néo-impérialisme allemand qui pousse son dernier couac peuvent se concilier un moment, contre la Russie ou le monde arabo-musulman.
    Il y a plusieurs forces nationales, politiques et culturelles européennes qui veulent voir aboutir le projet d’une Europe fédérale: l’Allemagne (et de par l’influence historique du SPD, une partie de la social démocratie européenne) et l’Église catholique qui vise à une longue influence politique future dans un ensemble politique où elle serait, théoriquement, majoritaire, et une force extérieure non négligeable, la Chine, ou certains secteurs en Chine, qui chercheraient ainsi (à mon avis, illusoirement) à dissocier en deux morceaux un bloc occidental qui est tendanciellement très menaçant pour elle.
    Il y a d’autres forces qui veulent immobiliser le statu quo d’une zone de libre échange en déclin économique sous protectorat américain : l’allié et patron états-unien, la bourgeoisie parisienne, les élites de la Grande Bretagne [ où les contradictions internes ont finit par devenir insupportables] , les multinationales du Net et de la finance, parce que cette conjoncture prolongée leur permet de s'approprier une plus grosse part du gâteau.
    La petite bourgeoisie de part en part du continent est globalement européiste, par conformisme idéologique, sans bien voir ce clivage.
    Les classes populaires sont globalement anti UE car elles ont compris depuis longtemps que l’UE n’est rien d’autre que le nom de marketing du capitalisme du futur, qui ne leur promet en fin de compte que le chômage et l'anomie, non sans verser parfois dans la nostalgie du capitalisme national de papa.
    Le Brexit a ouvert la contradiction antagonique entre les deux forces européistes qui représentent deux projets d’avenir différents pour le capitalisme. Ces deux projets sont également dangereux et la tension entre les deux aboutit à une surenchère belliciste extrêmement dangereuse. Car qu’on veuille une Europe allemande ou américaine, elle sera certainement anti-russe.
    Pourquoi quitter l’UE ?
    1. Pour des raisons de démocratie
    L’UE est un pouvoir politique qui surplombe les institutions nationales de ses pays membres, et qui se trouve entre les mains de personnalités et d’institutions non élues, ou quand elles le sont, non responsables. La logique même de la construction consiste à limiter au maximum l’incidence du suffrage universel. Un des modèles historiques tirés du passé qui peut resservir à penser cette démocratie très limitée est l’Empire austro-hongrois, qu’on nommait avec raison « la prison des peuples ».
    1. Pour des raisons de souveraineté populaire
    Les États membres abandonnent par pans entiers leur indépendance, et perdent leur autonomie en matière de politique économique, budgétaire, monétaire, mais aussi sur le plan de la politique étrangère. A quoi sert dans ces conditions de voter pour des élus qui devront rendre compte en plus haut lieu, à Bruxelles ou à Francfort ?
    1. Pour des raisons économiques
    Le projet économique européen fixé par l’Allemagne est un projet libéral contrôlé, avec monnaie forte, parce que ce choix monétaire favorise les propriétaires au détriment des travailleurs. Il abouti à une désindustrialisation dans tous les autres pays qui y sont associés. A ce projet se superpose la politique globaliste de dérégulation financière qui a les faveurs de la Commission, qui est totalement perméable au lobbying des multinationales. Ces deux politiques également nocives pour l’emploi deviennent catastrophiques pour les travailleurs quand on cherche à les mettre en pratique ensemble.
    1. Pour des raisons sociales
    Ces deux projets sont également producteurs d’inégalité et de précarité, le premier étant favorable à une institutionnalisation de la pauvreté, et le second à une spécialisation parasitaire de l’économie dans la division du travail internationale (finance, marketing, spectacle, idéologie) qui ne propose aux classes populaires que des emplois de service déqualifiés.
    1. Pour des raisons patriotiques élémentaires
    L’identité psychique élémentaire des individus vivants, dans la mesure où elle excède celle de simples consommateurs de marchandises, est structurée par leur appartenance nationale. L’Europe est même le continent le plus clivé sur ce plan. La disparition des patries européennes signifiera la mise au rancard de peuples entiers et notamment des classes populaires, ceux qui ne possédant rien possédant au moins leur pays. Sans elles, il n’y a plus aucune intégration à rien d’autre qu'au discours de marketing propagateur de la marchandise globale, et cela pour les immigrés comme pour les autochtones.
    1. Pour la Paix
    Le projet européen peut bien se faire passer pour la paix éternelle entre la France et l’Allemagne, il signifie bel et bien une attitude fermée et hostile envers les autres continents, un déplacement et un renforcement des barbelés, et une sorte de mise en commun de l’impérialisme et de ses guerres. La guerre exclue de l’intérieur rejaillira aux frontières en des opérations néocoloniales qui prendront prétexte des « valeurs » universelles telles les "droits de l'homme" qui sont appropriées sans vergogne comme patrimoine européen quasi-national.
    1. Parce que l’Europe en fait n’existe pas en tant que puissance souveraine : c’est l’appendice de l’Occident anglo-saxon, dominé par les États-Unis.
    Le monde actuel est dominé par une structure impériale en emboitement : les États-Unis d’Amérique et leurs multinationales de la finance, du pétrole et du Net, les pays anglo-saxons homogènes culturellement aux États-Unis et "junior-partners" qui servent d’amplificateur à leur influence mondiale (Grande Bretagne, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, Israël), la zone satellisée de l’Union européenne, et les pétromonarchies du Golfe, sans parler de la classe dirigeante acculturée des écoles de commerce et des pensionnats de luxe partout dans le monde. L’UE n’est qu’une pièce rapportée de cette structure dont les ambitions sont dépassées par rapport au processus de domination globale à l’œuvre dans le monde.
    Pourquoi ne quitte-t-on pas l’UE puisque tout ce qui précède est bien connu ?
    Quelques réponses possibles en vrac ...
    Quitter l’UE comme toute lutte a un coût que le public atomisé et timide actuel redoute d'avoir à payer. D’autant que les défenseurs de l’Europe ne masquent pas leur volonté d’exercer des représailles en un tel cas.
    Il existe une très forte propagande pro-UE, activée par des forces idéologiques convergentes et influentes (social-démocratie, libéralisme, anarcho-libertairianisme, christianisme social, gauchisme néo-soixante-huitard), active dès la rédaction des programmes scolaires, et bénéficiant d’une quasi unanimité dans les médias de masse. Cette propagande procède par confusion, amalgame, répétition, diabolisation du camp adverse et amalgames pour intimider les hérétiques.
    L'Europe se moque des principes élémentaires de la démocratie et de la souveraineté du peuple, mais existe-t-il encore dans l'univers consumériste des "citoyens" au sens originaire du terme?  des gens prêts à se battre jusqu'au bout pour ces "valeurs"? Les adversaires de la tyrannie européistes parlent beaucoup mais font fort peu de choses. Tout se passe comme si ces idéaux étaient déjà morts, n'étaient plus que des grands mots. Dans la bourgeoisie, le patriotisme est mort et bien mort.
    L’Europe est une tyrannie « non-létale », les forces de répression policières, militaires, et les services secrets agissant dans un cadre national. De ce fait elle ne paye pas le coût politique de la répression.
    L’UE est un facteur de corruption de la vie politique de ses pays membres : subventions, ONG crées de toute pièce, aides ciblées permettent de favoriser systématiquement les partisans de l’UE et de confiner petit à petit ses adversaires dans la marge du politique et dans l’inefficacité.
    Le patriotisme est mort, mais on adhère à l’UE avec une sorte de « néonationalisme » honteux, par nostalgie de puissance, en un sentiment formé par le résidu des différents romans nationaux élaborés au XIXème siècle et enseignés à l’école jusqu’aux années 1970. On veut participer d’une grande histoire, d’une grande puissance ! La France et l’Allemagne opiniâtrement poursuivent sous le masque européen depuis 1940/45 la vaine tâche de reconstituer leur stature mondiale perdue.
    Il existe un inconscient colonial et raciste à l’œuvre dans le projet européen qui reste prégnant. Se reconnaître dans l’Europe, c’est qu’on le veuille ou non se reconnaître dans le continent des blancs, des chrétiens et des impérialistes qui s’est défini historiquement contre l’Afrique, L’Asie, l’Islam et la Russie.
    L’alternance politique sanctuarise le projet européen : les mécontents sont invités à se prononcer à chaque élection pour une alternative tout aussi pro-UE que le pouvoir sortant. Le débat politique sur cette question centrale est complètement verrouillé.
    Le mythe de l’Europe sociale mystifie certains opposants qui ne sont radicaux qu'en paroles : ils veulent employer les mêmes moyens bureaucratiques qui sont utilisés pour imposer les normes du libéralisme économique, pour une massive redistribution des revenus à l’échelle du continent. Mais si par extraordinaire des sociaux-démocrates keynésiens redistributeurs et résolus (?) prenaient le pouvoir simultanément dans plusieurs pays et surtout dans les deux pays clés (la France et l’Allemagne), ils seraient obligés de quitter l’UE pour appliquer leur programme qui heurte de front les Institutions telles qu’elles fonctionnent au régime du Traité de Lisbonne (2008), et qui ne sont pas réformables : pour modifier une disposition, il faut obtenir l’unanimité des 27 pays membres ce qui est en pratique impossible. L’Europe sociale n’est donc rien de mieux qu’une promesse électorale pour éternels opposants.
    Le plus importants : les adversaires de l'UE qui sont tendanciellement majoritaires, sont divisés en deux camps politiques irréconciliables, placés à l’extrême droite et à l’extrême gauche du champ politique. Bien que ces « extrêmes » ne le soient guère que par les arrières pensées qu'on leur prête, et qu'ils ne soient que de pâles caricatures de leurs prédécesseurs du XXème siècle, dans les faits aucun compromis ni aucune alliance n'est possible entre les deux camps sous peine de désintégration réciproque, et c'est bien là la pièce clef du dispositif qui sanctuarise l'UE. La seule sortie de cette difficulté passe par la reconquête hégémonique du camp anti-UE par "l’extrême gauche", c’est à dire par le champ politique influencé par le marxisme, l’extrême droite ne fonctionnant que comme leurre-épouvantail inconsistant, n’aboutissant qu’à consolider le pouvoir du bloc central européiste. Mais l’extrême gauche ne peut manger l’extrême droite qu’en reprenant à son compte les revendications populaires que celle-ci s’est appropriée, et en rompant ses attaches idéologiques avec le libéralisme global.
    Fondamentalement ce qu’on appelle « l'Europe » représente le projet fatal d’universaliser l’individualisme de masse, de répandre partout un discours consensuel factice lénifiant et endormeur, et de détruire toute forme de résistance sociale ou culturelle à l’uniformisation du monde sous le contrôle des trusts du Net et de la finance. Tout esprit épris de liberté doit la vomir. Abattre la tyrannie rosâtre et (pour l’instant) non-létale de l’Union européenne est une aventure ouverte aux nouvelles générations, aux jeunes de toute origine et de tous les pays européens, c’est un projet à la mesure de notre temps, pour reconquérir la dignité et la liberté des peuples et le droit de replacer l'égalité et le droit au travail à la base de la société.
    Mais ce ne sera pas une affaire tranquille et facile, et il faudra de nouveau que les aspirants au changement social acceptent de résider et de se compromettre avec le négatif. En castillan, "comprometido" veut dire tout simplement "engagé".

    GQ, 26 mai - 12 juin 2017, relu le 9 avril 2020