mercredi 28 novembre 2018

LA DERNIÈRE ÉTAPE POUR MA BICHE CHÉRIE?

Pourquoi dernière étape? Simplement parce que les choses évoluent très rapidement. Le mal de Gisèle qui ne faiblit pas, les douleurs lancinantes autour du péritoine, du foie(?), la souffrance de ma pauvre petite chérie dont je suis constamment le témoin, sans que je ne puisse rien, rien, faire, lui apporter la moindre amélioration, la moindre consolation, être près d'elle ne suffit pas à alléger sa souffrance, encore ce matin elle m'a répété" Je veux en finir, je veux partir" , et comme je lui répondais " Non, tu vas me laisser seul, je ne le veux pas, je ne veux pas que tu partes," elle me répondait :" Si, JE VEUX!!! J'AI TROP MAL!!", sans que mes larmes ne la fassent changer d'avis, parce que maintenant que nous  avons parlé, je ne retiens plus mes sanglots devant elle, qui, elle, ne verse pas une larme, mais ses yeux me regardent fixement et sont toujours larmoyants,  même lorsqu'elle sourit - çà lui arrive, parfois, même si c'est très rare - Mais je ne peux pas me faire à l'idée que tu me laisses seul, mon petit cœur. Aussi, qu'est-ce que tu dois souffrir, pour me répondre cette chose horrible.....
Mais en plus aujourd'hui, après avoir entendu une aide soignante lui parler une nouvelle fois des soins palliatifs, ma petite femme chérie a froidement décidé d'être transférée au troisième étage de la clinique, là justement d'où l'on ne redescend plus comme on y est venu....Un symbole, les "soins palliatifs", de dernière étape, - j'y étais venu voir mon cousin André il y a deux ans, peu avant qu'il nous quitte, - difficile à imaginer quand on nous en parle une première fois, puis la souffrance s'installe avec une telle violence  que le malade lui-même finit par prendre lui même cette décision fatidique, presque sereinement. C'est ce qui s'est passé aujourd'hui avec ma petite bichette chérie. Et je n'oublie, n'oubliez pas, vous tous qui l'aimez et pensez à elle ou priez pour elle, que Gisèle est devenue athée, donc elle se dit que personne ne pourra espérer adoucir sa souffrance, par la promesse d'une vie meilleure dans un paradis auquel elle ne croit plus depuis longtemps. Et je me dis que c'est peut-être - sans doute- à mon contact qu'elle n'a plus cette foi qui crée la sérénité des croyants. Dois-je m'en vouloir? Je n'y peux rien changer, mais je voudrais tant qu'elle continue de vivre  en ne souffrant plus de ce mal maudit....
Ce soir, lorsque je l'ai quittée, elle avait en main une petite télécommande, qui lui permettra de doser le calmant qui atténuera sa douleur. L'effet est garanti: elle ouvrait à peine les yeux lorsque je lui donnais la becquée  de fromage blanc et de notre confiture, pour le repas du soir auquel elle n'a pas touché, les refermait après chaque bouchée. Cher amour: que tout çà va vite, très vite, ta descente, NOTRE descente aux enfers, nous étions encore si heureux, il y a tout juste huit semaines, à prendre nos photos au bord de l'Océan. A oublier de penser au cauchemar qui nous attendait, mais que nous ne savions pas si proche et si cruel.....
V., une aide soignante douce, prévenante, adorable, est venue prendre la tension de Gisèle, en cours d'après-midi, la température, comme çà se fait tous les jours. Je lui ai demandé ce qu'elle pensait de ce qui m'arrive, le matin, au réveil: des bourdonnements dans ma tête, qui durent assez longtemps, qui me reprennent même dans la journée. Aussitôt, elle m'a pris la tension au bras gauche: 7/5 , puis 15 au bras droit! Inquiétude .... Comme nous sommes dans le bâtiment où je fais mes tests d'effort tout les ans depuis plus de 20 ans, j'ai couru tenter de voir mon cardiologue. La secrétaire m'a prévenu: emploi du temps très complet. Mais: " Attendez là, il va sortir des tests d'effort". Effectivement, dix minutes plus tard, mon cardio sort, je me lève, m'approche, lui explique que Gisèle va entrer aux "soins palliatifs" - il savait pour son mal et notre situation -, je lui parle de cette tension inquiétante.....Il m'envoie immédiatement dans son cabinet, deux étages plus bas, me rejoint aussitôt, il me prend la tension: "15 à chaque bras" !. Soulagement! Je lui dis en pleurant que je n'ai qu'une peur: partir avant mon épouse, que je ne pourrais plus entourer, accompagner....Et lui me rassure, ma tension un peu élevée? "Mais avec le train que vous menez depuis ces dernières semaines, rien d'étonnant! Normal!" Il me tape dans le dos, me souhaite du courage, me rappelle, ce dont nous avons souvent parlé, que pour sa femme, çà a duré SIX ANS, la pauvrette avait moins de 50 ans (!), qu'il en a bavé, ce que je savais, me raccompagne....Le dr G., cardiologue à "l'Ormeau," un toubib humain, que j'appréciais depuis plus de vingt ans, lorsqu'il m'a fait poser un "stent", j'ai arrêté de fumer aussitôt, - plus de 2 paquets de clopes par jour !- grâce à lui,  et évidemment grâce à ma biche qui m'accompagna partout, j'ai eu une seconde jeunesse, j'ai retrouvé le goût et l'odorat.... Et aujourd'hui, encore, il m'a donné, malgré son temps très occupé, un sacré coup de fouet au moral! Je traverse sa salle d'attente, au moins 15 personnes sont là, je les salue, je pleure, je souris, je leur ai pris involontairement trois ou quatre minutes, je redescends au premier, rejoindre mon amour de femme, soulagé, reconnaissant: Merci cher Dr G., merci à toutes les soignantes et les soignants qui accompagnent Gisèle,  grâce à vous tous, j'ai vécu une fin de journée beaucoup plus rassurante....Et çà n'est pas tous les jours....