LE PRÉSIDENT OBAMA LIBÈRE LES PRISONNIERS CUBAINS
C'est le message que m'envoie Jacqueline ROUSSIE, infatigable militante pour la Paix. Je le transmets, comme je l'ai reçu, en souhaitant que les souhaits qu'elle évoque se réalisent. Dans ce monde de violences, d'indifférence, de cynisme, d'égos ridicules, de vrais outrages impunis, de crimes, et d'injustices innombrables, les rares bonnes nouvelles sont encore meilleures. A juste titre, ô combien appréciables. Combien de lettres as-tu écrites, Jacqueline, à tous les Présidents des USA qui se sont succédé? Je partage ce bonheur que tu dois savourer.
Bonjour,
Je n’aurai pas à envoyer de nouvelle lettre au président Obama, je viens d’apprendre que les trois derniers Cubains ont été libérés aujourd’hui!
Un échange humanitaire a été fait entre les trois Cubains et Alan Gross.
Une nouvelle page de relations entre Cuba et les Etats-Unis va s’écrire, je le souhaite vraiment.
Et comme la période de Noël est celle des contes, je vous envoie celui de « l’oiseau et le prisonnier ».
La photo est celle de Gerardo et de l’oiseau Cardenal. Gerardo est celui qui était condamné à finir ses jours en prison.
Joyeuses fêtes, et mes meilleurs voeux pour 2015.
Jacqueline Roussie.
Je n’aurai pas à envoyer de nouvelle lettre au président Obama, je viens d’apprendre que les trois derniers Cubains ont été libérés aujourd’hui!
Un échange humanitaire a été fait entre les trois Cubains et Alan Gross.
Une nouvelle page de relations entre Cuba et les Etats-Unis va s’écrire, je le souhaite vraiment.
Et comme la période de Noël est celle des contes, je vous envoie celui de « l’oiseau et le prisonnier ».
La photo est celle de Gerardo et de l’oiseau Cardenal. Gerardo est celui qui était condamné à finir ses jours en prison.
Joyeuses fêtes, et mes meilleurs voeux pour 2015.
Jacqueline Roussie.
Gerardo
et Cardenal traduit
du récit d’Alicia Jrapko.
Il
était une fois un petit oiseau, qui se fit l’ami d’un
prisonnier. Tous deux étaient emprisonnés aux Etats‐Unis, tous
deux partageaient une détention injuste pour avoir défendu Cuba
contre des actes terroristes...
L’histoire
commence ainsi. Le 4 juin 2009, le jour même de son anniversaire,
Gerardo Hernandez apprit l’existence de ce nouveau venu par un
prisonnier du nom de Lira, qui travaillait à l’usine de la
prison. Lira et un gardien nettoyaient les toits avec un puissant
jet. Sans le vouloir, ni même le savoir, ils détruisirent un nid
qui abritait trois oisillons. Deux d’entre eux moururent sur le
coup, mais le troisième survécut. Ils étaient si petits qu’ils
n’avaient pas encore de plumes. Ils venaient probablement de sortir
tout juste de leur coquille.
Emu
et se sentant responsable, le gardien permit à Lira d’emmener, en
le cachant, le petit oiseau à l’intérieur de la prison pour
essayer de le sauver. L’oisillon dans le creux de sa main, et ne
sachant que faire, le prisonnier interrogea les autres prisonniers.
L’un d’eux suggéra : «demandons à Cuba (surnom donné à
Gerardo par les autres prisonniers), il aime les animaux, il saura
sûrement ce qu’il faut faire ». Ils appelèrent alors Gerardo
qui se rendit dans la cellule où était le petit animal.
La
première réaction de Gerardo fut de siffler, comme l’aurait
fait la mère de l’oisillon pensait‐il. Il bougea les doigts
comme si c’étaient de petites ailes. Par miracle le petit ouvrit
le bec. Gerardo commença à lui donner de la mie de pain, puis,
plongeant les doigts dans l’eau, fit courir des gouttes qui
tombèrent doucement dans le bec du poussin.
Gerardo
ne voulut pas l’amener dans sa cellule, mais chaque jour il passait
pour le nourrir. Le problème était qu’au début, l’oiseau ne
voulait manger avec personne d’autre que lui. Un jour, il eut
l’idée de donner à l’oisillon des miettes de poisson, et dès
lors le coquin dédaigna la mie de pain. Ses plumes commencèrent
à pousser, et Gerardo lui apprit à manger seul. Il mettait des
petits morceaux de nourriture dans la paume de sa main, et le petit
oiseau venait picorer en toute confiance.
Cependant
les détenus étaient préoccupés. En cas d’inspection,
l’oiseau serait un problème. Comme il avait grandi, ils le
portèrent dans la cour pour qu’il puisse s’envoler librement.
L’oisillon
voletait et revenait se poser sur l’épaule de Gerardo. Chaque
fois qu’il essayait de voler en compagnie d’autres oiseaux,
ceux‐ci le chassaient à coups de bec. Peu à peu il prit
confiance. Gerardo entrait seul dans son pavillon, mais quand il
ressortait dans la cour, l’oiseau revenait pour le voir.
Un
jour où de nombreux prisonniers étaient dans la cour, quelqu’un
dit à Gerardo que l’oiseau était posé sur les barbelés
encerclant la prison. Gerardo siffla et, devant tous les prisonniers,
l’oiselet surgi de nulle part se posa sur l’épaule de Gerardo.
Incroyable ! Cette histoire était dans toutes les bouches.
Ils
avaient baptisé l’oiseau Cardenal (cardinal) parce que Gerardo
lui avait peint les plumes de la queue avec un marqueur rouge pour le
distinguer de ses congénères. La peinture l’avait un peu
affecté. L’oiseau perdit ses plumes caudales, mais pas pour
longtemps. Elles repoussèrent avec leur couleur naturelle.
Toutefois le nom lui resta : Cardenal.
Une
autre fois, un prisonnier trouva l’oiselet dans la cour, bec
ouvert. Il faisait très chaud, il avait soif. Il le prit et le
porta à Gerardo. Ce dernier le cacha sous sa casquette pour le
faire entrer discrètement. Bien sûr il était manifeste qu’il
avait quelque chose de bizarre sur la tête. « Qu’as‐ tu sous
ta casquette ? », lui demanda l’un des gardiens, et Gerardo
répondit : « rien ». Cardenal
2
en
rajouta, piaillant comme un fou. Ne me dis pas que tu l’entraînes
pour envoyer des messages à Fidel, lui dit en riant le gardien.
L’histoire
ne s’arrête pas là. Gerardo porta l’oiseau dans sa cellule et
lui aménagea un coin pour qu’il puisse y rester. Il jouait avec
lui, le posait sur son épaule, sur sa tête. Quand Gerardo
écrivait, Cardenal venait le distraire, et le Cubain lui donnait
une tape affectueuse pour qu’il le laisse tranquille. Cardenal se
posait alors sur son dos hors de portée de la main amie.
Quelquefois il se blottissait dans le col de la chemise du prisonnier
et s’y endormait. Ou bien il picorait l’oreille de son ami, et
quand Gerardo secouait la tête, Cardenal changeait d’oreille.
Une
fois où Gerardo avait lâché Cardenal, celui‐ci s’était
envolé vers le réfectoire et avait atterri dans l’assiette d’un
prisonnier grand et costaud qui mangeait un morceau de poulet. Le
prisonnier empoigna le petit oiseau pour le broyer, et quelqu’un
cria : « Ne le tue pas. Il est à Cuba ! » Le cri le prit au
dépourvu. L’homme lâcha Cardenal et demanda étonné : « Qui
diable est donc Cuba ? »
En
réalité Gerardo était très préoccupé. Un gardien en
particulier n’appréciait pas du tout l’oiseau. Au cours d’une
inspection, ce gardien avait obligé Gerardo à relâcher Cardenal
et à refermer la porte derrière lui. Le petit oiseau réapparut
plus tard, blessé. Gerardo le garda quelques jours de plus dans sa
cellule pour qu’il récupère. Là‐dessus, il y eut un «
lockdown » (punition collective où les prisonniers restent sans
communication entre eux), et tout lockdown implique des fouilles.
Quand
Gerardo entendit qu’ils fouillaient son couloir, il empoigna
l’oiseau pour le mettre dehors. Cardenal sortit en voletant dans le
pavillon de la cellule de Gerardo. Quand le gardien entra, il vit la
cage où vivait Cardenal. Gerardo lui expliqua que là vivait son
ami, de son plein gré : « le problème est que lorsque je le mets
dehors, il revient ; ce n’est pas de ma faute ». « Et tu penses
que je vais croire que le petit oiseau va revenir », lui répondit
le gardien en faisant mine de sortir comme pour dire « tu es fou ».
Gerardo siffla de l’intérieur de sa cellule, et le gardien se
figea en voyant comment la petite bête revenait. Sans se tromper,
Cardenal avait reconnu le lieu où vivait son ami dans l’immense
galerie de cellules du premier et second étages, toutes exactement
identiques.
Cardenal
arriva devant la cellule de Gerardo. Il regarda à travers la grille
de la porte, mais ne put rentrer (c’était durant le lockdown). Il
resta là tranquille jusqu’à ce que Gerardo lui même, ému,
ouvre le petit guichet par où on lui passe les repas, et Cardenal
entra. Quelques jours plus tard, il y eut une autre fouille. Quand
les gardiens arrivèrent à la cellule de Gerardo, il leur dit
qu’il avait un petit oiseau, pour qu’ils ne soient pas effrayés
en le voyant voler sur leurs têtes. Ils lui dirent qu’il devait
le relâcher, mais comme aucun d’eux ne pouvait l’attraper, ils
conduisirent Gerardo jusqu’à la porte de son pavillon pour qu’il
le relâche lui même. Comme c’était le lockdown, Gerardo et le
petit oiseau sortirent escortés par les gardiens. A travers les
grilles de leurs cellules, tous les prisonniers les virent et
commencèrent à crier : « Ils amènent Cuba et son oiseau au
trou », et ils se mirent alors à tambouriner sur les portes de
leurs cellules en signe de protestation. Un gardien cria : « On se
calme ! Je ne l’amène pas au trou ; nous allons juste libérer
l’oiseau ».
Ce
fut la dernière fois où Gerardo vit Cardenal. Le pavillon resta
fermé tout le mois que dura le lockdown. Le Cubain ne put sortir et
Cardenal ne put rentrer. Le petit oiseau était resté dans cette
prison de haute sécurité depuis le 4 juin jour de l’anniversaire
de Gerardo, jusqu’au 16 juillet, lendemain de l’anniversaire de
mariage de Gerardo et Adriana.
Colorin
colorado ce conte (qui n’en est pas un) est terminé.
(Alicia
Jrapko a écrit cette histoire de mémoire deux heures après
l’avoir entendue de la bouche de Gerardo lors d’une visite
qu’elle lui a faite dans la prison de haute sécurité de
3
Victorville
en Californie. Il a ensuite revu et corrigé le texte qu’Alicia
veut remettre à la
« Casa Editora Abril » pour qu’il soit publié pour les enfants. Gerardo purge une peine de deux perpétuités plus 15 ans pour des charges non prouvées lors d’un jugement faussé à Miami.)
« Casa Editora Abril » pour qu’il soit publié pour les enfants. Gerardo purge une peine de deux perpétuités plus 15 ans pour des charges non prouvées lors d’un jugement faussé à Miami.)
Gerardo
Hernández Nordelo est né à La Havane le 4 juin 1965. Il est le
troisième enfant du couple de Gerardo Hernandez Martí et de
Carmen Nordelo Tejera, tous deux décédés. Il a été
diplômé en 1989 de l’Institut Supérieur des Relations
Internationales (ISRI)
« Raúl Roa García ».
Un
an auparavant, en 1988, il avait épousé Adriana Pérez O’connor,
son épouse actuelle. Il est caricaturiste et artiste graphiste, il
a réalisé ses travaux à Cuba et aux Etats‐Unis.
Vers
le milieu des années quatre vingt dix, il accomplit des missions
aux Etats‐Unis destinées à prévenir Cuba d’actions
terroristes planifiées et exécutées par des organisations
contre révolutionnaires situées à Miami.
Le
12 septembre 1998 il fut arrêté avec quatre de ses camarades qui
comme lui ont été victimes à Miami d’un jugement truffé
d’irrégularités et de mauvaise foi. Il a été condamné
sans preuves à deux perpétuités plus 15 ans.
Il
vient d’être libéré !
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