Il est 10H45. Virginie termine son travail, ta maison est propre, ton linge est repassé, rangé. Je t'ai appelé, le répondeur me répétait, comme à chaque jour où tu n'as pas eu le temps de prendre ton portable, égaré sur ton lit: " Vous êtes bien sur la messagerie de Pierre et Gisèle....." Cette voix qui pendant des années épelait clairement ton message adressé avec douceur à nos amis et correspondants, cette voix me bouleverse. Elle appartient à notre amour, à ces années que la saloperie de mal a décidé d'abréger. Lorsque tu m'as répondu, pour de vrai, quelques secondes plus tard, après que tu aies mis la main sur le portable retrouvé, ta voix n'était plus du tout la même. Faible, tremblante, elle m'étreint à chaque fois le cœur et les tripes. Elle n'est plus la voix tant aimée. Que c'est dur! Je vais partir vers toi: tout à l'heure, on doit te mettre un drain, pour que tu souffres moins, que tu puisses respirer plus aisément. C'est sans doute çà un nouveau soin palliatif......
Que je t'aime, ma biche chérie. A tout de suite...
A 11H30, retrouvailles : à ton chevet ma sœur Yvette, Alain son mari nous rejoint un peu plus tard, ils ne sont pas venus les mains vides, mais avec un petit festin préparé pour toi, pour te rendre un peu de cet appétit que l'on perd habituellement dans les chambres d'hôpital. Je ne les remercierai jamais assez, tant d'empressement pour d'adoucir les heures qui nous sont comptées....Et tu n'es que leur belle-sœur....Si tu vois ce que je veux dire....Du côté de ta sœur unique, on n'est pas sur la même longueur d'ondes. On parle beaucoup du "bon dieu", mais pour appliquer les valeurs sacrées de la charité chrétienne, c'est pas la même serrure: chez les uns, les premiers, le cœur aussi grand qu'une porte cochère, chez les autres fermeture automatique des portières. Sectarisme oblige. Mes idées ne sont pas les leurs, nous vivons donc, toi et moi, cernés par des gens trop intelligents, que dis-je, trop parfaits pour nous. Ou pour moi. Le premier? Un beau-frère humain. L'autre? Un beauf!
Demain, Alain et Yvette reviennent à nouveau avec, cette fois-ci, des coquilles St Jacques !! Pour ton repas de midi.... A chaque fois, 70 km aller/retour depuis St Pé de Bigorre. Et ils ne roulent pas sur l'or ! Ou alors, ils le cachent bien. C'est souvent comme çà: ce sont ceux qui peuvent le moins qui se montrent les plus humains, ceux qui donnent le plus. Tu vas me dire, ma petite femme chérie, que je ne parle que de bouffe. Comprends que tout ce qui te touche, qui concerne ta santé, plutôt ce qu'il en reste, et notamment ce bien-être auquel d'autres que moi contribuent pour toi avec tant d'amour, tout cela me bouleverse, comme me bouleversent l'indifférence, l'orgueil, l'égoïsme, de ceux de tes proches les plus proches qui devraient t'accorder un peu de générosité. Mais c'est fini, je n'en parle plus: gardons dans nos cœurs à jamais le souvenir précieux de ceux qui ne nous auront volontairement fait aucun mal.
On devait te poser un drain, aujourd'hui:Tu n'as eu droit qu'à une radio des poumons, le drain, ce devrait être pour demain.
Nous avons eu la visite dans ta chambre du responsable de la Sodexo de l'Ormeau. Qui avait eu des échos de nos griefs concernant certains repas. Il faisait la tournée des chambres. Il nous a assurés qu'il serait tenu compte de nos doléances. Monsieur fort aimable, d'ailleurs....Attendons....
Aujourd'hui, tu avais froid à tes pieds. Mauvaise circulation du sang! J'ai passé un long moment à te les masser, les frotter, les réchauffer, l'un après l'autre, puis les recouvrir de lainage confectionné par ta mère, plus ton manteau de chambre. Incroyable comme ce putain de mal n'en finit pas de t'inventer de nouvelles souffrances....Si je pouvais au moins prendre ta place, pour lui dire "Merde au cancer!", pour qu'il me châtie à moi, qu'il t'épargne, enfin. Je t'aime tant, et tant...../
Retour à 20H15 vers ma solitude. Pourvu que ta nuit soit apaisée, douce, reposante.....La mienne sera sans doute longue, agitée. Un grand vide. Quel calvaire vivons-nous! A moins que tes anti dépresseurs te déconnectent efficacement de ce qui t'attend. Qui nous attend.....
A 11H30, retrouvailles : à ton chevet ma sœur Yvette, Alain son mari nous rejoint un peu plus tard, ils ne sont pas venus les mains vides, mais avec un petit festin préparé pour toi, pour te rendre un peu de cet appétit que l'on perd habituellement dans les chambres d'hôpital. Je ne les remercierai jamais assez, tant d'empressement pour d'adoucir les heures qui nous sont comptées....Et tu n'es que leur belle-sœur....Si tu vois ce que je veux dire....Du côté de ta sœur unique, on n'est pas sur la même longueur d'ondes. On parle beaucoup du "bon dieu", mais pour appliquer les valeurs sacrées de la charité chrétienne, c'est pas la même serrure: chez les uns, les premiers, le cœur aussi grand qu'une porte cochère, chez les autres fermeture automatique des portières. Sectarisme oblige. Mes idées ne sont pas les leurs, nous vivons donc, toi et moi, cernés par des gens trop intelligents, que dis-je, trop parfaits pour nous. Ou pour moi. Le premier? Un beau-frère humain. L'autre? Un beauf!
Demain, Alain et Yvette reviennent à nouveau avec, cette fois-ci, des coquilles St Jacques !! Pour ton repas de midi.... A chaque fois, 70 km aller/retour depuis St Pé de Bigorre. Et ils ne roulent pas sur l'or ! Ou alors, ils le cachent bien. C'est souvent comme çà: ce sont ceux qui peuvent le moins qui se montrent les plus humains, ceux qui donnent le plus. Tu vas me dire, ma petite femme chérie, que je ne parle que de bouffe. Comprends que tout ce qui te touche, qui concerne ta santé, plutôt ce qu'il en reste, et notamment ce bien-être auquel d'autres que moi contribuent pour toi avec tant d'amour, tout cela me bouleverse, comme me bouleversent l'indifférence, l'orgueil, l'égoïsme, de ceux de tes proches les plus proches qui devraient t'accorder un peu de générosité. Mais c'est fini, je n'en parle plus: gardons dans nos cœurs à jamais le souvenir précieux de ceux qui ne nous auront volontairement fait aucun mal.
On devait te poser un drain, aujourd'hui:Tu n'as eu droit qu'à une radio des poumons, le drain, ce devrait être pour demain.
Nous avons eu la visite dans ta chambre du responsable de la Sodexo de l'Ormeau. Qui avait eu des échos de nos griefs concernant certains repas. Il faisait la tournée des chambres. Il nous a assurés qu'il serait tenu compte de nos doléances. Monsieur fort aimable, d'ailleurs....Attendons....
Aujourd'hui, tu avais froid à tes pieds. Mauvaise circulation du sang! J'ai passé un long moment à te les masser, les frotter, les réchauffer, l'un après l'autre, puis les recouvrir de lainage confectionné par ta mère, plus ton manteau de chambre. Incroyable comme ce putain de mal n'en finit pas de t'inventer de nouvelles souffrances....Si je pouvais au moins prendre ta place, pour lui dire "Merde au cancer!", pour qu'il me châtie à moi, qu'il t'épargne, enfin. Je t'aime tant, et tant...../
Retour à 20H15 vers ma solitude. Pourvu que ta nuit soit apaisée, douce, reposante.....La mienne sera sans doute longue, agitée. Un grand vide. Quel calvaire vivons-nous! A moins que tes anti dépresseurs te déconnectent efficacement de ce qui t'attend. Qui nous attend.....
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