Amazon embauche malgré le coronavirus : le capitalisme contre la santé publique
Alors que la plupart des entreprises ferment, les entrepôts
d’Amazon en France ne restent pas seulement ouverts, ils embauchent.
Avec la fermeture des commerces « non-essentiels » la multinationale
américaine anticipe une forte augmentation des commandes. Or les
conditions de travail dans ses entrepôts sont propices à la diffusion du
coronavirus. Alors que l’État regarde ailleurs, les salariés sont les
seuls à pouvoir, par un droit de retrait massif, faire fermer les sites.
« Amazon n’a rien d’essentiel, aujourd’hui c’est la grande
distribution qui nourrit la France. Pour nous l’entreprise devrait déjà
être fermée », enrage Laurent Degousée, co-délégué chez
Sud-commerce. Pourtant, la multinationale américaine ne ferme pas, au
contraire, lundi 16 mars, Amazon annonçait dans un communiqué
l’embauche de 100 000 employés à temps plein ou partiel ainsi qu’une
hausse temporaire du salaire horaire de deux dollars ou deux euros, aux
Etats-Unis et en Europe, jusqu’à fin avril.
Or les conditions sanitaires sont extrêmement mauvaises dans ces
grands entrepôts qui, en France, réunissent des milliers de salariés sur
cinq sites : Montélimar, Boves (Somme), Saran (Loiret),
Chalon-sur-Saône et Lauwin-Planque près de Lille. « On est entre 500
et 800 à travailler en même temps, même si on est assez espacés dans
les entrepôts, on croise bien plus de 5-6 personnes par jour. On
travaille sans gel hydroalcoolique, sans masque. Certains s’inquiètent
de ce qu’il peut se passer si on tousse sur des colis qu’on transmet
ensuite à un collègue », détaille Jean-François Bérot, délégué de Solidaires du site de Saran.
« C’est une situation qui rend dingue, tout ce qu’Amazon trouve à dire à ses employés, c’est de s’espacer d’une place à la cantine », s’indigne Laurent Degousée. Moins incisif, Jean-François Bérot précise : « Amazon
fait ce qu’elle peut pour garantir des mesures de sécurité et ne pas
fermer son site, mais ils ne peuvent pas faire assez tant qu’ils
n’auront pas drastiquement réduit les effectifs. Selon nous, si la boîte
veut rester ouverte, il faut qu’elle mette en place du chômage partiel
pour tous et limite l’activité aux seuls volontaires. Comme elle
n’acceptera jamais nous allons vers un dépôt massif de droits de
retrait. Nous avons d’autant plus de raison de le faire que nous avons
un membre d’une équipe qui a été mis au confinement car sa compagne a
été testée positif au coronavirus. »
Des débrayages pour aller vers un droit de retrait massif
« Pour se faire entendre il ne faut pas compter sur Amazon ou sur
l’État mais sur les collectifs de travailleurs. De plus il est hors de
question que les salariés paient la crise sanitaire de leur poche en
faisant grève. C’est pour cela que nous informons massivement sur les
droits de retrait et exigeons la fermeture des entrepôts d’Amazon
partout en France », annonce Laurent Degousée de Sud-Commerce. De
fait, depuis mardi, dans les cinq sites d’Amazon en France, des employés
ont organisé des débrayages pour réfléchir collectivement à la question
du droit de retrait.
« A Saran, environ 20% des employés du jour ont débrayé à l’appel
des organisations syndicales entre 11h et 15h ce mercredi 18 mars. Ce
temps a permis de les écouter, de comprendre leur crainte et de les
informer sur le droit de retrait. Nous avons également utilisé notre
droit d’alerte et une délégation a rencontré les employeurs en début
d’après-midi », informe Jean-François Bérot.
A l’entrepôt de Lauwin-Planque, près de Lille « Environ 300
salariés ont exercé leur droit de retrait depuis dimanche car aucune
mesure n’a été mise en place en matière sanitaire et ils sont 2 600 à
travailler sur ce site », souligne la CGT. « Là- bas, le ton
est monté et des petits chefs ont mis la pression individuellement sur
les salariés en leur disant , que le droit de retrait ne s’appliquait
pas et que toute absence serait une absence injustifiée », explique cependant Laurent Degousée.
«Sur
le site de Montélimar, les salariés d’Amazon étaient plus d’une
cinquantaine ce matin devant les entrepôts d’Amazon pour réclamer la
fermeture de l’usine, a indiqué au Dauphiné Julien Vincent »,
délégué général CFDT Amazon. A Boves, près d’Amiens les syndicats ont
affirmé à France info qu’il y aurait cinq suspicions de cas de Covid-19.
En revanche malgré la peur, la contestation ne semble pas encore s’être
fermement organisée. A Chalon-sur-Saône enfin, des employés ont
également débrayé mardi matin selon la CFDT.
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