mardi 5 janvier 2021

Ça n'empêche pas Nicolas

Apple, Google, Facebook et Twitter vont faciliter la portabilité de vos  données | TIC Magazine BF

La société inhumaine que veulent nous imposer Facebook, Google et Twitter ...

« Derrière nos écrans de fumée » : Une critique acerbe de l’industrie technologique et un appel au changement

Social Dilemma (Derrière nos écrans de fumée) de Jeff Orlowski est peut-être le documentaire le plus important à voir cette année.

Ce film met en accusation l’industrie technologique en expliquant avec brio les dommages causés par des entreprises telles que Facebook, Google et Twitter via leurs plateformes de médias sociaux et leurs moteurs de recherche, comment et pourquoi elles le font et surtout comment y mettre un terme.

Présenté au festival de Sundance [avant la pandémie du Covid19, NDT], The Social Dilemma prend aujourd’hui en compte les références au Coronavirus.

Même si on ne s’intéresse que peu aux médias sociaux ou si on utilise rarement Google pour ses recherches, cela vaut la peine via ce documentaire d’aller jeter un coup d’œil aux coulisses et d’expliquer une grande partie de la folie que nous observons actuellement dans le monde réel. Ce n’est pas de la paranoïa. Il ne s’agit pas d’anciens employés mécontents et voulant en découdre – en fait, beaucoup des personnes interrogées sont reparties très riches et continuent de travailler dans le secteur de la technologie, de profiter de tous ses avantages, mais simplement avec des ambitions plus altruistes.

Le film ouvre sur une citation de Sophocle : « Rien d’excessif ne se glisse lentement dans la vie des mortels qui ne les expose au malheur. » Les pionniers de la Silicon Valley se font l’écho des débuts des médias sociaux (avant leur gigantisme) lorsqu’ils étaient pavés de bonnes intentions, même si ils brossent un tableau sombre de ce qui se passe aujourd’hui. Comme le souligne Justin Rosenstein, ancien ingénieur de Google et de Facebook, le bouton « j’aime » a été conçu pour être un outil pour partager « sentiments positifs et amour », et non comme le système de surveillance comportemental qu’il est devenu.

Tristan Harris, ancien responsable de l’éthique du désign chez Google et co-fondateur du Center for Humane Technology, est le personnage clé du film alors qu’il tente de convaincre les bons génies des entreprises technologiques. Il souligne ainsi que le « dilemme » est que les médias sociaux et leurs applications proposent simultanément l’utopie et la dystopie. Ils font ressortir le meilleur et le pire de la société. Ils rendent tant de choses si faciles, mais à quel prix ?

La santé mentale est une préoccupation majeure, alors que de nombreuses études révèlent que l’anxiété, la dépression et les suicides augmentent en parallèle de la progression des médias sociaux et de l’utilisation des téléphones portables, particulièrement chez les adolescents et les collégiens. Afin d’illustrer l’échec des réseaux sociaux, le film mentionne également la tendance croissante à la désinformation, la radicalisation des extrémismes au Moyen-Orient et des suprémacistes blancs aux États-Unis, la montée de la polarisation politique et le fait que des régimes autoritaires les utilisent dans des pays tels que le Myanmar et les Philippines, ce sont là des exemples d’échec de ces plates-formes.

Orlowski (Chasing Coral) et son équipe, qui compte la productrice Larissa Rhodes, l’auteur-éditeur Davis Coombe, l’écrivaine Vickie Curtis et le compositeur Mark Crawford, utilisent l’animation, le graphisme et la dramaturgie pour donner plus de poids aux interviews. Les capsules présentant une famille de cinq personnes aux prises avec un monde numérique tumultueux, semblent superflues mais sont relevées par un bon casting où figurent Vincent Kartheiser, Kara Hayward et Skyler Gisondo, et sont susceptible de toucher le public de façon plus émotionnelle.

 

Skyler Gisondo dans le documentaire The Social Dilemma. (Source Labs/Netflix)

La partie la plus troublante du film est celle qui nous apprend à quel point Facebook et consorts monnayent leurs utilisateurs. « Quand le produit est gratuit, c’est que vous êtes le produit », nous rappelle Harris. Et alors que la plupart des gens ont tout à fait conscience d’être exploités pour leurs données lorsqu’ils sont sur ces sites, peu réalisent jusqu’à quel point cela va. Si vous pensez que le but consiste simplement à générer des publicités ciblées pour vos baskets préférées, vous allez avoir un vrai choc.

La manipulation de votre comportement par l’I.A. prédictive, la « captation de l’attention » (qui vous incite à cliquer le plus longtemps possible) et la récolte de vos données pour les vendre au plus offrant (vous aimez les théories du complot, n’est-ce pas ?) sont autant de moyens pour que vous deveniez la marchandise et que les annonceurs deviennent le client. (Et il ne s’agit pas seulement d’intérêts commerciaux. Les organisations étrangères font des ravages, déstabilisent les sociétés partout dans le monde). Ces plate-formes sont conçues pour créer une dépendance et une addiction au service de ce « capitalisme de surveillance ».

La professeure et auteure Shoshana Zuboff qualifie ces marchés des données de « marchés à terme humain » – comme la poitrine de porc [la poitrine de porc, matière première du bacon, était naguère cotée sur le marché à terme, NdT] – et estime qu’ils devraient être rendus illégaux. Et finalement, le documentaire en arrive à considérer le modèle commercial comme le méchant de l’histoire. La plupart des personnes interrogées hésitent à qualifier Mark Zuckerberg, ou tout autre individu, de malfaiteur, préférant présenter les entreprises comme les victimes de leur propre succès, piégées dans le cercle vicieux de la nécessité de gagner plus d’argent pour maintenir la machine en vie.

Selon Jaron Lanier, informaticien, pionnier de la réalité virtuelle et auteur, les enjeux de la réforme sont de la plus haute importance. « Si nous nous enfonçons dans ce statu quo, pendant encore 20 ans, dit-il, nous détruisons probablement notre civilisation par ignorance délibérée ; ne relevons pas le défi du changement climatique ; nous dégradons les démocraties du monde les faisant chuter dans un quelconque dysfonctionnement autocratique ; nous ruinons l’économie mondiale. Probablement, nous ne survivons pas. Je considère vraiment cela comme une question existentielle ».

En 2019, Harris a témoigné devant le Sénat américain précisant qu’il appartenait aux entreprises de prendre leurs responsabilités. Cependant, selon le film, compte tenu de leurs antécédents, l’autorégulation n’est pas une option crédible. Certains des sujets suggèrent des mesures réglementaires plus strictes pour protéger les consommateurs. Pour d’autres, seules des incitations financières, telles la taxation du traitement des données collectées par les entreprises, endigueront la marée. Quoi qu’il arrive, dit Harris, il faudra une volonté collective pour insuffler les changements nécessaires.

Transparence totale : The Social Dilemma est plein des idées qui m’ont travaillé ces cinq dernières années, mais elles sont ici exprimées par des gens plus intelligents et mieux informés. Regardez par vous-même (et si vous n’êtes pas abonné à Netflix, profitez d’un essai gratuit mais essayez de ne pas succomber à leurs algorithmes). Tout cela est assez terrifiant.

 

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