mardi 22 mars 2022

Publié par El Diablo

Pour mémoire, il est instructif de se pencher sur la longue interview que Volodymyr Zelensky avait accordée à la chaîne ukrainienne RBK juste avant son élection en avril 2019 (liens ci-dessous).

La BBC Ukraïna en avait relayé des extraits en résumant l'essentiel sous le titre suivant : "Zelensky à propos de Bandera : pour une part des Ukrainiens c'est un héros et c'est cool."

L'interview était en russe et "cool" est un moyen de traduire le russe "Это класснo" : c'est tip-top, c'est classe. Langage de djeun's et tenue décontractée, donc, quand la conversation roule nonchalamment sur un génocidaire et un criminel de guerre.

Voici le passage sur Bandera, correspondant à la minute 9,50 de la vidéo :

Question : "Que pensez-vous de la décommunisation ? Continuera-t-il en cas de votre présidence ? Après tout, d'une part, il y a la décommunisation, d'autre part, il y a les avenues de Stepan Bandera. Comment pensez-vous qu'il faille procéder ?"

Réponse du candidat : "En général, je suis d'accord avec la décommunisation. La société a choisi, et c'est bien. Il y a des héros indéniables. Stepan Bandera est un héros pour un certain pourcentage d'Ukrainiens, et c'est normal et cool. C'est l'une de ces personnes qui ont défendu la liberté de l'Ukraine. Mais je pense que lorsque nous appelons tant de rues et de ponts du même nom, ce n'est pas tout à fait correct. Au fait, il ne s'agit pas de Stepan Bandera. Je peux dire la même chose de Taras Grigorievitch Chevtchenko [poète romantique de langue ukrainienne]. J'ai beaucoup de respect pour son travail incroyable. Mais nous devons nous souvenir des héros d'aujourd'hui, les héros de l'art, les héros de la littérature, juste les héros de l'Ukraine. Pourquoi ne pas les appeler par leur nom - les héros qui unissent l'Ukraine aujourd'hui ? Il y a une telle tension dans la société que tout doit être fait pour unir l'Ukraine. Une fois on m'a demandé Pourquoi une rue ne porte-t-elle pas le nom d'Andriy Chevtchenko [footballeur ukrainien] ? Pour moi, c'est un héros, je le pense vraiment."

J'imagine déjà que les vérifieurs d'infos de "Libé" et d'ailleurs, qui en ce moment se surpassent, vont habilement glisser sur ce que pouvait évoquer alors le terme "décommunisation" cinq ans après le massacre de la maison des syndicats à Odessa, pour s'attacher à une analyse de fond : interpréter ce "cool" en disant que M. Zelensky avait en réalité subtilement glissé sur la question piège Bandera, pour suggérer qu'on pense AUSSI à ces pauvres footballeurs et que c'est bien là l'essentiel.

Il demeure qu'on ne peut s'empêcher de penser qu'il y avait bien quelque chose de pourri au Royaume du Danemark, comme aurait dit Hamlet. N'est-il pas ?

Aymeric Monville,

Le 21 mars 2022

Le lien de l'enregistrement vidéo de l'interview (en russe) se trouve ici, sur Youtube :

 

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