vendredi 5 janvier 2024

 

Vœux du président de la République : Merci Macron pour cet enfumage en règle.

Carlo Gallo  Agora Vox

Depuis presque sept ans qu’il est au pouvoir, Emmanuel Macron projette d’« agir encore ». C’est ainsi qu’en 2024, pour renouer avec les « fiertés françaises » et mener la campagne des européennes, il compte agir !

Mais agir dans quel domaine ? Poursuivre le détricotage du domaine public ? Poursuivre le démantèlement de l’enseignement public, de l’hôpital, des droits des travailleurs ?

Continuer à nous fournir comme seul argument le « combat du bien » représenté par ses amis milliardaires contre le mal représenté par tous les autres, c’est-à-dire les ignares, ceux qui ne « valent rien », ceux qui défendent leurs droits, ceux qui réclament le fruit de leur travail, ceux qui veulent une vie digne ?

N’empêche, ces vœux tombaient bien. Après avoir défendu Depardieu en piétinant la fonction présidentielle et la justice de ce pays ; après l’adoption de la loi inique sur l’immigration, il avait la possibilité de faire diversion par l’intermédiaire de cet exercice d’un autre âge.

C’est debout dans la nuit noire, devant les drapeaux des nations olympiques dans les jardins de l’Elysée, que Macron, visage illuminé (le seul point illuminé de la photo) a lu sur son prompteur le bla bla préparé certainement par ses amis communicants de chez McKinsey. Ils savent y faire ceux-là ; la photo et la mise en scène en sont la signature : une signature américaine. Macron est présenté comme le sauveur, presque comme le messie (le « presque » est même inutile dans le cas présent). Un messie qui colle parfaitement aux jours qui entourent Noël, pleins de religiosité … 

Une année de « détermination, de choix, de régénération, de fierté », a-t-il martelé, une année de combat ! Cela fait presque sept ans qu’il est président et il comprend qu’il faut faire quelque chose ; il était temps ! Mais aussi, faire quoi ? Ça, on ne le saura jamais !

Après avoir dressé le constat sombre d’une France tenaillée en 2023 par les menaces extérieures et les fractures intérieures, le président de la République a décuplé dans le déballage des promesses qui n’engagent que ceux qui les écoutent : L’année 2024 sera, dit-il, « un millésime français ».

Il faut dire qu’on peut difficilement faire mieux, dans le vide de politique et de projet, quoi que…

Il se fait même aumônier et prédicateur avec son « dans ce contexte de crises peut naître le meilleur », équivalent à une vie meilleure dans l’au-delà de (presque) toutes les religions.

 Le président de la République a balayé d’un revers de la main la crise politique qui traverse son camp depuis le vote de la loi « immigration », le 19 décembre, avec les voix du Rassemblement national, au prix de la démission du ministre de la santé, Aurélien Rousseau, et d’un malaise partagé par d’autres membres du gouvernement et de nombreux députés de la majorité. Il a préféré vanter « la force de caractère, vertu des temps difficiles  ». D’ailleurs, le terme « réarmement » a été employé sept fois par Macron. Comble de la tromperie et des astuces de communicant (je me répète, ses amis américains savent y faire), alors que cette loi parle de « préférence nationale » notion défendue par l’extrême droite, en distinguant entre travailleurs étrangers et nationaux pour verser des prestations sociales, ou impose une caution aux étudiants étrangers, Emmanuel Macron l’a présentée comme nécessaire pour « lutter contre les passeurs et l’immigration clandestine » et «  mieux intégrer ceux qui ont vocation à demeurer sur notre sol : réfugiés, étudiants, chercheurs, travailleurs ».

Même la réforme des retraites, a été présentée comme positive par Macron, bien qu’elle ait provoqué la première crise de ce second quinquennat. Il a dit qu’elle permettrait au pays « d’être en mesure de financer notre modèle social » et de créer des emplois.

Les crises il ne les connait pas et ne les nomme même pas : «  Depuis sept ans, là où vous m’avez placé, je tâche de rendre la France plus forte et plus juste et de libérer, protéger, unir. Tel est le cap et nous le tenons, il en fut de même en 2023 », clama-t-il, faisant référence à son slogan de campagne de 2017 : « libérer, protéger ». « La France c’est une culture, une histoire, une langue, des valeurs universelles qui s’apprennent dès le plus jeune âge », insista-t-il, affirmant vouloir « rétablir l’autorité partout où elle manque face aux incivilités et à la délinquance ».

Dans le bla bla présidentiel sont venues quelques touches d’espérance et de « fiertés ». Il s’approprie la sphère mémorielle et les événements actés depuis longtemps : « Dans les prochains mois, la France rayonnera dans le monde, promet le chef de l’Etat, à travers la commémoration du 80e anniversaire du Débarquement en Normandie et la tenue des Jeux olympiques de l’été 2024. Nous serons fiers de nos athlètes, de nos artistes, de nos paysages, de cette fête populaire. » Le terme populaire me parait totalement hallucinant dans la bouche du président car les Parisiens sont invités à quitter la capitale durant les jeux, les bouquinistes des quais de la Seine sont exilés, les prix exorbitants de billets d’entrée sur les différents sites sont inabordables, le prix des transports exorbitants, le prix des locations de même…dois-je en rajouter ? Mais, pour les amis du président tout cela est du menu fretin, valeur insignifiante… pourvu que le président soit glorifié et qu’eux conservent leurs privilèges. 

La reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, après l’incendie qui l’avait ravagée cinq ans plus tôt, montrera que la France « lorsqu’elle est fière d’elle-même accomplit l’impossible », poursuivait Macron, s’attribuant (avec nos impôts) le mérite de sa reconstruction, lorsqu’il soulignait que ce n’était qu’« une fois par millénaire que l’on rebâtit une cathédrale ».

P.S. : Macron : « Si la réussite est au bout, ce sera grâce à ma lumineuse personne. Si au contraire l’échec arrive, ce sera à cause de vous, mes chers conpatriotes[1] »

 

[1] Vous avez remarqué la faute d’orthographe. Elle a été glissée express dans le texte par ses auteurs, en guise de clin d’œil : à la prononciation du bla bla présidentiel cela ne s’entend pas mais cela permet au président de sourire et montrer ainsi son humanité et bienveillance.

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