vendredi 17 août 2018

                            
Fonction publique : Rapport CAP22, ce que ne doit pas cacher l'affaire Benalla-Macron

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite
Le rapport 

« Comité d’action publique 2022 » a finalement été rendu public, contre la volonté de Matignon. Ses propositions sont censées servir de guide pour la rénovation de l’action publique souhaitée par le gouvernement. Mais sa rédaction a très largement échappé à certains membres du comité, qui aujourd'hui évoquent un « jeu de dupes ». 
Le rapport « Comité d’action publique 2022 » (« CAP 2022 ») a finalement été rendu public samedi 21 juillet par le syndicat Solidaires finances publiques, après sa mise en ligne sur différents médias, dont Mediapart.
L’épilogue d’une histoire assez rocambolesque, où ce qui avait été présenté comme une initiative de rénovation en profondeur de l’action publique s’est mué en un dossier embarrassant de plus pour le gouvernement.
Initialement prévue pour le mois d’avril, la publication du rapport a été régulièrement reportée. Puis finalement, en juillet, Matignon fait savoir qu’il n’y aura pas de publication du texte. Le gouvernement ne souhaiterait plus que celui-ci serve de base de discussion dans la mesure où il ne veut pas reprendre l’ensemble de ses propositions. Il préfère reprendre « au fil de l’eau », et dans le cadre d’annonces ciblées, certaines propositions.
Mais la publication des principales propositions de CAP 2022 dans Le Figaro du 16 juillet relance la polémique quant à cette méthode. Jeudi 18 juillet, le président de la commission des finances du Sénat Vincent Éblé exige la publication du texte.
Finalement, samedi 21 juillet, le syndicat Solidaires finances publiques met en ligne l’intégralité du rapport.
Pourquoi le gouvernement a-t-il voulu éviter la publication de ce rapport ? Certains estiment que les propositions de CAP 2022 sont trop radicales et auraient conduit à déclencher des polémiques que l’exécutif chercherait à éviter. Il est vrai que le texte affiche des propositions inquiétantes, comme la fin du statut des fonctionnaires et la priorité donnée à l’embauche de contractuels de droit privé, la création d’un nouveau corps enseignant, des économies de 5 milliards d’euros dans l’hôpital, la mise sous conditions de ressources des allocations familiales ou une nouvelle simplification du mille-feuille territorial français.
Mais cet argument sonne étrangement. D’abord parce que, lors de son lancement le 13 octobre, ce comité avait comme ambition de réduire la dépense publique de 30 milliards d’euros. Le premier ministre Édouard Philippe avait alors explicitement demandé au comité de réfléchir sans tabous. De plus, l’essentiel du rapport est largement inspiré par les travaux de la commission Attali, qui remontent à 2008, et reprend nombre des propositions du gouvernement. C’est le cas notamment du calcul des revenus en temps réel pour l’attribution des aides personnalisées au logement, qui sera sans doute inscrit dans le budget 2019, ou de la réforme de Pôle emploi que le premier ministre a présentée la semaine dernière et qu’il a directement reliée aux travaux de CAP 2022.
La clé de cette affaire est peut-être à chercher ailleurs, dans les coulisses du comité. Car la rédaction de ce rapport a été réalisée de façon étrange. Le maire de Sceaux Philippe Laurent (UDI), membre du comité, a publié jeudi 18 juillet un communiqué pour se désolidariser de ce qu’il appelle un « jeu de dupes ». D’autres de ses collègues de CAP 2022 confient un certain « malaise ».
Selon les informations collectées par Mediapart, les membres du comité, répartis en groupes de travail, ont jusqu’en février réalisé leurs auditions et « rédigé des fiches ». Ces dernières ont été remises fin mars. La publication du rapport était alors prévue à la mi-avril. Cette publication n’est cependant pas intervenue.
Le 25 avril à midi, les membres du comité sont convoqués dans un immeuble gouvernemental de l’avenue de Ségur, pour prendre connaissance d’un préprojet de rapport. Nul ne sait qui a rédigé ce texte à partir des fiches des membres du comité. Sont-ce les trois coprésidents ? Est-ce la délégation interministérielle à la transformation publique dirigée par Thomas Cazenave ? Sont-ce les deux ? Pourquoi la publication a-t-elle été reportée ? Les membres du comité n’en ont pas été informés.
Ce jour-là, le rapport est soumis à la lecture des membres du comité pendant « une heure, une heure et demie », se souvient Philippe Laurent. Puis un plateau-repas est servi et on demande aux membres leurs remarques sur le texte. Vers 15 heures, les textes sont récupérés et on s’assure que les membres du comité n’ont pris aucune photo ni conservé aucun document. Tout le monde sort donc. Aucun membre ordinaire de CAP 2022 ne verra de version définitive et globale de ce rapport avant sa publication samedi, contre la volonté du gouvernement.

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