LES RAISONS D'UNE COLÈRE
Grève annoncée à la tour Eiffel le 1er août
Depuis
le 2 juillet dernier, un dispositif de prévente permet aux visiteurs
d'accéder à la tour Eiffel « sur rendez-vous » —à des créneaux horaires
choisis. Déployé par la Société d'Exploitation de la Tour Eiffel (SETE),
le projet vise à répondre à la volonté de la Ville de Paris d'un
meilleur accueil des visiteurs de la tour (réduction des temps et files
d'attente, satisfaction client). Seulement voilà : depuis son lancement,
c'est l'inverse qui se produit : le process mis en œuvre par la SETE
génère des files d'attentes parfois monstrueuses —et souvent totalement
déséquilibrées. Au-delà du gâchis généré en termes d'efficacité
(insatisfaction des visiteurs…) —et cela à l'une des périodes les plus
importantes de l'année en termes de fréquentation—, les agents d'accueil
sont à bout. Ce raté manifeste n'est pourtant pas une fatalité.
Différentes solutions et options existent pour « corriger le tir ».
Depuis plusieurs semaines, la CGT les défend. La direction de la SETE
les refuse, persistant dans un process rigide démontrant jour après jour
son inadaptation opérationnelle. Au bout du rouleau, les salariés de la
tour Eiffel ont, par le biais de leurs organisations syndicales
représentatives, déposé un préavis de grève pour le 1er août.
Détails.
En
soi, le projet était défendable : ouvrir 50% de la billetterie de la
tour Eiffel à un système de prévente en ligne. L'idée : permettre aux
intéressés de planifier leur visite par l'achat de billets prépayés les
invitant à se présenter le jour dit à un horaire précis —formule censée
leur éviter d'importants temps et files d'attente. Malheureusement, la
solution mise en œuvre par la SETE depuis le 2 juillet dernier ne
fonctionne pas. Ou, plus exactement, n'est pas adaptée aux contraintes
d'exploitation du monument.
Explications :
Le
principe retenu par la direction consiste à dédier l'un des deux
piliers d'accès à la tour (le pilier nord) aux seuls billets achetés en
prévente, et un second pilier (le pilier ouest) à tous les autres
visiteurs(1) .
Problème :
dès
le 2 juillet, jour de lancement, de très importantes distorsions
apparaissaient dans les deux files d'attente. Loin d'être équivalents,
les flux de visiteurs respectivement dédiés aux piliers nord et ouest
génèrent depuis —et quotidiennement— de véritables inepties
opérationnelles. A savoir : - certains créneaux horaires (soirée et
début d'après midi) étant très peu réservés par la prévente, il est
fréquent de voir l'ascenseur dédié monter quasiment à vide, alors même
que des files d'attente parfois interminables se constituent sur le
pilier ouest (jusqu'à trois heures d'attente) —voir vidéo jointe. - à
l'inverse, lorsque certaines tranches horaires successives sont vendues «
à plein » en prévente (en surcapacité évidente), c'est cette fois
l'ascenseur du pilier nord qui est dans l'incapacité d'absorber le flux
auquel il doit faire face. Les clients qui disposent de billets
prévendus doivent ainsi souvent patienter plus d'une heure —et cela
alors même qu'un système de rendez-vous sans file d'attente leur a été
promis.
Pour faire simple :
à
une période où la tour Eiffel accueille 25000 visiteurs par jour, il
n'est pas rare de voir l'un des deux ascenseurs ne transporter que 35%
d'entre eux (et cela en montant quasiment à vide plusieurs heures par
jour). A charge alors pour le second d'assurer, lui, la montée des 65%
restants dans de bonnes conditions —ce qui est évidemment impossible.
Au-delà
de l'inefficacité de la solution déployée et des sentiments de gâchis,
de frustration et d'insatisfaction qu'elle génère (parmi les visiteurs
de la tour comme chez ses salariés), deux autres décisions de la SETE
nourrissent également la déception et la colère des agents d'accueil(2) :
- la suppression de la « caisse groupe », qui permettait auparavant de
fortement faciliter l'accueil et la gestion des groupes(3) . - la
réduction de la cellule dédiée au service et à l'accompagnement client
sur site (c'était évidemment tout l'inverse qu'il aurait été judicieux
d'anticiper et d'engager, ne serait ce que pendant la phase transitoire
de calage et de consolidation de la nouvelle formule).
Que faire ?
Loin
de remettre en cause le principe même de la prévente, la CGT a, depuis
plusieurs semaines, émis à la direction de la SETE plusieurs
propositions : - D'abord, revenir sur le principe de séparation des deux
flux—structurellement inadapté aux contraintes d'exploitation du
monument. Comment ? En permettant à la totalité des visiteurs (billets
prévendus ou non) d'accéder aux deux piliers —et cela avec une file
prioritaire dédiée aux clients munis de billets achetés en prévente. -
Ensuite, remettre à nouveau en place une caisse dédiée à l'accueil des
groupes. - Enfin, renforcer l'équipe des agents d'accueil chargée du
support et de l'assistance client sur le parvis.
Face
aux refus réitérés de la direction de la SETE de revoir le dispositif
opérationnel, les organisations syndicales représentatives ont déposé un
préavis de grève pour le 1er août. Ce préavis a volontairement été
déposé très en avance, afin de laisser à la direction une grande
latitude pour réagir. Encore une fois, le but n’est pas de revenir sur
le principe d’une augmentation des ventes sur internet, mais bien de
trouver des solutions opérationnelles permettant d’accueillir dignement
nos visiteurs(4) —ce qui est l'essence même du projet souhaité par la
Ville de Paris. La qualité d’accueil à la tour Eiffel est primordiale :
elle est une vitrine hautement significative et symbolique du tourisme
en France.
(1)
Trois des quatre piliers de la tour Eiffel sont équipés d'un ascenseur.
En haute saison, les visiteurs sont accueillis et transportés au sein
de deux de ces trois piliers. Le troisième reste alors « en secours » si
nécessaire (panne d'un ascenseur, notamment).
(2)
Malgré beaucoup de bonne volonté, les agents d'accueil ne parviennent
pas à gérer sereinement et efficacement les deux flux de visiteurs.
Engagée suite à un droit d’alerte des délégués du personnel, une enquête
conduite par la direction courant juillet a démontré l’état d'extrême
fatigue physique et/ou morale des salariés en charge de l'accueil. (3)
La suppression de la « caisse groupe » a notamment eu pour conséquence
que les groupes sont désormais condamnés à stagner et patienter dans la
file d'attente générale. Leur présence et leurs tailles parfois
conséquentes impactent ainsi fortement l'accès de tous les autres
visiteurs à l'ensemble des caisses (quatre caisses par pilier).
(4)
Au-delà des dysfonctionnements déjà évoqués, le dispositif actuel
présente également l'inconvénient de renforcer la constitution de
longues files d’attente à l’extérieur du périmètre de sécurité —générant
ainsi des problèmes significatifs de sécurité et de nuisances pour les
riverains. A signaler : contrairement à une explication relayée par la
presse courant juillet, les importants travaux d'aménagement
actuellement conduits (l'édification du mur de sécurité en verre dressé
autour du parvis, notamment) ne sont en rien responsables des
distorsions considérables existant entre les deux flux de files
d'attente (prévente et vente directe).
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