Emmanuel Todd : une soirée anti-électorale… et une promesse…
Effectivement le désarroi des commentateurs était réjouissant, je l’avais également noté et souligné qu’il fallait en profiter parce que cela ne durerait pas. D’ailleurs ça a recommencé dès lundi… Malgré la déroute des sondeurs dès le lendemain de l’élection leur parole était redevenue l’équivalent d’un résultat avéré et la promotion de Macron et la Le Pen était remis sur orbite comme s’il n’était intervenu aucun désaveu.
Il y a eu sur la 2, le soir du deuxième tour un moment de grâce qui a prolongé cette fugace prise de conscience ça a été l’intervention de Fabien Roussel. Fabien Roussel, il faut le reconnaître est sympathique et cela nous change de son prédecesseur. Cette sympathie ou cet aspect tristounet, si je l’évoque, n’est pas seulement caractéristique individuelle, elle correspond à la ligne qu’il a choisi avec son équipe, “je suis communiste et il faut que vous fassiez avec” mais le dialogue est essentiel, la courtoisie également, pas de langue de bois, l’assurance du collectif et le respect de l’interlocuteur. C’est vrai que cette élection semble un peu l’encerclement des villes par les campagnes, le parisien élitisme avec sa marginalisation de tout ce qui n’est pas lui et la boboisation suspendus par un double désaveu, celui de l’abstention et celui de la capacité à se parler, à reprendre pied sur le terrain. Anne’Sophie Lapix sur France 2 en était toute revigorée et elle a dit son fait au candidat du Rassemblement national Jordan Bardella. Mais c’était la franchise de Fabien Roussel qui libérait ainsi le ton général. le moment où il a dégonflé la baudruche de l’espoir déconfit du Rassemblement national était savoureux , il a foncé en lui disant qu’il n’était qu’un tract et qu’il ne créait rien en dehors de la haine d’une partie de la population. Ce qu’il disait était si simple, si sincère que l’union se refaisait, tout paraissait s’être calmé y compris au sein de la gauche au moment même où il revendiquait le droit pour les communistes de porter une parole qu’ils étaient les seuls à détenir, une parole de classe qui ne confondait pas alliés et ennemis.
Il y a eu d’ailleurs la réponse étonnante du dit Jordan Bardella à laquelle personne n’a fait réellement attention : “laissez-moi parler Fabien Roussel, nous ne sommes plus en 1945 où vous pouviez nous interdire”… Rarement l’aveu fut plus clair… c’étaient les collabos, les pétainistes, les diviseurs de la France sur des bases de races qui prétendaient prendre leur revanche sur les communistes qui les avaient vaincus. Le masque respectable, républicain tombait et ce n’était pas un hasard si c’était un communiste qui l’avait arraché.
Quelque chose est en train de naître et ces élections en témoignent en 2015, les élus communistes étaient présents dans 39 département, en 2021 le PCF est présent dans 52 départements, la présence des communistes s’est étendue jusqu’en Alsace. les résultats du parti dans les hauts de France, la manière dont il a su faire l’union malgré les manoeuvres de la FI, en sont la preuve, le rassemblement national a été vaincu sur des bases de classe. Les communistes ont mené une campagne incroyable en particulier dans le Pas de Calais. En passant de 4 à 9 élus départementaux et en entrant au conseil régional, c’est le département de France où les communistes réalisent la plus forte progression! Il n’y a pas que les élus , il y a les résultats jamais atteints après une campagne novatrice avec ses adhésions, son porte à porte, la volonté partout de continuer à reconstruire le parti au-delà de l’éléction et d’envisager celle de la présidence dans le même sens… Ce n’est pas comptabilisé et pourtant c’est le plus fondamental…
Il y a six ans, quatre ans encore, l’équipe de direction d’alors ne cessait de proposer de changer de nom pour éviter de changer de secrétaire, en 2018, hier à peine, le parti a une fois de plus refusé de changer de nom et a changé de secrétaire; une porte s’est entrouverte et ça s’accélère au rythme de la France elle même, de ses refus, de l’exigence d’une mise en conformité.
En revanche dans l’île de France où déjà la vague des municipales avait fait des dégâts la direction fédérale a poursuivi sa ligne liquidatrice et imposé cette cruche de Clémentine Autain comme leader des communistes les repentants anonymes… La divine surprise d’une entente qui n’est fondée sur rien… Avec les résultats que l’on sait la perte d’un département, le désaveu des municipales amplifié malgré les pôles de résistance.
On retrouve la même errance dans la région PACA où la campagne a été la même avec le heurtde deux lignes et où cela a entrainé des divisions , où Gardanne a été perdu… toujours dans le prolongement des municipales…
Une élection se fait sur un terrain qui est ce qu’il est et avec lequel on doit composer et il faut voir que la nouvelle ligne que porte Fabien Roussel, celle qui reconstruit le parti de la classe ouvrière et des couches populaires et va les arracher à l’abstention voir au Rassemblement national est déjà là et les priorités qu’il désigne y compris celle de la jeunesse sont totalement en phase avec ce que désignent cette élection. Il est difficile dans le court temps électoral de faire mieux et de porter autant de résultats. En outre la nouvelle ligne née au 38 e congrès se heurte à l’ancienne ligne des liquidateurs (les effets des municipales) et à leur résistance (la désignation de clémentine Autain une candidature de division et de négation des comunistes) qui a encore aggravé les effets des municipales et de trente ans d’abandon.
Là aussi Fabien Roussel a fait ce qu’il a pu pour apaiser, recréer l’union , désigner les vrais ennemis et refuser le Rassemblement National … Donc comme le dit Emmanuel Todd tout n’est pas négatif dans cette abstention, il y a une sorte d’attente d’autre chose et pour les communistes ces élections reflètent à la fois le positif d’une ligne qui ne cesse de s’approfondir depuis le 38 e Congrès et les miasmes d’un passé qui s’accroche et empêche que les efforts des camarades donnent leur pleine mesure. et les insultes que l’on retrouve parfois dans les réseaux sociaux comme les délires des plateaux de télévision dont elles sont le reflet font partie de ce passé..
Je sais pourquoi je ne retournerai pas au PCF, je n’ai pas la patience, pas le temps d’accompagner mes contemporains dans ce lent chemin vers la conscience de ce qu’ils ont vécu ou de ce qu’ils vivent, à ma manière il ne me reste plus qu’à être une abstentionniste mais à l’inverse de Todd, ce n’est pas simplement de l’UE, de l’interdiction de tout changement par la Constitution, que j’ai choisi d’être l’abstentionniste, mais c’est de la difficulté éprouvée à faire penser le socialisme et le moment historique planétaire… Je trouve qu’il y a trop de myopie encore…
parce que au-delà de ces babillards ce qui se dessine depuis pas mal de temps c’est qu’une partie du capital ne veut pas du couple infernal Macron -Le Pen. Pour une raison très simple parce qu’ils savent qu’aucun des deux n’est capable de faire face à une révolte populaire contre la politique imposée depuis tant d’années et qu’ils doivent encore aggraver alors ils cherchent face à la faiblesse de la gauche, son incapacité à mobiliser les forces populaires, une alternative sans alternance … Comment la fabriquer, quelle marionnette du capital elle remplacera Macron- Le Pen ? Une solution à la Biden avec quel cahier des charges “atlantiste”?
danielle Bleitrach
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