jeudi 6 janvier 2022

Marcel Cachin, Breton émancipé et communiste

Bien connu des amateurs de football et de cyclisme, le journaliste Georges Cadiou, originaire du Huelgoat, signe une biographie de Marcel Cachin, ancien directeur de L’Humanité et fondateur du Parti communiste français. Une figure de la gauche du xxe siècle, très attaché à la Bretagne…

Comment vous est venue l’idée de consacrer un ouvrage à Marcel Cachin ?

Assez naturellement, car il n’existait pas de vraie biographie du personnage, à l’exception d’un livre écrit par sa fille dans les années 1980, mais il s’agissait plus d’un recueil de souvenirs personnels. Alors que sont régulièrement publiés des livres sur d’autres figures de la gauche, comme Jaurès ou Blum, je trouvais dommage que personne ne travaille sur Cachin qui a pourtant joué un rôle non négligeable dans l’histoire politique du siècle dernier.

Enfin, plus personnellement, j’ai été secrétaire général de l’association des Bretons d’Île-de-France qui a succédé à celle des Bretons émancipés, dont Cachin fut le président.

Qui était Marcel Cachin ?

C’est un Breton bretonnant, né à Paimpol. Il a parlé breton toute sa vie. Professeur de philosophie, brillant orateur, il a rejoint la SFIO. On l’oublie souvent, mais Cachin a aussi été socialiste pendant trente ans. Il était très proche de Jaurès et devient d’ailleurs directeur de L’Humanité. Il le resta jusqu’à sa mort en 1958.

Après la Première Guerre mondiale, il est l’un des grands acteurs du congrès de Tours, durant lequel une majorité de socialistes décident de rejoindre la Troisième internationale et de fonder le Parti communiste. Il y fait un grand discours en écho à celui de Léon Blum qui, lui, choisit de rester socialiste. Durant l’entre-deux-guerres, il devient l’une des figures de la gauche française.

Pendant l’Occupation, les Allemands l’ont manipulé pour qu’il condamne les attentats. Le Parti communiste clandestin l’a ensuite exfiltré et caché. Néanmoins, cela lui a été reproché, même si, à la Libération, il a retrouvé toute sa place. Il est alors plutôt une icône qu’un acteur réel de l’évolution du Parti communiste…

Quel est le rapport de Cachin à la Bretagne ?

C’est peut-être l’apport de ce livre, et cela ne fera sans doute pas plaisir aux jacobins de gauche, mais Marcel Cachin était très attaché à la Bretagne et à sa langue. Et je le cite abondamment pour ça…

Il a été anticolonialiste, antifasciste, il a défendu l’indéfendable, dont les procès de Moscou et le stalinisme, mais il a été aussi un défenseur de la Bretagne toute sa vie. Il utilisait le breton dans ses meetings, essentiellement en région parisienne, où beaucoup de nos compatriotes avaient alors émigré. Je rappelle qu’en 1932, L’Humanité a été le seul journal parisien à ne pas condamner l’attentat de Rennes qui a détruit le monument symbolisant l’union de la Bretagne à la France… En 1935, il est à Plourivo pour l’enterrement de Yann Sohier, le grand défenseur de l’enseignement du breton à l’école publique. En 1939, Marcel Cachin écrit ainsi que la Bretagne est une nation, qu’elle est bien plus qu’une région. Cela va à l’encontre de la ligne officielle du Parti communiste après la Seconde Guerre mondiale, mais la lecture de ses carnets est éclairante sur ce point…

Erwan Chartier-Le Floch

 

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