Attentat de Moscou, Guerre Israël vs Hamas – Les REMARQUES de Philippe Arnaud
Chers tous,
Je reviens sur deux aspects de l'attentat de Moscou, aspects qui, à ma connaissance, n'ont pas été relevés par les médias.
1.1. Le Crocus City Hall est (ou plutôt était...) une salle incluse dans un vaste ensemble appelé Crocus City, comportant un parc des expositions (Crocus Expo), un grand centre commercial (Crocus City Mall), un aquarium, un complexe d'affaires et de divertissements (Vegas City Hall). Où veux-je en venir ? A ceci : il est pour le moins étrange (ou paradoxal) que la Russie, qui se pose en adversaire (idéologique, stratégique, politique, économique...) des États-Unis, abrite en son sein un complexe qui imite en tous points (y compris - ce qui est un comble ! - par l'usage de mots anglophones et de caractères latins pour les désigner), ce qui se fait à Disneyworld Floride, à Las Vegas, à New York ou dans les gigantesques ensembles équivalents des pays du golfe arabo-persique.
1.2. De plus, l'attentat a eu lieu alors que se produisait un groupe de rock russe, appelé Piknik. Je ne me prononce pas ici sur le fond ou l'inspiration des chansons de ce groupe. Je m'arrête juste sur l'énumération de ses instruments : une guitare, une batterie, une guitare-basse, des claviers. En somme, dans la forme (j'insiste sur le mot), les mêmes instruments que ceux des groupes européens, nord-américains ou australiens (donc "occidentaux"). Il y a de ce fait une forte dissociation entre l'opposition (idéologique, stratégique, politique et économique) de deux États et leur proche proximité culturelle. Cela rappelle des épisodes de l'histoire européenne qui parleront aux Français. En 1715, la mort de Louis XIV a coïncidé avec le coup d'arrêt porté à la puissance politique et militaire de la France (après la guerre de Succession d'Espagne). En revanche, tout au long du XVIIIe siècle, les divers pays européens, bien que souvent adversaires de la France, ont multiplié les constructions de petits Versailles, et, parmi leurs élites, se sont mis à parler français. [Frédéric II de Prusse disait ainsi que l'allemand était une langue bonne pour les chevaux]. Cela a recommencé, un siècle plus tard, en 1815, après la défaite de la France. Les élites européennes ont continué à parler français - au point que lors de la fameuse "dictée de Mérimée", ce fut la princesse de Metternich qui commit le moins de fautes...
2. L'autre aspect de cet attentat est le suivant : le lendemain de l'attentat, la télévision russe a célébré le courage, la présence d'esprit, le sang-froid de deux jeunes employés du Crocus City Hall, âgés de 15 ans, qui ont guidé des centaines de spectateurs hors de la salle de concert. La question est : comment peut-on être employé (c'est-à-dire salarié) à l'âge de 15 ans ? Comment peut-on l'être sans travail dissimulé ou exploitation d'une main d’œuvre censée être plus docile ? Sauf à imaginer qu'en Russie la législation du travail permet de tels écarts... Ou que le créateur et propriétaire du Crocus City, le milliardaire azéri Aras Agalarov, en raison de sa fortune, de son entregent, de son carnet d'adresses, peut se permettre d'ignorer impunément la législation sociale.
L'autre curiosité est que ce jeune homme s'appelle Islam (il porte donc un prénom musulman) et a les yeux légèrement bridés, ce qui peut laisser supposer qu'il est originaire d'une des ex-républiques soviétiques d'Asie centrale, se terminant en "stan" (Tadjikistan, Ouzbékistan, Kazakhstan, Turkménistan) ... comme les terroristes qui ont perpétré l'attaque ! Et son camarade se prénomme Artiom, qui est un prénom d'origine kurde. Ces deux jeunes Russes ne relèvent donc pas de l'image folklorique du Slave blond aux yeux bleus orthodoxe... Cela, de nouveau, ne peut qu'évoquer la France où, lors des attentats perpétrés depuis des années par des terroristes se réclamant de l'islamisme, on a relevé, parmi les victimes, nombre de Français ou d'étrangers eux-mêmes de confession musulmane. Voire, parmi ces derniers, des sujets courageux qui ont soit protégé d'autres personnes, soit contribué à faire arrêter les auteurs des attentats.
3. Autre chose qui n'a rien à voir : tous les matins, je reçois de France Info un mail intitulé : "Toute l'actu à 7 h 30". Ce mail retrace brièvement plusieurs dépêches d'actualité. Et hier 26 mars, la première de ces dépêches était libellée ainsi : "Guerre entre Israël et le Hamas : les combats continuent, malgré l'appel du Conseil de sécurité de l'ONU à un cessez-le-feu immédiat". Sans avoir l'air d'y toucher, ce titre en disait long sur l'idéologie de son auteur.
3.1. D'abord, dans l'ordre de présentation des belligérants : Israël est nommé en premier. Même si cela ne change rien à la violence des combats, le premier que l'on nomme est, inconsciemment, subrepticement, celui au côté duquel on se place. C'est pourquoi je m'efforce de dire "palestino-israélienne" au lieu de "israélo-palestinienne" ou "arabo-israélienne" au lieu de "israélo-arabe". Ensuite dans l'entame de l'annonce : "les combats continuent". Ce qui est faux, car la disproportion des forces (au moins de 100 contre 1, voire 1000 contre 1 au bénéfice d'Israël) fait que la responsabilité de la poursuite des combats, dès le 7 octobre, ne peut émaner que d'Israël. Il est dans l'intérêt du Hamas (et des autres groupes armés palestiniens, il ne faut pas l'oublier) que les combats cessent, pour que la monnaie d'échange des otages reprenne de la valeur et pour que le Hamas reconstitue ses forces. En disant "les combats continuent", le rédacteur de la dépêche renvoie dos à dos les deux protagonistes, alors que c'est Israël qui porte l'écrasante part de responsabilité de cette poursuite des combats.
Je vous saurais gré de vos remarques, précisions, rectifications et critiques.
Bien à vous
Philippe ARNAUD
Amis du Monde Diplomatique - Tours
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