mercredi 2 juin 2021

Y A-T-IL UN PILOTE DANS LA POLICE ?



Y a-t-il un pilote dans la police ?

Le ministre de l’Intérieur n’est pas devant, mais derrière. Il court après les policiers. Il se tait lorsqu’une députée est jetée à terre. Et il laisse la police à une forme d’autogestion chaotique, entre syndicats, hiérarchie, préfecture. Cette désertion du politique, c’est un symptôme. D’une « classe dirigeante » impuissante à « diriger », qui ne fait plus que « dominer ».

« Comme la police n’est plus dirigée, c’est désormais elle qui dirige ». Je pointais cela, l’année dernière, dans mon rapport parlementaire : la désertion du politique.

« Y a-t-il un pilote dans la police ? Je m’interrogeais. Y a-t-il un ministre à l’Intérieur ? Ou bien, en est-on à une autogestion chaotique, entre syndicats, hiérarchie, préfecture, sans cap politique fixé d’en haut ? »

Les événements récents en témoignent, jusqu’à la caricature : le ministre n’est pas devant, mais derrière. Le mardi, il court après les syndicats de policiers, lors d’une manifestation où il se fait huer. Le jeudi d’après, c’est ma collègue députée Bénédicte Taurine qui, lors d’un rassemblement, est jetée à terre, un fait inédit, et sans une réaction derrière, ni de l’Intérieur ni de Matignon.

Et il en est ainsi depuis près de trois ans, depuis les Gilets jaunes – dont il faut rappeler le bilan : 27 éborgnés, 5 mains arrachées, 321 crânes ouverts, et deux morts. Depuis cette crise, le politique est « à la remorque », muet devant les policiers, les approuvant ou les couvrant, levant parfois un petit doigt, timidement, avant de se rétracter face à un haussement de sourcil syndical.

Mon collègue de droite Guillaume Larivé le disait autrement, en Commission des lois :

« Bien sûr, nous soutenons les forces de l’ordre et nous sommes conscients des difficultés de leur mission. Mais elles doivent être commandées. La chaîne hiérarchique comprend les gradés, les officiers, les commissaires dans la police, les sous-officiers et des officiers dans la gendarmerie, au bout se trouve le ministre de l’Intérieur. Je plaide pour le commandement, qui implique de savoir sanctionner, de dégager des lignes directrices de doctrine, de reconnaître parfois des errements et de les corriger [... ] Le ministre de l’Intérieur ne doit pas être derrière les forces de l’ordre. Il est là pour être devant et les diriger. Au vu des événements des dix-huit derniers mois, le ministère de l’Intérieur devrait engager une réflexion sur d’éventuelles évolutions de doctrine et d’organisation. Je souhaite une chaîne hiérarchique qui assume de sanctionner lorsqu’il y a des errements, qui assure un bon enseignement et qui vérifie que la force est employée de manière légale. Il faut un rendez-vous d’actualisation de la doctrine au sein de la police nationale en 2020. »

Sans reprise en main, la police est la bride sur le cou, en une forme d’autogestion décomposée. L’absence du politique laisse un grand vide, que les syndicats, et les plus incendiaires des syndicats, vient occuper.

Faute de Beauvau, la police part à vau-l’eau.

***

Lors de mes auditions, c’est une institution en crise que j’ai découverte.


Faut d’un cap, d’abord. Ou alors, des caps successifs, simultanés, parfois opposés. Qui ont désorienté, plus qu’orienté : « Quelle police voulons-nous ? s’interrogeaient – et m’interrogeaient – les représentants policiers. Pour quoi faire ? Du chiffre ou de la proximité ? »

Aucun discours fort, depuis Sarkozy, pour tracer un horizon. Si bien que la politique du chiffre, autrement appelée la « batonnite » – « Comme les écoliers, on rentre au commissariat, on fait des bâtons dans nos cahiers. Une, deux, trois interpellations. Il vaut mieux arrêter deux shiteux qu’un trafiquant, c’est mieux pour les statistiques... » – la politique du chiffre demeure, bien que contestée, tempérée.

Des tas de réformes se sont pourtant succédées. « Le nouveau management » est arrivé, qui a cassé l’organisation habituelle, traditionnelle, du commissariat – sans fixer d’autre but qu’une vague « productivité ». Comme le résume un officier : « L’esprit “Maison police” a disparu ». Des divisions se sont produites, des divisions horizontales : « Les commissaires sont passés de “chef de service” à “manager de service” », produisant une fracture d’avec leurs hommes.

D’autant qu’entre les deux, un maillon est presque supprimé : « Les relais, ce sont les brigadiers, les chefs d’équipe. C’est le contremaître de la police : il a un pied sur le terrain et un pied dans l’état-major ». C’est le brigadier qui fait le lien entre le haut et le bas, qui donne une cohésion à l’ensemble. Son absence, ou son effacement, en font le chaînon manquant.

Les policiers sont atomisés, « chacun dans son couloir »

« Je me souviens, quand j’ai commencé ma carrière il y a trente ans, un fonctionnaire était désigné à tour de rôle pour faire le café et les sandwichs pour tout le monde. Vous aviez une salle conviviale, où tout le monde venait, on faisait l’appel, on prenait nos consignes, et ensuite on allait tous dans cette salle de repos [...] Tout ça a été supprimé parce que “effectifs, effectifs”, il faut être rentable, etc. Du coup, vous n’avez plus ce rapport humain, vous avez des machines à café, un distributeur de plats tout préparés, un micro-ondes... Aujourd’hui, ces temps communs n’existent plus. »

.....La suite - intéressante, il va sans dire - de l'article de Ruffin dans le blog "Le Grand Soir" ....


 

mardi 1 juin 2021

Colombie, tandis que nos médias pleurent sur un néo nazi… des corps sans vie…

L’artiste colombien Cizañero a fait ce dessin suite à la découverte, dans un sac, de la tête coupée d’un jeune homme qui avait été porté disparu par la police colombienne ces derniers jours.

Plusieurs corps de manifestants qui ont été arrêtés – disparus par la police colombienne, ont commencé à apparaître dans les fleuves de Colombie et dans des fosses clandestines.🔴

La Colombie souffre d’une répression brutale de l’État.

La police multiplie des centaines de captures pour tenter d’étouffer la contestation sociale. Les forces répressives capturent les manifestants et vont même dans les maisons pour kidnapper les jeunes : ou pour les juger sous les montages judiciaires répétés qu’emploie l’État colombien pour réprimer la contestation (il y a déjà plusieurs cas de montages judiciaires), ou pour les faire disparaître …

Il est très important que les personnes arrêtées tentent de crier leurs noms et prénoms et que le voisinage puisse filmer le fait, afin d’éviter que les kidnappés par la police ne soient victimes du crime d’État de la disparition forcée.

Déjà plus de 600 personnes disparues par la police en trois semaines de grève nationale. Parmi certaines de ces personnes enlevées et disparues par la police, les corps sans vie ont refait surface. Les corps de deux étudiants kidnappés par la police le 28 avril sont apparus le 5 mai flottant sur la rivière Cauca, il y a trois jours le corps sans vie d’un leader paysan et le corps avec des signes de torture de l’enseignante et syndicaliste Beatriz Moreno Mosquera.

D’autres corps de personnes torturées flottant dans les fleuves ont également refait surface, comme on peut le voir dans les vidéos et les photos, que la population enregistre horrifiée.

La disparition forcée est une pratique du Terrorisme d’État que les forces répressives de l’État colombien ont fortement employé contre la population, en particulier pendant cette grève: cette pratique injecte la terreur et dévaste les familles et les communautés.

Nous exigeons que l’État colombien renvoie les centaines de personnes disparues : ceux qui ont encore des vivants dans les commissariats, les bataillons militaires, entrepôts ou maisons clandestines de la police, les renvoie, et que la barbarie policière de la disparition forcée cesse.

Les personnes que la police a enterrées dans des fosses communes et jetées dans des rivières continueront à être recherchées et réclamées inlassablement par leur famille, leurs communautés, et par tout un pays qui ne permettra pas ′′ la disparition des disparus “. Ils nous les ont arrachés pour être des gens dignes qui se sont battus pour toutes et tous, nous ne laisserons pas leurs noms oublier, encore moins que leur combat s’éteigne. Le Terrorisme d’État ne parviendra pas à taire la lutte sociale d’un peuple marre d’exploitation, de précarité et de pillage capitaliste. La Colombie pleure, la Colombie souffre, mais elle ne lâche pas.__#SOScolombia#TerrorismoDeEstadoEnColombia#ColombiaLloraPeroNoSeRinde#ElParoSigue#CapitalismoEsBarbarie#Lucha____AIDE À SUIVRE pour contribuer à ouvrir une brèche dans la clôture désinformative qui couvre le génocide.

 

Le PCF progresse en France !

Les résultats des législatives partielles montrent une chose : un vent favorable pousse les scores des communistes ! Deux progressions significatives : – dans le Pas-de-Calais : le PCF double son score par rapport à la législative de 2017. il passe de 2 à 5,8- à Paris : le candidat PCF fait plus du double du score de l’élection législative en 2017 et dépasse les 10%. De belles perspectives pour l’année qui vient ! D’autant plus qu’il s’agit de circonscriptions où il est traditionnellement faible et où le vote à gauche pouvait jouer à ses dépends… Cela confirme dans les possibilités d’une reconquête de la gauche sur la droite et l’extrême-droite et le faible impact de ceux qui depuis quinze jours se relaient dans les réseaux sociaux pour faire porter tous les coups sur le PCF…

On me répondra qu’il y a eu un taux d’abstention important… et bien cela démontre deux choses:

  1. que certains ne craignaient pas à proclamer la victoire des verts ou du printemps marseillais quand le taux d’abstention aux municipales est au moins égal mais pas quand cela se traduit par un score important pour le PCF
  2. Que le PCF est en train de réussir son pari c’est-à-dire faire voter les abstentionnistes… et cela profite à la gauche…

Enfin je voudrais ajouter une anecdote et notre lecteur s’y reconnaîtra même si j’ai masqué un peu les références pour des raisons que l’on comprendra :

Ce matin, j’ai eu une discussion avec un gradé dans la police, prolo d’origine, se disant anarchiste, et qui suit mon blog, il le trouve intéressant sur le plan historique, très informé mais trop “idéologisé”… il a écouté par hasard Roussel chez Bourdin et il m’a dit que lui fils d’ouvrier c’était la première fois où il entendait enfin quelqu’un de gauche défendre la sécurité, celle de l’emploi et celle de la vie pour les petits…

Il m’a dit “tenez bon, il y a des tas de gens qui ne veulent pas de racisme, de Marine Le Pen mais qui ne s’y reconnaissent plus quand on nie les réalités, les gens veulent des choses simples un emploi et la sécurité c’est pas sorcier… Quand je l’ai entendu chez Bourdin, j’étais stupéfait enfin un langage de la gauche , la vraie, celle des petits contre les gros… qui ne nie pas la réalité. Après, j’ai vu que sur le nucléaire il disait aussi des choses sensées… j’espère qu’il va tenir bon et qu’on va enfin pouvoir poser les problèmes à ce niveau là… Mais pourquoi vous ne parliez plus comme ça, tranquillement, simplement ?

J’ai tenté de lui expliquer la situation y compris à Marseille, et je lui ai dit: vous savez en tant que communistes, nous nous disons tant pis nous ferons 2% mais enfin nous aurons dit ce que nous avons à dire… et il m’a dit si vous avez le courage de représenter la vraie gauche, celle qui a disparu, vous ferez plus que ça…

je vous promets que l’anecdote est totalement vraie…

 

jeudi 27 mai 2021

Israël-Palestine. Rachida Brakni et Éric Cantona : une question politique, non religieuse

Publié le par Front de Gauche Pierre Bénite

Israël-Palestine. Rachida Brakni et Éric Cantona : une question politique, non religieuse

DES VOIX POUR LA PAIX. Des personnalités s’élèvent contre la colonisation et affirment leur solidarité avec le peuple palestinien. L’Humanité les accueille dans ses colonnes. Voici la contribution de Rachida Brakni et Éric Cantona, acteurs.

« Le monde avait détourné le regard. Et voilà que les événements de ces derniers jours, cette escalade guerrière, ces ratonnades, ces bombardements, ces morts nous rappellent que là-bas un peuple est condamné à l’exil permanent, dans l’indifférence.

Le monde avait détourné le regard. Silence sur une occupation qui grignote chaque jour la terre des Palestiniens, mettant en lumière l’impuissance des Nations unies. Combien de résolutions ? Pour quels résultats ?

Ce qui se passe là-bas nous concerne, ici. Ce qui se passe là-bas, cet engrenage, cette instrumentalisation par des extrémistes à des fins politiciennes, sont insupportables.

On voudrait nous faire croire que ce conflit serait religieux. Mais ce n’est pas une histoire de religion. Ce n’est pas une guerre de religions. C’est une question politique, un système qui ne fait qu’exacerber les rancœurs et les haines, qui fait le lit de tous les extrémismes, de tous les fondamentalistes. Les uns veulent faire disparaître la Palestine. Les autres Israël. Ce qui se joue aujourd’hui, c’est la cohabitation de deux peuples, de deux États. Plus que jamais, imaginer deux États est une nécessité. Être contre un État palestinien, c’est être contre Israël. Laisser Netanyahou et ses alliés d’extrême droite jouer encore avec le feu, c’est renforcer le Hamas, c’est mettre en péril la survie d’Israël.

Dans ses poèmes, Mahmoud Darwich nous demandait d’être des ambassadeurs de la Palestine. “ Être ambassadeur de la Palestine, c’est être ambassadeur de la paix”, écrivait-il. Tant que la Palestine n’existera pas, Israël sera menacé. »

Retrouvez dans l'Humanité tous les témoignages de solidarité

 

Jean-Claude Delaunay et la “sécurité”

Quand je dis que cette campagne de Fabien Roussel remue et que chacun a envie d’intervenir ce qui est déjà une manière de se l’approprier je suis au-dessous de la réalité… Et j’espère que pour être complet ce débat passionné et passionnant s’accompagne de travail sur le terrain parce que comme chacun devrait le savoir le critère de la pratique tranche. (note de danielleBleitrach pour histoire et societe)

Je suis bien d’accord, il n’y a pas que la sécurité des personnes, il y a l’emploi, les services publics, l’école, l’hôpital, et ainsi de suite.

Mais tout se tient, et le problème de la sécurité me tient à cœur, tant pour des raisons personnelles, que pour des raisons théoriques, que je voudrais expliquer ici. Tout se tient et il est bon de comprendre comment et pourquoi.

  1. Un souvenir me vient en tête pour commencer. C’était un dimanche matin de l’été, à Villejuif, il y a quelques années. J’étais sorti tôt et je rencontre mon camarade Jean-Claude, égoutier, un camarade que j’aimais bien, vraiment, plutôt râblé, bien planté sur ses jambes, et surtout plein de bon sens. Il était blanc comme un linge. Je lui demande : qu’est ce qui se passe? Il me répond. «Ce matin, je devais partir en vacances. Mais ma voiture a été saccagée pendant la nuit. Le pare-brise, les vitres, tout ça a volé en morceau. Je dois la mener au garage. Ce sont les loubards du quartier qui ont fait ça». En quelques instants d’un plaisir stupide, ces jeunes branleurs avaient bousillé les vacances de ce copain et de sa famille, mangé les quelques billets mis de côté, au fil de l’année, pour payer une glace aux enfants, aller ensemble aux restaurants sans avoir à faire la vaisselle, pour se détendre de l’année, pour lui passée dans les égouts de Paris.

Des souvenirs de ce type, j’en ai d’autres. Pas des milliers, mais quand même suffisamment, et parfois plus dramatiques. Je ne sais pas ce qu’il est advenu de Jean-Claude. Il a quitté Villejuif. Je n’en dirai pas plus, car il faut aller de l’avant, sauf à souligner que nous, communistes, avons été décérébrés pendant plusieurs décennies sur beaucoup de questions et notamment sur celle-ci. Avoir été décérébré, ce fut agir sans principe, machinalement, parfois en fonction des bons sentiments. Ce fut dire le contraire ou autre chose que ce que disait la famille Le Pen. Comme si les communistes français n’avaient pas à s’exprimer d’abord et avant tout en fonction de leurs propres analyses et de leur propre pratique!

Nous avons été décérébrés au plan de la théorie et plus particulièrement du marxisme, que nous avons laissé tomber. Nous avons été décérébrés en perdant le contact avec la classe ouvrière et les travailleurs en général. Cela a commencé bien avant Robert Hue. Cette époque, espérons-le, est révolue. Quelle leçon tirer de tout cela pour l’avenir?

  • Je voudrais éviter d’être une sorte de père Machu ridicule, jurant par scrogneugneu tout en caressant une moustache imaginaire. Je vais, cependant, avoir cette folle audace.

La sécurité des personnes fait partie de ces problèmes dont nous devons proclamer la solution de manière très carrée. Pour moi, la formulation correcte des choses est la suivante : NOUS, COMMUNISTES, SOMMES POUR LE RÉTABLISSEMENT DE LA SÉCURITÉ DANS CE PAYS DE MANIÈRE TOTALE ET IRRÉVERSIBLE. Je trouve que nous avons encore des réflexes de bon samaritain. C’est un peu comme si nous avions du remords à être en faveur de la sécurité des personnes. «Nous sommes en faveur de la sécurité, mais vous savez, on est pas des méchants». Évidemment que nous ne sommes pas des méchants, évidemment que nous ne sommes pas des imbéciles, croyant que la répression va tout régler. Mais, à mon avis, il faut savoir qu’il y aura, dans la solution de ce problème, au moins deux phases: 1) la phase de l’immédiat qui sera à dominante répressive, 2) la phase du moyen long terme qui sera à dominante éducative et préventive.

Mais alors pourquoi la phase de la répression doit-elle être soulignée avec force? Certainement pas pour faire de la surenchère avec l’extrême droite, dont je n’ai que faire pour penser l’avenir de mon pays, mais pour les deux raisons suivantes.

La première est que les individus et les groupes portant atteinte à la sécurité des personnes ne vont pas s’arrêter parce que l’on aura froncé les sourcils en leur direction. Laurent Brun l’explique très bien. La bête va se débattre et mordre.

La deuxième raison est que la voyoucratie est une alliée objective des classes dirigeantes. La France est malade et de sa maladie, dont la grande bourgeoisie porte l’entière responsabilité, les dirigeants de cette classe sociale, féroce et épuisée, tirent avantage. Cela les aide à prolonger leur pouvoir. S’ils observent que, dans le contexte d’une démocratie nouvelle, la voyoucratie est en danger, soyons certains qu’ils n’hésiteront pas une seconde à la soutenir sans doute avec doigté mais néanmoins de toutes leurs forces. Pour autant que j’aie compris l’histoire, le nazisme et ses variantes ne furent pas seulement l’extrême droite. Ce furent des systèmes à plusieurs composantes et parmi celles-ci figuraient les voyous, ce que Marx et Engels ont appelé «le lumpen proletariat».

Lutter contre les voyous, c’est aussi lutter contre les classes dirigeantes. Si l’on prétend rompre définitivement avec ces mêmes classes dirigeantes, ce que nous proclamons, nous, communistes français, alors il nous faut rompre tout aussi définitivement avec la voyoucratie.

  • Mais comment faire? Bien sûr, la police et la gendarmerie vont se trouver en première ligne pour accomplir cette tâche. Mais comment concevoir que celle-ci puisse être accomplie par des composantes d’un appareil d’État, qui fut structuré et formé par la bourgeoisie ? Je pense que, à travers ce questionnement, les communistes français sont directement confrontés au problème de l’État bourgeois et à la théorie qu’ils en ont. Faudrait-il «refaire une police» avant de commander à ce corps de l’État de «faire la police»?

Le problème est compliqué mais je crois, d’une part, que nous devons l’aborder de front, car il concerne toutes les fonctions de l’État, et d’autre part, que la solution que nous lui apporterons de manière explicite sera l’illustration pratique de ce que nous appelons la dictature du prolétariat. Car il nous faudra non seulement mettre en œuvre la dictature du prolétariat (l’application de la théorie), il nous faudra également et peut-être surtout construire cette dictature dans la dialectique de la lutte et de la démocratie.

Nous n’allons pas reconstruire a priori, ou ex-ante, un appareil d’État devant nous permettre de mettre fin à la dictature de la grande bourgeoisie. Nous devrions plutôt, avec le soutien des masses populaires et, bien sûr, avec nos propres analyses, prendre place dans le mouvement réel. C’est ce qu’a fait Fabien Roussel, me semble-t-il, en participant à la manifestations des policiers. Reproche ne lui en sera certainement pas fait par les gens du peuple.

Nous devrions ensuite, avec les policiers, construire la police susceptible de répondre aux besoins de sécurité ainsi qu’à tous les besoins que la police a pour fonction de satisfaire. Les dirigeants factieux de tous les corps de l’État concernés devront certainement être neutralisés et chassés de la position qu’ils occupent. Mais dans l’expérimentation, par la majorité des personnels de l’Etat, de la malfaisance de leurs chefs actuels, de la malfaisance des doctrines qu’ils diffusent ainsi que des intérêts qu’ils défendent vraiment sans forcément le savoir.

Il va de soi qu’une telle démarche supposera, si elle est partagée, des conceptions et des analyses autres que celles de Titine Taintain, ou des supporters irréfléchis du marxisme-léninisme. Elle supposera une grande capacité politique et le soutien populaire.

Cela dit, elle ne reposera pas sur le sable de notre imagination. 1) Les CRS, pour ne parler que d’eux, sont aussi des enfants du peuple. Ce sont aussi des fils de paysans, d’ouvriers, de commerçants, de fonctionnaires. Cela ne s’est pas effacé d’un coup de leur mémoire. 2) Ensuite, la police n’est que l’un des corps professionnels concernés. L’expérimentation démocratique de la construction de la dictature du prolétariat sera une expérimentation générale. Entre ces expériences se produiront des effets de réciprocité et l’on peut espérer que ces effets seront positifs et convergents. 3) Il faut également penser que l’expérience de la démocratie nouvelle devra concerner d’autres professions que celles des corps d’État traditionnels. Je pense notamment aux informaticiens dont j’ai fait mention dans l’article publié sur ce site à propos du système chinois de crédit social. Nous disposons aujourd’hui de technologies matérielles et scientifiques dont nous pourrons faire usage dans cette lutte. 4) Enfin, dans ce domaine comme dans tous les autres, il est sain de tirer régulièrement les bilans nécessaires. La théorie est indispensable, mais la pratique collectivement raisonnée n’est pas mal non plus.

  • Je souhaite indiquer un dernier point relevant de l’analyse théorique. Les problèmes de sécurité que rencontrent aujourd’hui les Français ou les résidents français me suggèrent personnellement qu’existent 3 niveaux dans l’analyse des problèmes que les communistes se donnent l’ambition de contribuer à résoudre, et non pas 2, comme je je le croyais précédemment.

La Nation, qui est le niveau de la décision, en occupe la place centrale. Elle est le point d’aboutissement de son intérieur et le lieu de la jonction avec l’extérieur, c’est à dire les autres Etats et les autres Nations.

La Société est l’assise de la Nation. C’est la cohérence de la Société qui constitue la force de la Nation. Éliminer immédiatement et définitivement la grande bourgeoisie de la direction et de la décision des affaires de la France est une priorité, d’une part pour la bonne marche de la Nation mais d’autre part aussi pour la bonne marche de la Société.

C’est alors que, d’un même mouvement, nous pouvons mieux comprendre les phénomènes suivants. La cohérence de la Société recouvre non seulement sa cohérence sécuritaire, mais également sa cohérence économique, Je ne dis rien de sa cohérence idéologique car cet aspect mériterait d’autres développements. Je signale au passage, pour celles et ceux que cela intéresserait, que j’ai traité de ces questions dans mon récent ouvrage sur le socialisme. J’y renvoie car je me suis «mouillé» à ce propos.

Quoiqu’il en soit, énoncer que nous recherchons la Cohérence de la Société en tant que résultante de toutes les cohérences jugées nécessaires à un moment donné du temps, et comme fondement de la force de la Nation, ne signifie pas que soit niée l’existence de contradictions au sein de la Société. Cela signifie que, lorsque la grande bourgeoisie aura été mise à la porte de tous les pouvoirs, la démocratie, à la fois procédurale et substantive, pourra donner à chacun sa place, sans phénomènes d’exploitation et de domination.

La Société est, pour moi, le niveau de ce que nous appelons le Peuple. Mais en abordant l’analyse de la Société par le biais de sa Cohérence, et donc de toutes les cohérences qui constituent cette dernière, nous agissons en sorte que le Peuple corresponde à une approche concrète, précise. Nous désidéologisons ce concept et la réalité qu’il recouvre.

On comprendra alors que la Nation que nous défendons diffère profondément de la perception qu’en ont la grande bourgeoisie et l’extrême droite. Nous, communistes, nous sommes des internationalistes. Nous ne sommes pas des nationalistes. Nous sommes à la fois des patriotes et des internationalistes parce nous aspirons seulement à la défense des intérêts de notre peuple et de sa souveraineté. Nous sommes pour le respect de toutes les nations et non pour la suprématie de notre Nation ou de quelque Nation que ce soit sur les autres.