Les partisans de l’intégration européenne se lamentent des bisbilles entre Etats membres de l’UE
Les conséquences
économiques dramatiques de l’épidémie ont réactivé les antagonismes
entre Etats membres. La fable officielle des « pays égoïstes » du Nord
est désormais relayée par les eurodéputés « insoumis ».
La crise épidémique qui secoue l’Europe a
provoqué un psychodrame collectif dont les dirigeants de l’UE ont le
secret. Devant l’ampleur du séisme économique qui menace, la Commission a
certes levé – provisoirement – certains de ses tabous les plus sacrés,
en matière de contraintes budgétaires comme de règles de concurrence.
Mais une succession de réunions des
chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-sept, des ministres des
finances, ainsi que de l’eurogroupe a déclenché le retour de polémiques
déjà anciennes. Schématiquement, il y aurait d’un côté les pays les plus
touchés par la pandémie, qui se trouvent être aussi ceux régulièrement
accusés de ne pas savoir suffisamment « maîtriser » leurs finances
publiques ; et de l’autre, les Etats qui restent attachés à des règles
budgétaires rigoureuses, bien décidés à ne pas prendre le risque de
s’endetter excessivement au profit des premiers.
La bataille s’est en particulier
cristallisée autour de la possible émission de dette commune (et donc
solidairement remboursable), ce que le chef du gouvernement italien a
nommé les « coronabonds ». Rome est activement soutenue par Madrid et
Paris. En face, le groupe des pays accusés de s’opposer à cette
perspective est emmené par les Pays-Bas, et rassemble, avec des nuances
diverses, l’Allemagne, l’Autriche, la Finlande et (hors zone euro) la
Suède. On notera au passage que la « générosité » européenne sur
laquelle s’écharpent les Vingt-sept consiste à autoriser les pays les
plus touchés à… emprunter (à taux favorable) sur les marchés.
La propagande macroniste n’hésite pas à dénoncer le club des « pingres » ou des « avares »
La propagande macroniste (notamment)
n’hésite pas à nommer les seconds le club des « pingres » ou des
« avares ». D’autant que ce sont les mêmes pays qui plaident depuis deux
ans pour un budget communautaire pluri-annuel (2021-2027) le plus
modeste possible.
Le ministre français de l’Economie,
Bruno Le Maire, a été, ces dernières semaines, en pointe dans la
dénonciation de ces « égoïstes » qui fouleraient au pied les valeurs de
l’UE et mettraient ainsi cette dernière en danger de mort (l’actuel
locataire de Bercy n’en est pas à un retournement de veste près, lui qui
se voulait jadis le plus déterminé pourfendeur de la dette publique…).
Il n’est pas interdit, sinon de
s’étonner, du moins de s’affliger, de la position adoptée par les
eurodéputés de la France insoumise. Dans un communiqué, ceux-ci se sont
alignés mot pour mot sur le « narrative » – en bon français de
communiquant, les « éléments de langage » – de la pensée dominante en la
matière, celle-là même qui court de Paris à Bruxelles.
L’accord trouvé entre ministres des
finances lors de la réunion du 10 avril est un compromis qui comporte à
ce stade des concessions provisoires de part et d’autre, et pourrait
donner lieu à un nouveau bras de fer lors du Conseil européen prévu le
23 avril (Ruptures consacrera un dossier sur les éléments factuels dans son édition de fin avril).
Mais, plus qu’une appréciation sur le contenu de l’accord trouvé, ce
sont les termes employés par les mélenchonistes de l’europarlement qui
laissent pantois : il y est question d’un « triomphe pour le club des égoïstes, emmené par l’Allemagne et les Pays-Bas ». Certes, les eurodéputés étiquetés (par antiphrase) « gauche radicale » fustigent la « défaite politique pour la France qui s’était dit favorable à l’émission d’obligations communes », mais Paris est accusé d’avoir « capitulé ».
Comme si les relations entre Etats devaient relever de (bons) sentiments – là où il ne peut s’agir que d’intérêts, de confrontation ou de coopération
Surtout, l’emploi du mot « égoïste »,
tout droit copié/collé de la doxa de Bercy, doit retenir l’attention.
Comme si les relations entre Etats devaient relever de (bons) sentiments
– là où en réalité il ne peut s’agir que d’intérêts, de confrontation
ou de coopération.
Chaque pays connaît une réalité
différente, pas seulement sur le plan sanitaire, mais aussi économique,
social, démographique, culturel. Or c’est précisément dans ce cadre
qu’agit l’intégration européenne : son principe est de vouloir aligner
artificiellement ces situations.
Un des mécanismes les plus pervers de
cette intégration est connu dans le jargon bruxellois sous le nom de
« pression des pairs ». Pour prendre l’exemple du premier ministre
libéral néerlandais, décrit à Paris comme le chef des « sans-cœur », Mark Rutte est d’un côté tenu par ses engagements pris devant son Parlement national,
engagements qui, en l’espèce, reflètent l’état d’esprit d’un peuple
devenu de plus en plus rétif à l’Union européenne – celui-là même qui
refusa le projet de traité constitutionnel en 2005 quelques jours après
les Français, et avec un pourcentage encore supérieur.
Qu’est-ce qui doit prévaloir : la souveraineté de son peuple ou « l’intérêt supérieur européen » ?
De l’autre, le chef du gouvernement
batave se voit soumis aux sollicitations insistantes de nombre de ses
collègues (même l’ancien président de la Commission européenne,
Jean-Claude Juncker, s’y est mis), sur le thème : « Mark, tu ne peux pas
bloquer et mettre ainsi en danger la belle solidarité européenne » (une
« solidarité européenne » qui s’est traduite, trois décennies durant,
par des coupes de plus en plus drastiques dans les services publics,
notamment de santé). De fait, La Haye a, pour l’heure, fait une forte
concession en acceptant le recours au mécanisme européen de stabilité
comme le souhaitait Paris.
Le point ici n’est pas de juger la
politique de M. Rutte, mais de savoir ce qui doit prévaloir : la
souveraineté de son peuple, ou « l’intérêt supérieur européen ». Pour
les europhiles, la réponse va de soi. Qui n’ont jamais
aussi mal porté leur nom.
Note de Pedrito. Insoumis je me revendique, sans aucun rapport avec Mélenchon, le disciple de Mitterrand, qui a vite tourné le dos à ses promesses de politique de gauche. Quand aux qualificatifs affligeants de pingres, avares, égoïstes, attribués par les membres de l'équipe gouvernementale du banquier Jupiter, enfant gâté de la bourgeoisie promu grâce aux banques président des riches aussi incompétent qu'arrogant, ne surtout jamais oublier que la plupart de ses ministres sont millionnaires - en euros, bien sûr,- ils affichent des fortunes insolentes, ils sont pour cela bien mal inspirés, et ils ne manquent ni d'audace ni de scrupules de venir chaque soir sur les plateaux télé encadrés par les chiens de garde de la presse des milliardaires, donner des leçons de morale ou de civisme aux citoyens qui bossent dur, très dur, et ne vivent ou ne survivent QUE DU FRUIT DE LEUR TRAVAIL.
Ce qui n'est justement pas le cas de ces aboyeurs et des valets au seul service du capitalisme.
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