vendredi 17 juin 2022

EN VOILA UNE QU'ELLE EST BIEN BONNE !!!!!


Des journalistes pour former les citoyens ?...Elle est bien bonne celle-là !

Dans le journal Le Monde du 15 juin, Nathalie Sonnac qui préside le Comité Théodule d’éthique pour les données d’éducation nous apprend qu’elle vient d’inventer le fil à couper le beurre. « L’Etat, dit-elle, doit s’appuyer sur l’audiovisuel public pour former les élèves à devenir des citoyens ». Comme c’est étrange, pourquoi seulement les élèves ?

Elle a été membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel [CSA, aujourd’hui ARCOM : Autorité de régulation de la communication audiovisuelle] de 2015 à 2021 et qu’y fit-elle ? Certes, elle a raison de dire que l’école ne peut pas tout, surtout lorsqu’on ne lui donne pas les moyens d’assurer ces fonctions premières d’apprentissage et de maîtrise de la lecture, du calcul et de la réflexion, de penser quoi. Mais elle à tort d’agiter des chiffres pour nous faire prendre des vessies pour des lanternes et poursuivre ainsi le numéro d’illusionnisme qui consiste à nous dire que « pendant la crise des gilets jaunes », 72% des Français faisaient confiance à France 3, 71% à France info et 68% à France 2 contre seulement 52% à BFM. Un calcul douteux en l’absence des questions posées, cet oubli récurrent qui accompagne la plupart des sondages. Tout d’abord, le citoyen que je suis, plus ou bien formé, n’a pas la même approche du Mouvement des Gilets Jaunes que Nathalie Sonnac puisqu’il refuse de parler de « la crise des gilets jaunes » comme elle. Il a d’autres mots pour désigner cette protestation, cette révolte, ce soulèvement digne des ronds-points, un mouvement tout à fait joli, puissant qui m’a rassuré sur la capacité d’un peuple à réclamer son dû : une autre répartition des richesses. Un mouvement qui a sans doute fait piquer quelques crises aux locataires de l’Elysée et aux membres du Gouvernement dont l’extrême violence des réponses a donné la mesure de la grande peur qu’ils en ont eu.

Je ne suis pas sûr qu’à ce moment là le souci de former des citoyens ait été la préoccupation majeure des gensdetélé du service public qui, quel que soit le moment ou le sujet, parlent avec la même moraline, en invitant toujours les mêmes spécialistes qui disent souvent le contraire de ce qu’ils ont avancé la veille. C’est la valse des mille et un mêmes qui donne à l’écran de ma télé le ton blafard d’une décrépitude. Alors, à quoi peut bien servir le Conseil supérieur de l’audiovisuel s’il ne se rend pas compte de cette itération morbide des même visages, des mêmes voix, des mêmes arrogances, des mêmes fantômes comme Daniel Cohn-Bendit que l’on mêle à toutes les sauces et qui se régale de parler pour ne rien dire, sinon pour occuper le temps et l’espace que d’autres n’auront pas. L’apprenti citoyen, quel que soit son âge, mérite mieux. Il mérite mieux que de voir le Ministre de l’Intérieur Gérard Damanin se répandre dans le cadre de l’émission de Laurent Ruquier On est en direct le samedi 11 mai, la veille du premier tour des élections législatives, alors qu’il est candidat et que la campagne de ce premier tour est close depuis le vendredi soir. Je crois entendre de courageux hypocrites me souffler que la question de la députation n’était pas le sujet. Sans doute, mais le candidat était bien là à se faire mousser par un animateur qui n’en est pas à son premier coup de Jarnac, dans son sens pernicieux. Il y a une tendance fâcheuse à voir les politiques synchrones avec les journalistes et de moins en moins avec le réel. Aussi, lorsque Nathalie Sonnac parle des 4500 journalistes professionnels du service public pour former les élèves et les enseignants je voudrais bien savoir desquels elle parle précisément et de quelle compétence.

Qu’ils fassent d’abord la preuve de leurs qualités de citoyen en faisant leur boulot d’informer selon les principes de la démocratie qui est en réalité un régime où s’exerce le pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple, selon la formule d’Abraham Lincoln reprise mot pour mot par l’article 2 de notre Constitution. Oui, qu’ils la fassent vivre la démocratie par le truchement de vrais débats contradictoires avec le temps nécessaire à leurs résolutions et non pas dans le cadre de numéros de cirque où les journalistes se donnent alternativement les rôles du dompteur et du clown blanc. La démocratie, c’est l’espace et le temps d’écouter les différences, c’est le temps et l’espace de vivre les conflits d’idées. La vérité est sans doute hors d’atteinte et seule un croisement de sincérités peut nous en approcher. Nous devons nous écouter et finir par comprendre que, si les convictions sont souvent de bons moteurs, il ne faut pas pour autant confondre convictions avec connaissances. Les médias ont les puissances nécessaires pour faire ce travail et par conséquent pour nous aider à devenir des citoyens.

Mais nous sommes encore loin de cela puisque aujourd’hui nous devons nous contenter le plus souvent de communiqués de guerre pour avoir une approche éclairée de la situation en Ukraine. Et puis, même si l’ORTF n’est plus, cela n’empêche guère le Président d’apparaître sans cesse sur les écrans du service public avec sa prose de miel souvent arrogante. Là il vient de nous servir le coup du tarmac et j’ai eu la faiblesse de penser à la théâtrale sortie de VGE, sans doute sous le coup de la chaleur ou bien d’un verre de trop. Malheureusement, l’avion qui, derrière lui, dessinait un départ imminent ne partait que pour mieux revenir. Pathétique image d’un homme qui, loin de parler au peuple qu’il devrait écouter et non pas soumettre, s’adressait à son armée en déroute où se comptent pourtant de plus en plus de transferts issus de partis sur le déclin, comme des rats qui abandonnent des navires qui s’échouent.

En très peu de temps, digne héritier des nettoyeurs qui l’ont précédé, il a réduit la France à la dimension d’une région d’Europe qu’il gère en suivant les consignes des commissaires européens joints aux impératifs du marché de la mondialisation. C’est un tout petit homme qui pense incarner le bien contre les autres, vous savez bien ces habitants du mal, loin de toute exigence citoyenne, sans comportement citoyen. Mais c’est quoi un citoyen ? Ne faudrait-il pas se poser la question avant même de former les élèves à devenir des citoyens ? Pour moi, le citoyen n’a rien à voir avec ces élèves qui sortent des écoles de commerce où ils ont appris a faire des économies sur tout, les salaires en premier, pour mieux nourrir les rentes. Des élèves qui parfois deviennent des journalistes.

Pour moi, il me semble que le citoyen, qui jouit des droits civils et politiques garantis par une Cité ou un État a aussi des devoirs qui lui demandent de concourir au bien-être commun par le truchement d’une entraide fraternelle entre les uns et les autres dans l’observation des règles qui font la société, sans pour autant s’empêcher d’en proposer de nouvelles limites. Le bien-être commun compris aussi comme la liberté d’expression, la liberté d’opinion. Plus simplement, je dirais que le citoyen de France que je suis ne veut pas, en tout cas pas en l’état actuel des choses, être un des sujets des commissaires de Bruxelles qui cherchent à me soumettre sans aucune légitimité démocratique. Le destin du citoyen est de partager et non pas de subir, sinon il a le droit à la désobéissance, je dirais même que c’est un devoir.
Et pour revenir à l’ORTF comment ne pas parler de Jacquou Le Croquant1 de Stellio Lorenzi que la France entière regardait sur la première chaîne en 1970 et commentait en famille, au travail ou ailleurs : une belle formation du citoyen à la relecture de son passé ; un vrai ciment social.

Guy Chapouillié
Fondateur et ancien directeur de l’ESAV (École supérieure d’audiovisuel) de Toulouse.

 Brièvement, quelques note de Pedrito.

L'audiovisuel public pour former les citoyens? Une sinistre plaisanterie, une mascarade de politiciens "libéraux" à côté de leurs pompes. Comme si ce rôle ne devrait pas relever de l'enseignement de l'école républicaine, d'abord, en complément de celui des parents.

Parce que les maudits chiens de garde qui applaudissent et glorifient la politique des fondés de pouvoir des milliardaires qui nous méprisent et nous écrasent seraient désignés par d'obscurs politologues et autres "spécialistes"  pour nous donner des leçons de civisme?  

La presse aux ordres du pouvoir capitaliste n'est surtout pas qualifiée pour nous donner des directives trompeuses, ni à nous, citoyens cocufiés par des décennies de promesses non tenues et de trahisons de droite et surtout de gauche, les plus graves, érigées en système, ni à nos descendants, nos enfants et nos jeunes gavés d'informatique et de tablettes, - et de drogues - tout ce qui concourt à faire d'eux des robots, des zombies, incapables d'observer de temps en temps un peu de ce qui les entoure et prépare malgré eux leur avenir de numéros manipulés. 

Il n'est qu'à prêter l'oreille aux "news" des chaines dites d'infos dictées par les USA et jeter un œil sur la presse régionale aux mêmes ordres pour y relever chaque jour les tombereaux d'âneries et d'insanités dictées par l"actualité" aux ordres pour mesurer l'abêtissement auquel nous sommes soumis.

La religion est l'opium du peuple, prétendait Lénine.

Aujourd'hui, l'opium est partout, même et surtout dans le matraquage incessant de "l'info" qui devait nous ouvrir vers le monde, l'audiovisuel s'avérant après usage le pire des endoctrinements, avec, au bout du compte, l'assoupissement cérébral.  

La dépendance.

Que l'école laïque républicaine retrouve son rôle fondamental: la laïcité, sans aucune autre concession.

 Et pour corroborer mon modeste commentaire, ce nouvel article que je découvre sur le Grand Soir

Le jour où le journalisme est mort

Malgré les appels de virtuellement toutes les organisations de défense des droits de l’homme, de défense de la liberté de la presse et de la liberté d’expression, d’organisations et de syndicats de journalistes, Priti Patel vient de signer l’extradition de Julian Assange. La défense a 14 jours pour faire appel. L’appel peut être refusé.

Il s’agit d’une grande victoire pour la presse institutionnelle qui a tout fait pour réduire "la plus importante affaire de presse de notre existence" (dixit John Pilger) en un vulgaire faits divers. Une presse qui a relayé pendant plus de dix ans tous les mensonges, calomnies et légendes urbaines qui ont servi d’écran de fumée pour occulter les vrais tenants et aboutissants. Le résultat fut celui qui avait été prévu et planifié dès 2010 : faire disparaître le cas Assange de la conscience collective et procéder à l’élimination - médiatique si possible, physique si nécessaire - du journaliste le plus innovant, primé, efficace et dangereux (pour les pouvoirs corrompus) du 21ème siècle.

Une presse si prompte à faire du "fact-checking" lorsqu’il s’agit de sauver un récit officiel mais si absente lorsqu’il s’agit de sauver le représentant le plus conséquent de notre droit de savoir. Des accusations de viol (qui n’ont jamais existé) jusqu’aux pseudos "mises en danger" de vies, en passant par la qualité de ses chaussettes, rien ne lui aura été épargné. Avec une mention spéciale pour tous ceux qui ont collaboré et profité et gagné de petites fortunes sur le dos de Wikileaks, et qui n’ont pas trouvé une once de courage - ou de volonté ? - pour exprimer leur solidarité avec lui.

Et comme à chaque fois que le nom de Julian Assange apparaît dans les fils de l’actualité, on assistera à un défilé de trolls en mission, dont certains sont munis d’une carte de presse, qui nous asséneront leurs conneries habituelles. Je serais tenté de dire que l’Histoire leur sera ingrate, mais encore faut-il que l’Histoire ne soit pas réécrite au passage, comme ils l’ont déjà fait et comme ils sont encore en train de le faire.

Bien-sûr, ils diront qu’en ce qui concerne Assange et Wikileaks, il ne s’agissait pas vraiment de journalisme et que la presse institutionnelle sera toujours là pour nous informer correctement. Mais que voulez-vous que la presse des milliardaires dise d’autre ?

Le journalisme est mort non pas au fond d’un cachot, non pas d’une balle dans la tête, non pas dans l’explosion d’une voiture, ni même découpé dans une ambassade saoudienne. Il est mort le jour où il a choisi la complicité en laissant filer en silence et vers l’oubli le meilleur d’entre eux.

Viktor Dedaj


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