jeudi 1 février 2024

 

Publié par El Diablo

 

Le nombre de médecins généralistes ne cesse de diminuer et leur répartition sur le territoire est de plus en plus inégalitaire. Une autre évolution aggrave l’accès aux soins, il s’agit de la modification de l’exercice des médecins qui effectuent de moins en moins de visites à domicile. L’argument avancé par la profession pour expliquer ce phénomène est qu’elles prennent beaucoup de temps et sont mal rémunérées. Si ceci est entendable au niveau individuel, il s’agit d’un non-sens en termes de santé publique. En effet, le vieillissement de la population a une conséquence incontournable qui est une diminution de la mobilité au fil du temps, en particulier pour les plus fragiles et les plus malades. A cela s’ajoutent par exemple les femmes isolées ne possédant pas de véhicule, pour lesquelles se déplacer au cabinet avec un enfant malade est parfois impossible. Or le constat actuel est qu’une partie de cette population d’une part n’a plus de médecin traitant et que, même dans le cas contraire, ce dernier ne se déplace plus. Pour les mieux entourés, une des solutions est de se faire accompagner pour se rendre à une consultation, mais de plus en plus de personnes sont isolées et ne peuvent bénéficier de ce soutien.

Les solutions proposées par une partie de la profession ne sont pas satisfaisantes et ne constituent qu’un pis-aller. Cela va de l’ordonnance récupérée par un proche sans examen du patient après un simple contact téléphonique, à la proposition de consultations en télémédecine ou à la demande de la prise en charge par l’assurance maladie du transport en ambulance des patients jusqu’au cabinet. Sans compter, les structures comme les maisons médicales de garde qui se transforment toutes au fil du temps en cabinets de consultations sans rendez-vous qui, par ailleurs, n'entraînent aucune diminution du nombre de passages aux urgences.

Le problème de fond est que le mode d’exercice des médecins avec la rémunération à l’acte ne permet plus de répondre aux besoins de la population. Les négociations actuelles de la convention médicale en sont une illustration caricaturale avec une focalisation sur le montant de la consultation, avec une évacuation complète de la question de l’accès aux soins qui se traduit par un abandon d’une partie de la population qui devrait être prioritaire au regard de ses besoins.

Il y a donc urgence à une modification de l’organisation du système et de son financement, prenant en compte les revendications catégorielles de la profession médicale mais pas au détriment des priorités en termes de santé publique. Il s’agit notamment du maintien à domicile en assurant un soutien adapté pour éviter les hospitalisations quand elles ne sont pas nécessaires ou encore retarder la prise en charge en institution du fait de l’évolution de la dépendance. Pour cela, les médecins ne peuvent pas s’exonérer de la visite à domicile des patients, ce qui présente aussi l’avantage de les examiner dans leur environnement, élément essentiel pour pouvoir mieux comprendre leurs problèmes et y apporter des réponses adaptées.

Docteur Christophe Prudhomme

Praticien hospitalier - SAMU 93

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