Répression syndicale
Après 10 ans de répression et de harcèlement contre un syndicaliste, La Poste enfin condamnée !
La justice a condamné La Poste pour des faits de discrimination syndicale et de harcèlement moral à l'encontre du secrétaire de la section syndicale SUD Poste 78 Vincent Fournier. Une victoire importante qui met en avant la répression répandue au sein de l’entreprise.
14 mars
La semaine dernière, la direction de la Poste a été condamnée à 40 000 € d’amende pour presque dix ans de discrimination syndicale et de harcèlement moral à l’encontre du secrétaire de SUD Poste 78, Vincent Fournier. La cour d’appel a aussi annulé autant d’années de sanctions à l’encontre du syndicaliste qui remonte à lorsqu’il était encore à la CGT FAPT.
Une victoire importante après une décennie de harcèlement et de répression anti-syndicale contre Vincent Fournier
Ce jugement, qui résonne comme une victoire importante pour tous les syndicalistes sous le feu de la répression, est le fruit de plusieurs années de luttes de la part de Vincent Fournier.
En effet depuis 2015, presque chaque année (voir nos articles de 2017 et 2019), le syndicaliste, qui doit faire vivre ses deux enfants avec à peine plus d’un SMIC, a dû subir à répétition des mises à pied allant jusqu’à plusieurs mois, avec des suspensions de salaire.
En plus de cela, la direction de La Poste l’a menacé continuellement de licenciements, en déposant plainte et mains courantes à de nombreuses reprises, tout en lui imposant des amendes et des convocations au commissariat. La direction lui reproche notamment ses prises de parole dans les centres postaux et sa présence lors des grèves. C’est-à-dire ni plus ni moins que son activité syndicale.
Pour empêcher à tout prix son contact avec les travailleurs des centres postaux, elle n’a pas hésité pas à appeler à plusieurs reprises la police, comme en mars 2020 à Croissy-sur-Seine, en utilisant les restrictions sanitaires comme prétexte alors que le délégué syndical venait justement expliquer aux salariés, contraints à travailler sans masque en pleine pandémie, comment exercer leur droit de retrait. Un évènement qui s’est reproduit à nouveau en novembre 2021 à Mantes-la-Jolie.
En février 2022, une autre vidéo montrant l’acharnement de la direction du centre postal de Versailles à son encontre avait eut un écho important. Les faits se sont produits seulement une semaine après la fin d’une énième mise à pied de 3 mois, à l’issue de laquelle il recevait sa neuvième convocation à un entretien préalable à licenciement.
Dans la vidéo, on voit des policiers armés intervenir jusque dans la salle de pause après avoir été appelée par la directrice du centre pour dégager Vincent Fournier, présenté comme un « extérieur » en dépit de son mandat syndical. On y entend aussi cette directrice et son responsable RH interdire à un travailleur du site de filmer juste avant qu’un policier ne menace de l’embarquer au commissariat et ne lui prenne son téléphone. Selon Vincent, en partant, les policiers avaient admis n’avoir rien à leur reprocher tout en les menaçant que, s’ils s’avisaient de revenir, « ils trouveraient bien quelque chose » pour les arrêter.
Interviewé par Révolution permanente en 2019, Vincent Fournier déclarait ainsi : « C’est devenu pour eux une véritable stratégie sur laquelle ils ne veulent pas lâcher. Leur rêve, ce serait évidemment d’être débarrassés de tous les militants combatifs qui ne jouent pas, de manière docile, le jeu de « partenaires sociaux », mais qui défendent jusqu’au bout les intérêts de leurs collègues travailleurs contre les patrons. ». En réponse à la répression subie par Vincent Fournier, plusieurs manifestations de soutien ont été organisées.
C’est ce dont témoigne Paul, postier militant syndical chez SUD PTT également : « Avec les collègues, on a été à plusieurs reprises à des rassemblements de soutien lors de ses convocations. En soutenant notre camarade, on soutient l’ensemble de la lutte car, quand la Poste s’en prend à Vincent, elle s’en prend à l’ensemble des postiers et à leurs conditions de travail ».
Des méthodes devenues la norme à La Poste pour entraver l’organisation et la mobilisation des travailleurs
Depuis longtemps à la Poste, les méthodes employées contre Vincent Fournier sont utilisées par la direction pour réprimer de nombreux postiers combatifs. En 2017 déjà, Vincent Fournier déclarait : « C’est moi qui passe aujourd’hui en conseil de discipline, mais c’est global, il y a plein de gens qui sont attaqués dans le département et je ne suis pas le seul à prendre des sanctions. Plusieurs collègues ont pris des avertissements, des blâmes pour des prises de parole ».
Dans le même genre l’automne dernier, La Poste a sanctionné un facteur perpignanais, secrétaire général de la CGT FAPT 66, à deux ans de mise à pied dont six « avec sursis » pour avoir fait grève lors des mouvements contre les réformes des retraites de Macron. La volonté de la direction est triple : sanctionner un syndicaliste actif, faire planer une menace sur lui par le sursis et dissuader tous les salariés de faire grève.
Dans un communiqué paru en juillet dernier, la fédération SUD PTT avait multiplié les exemples de « procédures disciplinaires systématiques à l’encontre de militant-e-s récalcitrants » allant de la mise à pied au licenciement. Si le communiqué évoquait bien sûr Vincent Fournier, il mentionnait de nombreux autres cas de répression ciblant des militants syndicaux SUD et CGT dans toute la France : Pyrénées-Orientales, Hauts-de-Seine, Loiret, Bouches-du-Rhône, etc.
A la fin du mois de juillet à Bordeaux, les prud’hommes condamnaient d’ailleurs La Poste pour six affaires de retenues de salaire abusives pour fait de grève. Et pas plus tard que le 23 février dernier, la cour d’appel de Bourges a rendu un verdict similaire en faveur d’un postier de la CGT Fapt de l’Indre pour les mêmes méthodes anti-grévistes.
Tandis que plusieurs grèves sont en cours à La Poste pour les salaires, contre les « réorganisations », les délocalisations, les suppressions d’emplois ou encore le manque d’effectif, il ne fait aucun doute que la Poste continuera à essayer d’intimider celles et ceux qui continueront de défendre les salariés. Cette nouvelle condamnation de La Poste est un pas de plus dans la lutte contre la répression mais, au-delà des amendes que peut lui donner la justice, la direction montre que ce qu’elle craint le plus, c’est la solidarité, l’organisation et la mobilisation des salariés.
Comme nous le disait Vincent Fournier en 2019 : « Plus la défense sera puissante au départ, plus une partie de cette souffrance peut être épargnée à celui qui la subit et plus on aura de chance de contraindre la direction de la Poste à renoncer à ces pratiques intolérables qui transgressent les droits syndicaux les plus élémentaires ».
Lire aussi : Répression syndicale, du jamais vu depuis l’après-guerre
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