mercredi 6 avril 2022

Comment j’ai vécu entre la Tunisie et la Libye, l’affaire du faux charnier de Timisoara et celle du vrai à Panama…

Les 8 et le 9 septembre 2013, j’écrivais ces textes sur l’ancien blog, je ne sais quelle folie m’a toujours poussée à dénoncer les leurres avec lesquels on manipule les sots qui croient savoir, les scénarios ne sont que des remakes mais comme le désert nous confrontent à l’infini… celui de la bêtise humaine… Mais qui est réellement bête? Ou du moins qui l’est assez pour prendre au sérieux ces scénarios de l’indignation des occidentaux qui en général cherchent à masquer sous les pseudos crimes de l’adversaire, la cible désignée, ses propres turpitudes… (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société)

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Comment voulez-vous croire à ce qu’on vous raconte quand vous avez vécu certaines situations. Par exemple il y a eu le faux charnier de Timisoara dont certains se souviennent mais pour moi cette énorme manipulation en couvrait une autre qui inaugurait des temps « nouveaux », l’opération Juste Cause au Panama. Cela se passait pendant les fêtes de la Noël et du jour de l’an, le 30 décembre 1989. J’étais partie traverser le désert entre la Tunisie et la Libye dans une jeep, nous étions six dans le véhicule, avec mon fils et deux autres touristes italiens, plus le chauffeur et un accompagnateur.

Il s’est rapidement avéré que les deux Italiens étaient communistes. Quand nous avons quitté l’Europe aux alentours du 20 décembre nous savions qu’il se préparait quelque chose du côté du Panama. Tout le long du séjour dans le désert, périple qui a duré huit jours, nous réclamions donc à nos accompagnateurs qui écoutaient une radio arabe des nouvelles du Panama et il nous répondaient : « on ne parle que de la Roumanie et de Ceaucescu, »… Mais nous découvrions l’or du désert et les nuits glacées dans les oasis misérables… Toujours nous demandions « Et le Panama? » Nous étions les seuls, la radio, notre seul lien avec le reste du monde ne parlait que d’un terrible charnier en Roumanie, on a en peu de jours atteint les 70.000 cadavres…

Pourquoi le Panama ?

Depuis pas mal de temps se multipliaient les articles contre Noriega, je me souviens la presse underground s’était déchaînée contre celui qu’elle appelait tête d’ananas et nous avions l’habitude à cette époque-là de savoir ce que signifiaient ces articles produits dans quelques officines de la CIA. Mais l’extraordinaire dans cette affaire fut non seulement l’invention d’un faux charnier mais le silence de tous les médias sur un vrai charnier qui avait lieu au même moment au Panama.

L’opération Juste cause

Sous le nom de code Operation Just Cause, on reconnaîtra bien là déjà ce mélange de servilité médiatique, de crapulerie et de meurtre légitimé par la bonne conscience des Etats-Unis, a eu lieu l’invasion du Panama par les États-Unis. En décembre 1989, sous l’administration du président des États-Unis George H. W. Bush. Au cours de cette invasion le dirigeant panaméen Manuel Noriega a été déposé et la Force de défense panaméenne (FDP) dissoute. Noriega était connu à la fois pour être un trafiquant de drogue et un agent de la CIA, et à ce titre en liaison directe avec Bush père dont on savait du moins à Cuba que sous son administration la CIA n’avait pas craint de distribuer la drogue dans les ghettos noirs. Mais quand Noriega voulut manifester une certaine indépendance autour du canal, il a été décidé qu’il « avait déclaré la guerre aux Etats-Unis.

Le coût de l’opération fut estimé à 163 millions de dollars américains de l’époque soit 213 millions de dollars valeur 2010. L’US Army, l’US Air Force, l’US Navy et les US Marines ont participé à l’opération « Just Cause ».

L’incursion militaire en Panama a commencé le 20 décembre 1989, à 01 h 00 heure locale. L’opération a impliqué 57 684 soldats américains, surarmés. L’opération a commencé par une attaque des installations stratégiques telles que l’aéroport civil de Punta Paitilla (opération « Nifty Package ») dans Panama, la garnison de la Force de Défense Panaméenne et le terrain d’aviation de Rio Hato, où Noriega possédait une résidence, et d’autres centres de commandement militaire dans tout le pays. L’attaque contre le quartier général de la FDP (dénommé la Comandancia) a déclenché plusieurs incendies, dont l’un a détruit une partie du quartier El Chorrillo au centre-ville de Panama (zone à forte densité de population). Selon des témoins oculaires, les maisons dans ce quartier ont été délibérément incendiées par les soldats américains dans le but d’arrêter les soldats de la FDP qui se cachaient dans la région.

On a estimé les pertes humaines autour de 3000 minimum.

Les opérations militaires ont continué pendant plusieurs semaines, essentiellement contre les unités militaires de l’armée du Panama. Noriega resta en liberté pendant plusieurs jours, mais il réalisa qu’il avait peu d’options à envisager face à une grande chasse à l’homme, avec un million de dollars de récompense pour sa capture. Il obtint refuge dans la mission diplomatique du Vatican dans la ville de Panama. Noriega se rendit finalement aux militaires américains le 3 janvier 1990. Il fut immédiatement mis dans un avion de transport militaire et extradé aux États-Unis.

Des unités militaires firent des patrouilles de « police » dans la ville de Panama et les zones à l’ouest du canal, pour rétablir la loi et l’ordre ainsi que pour assurer le soutien du nouveau gouvernement (dans le cadre de l’opération « Promote Liberty »).

Comment a-t-on pu déplacer une telle armada dans le silence total de la presse qui se déchaînait sur le faux charnier de Timisoara en expliquant que Dracula était communiste…

Le fait est que quand je suis revenue de mon périple dans le désert, j’ai téléphoné à ma mère. Cette brave maman m’a supplié de ne pas dire que j’étais communiste parce que j’allais être lynchée.

Le fait est que lors de mon premier cours de janvier, c’était dans le grand amphi, trois cent étudiants me fixaient dans un silence total, mon cours portait sur Marx.

Un élève s’est levé et m’a interrogée : « Comment pouvez-vous faire un cours sur Marx après un tel crime des communistes, m’a-t-il demandé! »

Je lui ai répondu je crois que Marx n’avait pas grand chose à voir avec « le vampire des Carpathes » puisqu’il avait été affirmé par TF1 entre autres que Ceaucescu atteint de leucémie avait besoin de changer son sang et ces gens étaient les victimes de cette médecine,… Et j’ai bravement commencé à expliquer la relation entre l’accumulation du capital et l’exclusion, soit le livre II du Capital.

Nous étions dans un temps de retournement de l’histoire et je l’avais déjà compris quand j’avais été envoyée assister à la rencontre Bush-Gorbatchev, la même année, au cours de laquelle ce dernier avait vendu la RDA… Et je me souviens de ce luthérien foudroyé qui m’avait regardée en me disant : « Nous sommes un peuple que l’on peut vendre ». Ce qui est sûr est que les Américains qui jusque-là avaient utilisé Ceaucescu contre l’URSS n’en avaient plus besoin. Par contre débutait une nouvelle période d’impunité avec des invasions qui allaient se succéder, peu de temps après c’était la Yougoslavie (1), puis l’Irak…

A PROPOS DU VAMPIRE DES CARPATHES : était-il communiste ?

Le faux charnier de Timisoara et le vampire des Carpathes : souvenez-vous…

08SEP

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L’affaire a lieu en décembre 1989, lors de la chute du régime Ceaușescu. Les médias occidentaux, et en particulier français, annoncent quelques centaines de morts, puis jusqu’à 70 000 morts quelques jours plus tard. On parle de « charniers ». Les témoignages, les chiffres et les explications les plus absurdes sont avancés sans aucun contrôle:
TF1: « Ceaucescu, atteint de leucémie, aurait eu besoin de changer son sang tous les mois. Des jeunes gens vidés de leur sang auraient été découverts dans la forêt des Carpates. Ceaucescu vampire ? Comment y croire ? La rumeur avait annoncé des charniers. On les a trouvés à Timisora. Et ce ne sont pas les derniers ».
Le magazine L’Événement du jeudi du 28 décembre 1989 titre même : « Dracula était communiste ».
Gérard Carreyrou lance un appel à la formation de brigades internationales prêtes à « Mourir à Bucarest ».
Le quotidien Libération avec Serge July titre « Boucherie ». On y lit: « Timisoara libéré découvre un charnier. Des milliers de corps nus tout juste exhumés, terreux et mutilés, prix insupportable de son insurrection. »
Le Monde félicite La Cinq d’avoir « révélé l’horrible charnier des victimes des manifestations du dimanche précédent »

Ces mêmes allégations et graves approximations sont également reprises par les médias étrangers:
Le renommé journal espagnol El País avance qu’« à Timisoara, l’armée a découvert des chambres de torture où, systématiquement, on défigurait à l’acide les visages des dissidents et des leaders ouvriers pour éviter que leurs cadavres ne soient identifiés. »
Le New York Times, tout en soulignant que ces chiffres n’ont pas été confirmées par des sources indépendantes, avance que 4.500 personnes auraient été massacrées en trois jours.

C’est le journal Le Figaro qui, dans son édition du 30 janvier, annonce qu’il s’agissait d’un faux, que les morts montrés à la télévision avaient été déterrés du cimetière de la ville.

Pendant ce temps-là, les mêmes jours, la même semaine, sous le nom de code Operation Just Cause, eut lieu l’invasion du Panama par les États-Unis, en décembre 1989, sous l’administration du président des États-Unis George H. W. Bush. Ceci dix ans après que le contrôle du canal de Panama fut rendu par les États-Unis au Panama. Au cours de cette invasion le dirigeant panaméen Manuel Noriega a été déposé et la Force de défense panaméenne (FDP) dissoute. Il y a eu une controverse sur le nombre de victimes parmi la population civile panaméenne résultant de l’invasion. Selon les chiffres officiels du Pentagone 516 Panaméens ont été tués durant l’invasion, une note interne de l’armée de terre des États-Unis estime le nombre à 1 000. Mais d’autres enquêtes menées au niveau international par des commissions indépendantes ont abouti au chiffre de 3000 plus 15.000 personnes déplacés parce que leur habitation a été détruite…
Et bien il n’y a eu dans les médias précités pas la moindre allusion à ces événements qui faisaient de vrais morts au Panama… Qui a vécu ce genre de situations en conserve une suspicion légitime sur les médias… et ne s’étonne pas du silence total fait sur les snipers du maïdan…

Je suis un peu lasse de tenter de vous convaincre… Et surtout je ne vois plus très bien l’intérêt que mon malheureux pays et ses sordides “élites” peuvent représenter au point de continuer ainsi à mobiliser le peu d’énergie qui me reste…

RAJOUT LE 5 AVRIL 2022 et le faux charnier d’Ukraine…

La Libye (2) et il m’arrive de retrouver des textes de l’époque et d’être frappée par leur lucidité et avant même ma rencontre avec Cuba. Je vous présente ces quelques textes mais tout ce que j’ai écrit est du même tonneau et m’a valu non seulement la censure mais la diffamation pendant que je m’obstinais à croire que quelque chose pouvait être sauvé… Ma rencontre avec Marianne et ses compétences linguistiques n’a fait qu’aggraver mon cas…

Chaque fois, avec une bravoure pleine d’espoir, je faisais face. Pouvais-je agir autrement ? cela tenait à mon ancrage communiste mais plus encore à une exigence intellectuelle minimale, celle qui animait un Diderot et que Marx désignait comme la clarté gauloise… Il y avait un tel fatras dans la preuve apportée et de telles contradictions dans les démonstrations qu’il m’était impossible d’y adhérer, le doute me saisissait.

On m’a tant de fois accusée de soutenir les despotes ! Je me suis tant de fois faite convaincre de stalinisme au point de finir par m’interroger sur ce qui était réellement reproché à Staline alors que les vrais staliniens, sont ceux qui suivent les idées reçues et sont sur la ligne d’arrivée pour y attendre le vainqueur…

Aujourd’hui les mêmes y ajoutent l’infamie suprême : mon âge… Sans le moindre argument, ils répètent ce qu’on leur met dans la tête et le disent sur le ton monocorde et répétitif des chaînes dites d’information… Jamais il ne leur viendrait le souvenir de la manière dont ils ont été dupés, ils ont semble-t-il oublié Timisoara, ce qu’on faisait au même moment au PANAMA, au nom d’une “juste cause”… Pourtant tout y était déjà, le vampire des Carpathes se baignait dans le sang comme Poutine dans celui des cerfs, tous les deux pour se sauver de la leucémie… Il y a un scénario qui se déroule comme un tapis pour faire passer une élection présidentielle qui ressemble à la nef des fous…

DANIELLE BLEITRACH

(1) c’est à partir de ce texte sur la Yougoslavie que j’ai été interdite dans la presse communiste, s’il se trouve un lecteur pour le lire je crois qu’il sera édifié par les conditions de la censure dans cette presse, surtout si vous ajoutez à ce texte le fait que je me suis rangée aux côtés de Cuba, quand Patrick le Hyaric et tous les bien pensants d’aujourd’hui faisaient la courte échelle à Robert Ménard et à l’opération Cuba si, CASTRO NON et déjà réclamaient les sanctions de l’UE contre Cuba asphyxié en 1995; voici donc le texte sur la Yougoslavie : La troisième guerre mondiale a-t-elle commencé au Kosovo, par Danielle Bleitrach* et Jacques Jedwab** | Histoire et société (histoireetsociete.com)

(2) à propos de Kadhafi entre autres ce texte qui résume ma position face aux interventions de l’OTAN sous des prétextes humanitaires…

https://histoireetsociete.com/2020/02/13/kadhafi-spinoza-les-derniers-barbares-par-danielle-bleitrach/


 

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