Attention à la marge ! par Jean LEVY
Les prix à la consommation augmentent si vite que Macron II est contraint d'en faire état. Et lui et ses économistes affirment que la puissance publique n'y peut rien, si ce n'est de distribuer des rustines pour colmater les brèches, à coup de petits chèques, tel le bourgeois repu donne une petite pièce au mendiant à la sortie de la messe.
Et les chiens de garde médiatiques de nous expliquer que pour les patrons tout augmente : les matière premières, l'énergie, les pièces détachées, et que pour conserver leurs marges, les chefs d'entreprises n'ont comme arme que la majoration du prix des marchandises qu'ils vendent aux détaillants. Ceux-ci, naturellement, font le même calcul : pour conserver leur marge, ils vendent plus chers aux clients.
C'est la loi du marché !
Exception faites des dividendes perçus par les administrateurs des sociétés du CAC 40 : ceux-ci, en pleine crise économique, doublent en milliards les revenus par leurs spéculation boursière, sans qu'on nous dise que c'est un facteur d'inflation...
Et, fin du fin, le Medef et Macron et tous les petits Macrons, de nous convaincre que pour conserver ses marges les patrons ne peuvent pas majorer les salaires de leurs salariés.
Quoi, nous répètent-ils : augmenter les salaires et pensions alimenterait le cycle inflationniste, funeste solution; nous dit-on.
Mais qui pense aux "marges" de ceux qui sont au bas de l'échelle ?
Ils seraient pourtant en droit de réclamer eux aussi le droit de compenser leur manque à gagner pour faire face à la hausse continue du coût de la vie, la "marge" vitale du monde du travail en activité, en retraite ou contraint au chômage par ces mêmes employeurs.
Jean LEVY
Et toujours la morale de notre bon La Fontaine est d'actualité :
LES ANIMAUX MALADES...DE L'INFLATION
Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom)
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre.
Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés :
On n'en voyait point d'occupés
A chercher le soutien d'une mourante vie ;
Nul mets n'excitait leur envie ;
Ni Loups ni Renards n'épiaient
La douce et l'innocente proie.
Les Tourterelles se fuyaient :
Plus d'amour, partant plus de joie.
Le Lion tint conseil, et dit : Mes chers amis,
Je crois que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux,
Peut-être il obtiendra la guérison commune.
L'histoire nous apprend qu'en de tels accidents
On fait de pareils dévouements :
Ne nous flattons donc point ; voyons sans indulgence
L'état de notre conscience.
Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons
J'ai dévoré force moutons.
Que m'avaient-ils fait ? Nulle offense :
Même il m'est arrivé quelquefois de manger
Le Berger. Je me dévouerai donc, s'il le faut ; mais je pense
Qu'il est bon que chacun s'accuse ainsi que moi :
Car on doit souhaiter selon toute justice
Que le plus coupable périsse.
- Sire, dit le Renard, vous êtes trop bon Roi ;
Vos scrupules font voir trop de délicatesse ;
Et bien, manger moutons, canaille, sotte espèce,
Est-ce un péché ? Non, non. Vous leur fîtes Seigneur
En les croquant beaucoup d'honneur.
Et quant au Berger l'on peut dire
Qu'il était digne de tous maux,
Etant de ces gens-là qui sur les animaux
Se font un chimérique empire.
Ainsi dit le Renard, et flatteurs d'applaudir.
On n'osa trop approfondir
Du Tigre, ni de l'Ours, ni des autres puissances,
Les moins pardonnables offenses.
Tous les gens querelleurs, jusqu'aux simples mâtins,
Au dire de chacun, étaient de petits saints.
L'Ane vint à son tour et dit : J'ai souvenance
Qu'en un pré de Moines passant,
La faim, l'occasion, l'herbe tendre, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net.
A ces mots on cria haro sur le baudet. Un Loup quelque peu clerc prouva par sa harangue
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Manger l'herbe d'autrui ! quel crime abominable !
Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
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