Alstom, la France à vendre ? Une enquête de Off Investigation
Cette excellente enquête est au coeur de la
lutte des classes et permet de montrer du doigt la déliquescence du
capitalisme dont il faut au plus vite se débarrasser ; cette enquête
donne un argument indéniable pour convaincre de ne surtout pas voter
Macron, Pécresse, voire Zemmour ou autres PS et affidés, etc... Au-delà,
elle pose aussi la question de savoir ce que signifie reconstruire la
gauche. Mais ce qui éclate au grand jour avec cette affaire, c’est
pourquoi il est indispensable d’intégrer à notre démarche politique, à
notre lutte de communiste, l’indépendance nationale qui est une
condition nécessaire à l’emploi, la prospérité, le progrès, la
coopération, la liberté, l’émancipation et la paix.
PB
Le 10 février 2022, Emmanuel Macron annonce le rachat par EDF (dont l’Etat est actionnaire à 84%) des turbines “Arabelle”, dont il avait lui-même signé l’accord de vente aux Américains de General Electric sept ans plus tôt. Pourquoi ce rétropédalage ? Entre abandon de souveraineté industrielle, gâchis d’argent public, casse sociale et conflits d’intérêt… Enquête sur un scandale d’Etat devenu l’un des talons d’Achille d’Emmanuel Macron.
En 2014, la vente de la branche "énergie" d’Alstom au géant américain General Electric (GE) était présentée par le ministre de l’Economie, Arnaud Montebourg, puis son successeur, Emmanuel Macron, comme une "alliance d’égal à égal". Les américains promettaient alors, entre autres, la création de 1.000 emplois et le maintien des sièges sociaux en France pendant dix ans, et l’Etat s’en portait garant. Sauf que sept ans plus tard, ni General Electric, ni le pouvoir exécutif, n’ont respecté les termes du contrat : 4 à 5.000 emplois ont été détruits, ⅔ des sièges sociaux sont désormais hors du territoire, des brevets stratégiques sont tombés aux mains des Américains, des compétences clés ont été délocalisées… Bref, la France a perdu une part importante de sa souveraineté dans un secteur particulièrement stratégique : l’énergie.
En 2013, Alstom était encore un fleuron français, avec 93.000 salariés dans le monde dont 18.000 en France. Une entreprise en pointe dans certaines spécialités, comme les réseaux électriques, l’hydroélectricité ou les turbines à vapeur… C’est Alstom qui fabriquait notamment les fameuses turbines "Arabelle" qui vont être prochainement rachetées par EDF, celles qui équipent la plupart de nos 56 réacteurs nucléaires. Et c’est l’alliance des compétences d’Alstom et d’Areva (devenue Orano) qui faisait à l’époque de la France, l’un des seuls pays au monde capable de livrer clé en main des centrales nucléaires 100% françaises.
Alors pourquoi en 2014, une telle unanimité régnait dans les sphères politiques et médiatiques pour accepter que Patrick Kron, alors PDG d’Alstom, vende 70% de ce groupe stratégique aux Américains de General Electric ? Pourquoi le Président de la République François Hollande, le Premier Ministre Manuel Valls et le jeune secrétaire général adjoint de l’Elysée, Emmanuel Macron, se sont-ils opposés aux propositions d’Arnaud Montebourg de bloquer la vente à General Electric ou de nationaliser – pour tout ou partie – Alstom ? Les procédures judiciaires extraterritoriales américaines, faisaient planer depuis 2010 sur Alstom une menace d’1 milliard d’euros d’amende et des poursuites pénales contre une soixantaine de cadres-dirigeants du groupe, pour des faits de corruption, ont-elles pesé dans la balance ?
Quant aux conditions financières de la vente, de nombreux éléments portent à croire qu’elles ont contribué à favoriser le rachat par les américains, plutôt que par le duo germano-japonais Siemens-Mitsubishi. Pourquoi l’ancien ministre du redressement productif Arnaud Montebourg et le député Les Républicains, Olivier Marleix qui a présidé une commission d’enquête sur la politique industrielle de l’Etat (rachats d’Alstom, Alcatel et STX) entre 2017 et 2018, s’accordent à dire qu’au moment de la vente, "tout Paris avait été loué" ?
Enfin, quel est le rôle joué par Emmanuel Macron devenu Président de la République entre 2017 et 2022, et par son ministre de l’Economie Bruno Le Maire, qui étaient supposés être les "garants" du bon respect des engagements pris par General Electric en 2014 ? Ont-ils joué leur rôle de vigie et surveillé de près les différents engagements du conglomérat américain ?
Entre sous estimation des enjeux de la guerre économique américaine, pantouflage de hauts fonctionnaires et conflits d’intérêts, retour sur un scandale qui implique de hauts cadres d’industrie (Patrick Kron, Jeffrey Immelt), des dirigeants politiques Français (François Hollande, Arnaud Montebourg, Emmanuel Macron, Nicolas Sarkozy, Jérôme Pécresse, Clara Gaymard…) et de puissants lobbies (les agences Publicis, DGM et Havas, les banques Rothschild, Crédit Suisse, Bank of America…). A la clé : 5.000 emplois détruits dont 1.200 à Belfort, une défiance grandissante des citoyens vis à vis de la classe politique et un bilan d’Emmanuel Macron entaché.
Pour aller plus loin…
Livres :
- Jean-Michel Quatrepoint, "Alstom, scandale d’Etat" (Fayard, 2015)
- Frédéric Pierucci et Matthieu Aron, "Le piège américain" (J’ai Lu, 2020)
- Arnaud Montebourg, "L’engagement" (Grasset, 2020)
- Les livres de Marc Endeweld : "L’ambigu Mr Macron" (2015), "Le grand manipulateur" (2019) et "L’Emprise" (2022)
Documentaires :
- "Guerre fantôme : la vente d’Alstom à General Electric" (LCP, 2017) réalisé par David Gendreau et Alexandre Leraître
- "Alstom, les enfants du Lion" (France 3, 2021), réalisé par Vanessa Ratigner et Christophe Bouquet
Rapports
- Rapport de la commission d’enquête parlementaire (avril 2019), "chargée d’examiner les décisions de l’Etat en matière de politique industrielle au regard de fusions d’entreprises intervenues récemment (Alstom, Alcatel, STX) ainsi que les moyens susceptibles de protéger nos fleurons industriels nationaux dans un contexte commercial mondialisé". Président : Olivier Marleix (LR). Rapporteur : Guillaume Kasbarian (LREM)
- "Alstom : racket américain et démission d’Etat", co-écrit par Leslie Varenne et Eric Denécé (CF2R). Le CF2R est un think tank créé en 2010 qui rédige des notes, rapports, ouvrages sur le renseignement, la sécurité internationale et l’intelligence économique.
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