Le général Vidaud, “bouc émissaire” des ratés du renseignement français
Sept mois seulement après son entrée en fonction, le chef du renseignement militaire français est remercié par le gouvernement, rapporte la presse étrangère : il n’a pas su prévoir l’invasion russe en Ukraine.
“C’est un petit tremblement de terre dans le monde de la défense française”, annonce le quotidien italien La Repubblica. Le général Éric Vidaud, chef du renseignement militaire, a été démis de ses fonctions, en plein milieu d’une guerre en Ukraine qu’il est accusé de n’avoir pas su prévoir. Selon une source interne au ministère de la Défense citée par L’Opinion, le général serait forcé de quitter son poste sept mois seulement après sa nomination pour “manque de maîtrise des sujets” et “briefings insuffisants”.
Durant le mois de février, quelques jours avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, “la France a constamment minimisé l’imminence d’une attaque à grande échelle, explique le quotidien britannique The Telegraph, en opposition totale avec les sombres prédictions des alliés, notamment les États-Unis et le Royaume-Uni.” Le général Vidaud était aussi sur un siège éjectable parce que son service n’était pas parvenu à anticiper “le torpillage du contrat sur les sous-marins” par l’Australie, en septembre 2021.
“Profonde méfiance” envers les services secrets américains
La Vanguardia précise depuis l’Espagne qu’aucun spécialiste français de la Russie n’a su prévoir l’invasion. “Certains ont ensuite fait leur mea culpa” : estimant une telle action tout à fait “déraisonnable”, ils pensaient Vladimir Poutine plus réaliste qu’il ne l’a été.
“Le général Vidaud devient donc, au-delà de ses erreurs d’analyse, un bouc émissaire à qui l’on fait payer le manque de lucidité générale.”
Peut-être cette erreur des renseignements français est-elle imputable à la “profonde méfiance” qui existe dans l’Hexagone envers les services secrets américains depuis 2003, lorsque ces derniers avaient transmis de faux renseignements sur les “armes de destruction massive” de Saddam Hussein. Quelques jours avant l’invasion russe, l’Élysée exprimait ainsi sa perplexité devant les inquiétudes “anglo-saxonnes”, ajoutant que l’Allemagne jugeait aussi que le ton “alarmiste” des États-Unis était excessif, renchérit le Telegraph.
“Début février, un officier français nous expliquait : ‘Nous avons les mêmes renseignements [que les Britanniques et les Américains], mais nous ne les interprétons pas de la même manière’”, ajoute le quotidien britannique The Times.
La Repubblica considère aussi qu’en France “le renseignement militaire souffre d’un manque de ressources et d’une organisation cloisonnée qui ne facilitent pas la circulation des informations”. Un changement de fonctionnement interne est d’ailleurs en cours pour éviter de telles erreurs d’analyse. Celle-ci aura été coûteuse pour Emmanuel Macron, très impliqué au cours des derniers mois dans le dialogue avec Vladimir Poutine, mais sans résultat tangible.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire