L’économiste Esther Duflo prix Nobel 2019 dézingue la réforme des retraites
Le Prix Nobel 2019 juge qu'il n'y a rien de "rationnel" dans ce projet de réforme et qu'il permet de faire des économies sur le dos "des plus pauvres".
La réforme des retraites a été promulguée par le chef de l'État au prix de longues semaines de contestations, mais la grogne ne faiblit pas. Mardi, le groupe Liot, déjà à l'initiative d'une motion de censure transpartisane du Gouvernement, disait réfléchir "sérieusement" à mettre à l'agenda de l'Assemblée nationale une proposition de loi pour abroger la réforme des retraites. Une étude menée par l'institut Rexecode laisse entendre de son côté que le déficit du régime de retraite pourrait perdurer malgré la réforme. Ce mercredi, c'est le Prix Nobel 2019 de l'Économie, Esther Duflo, qui dézingue la réforme des retraites dans La Tribune.
La qualifiant de "régressive", elle estime qu'elle touchera "d'abord ceux qui n'ont pas cotisé pendant assez de trimestres lorsqu'ils arrivent à 62 ans". L'économiste va aussi dans le sens du rapport de Rexecode en expliquant que cette réforme va permettre de faire des économies, oui, "mais sur les plus pauvres". "En contrepartie, les compensations sur les petites retraites et les carrières longues sont des usines à gaz. Mais cette réforme ne va quasiment rien rapporter", fustige-t-elle. Ne voyant "rien de rationnel dans ce projet", Esther Duflo considère que la réforme est même plus compliquée que le système qui existe actuellement.
Une réforme "politique"
"Cette réforme est avant tout politique", ajoute-t-elle. Dans leur étude, Rexecode, Fipadddict et l'ancien magistrat à la Cour des comptes, François Ecalle, évoquaient des gains pour les recettes publiques, mais mettaient en avant des dépenses qui pourraient augmenter à cause du recul de l'âge de départ à la retraite. Cela à cause des mesures de compensation sociale décidées par le Gouvernement. Concernant les travailleurs plus pauvres, Esther Duflo estime que le phénomène a “empiré au cours du temps".
L'économiste a aussi abordé l'inflation grandissante, qui touche "directement les gens si leurs salaires sont fixes et que les prix augmentent". Or, avec des prix de l'immobilier qui bondissent, les "personnes s'appauvrissent si leurs revenus stagnent", juge-t-elle. Faut-il pour autant instaurer une taxe sur les superprofits pour dégager plus de revenus ? Esther Duflo est favorable à davantage de taxes sur les profits, "mais pas seulement". "Il faut faire payer les pays riches pour compenser les pays pauvres de notre mode de vie. L'idéal serait d'avoir un impôt universel sur les citoyens les plus riches", propose l'économiste, qui a du mal à y croire. Mais pourquoi pas "un impôt sur les entreprises" qui serait "plus réaliste" ?
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