Après la gueule de bois post-électorale de la gauche. Que ne pas faire?
Si la gauche défendait les travailleurs de la périphérie au lieu des petits-bourgeois des métropoles, elle aurait davantage de voix et plus d’élus, et le RN beaucoup moins.
Défendre les petits-bourgeois ça se fait indirectement mais explicitement en défendant l’agenda des rebellions individualistes qui tournent autour du nombril et qui prennent pour cible les lois et les normes, non pour modifier telle loi ou telle norme, mais pour remettre en cause l’existence même de normes et de lois, de la morale élémentaire, de la famille et de l’État sans rien faire contre le capital à part proférer à la manière NPA quelque incantations de plus en plus inaudibles.
Cette remise en cause est d’ailleurs parfaitement vaine car elle s’attaque à des nécessités structurelles de la vie sociale et ne fait que renforcer en réaction l’aspect le plus conservateur ou même réactionnaire des lois et des normes attaquées.
Car le bon sens populaire comprend parfaitement que sans famille et sans État, nous sommes les esclaves nus du capital.
En pleine gueule de bois électorale on s’aperçoit que dans des régions dite « républicaines » et réputées de longue date pour leur « peuple de gauche (Aude, Tarn, Dordogne) l’élection de députés du RN montre que le divorce de la gauche avec sa base populaire est pratiquement terminé.
Loin d’être un repoussoir, l’épouvantail à moineau RN dirigé par des incompétents historiquement inoffensifs est maintenant valorisé dans les masses comme une institution « antisystème » au point d'y devenir hégémonique, y compris aux Antilles.
Car si environ 20% des votants exprimés choisit l'extrême droite, 60% choisit de ne pas s'y opposer.
On voit que répéter sur un ton à la fois comminatoire et effrayé « pas une voix pour le RN », ça ne va pas marcher.
On entend du coup dans les rangs des militants horrifiés l’habituel « que faire » qui contrairement à celui de Lénine est voué à rester sans réponse. Mais il faudrait aussi entendre et laisser dire le « que doit-on cesser de faire » !
Et bien, il faut cesser de croire au « front républicain », croire qu’il existe un socle de valeurs communes plus essentiel que tout partagé par tout le monde à gauche du RN ; c’est tout simplement faux.
Et cesser de défendre les causes « sociétales ». Il faut défendre le beefsteak du prolétariat – le vin et le fromage, mais sans porter un ruban jaune et bleu. Sans se laisser détourner de la bonne route par l’Union Sacrée des lemmings qui à l'appel des médias du capital courent au service de causes douteuses en Ukraine ou plus près d'ici.
Il faut souhaiter la réapparition d’un mouvement ouvrier purgé de toute l’idéologie bourgeoise individualiste postmoderne qui l’a rongé de l’intérieur depuis Mai 68. Sinon, si ce n'est déjà fait, les classes populaires se rallieront de manière irréversible aux solutions autoritaires dans le contexte de la grande crise économique politique et militaire de déclassement de l’Occident qui a déjà commencé. Et Vladimir Poutine paraîtra bientôt un modéré par rapport au violent retour du balancier qui ne manquera pas de se produire et qui commence déjà aux États-Unis.
GQ 23 juin 2022
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