La ville de New York diffuse une alerte à la guerre nucléaire
Non la peur devant l’inconnu n’est pas de l’ordre d’un quelconque déterminisme, elle est entretenue parce qu’elle est ce à travers quoi la classe dominante espère bloquer l’histoire et qu’elle ne peut y arriver que par la destruction. On se souvient de la manière dont l’URSS entretenait la foi dans la science y compris à travers la science-fiction, alors que Wells s’amusait déjà à faire sentir la menace qui pesait sur l’Amérique des magnats, de la guerre des mondes à Citizen Kane… Habituer l’humanité à la guerre en fait partie et les exercices stupides et inutiles sont une des bases de la mobilisation du capital pour sa survie sénile alors que la jeunesse est jetée dans la guerre. (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
Andre Damonil y a 5 heures
Lundi, le Bureau de gestion des crises de la ville de New York a diffusé un message d’intérêt public de 90 secondes donnant des instructions aux habitants de la ville sur ce qu’ils doivent faire dans la plus grande ville américaine en cas d’attaque nucléaire.
La vidéo commence par cette narration: «Il y a donc eu une attaque nucléaire. Ne me demandez pas comment ni pourquoi, sachez simplement que la grande attaque a eu lieu».
Le narrateur, debout dans ce qui semble être un appartement de luxe non endommagé, donne les suggestions suivantes: «Rentrez à l’intérieur», «restez à l’intérieur», et attendez d’autres instructions.
Le conseil donné aux résidents est de «prendre une douche avec du savon ou du shampoing» et de «rester à l’écoute» en utilisant l’application téléphonique sur Internet «notify NYC». La vidéo se termine par les mots du narrateur: «Eh bien? Vous l’avez compris», avant de sortir du cadre.
Tout dans cette vidéo, de sa narration enjouée à ses conseils triviaux, est complètement absurde.
En cas de frappe nucléaire sur la ville de New York, il n’y aura pas de bâtiments pour s’abriter, pas d’eau pour se doucher et certainement pas d’internet pour recevoir des notifications téléphoniques.
À première vue, il semblerait que les personnes qui ont commandé et diffusé cette vidéo n’ont absolument aucune idée de ce dont elles parlent.
Mais une telle vidéo, qui traite de questions cruciales de défense civile, n’a pu être produite qu’en consultation avec les plus hauts échelons du Pentagone et du gouvernement américain. Son absurdité est le fruit non pas de l’ignorance, mais de la tromperie. Son but est d’habituer le public à l’idée de la guerre nucléaire, tout en cachant son horrible réalité.
Une attaque nucléaire sur New York ferait partie d’un échange thermonucléaire à grande échelle, impliquant le lancement de milliers d’ogives sur des villes et infrastructures de tous les États-Unis et du monde entier.
Un tel événement ferait paraître le 11 septembre minuscule en comparaison. La ville et ses environs seraient frappés par de multiples ogives thermonucléaires, chacune ayant une puissance cent fois supérieure à celle de l’arme nucléaire «Gros homme» (Fat Man) qui a détruit Hiroshima.
Dans un tel scénario, tout l’horizon de New York serait incinéré et rasé, tuant presque tous ceux qui se seraient réfugiés dans les gratte-ciel de la métropole. Ceux qui parviendraient à survivre dans des abris souterrains seraient confrontés non seulement à l’effondrement de l’agriculture et du commerce, mais encore aux effets permanents de la radiation nucléaire, qui continuerait à tuer et à mutiler pendant des années et des années.
Une étude publiée le mois dernier par la Louisiana State University conclut qu’un échange nucléaire entre la Russie et les États-Unis «libérerait de la suie et de la fumée dans la haute atmosphère, ce qui bloquerait le soleil et entraînerait une absence de récoltes dans le monde entier».
Selon cette étude, un tel échange nucléaire ferait baisser la température dans le monde d’environ 13 degrés, plus que la dernière période glaciaire qui s’est achevée il y a environ 11.700 ans.
Une ère glaciaire déclenchée par une guerre nucléaire entre la Russie et les États-Unis décimerait la population sur toute la planète, même les habitants des îles les plus reculées du Pacifique ou de la la plus profonde forêt amazonienne. Le scénario décrit dans le message d’intérêt public serait, autrement dit, la fin de la civilisation humaine.
Le message de New York commence en disant: «ne me demandez ni comment ni pourquoi». Mais face à cette horrifiante perspective, il est évident que la population doit demander «comment» et «pourquoi» – avant qu’il ne soit trop tard.
Pourquoi le Bureau de gestion des crises de la plus grande ville américaine a décidé que c’était le bon moment de diffuser le premier message d’intérêt public sur la guerre nucléaire depuis des décennies reste totalement inexpliqué.
«Alors que le paysage des menaces continue d’évoluer, il est important que les New-yorkais sachent que nous nous préparons à toute menace imminente et que nous leur fournissons les ressources dont ils ont besoin pour rester en sécurité et informés», a déclaré Zach Iscol, commissaire à la Gestion des crises de New York.
Interrogé par un journaliste sur le moment de l’annonce et s’il y avait «quelque chose que nous devrions savoir», le maire de New York, Eric Adams, a répondu que le message avait été publié après «les attaques en Ukraine», ajoutant au cours du même briefing qu’il s’agissait «vraiment de prendre les mesures nécessaires après ce qui s’est passé en Ukraine».
Mais ces déclarations évasives ne font que soulever d’autres questions. L’instruction de créer cette annonce venait-elle du gouvernement américain? D’autres villes feront-elles des annonces similaires? Qui a proposé la publication de cette vidéo?
Quoi qu’il en soit, la publication d’une telle vidéo est un événement majeur. Sa diffusion ne peut que signifier que les responsables de la ville de New York, agissant sur la base d’informations reçues de Washington, pensent qu’une guerre nucléaire est désormais un danger réel et même imminent.
En réalité, cette vidéo fait partie d’un effort systématique visant à habituer le public aux plans du gouvernement américain en matière de guerre nucléaire.
L’annonce a lieu deux semaines à peine après un sommet de l’OTAN où les États-Unis ont, avec d’autres pouvoir de l’OTAN, annoncé des plans pour des «combats de haute intensité contre des concurrents de même niveau dotés d’armes nucléaires», dont la Russie et la Chine.
Cette déclaration ouverte sur des plans de guerre nucléaire fait suite au renforcement pendant des années des forces nucléaires américaines et au démantèlement systématique de toutes les restrictions internationales restantes à l’utilisation et au déploiement d’armes nucléaires.
En 2018, le gouvernement Trump s’est retiré du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, rendant les États-Unis libres d’encercler la Russie et la Chine avec des armes nucléaires à courte portée, capables de frapper de grandes villes en quelques minutes. Cela s’accompagna d’une extension massive du programme de modernisation nucléaire des États-Unis dont le coût a ensuite explosé, atteignant près de deux mille milliards de dollars.
Le gouvernement Biden a doublé les préparatifs nucléaires de ses prédécesseurs. Le budget 2023 proposé par Biden prévoit la création de nouvelles versions de chaque système d’armes de la «triade» nucléaire américaine.
Par le renforcement systématique de leurs forces nucléaires, tout en détruisant les accords internationaux de contrôle des armements et en provoquant des conflits irresponsables avec les puissances nucléaires que sont la Russie et la Chine, les États-Unis créent pour leur propre population et celle du monde entier, un terrible danger.
La semaine dernière, le Pentagone a donné à l’Ukraine ce qui était en fait un feu vert public pour attaquer la Crimée. Une action qui, selon les observateurs, pourrait déclencher des représailles nucléaires de la part de la Russie.
Alors que les États-Unis intensifient leur guerre avec la Russie, les généraux américains déclarent publiquement que la population doit accepter la perspective d’une guerre nucléaire.
«Nous nous sommes tellement inquiétés des armes nucléaires et de la troisième guerre mondiale que nous nous sommes permis d’être totalement dissuadés», a déclaré en avril le lieutenant-général Frederick B. Hodges, ancien commandant en chef de l’armée américaine en Europe. «Nous avons été dissuadés par une peur exagérée de ce qui pourrait arriver», s’est-il plaint.
La course aux armements nucléaires de Washington, son intensification de la guerre avec la Russie, son conflit avec la Chine, tout ceci est le résultat d’une campagne de plusieurs décennies de la classe dirigeante américaine pour parvenir à l’hégémonie mondiale à travers la guerre. Cela a déjà conduit à la destruction de l’Irak, de l’Afghanistan, de la Libye et de la Syrie. À présent, face à une crise sociale, économique et politique à laquelle elle ne voit pas d’issue, elle intensifie de façon irresponsable des conflits risquant d’aboutir à une guerre nucléaire.
Comme le démontre la réponse meurtrière du capitalisme américain à la pandémie, la classe dirigeante américaine est capable de sacrifier la vie de centaines de milliers d’Américains pour atteindre ses objectifs.
Arrêter les objectifs de guerre irresponsables et meurtriers de l’impérialisme américain nécessite une intervention politique consciente de la classe ouvrière. Dans tous les États-Unis, les travailleurs entrent en lutte contre l’explosion du coût de la vie. Dans le monde entier, les travailleurs doivent s’engager dans la lutte contre la guerre. Nous invitons instamment tous les lecteurs qui partagent cette perspective à nous contacter dès aujourd’hui.
(Article paru d’abord en anglais le 13 juillet 2022)
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