lundi 11 mai 2020



Pourquoi applaudir par la fenêtre les “soignants” protège les vrais responsables?

 par Frustation (A suivre demain)
Applaudir des “soignants”, invisibiliser tous les autres ?
Évitons tout de suite un malentendu : applaudir, “c’est déjà ça”, bien sûr. Je dirai même que c’est “mieux que rien”, après tout. Une première prise de conscience de la nécessité d’avoir de très bons services publics et en particulier hospitaliers à l’heure du coronavirus en France ? Pourquoi pas.
Applaudir à sa fenêtre, d’accord. Mais applaudir pour qui, ou pour quoi, exactement ?
On imagine facilement que Marc et Clotilde, trentenaires parisiens, ne savent pas vraiment à qui leur petit rituel #j’applaudis du soir se destine. Mais ils le font, de bon cœur, et affichent leur solidarité pleine et entière sur les réseaux sociaux. Leur vision de l’hôpital paraît digne de la série américaine Grey’s Anatomy, avec cet imaginaire comme quoi il y aurait pour l’essentiel des “médecins qui soignent” accompagnés des infirmières et infirmiers “qui aident les médecins”. On applaudit “les soignants” du haut de sa fenêtre ou de son balcon parisien, mais pas forcément le personnel dans son ensemble qui accompagne les soins ou permet leur réalisation.
Au grand étonnement de Marc et Clotilde, il y a aussi ce qu’on appelle des brancardier(e)s, des aides soignant(e)s, qui sont le plus souvent en contact avec les patients et donc particulièrement exposé(e)s, les ambulancier(e)s, les femmes et hommes de ménage, et d’autres encore …
Un “personnel hospitalier” dans sa totalité, en somme, souvent oubliés dans de nombreux reportages ou tribunes et invisibilisés par ces applaudissements de manière souvent inconsciente.
Et quid des caissières et caissiers, routières et routiers cheminotes et cheminots ? Méritent-ils aussi des applaudissements, celles et ceux qui n’ont d’autres choix que de prendre des risques pour nous nourrir ?

Applaudir les “soignants héroïques”, c’est dépolitiser leurs luttes quotidiennes

Applaudir rend exceptionnel et héroïque le travail hospitalier et dépolitise ainsi des problématiques structurelles de manque de moyens que rencontrent nos hôpitaux depuis plusieurs années. “Des gens qui sauvent des vies, quel miracle !”, s’exclame Clotilde, heureuse que l’on puisse potentiellement sauver la sienne et celle de son compagnon également.
Or, le personnel hospitalier demande depuis plusieurs années des choses très concrètes et politiques afin que leurs actes ne soient plus de l’ordre de l’exception, que l’on applaudit chaque soir touché par la grâce du docteur sexy de série B en blouse blanche : du matériel correct, de bonnes conditions sanitaires de travail, plus de masques, des lits, du temps pour exercer correctement leur travail, et tout un tas d’autres éléments indispensables à la réussite de leurs tâches.
En ce sens, exercer son métier dans de bonnes conditions matérielles avec un salaire à sa hauteur, et que l’on rémunère leurs nombreuses heures supplémentaires, notamment en cette période de mobilisation du personnel massive.

 
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vendredi 8 mai 2020 par Frustation

Applaudir des “soignants”, invisibiliser tous les autres ?
Évitons tout de suite un malentendu : applaudir, “c’est déjà ça”, bien sûr. Je dirai même que c’est “mieux que rien”, après tout. Une première prise de conscience de la nécessité d’avoir de très bons services publics et en particulier hospitaliers à l’heure du coronavirus en France ? Pourquoi pas.
Applaudir à sa fenêtre, d’accord. Mais applaudir pour qui, ou pour quoi, exactement ?
On imagine facilement que Marc et Clotilde, trentenaires parisiens, ne savent pas vraiment à qui leur petit rituel #j’applaudis du soir se destine. Mais ils le font, de bon cœur, et affichent leur solidarité pleine et entière sur les réseaux sociaux. Leur vision de l’hôpital paraît digne de la série américaine Grey’s Anatomy, avec cet imaginaire comme quoi il y aurait pour l’essentiel des “médecins qui soignent” accompagnés des infirmières et infirmiers “qui aident les médecins”. On applaudit “les soignants” du haut de sa fenêtre ou de son balcon parisien, mais pas forcément le personnel dans son ensemble qui accompagne les soins ou permet leur réalisation.
Au grand étonnement de Marc et Clotilde, il y a aussi ce qu’on appelle des brancardier(e)s, des aides soignant(e)s, qui sont le plus souvent en contact avec les patients et donc particulièrement exposé(e)s, les ambulancier(e)s, les femmes et hommes de ménage, et d’autres encore …
Un “personnel hospitalier” dans sa totalité, en somme, souvent oubliés dans de nombreux reportages ou tribunes et invisibilisés par ces applaudissements de manière souvent inconsciente.
Et quid des caissières et caissiers, routières et routiers cheminotes et cheminots ? Méritent-ils aussi des applaudissements, celles et ceux qui n’ont d’autres choix que de prendre des risques pour nous nourrir ?

Applaudir rend exceptionnel et héroïque le travail hospitalier et dépolitise ainsi des problématiques structurelles de manque de moyens que rencontrent nos hôpitaux depuis plusieurs années. “Des gens qui sauvent des vies, quel miracle !”, s’exclame Clotilde, heureuse que l’on puisse potentiellement sauver la sienne et celle de son compagnon également.
Or, le personnel hospitalier demande depuis plusieurs années des choses très concrètes et politiques afin que leurs actes ne soient plus de l’ordre de l’exception, que l’on applaudit chaque soir touché par la grâce du docteur sexy de série B en blouse blanche : du matériel correct, de bonnes conditions sanitaires de travail, plus de masques, des lits, du temps pour exercer correctement leur travail, et tout un tas d’autres éléments indispensables à la réussite de leurs tâches.
En ce sens, exercer son métier dans de bonnes conditions matérielles avec un salaire à sa hauteur, et que l’on rémunère leurs nombreuses heures supplémentaires, notamment en cette période de mobilisation du personnel massive.
(Première partie)

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